[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]19 novembre 1789.] et adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, notamment à celui concernant la contribution patriotique du quart des revenus. Cette lecture faite, il a été exposé qu’il s’était élevé quelques difficultés entre les députés des marches-communes de Bretagne et de Poitou, et ceux de ces deux provinces, sur la démarcation de leurs départements respectifs, et que les uns et les autres demandaient qu’on les renvoyât devant le comité de constitution pour y être “jugés ; l’Assemblée a prononcé ce renvoi. On a demandé qu’on joignît au comité de constitution quatre commissaires pris dans celles des provinces qui n’ont aucun intérêt dans la contestation, et que le décret fût commun à toutes celles qui seraient dans le même cas ; ces deux propositions ont été adoptées. M. le Président a dit qu’au nom de l’Assemblée nationale, il remercie le Roi des soins qu’il a bien voulu prendre pour réprimer les écarts du parlement de Metz. Il ajoute qu’il a présenté le décret relatif à ce parlement, et que Sa Majesté a promis de le prendre sans délai en considération. On reprend l’ordre du jour concernant les bases de la représentation , articles relatifs aux assemblées administratives. M. Target, au nom du comité de constitution, donne lecture d’une série d’articles. Le premier et le second sont ainsi conçus : « Art... Chaque administration, soit de département, soit de district, sera permanente, et les membres en seront renouvelés par moitié tous les deux ans, la première fois au sort après les deux premières années d’exercice, et ensuite à tour d’ancienneté. » « Art... Les membres des assemblées administratives seront en fonctions pendant quatre ans, à l’exception de ceux qui sortiront, par le premier renouvellement au sort, après les deux premières années. » Ces deux articles sont adoptés sans discussion. Un autre article est ainsi proposé : « Art... Après avoir nommé les députés à l’Assemblée nationale, les électeurs de chaque département, choisiront les membres pour l’administration du département. » M. Ramel-U'ogaret fait une motion tendant à ce que les assemblées de district nomment les membres de l’assemblée de département. M. de Tracy. Il paraît que, pour la nomination des membres de l’administration de département, le comité renonce à la combinaison des trois bases. Je réclame cette proportion, et, comm§ avocat des campagnes, j’insiste surtout sur l’influence à accorder à l’étendue du territoire. Je demande donc que le district concoure à l’élection des membres de l’administration du département, à raison de sa population, de sa contribution et de son étendue. M. Target. Vous avez arrêté qu’il n’y aurait pas deux degrés intermédiaires et, par ce moyen vous vous êtes interdit la faculté de combiner les trois bases pour l’élection aux assemblées de département. M. de Montloslcr. C’est surtout pour les élections relatives à l’administration des provinces m qu’il faut conserver la triple base; plus un territoire est étendu, plus il demande de soins. M. Target. En faisant usage de la triple base pour la représentation, on donnera lieu à un double emploi, puisque le nombre des districts sera déterminé en raison de cette triple proportion. Barrfere de Wienaae. Je n’examine pas la proposition de M. de Tracy, et je me borne à vous poser une question qui n’est pas sans importance. Si vous confiez à une même assemblée le soin de députer à l’Assemblée nationale et à l’assemblée de département, ne combinerez-vous pas ensemble deux pouvoirs qui deviendront nécessairement dangereux par leur réunion ? M. Garai l'aîné. En réunissant ces pouvoirs, on renforcera l’intrigue du moyen bien simple de l’échange des voix ; cet échange se fera en disant: Nommez-moi pour l’Assemblée nationale, je vous nommerai pour celle de département. M. Long demande que, pour être éligible pour l’assemblée de département, il soit nécessaire d’avoir été membre de l’assemblée de district. L’Assemblée ferme la discussion et adopte l’article du comité ainsi que l’article suivant ainsi conçu : « Art... Les électeurs du district, revenus au chef-lieu de ce district, choisiront les membres pour l’administration de leur district. » M. Target donne lecture de l’article suivant . « Art... Les administrations de département seront composées de trente-six membres. » M. Garai l'aîné. En établissant une administration on doit avoir toujours devant les yeux l’économie et la célérité de l’expédition des affaires; or je demande si les trente-six administrateurs dont on propose d’ordonner la nomination auront une rétribution? S’ils en ont une, cette dépense deviendra énorme; s’ils n’en ont pas, ils ne pourront être pris que parmi les gens riches, et l’aristocratie renaîtra. Je demande encore si l’on croit qu’un aussi grand nombre d’administrateurs n’occasionnera pas une grande lenteur dans les opérations. Je demande que le nombre des administrateurs soit réduit à dix-huit. M. Tillaret. Dans l’état actuel des choses, les personnes en état d’administrer les affaires publiques sont très-rares, aussi je propose de fixer à 24 le nombre des administrateurs de département. M. Target. On a demandé si les administrateurs de département seraient payés? Les28 membres composant le conseil feront leurs fonctions gratuitement. Les huit autres seront appointés. M. Garat Vaîné. C’est où j’attendais le comité de constitution. Je soutiens que si, sur 36 administrateurs, huit seulement reçoivent des honoraires, les 28 autres qui composeront ce qu’on appelle le conseil du département ne seront autre chose que les individus les plus opulents et les plus riches du pays. L’homme vertueux et capable n’aura pas toujours la faculté de pouvoir consacrer un mois de son temps à la chose publique. 116 [Assemblée nationale.] Je conclus donc à ce que tous les administrateurs soient payés également pour éviter l’aristocratie des riches, qui ne manquerait pas de s’introduire dans les assemblées de département, si l’on adoptait le système du comité de constitution. M. de Lachèze. L’administration provinciale de la haute Guyenne était composée de cinquante-deux personnes, et elle a toujours été au moins suffisante. Cette province sera au moins divisée en deux parties ; et en suivant cette proportion relativement au département, il est certain que le nombre proposé par le préopinant paraîtra convenable. M. Barnave. Les émoluments à accorder aux administrateurs doivent être bornés aux déboursés. Le nombre des administrateurs doit être considérable, sinon on concentrerait dans peu de personnes une autorité dangereuse, puisqu’elles auraient toujours à leur disposition des faveurs et des grâces. L’expérience doit aussi être notre guide. Dans les projets qui ont été faits par tous les ministres, pour l’établissement des assemblées provinciales, la proportion que présente le comité a toujours paru nécessaire. J’adopte l’article tel qu’il est. M. de Robespierre. 11 faut sacrifier la considération de l’économie à l’avantage essentiel de multiplier les soutiens et les défenseurs du peuple. D’après cette vue, loin de demander la réduction du nombre trente-six, je pense qu’il doit être porté à quatre-vingts. M. Refermon. En Bretagne, le petit' nombre des administrateurs a conduit à l’oppression du peuple. Je demande que les membres de l’administration de département soient au nombre de soixante-douze. M. fi’ abbé Sfiaury. L’article qui vous occupe est très-important pour la nation. 11 donne lieu à trois observations : premièrement, il ne faut faire de l’administration du royaume, ni la source d’un impôt, ni un objet de cupidité ; secondement, les assemblées les plus nombreuses sont toujours les moins actives ; troisièmement, autant le grand nombre peut éloigner les injustices générales, autant il peut faire des injustices de faveur qui sont plus dangereuses encore. En adoptant quelques-unes des propositions qui vous sont faites, la France régénérée renfermera cent mille administrateurs, et ce nombre inouï se trouvera égal à celui qu’emploie la fiscalité. J’adopte l’article du comité. M. Rupont, député de Bigorre. Je demande la question préalable sur tous les amendements. La question préalable mise aux voix est adoptée. L’article du comité est adopté sans modification. M. Target donne lecture des deux articles qui suivent, proposés par le comité : « Art... Les administrations de district seront composées de dix-huit membres. « Art... Chaque administration de district sera j divisée en deux sections, l’une sous le nom de I conseil de district, l’autre sous celui de direc-| toire composé de quatre membres. > ■ [19 novembre 1789.] M. de üfontlosier. Ce nombre doit être proportionné à l’étendue du district; nous devons en laisser la détermination aux électeurs. M. le comte de Tirieii. Je regarde comme très-important d’établir les administrations de district, de manière qu’elles soient entièrement subordonnées aux départements. 11 faut les considérer comme les yeux et les bras de cette dernière administration, et les réduire à l’état de simples commissions, qui seraient composées de sept personnes. M. le marquis d’Estourmel. Quand une administration est trop nombreuse, les membres qui la composent se reposent les uns sur les autres, et la négligence naît de cette confiance. Je crois convenable de réduire à neuf le nombre proposé par le comité. M. fie vicomte de Noailles. J’adopte d’autant plus volontiers cette opinion qu’elle peut donner un député par canton, et qu’il est très-essentiel que chaque canton soit représenté. M. ülalonet. L’intention du comité est de diviser le nombre des administrateurs de district en deux parties ; l’une formerait un conseil d’administration, l’autre un directoire d’exécution. Je n’admets ni cette division, ni le nombre proposé par le comité. Je réduis ce nombre à neuf. Trois de ces administrateurs seraient nommés directeurs de district, et exécuteraient sous les ordres immédiats du département; les six autres seraient chargés de préparer les matières et les considérations à soumettre à l’assemblée du département. M. Cochon de Lapparent. Les districts des divers départements seront inégaux en nombre. Je demande qu’il y ait cinq électeurs dans chaque district, si le département est divisé en neuf parties, sept s’il l’est en six, et neuf s’il l’est en trois. M. Befermon. Le comité propose un conseil d’administration dans chaque district, parce qu’en effet chaque district aura des travaux particuliers à faire et des établissements particuliers à créer. Vous avez accordé cet avantage aux municipalités : pourquoi le refuseriez-vous à une étendue bien plus considérable? On craint, dit-on, que le district ne s’oppose aux opérations du département ; mais si l’injustice de son opposition est apparente, il n’obtiendra rien; si la justice en est manifeste, il aura eu raison de réclamer, et on aura bien fait de lui en conserver le moyen. M. Dupont de Nemours. Les districts doivent être soumis au département pour l’administration générale, mais non pour l’administration particulière. Un certain nombre d’administrateurs est nécessaire� pour l’un et l’autre de ces pouvoirs; il doit être borné à trois pour exécuter, à neuf pour administrer. M. fie comte de Crififion. Les assemblées d’arrondissement ont très-souvent gêné les assemblées provinciales; celles de district pourront entraver les opérations de l’assemblée de département. 11 faut établir entre elles une grande différence, qui ne peut exister que par le nom-ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 novembre 1789.] U7 bre, puisque les citoyens qui composeront les unes et les autres seront égaux. Je propose de fixer ce nombre à neuf. M. le comte de Montmorency. Vous avez décrété ce matin même que les assemblées de district se renouvelleront par moitié à une époque déterminée ; ce renouvellement ne pourra se faire si le nombre des membres de ces assemblées n’est pas divisible par deux. Je pense, d'après ces observations, qu’il doit être porté à douze. L’opinion de M. le comte de Montmorency parait rallier le plus grand nombre de suffrages. M. le Président la soumet à l’Assemblée, qui l’adopte et décrète : « 1° Que les administrations de district seront composées de 12 membres ; 2° que chaque administration de district sera divisée en deux sections; l’une, sous le nom de conseil de district; l’autre, sous celui de directoire, composé de 4 membres. » Cet objet réglé, le comité propose l’article suivant : « Art... Chaque administration de département sera divisée en deux sections : l’une, sous le titre de conseil de département, tiendra annuellement une session pendant un mois, ou plus, si la nécessité des affaires l’exige, pour fixer les règles de chaque partie d’administration, et ordonner les travaux et les dépenses générales du département; l’autre, sous le titre de directoire de département, sera toujours en activité pour l’expédition des affaires étrangères, et rendre compte de sa gestion au conseil de département. » M. Befermon. Je propose d’ajouter à l’article une disposition portant que le compte rendu tous les ans, par le directoire au conseil, sera chaque année rendu public par la voie de l’im-’pression. M. Brostaret. La durée de la session du conseil de département doit être fixée d’une manière précise; je propose de la limiter à quinze jours. M. de Richier. Je demande au contraire que la durée de la session soit portée à six semaines pour donner au conseil le temps d’examiner et de traiter les questions qui lui seront soumises. M. Brunet de Latuque. J’ai un amendement ou plutôt une addition à présenter à l’article que nous discutons. Je propose de décider dès à présent que l’assemblée de département nommera six adjoints qui remplaceront, en cas de besoin, les membres de l’administration. M. Lanjuinais. Je propose d’exclure de l’administration du département les parents des administrateurs à un certain degré et j’adopte l’amendement de M. Brunet de Latuque. M. Alexandre de Lameth. Je vois avec chagrin qu’on propose sans cesse de nouveaux moyens de gêner les droits du peuples dans l’élection de ses représentants; ces droits ne doivent avoir d’autre règle que la confiance. M. le Président consulte l’Assemblée, qui décrète sur les deux premiers amendements : « 1° Que le conseil de département pourra rester assemblé pendant six semaines à la première session et un mois au plus aux suivantes ; « 2° Que le compte général du directoire au conseil sera rendu public par la voie de l’impression. » L’article ainsi amendé est lu de nouveau et définitivement adopté en ces termes : « Art... Chaque administration de département sera divisée en deux sections. L’une, sous le titre de conseil de département, tiendra annuellement une session pour fixer les règles de chaque partie d’administration, et ordonner les travaux et les dépenses générales du département : cette session pourra être de six semaines à la première assemblée, et d’un mois au plus pour les suivantes. « L’autre section, sous le titre de directoire de département, sera toujours en activité pour l’expédition des affaires, et rendra au conseil de département un compte annuel de sa gestion, lequel sera rendu public par la voie de l’impression. » M. Grelet de Beauregard. Il est important que le nombre des membres du directoire dans l’administration de département soit fixé sans retard, je propose de le porter à neuf. M. Target, au nom du comité de constitution. Le comité vous propose de décréter l’article suivant : « Art... Les membres de chaque administration de département éliront à la fin de leur première session huit d’entre eux, pour composer le directoire; ils le renouvelleront tous les deux ans par moitié : les 28 autres formeront le conseil de département. » L’article mis aux voix est adopté. M. Lanjuinais. Je demande qu’il soit décrété : Premièrement, que les parents ou alliés jusqu’au second degré inclusivement, ne puissent être en même temps membres de la même assemblée d’administration; Secondement, que chaque assemblée d’élection nommera un suppléant pour chaque député à l’Assemblée nationale et aux assemblées d’administration et que les suppléants n’entreront en activité qu’en cas de mort ou de démission d’un député. On fait observer que ces demandes s’écartent de l’objet du travail de la séance. Elles sont ajournées à lundi prochain. M. le Président a dit que des circonstances particulières le déterminaient à proposer à l’Assemblée les deux articles suivants, sur lesquels il croyait nécessaire qu’elle prononçât sans délai: Art. 1er. Les représentants nommés par les cau-tons pour l’administration du district ne pourront jamais être regardés que comme des représentants de la totalité du district, et non d’aucun canton en particulier; les représentants à l’administration de département ne pourront jamais être considérés que comme les représentants de la totalité du département. Les représentants nommés dans les départements à l’Assemblée nationale ne pourront jamais être regardés que comme les représentants de la totalité des départements, c’est-à-dire de la nation entière. Art. 2. En conséquence, les membres des administrations de district ou de département, non plus que les membres de l’Assemblée nationale,