[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 juin 1790.] 10S cessaires pour l'exploitation et la surveillance des exploitations des mines; 4° On doit supprimer la partie de l’administration des mines qui n’est pas absolument utile. Conserver le corps et l’école, former un comité, détruire les anciennes lois sur les mines, établir un nouveau code de lois plus précises et mieux combinées pour le bien général. Les dépenses annuelles de la nouvelle administration des mines proposée pourrait être bornée à 66,000 livres. DEUXIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 4 JUIN 1790. OBSERVATIONS SUR L’ARMÉE , PAR M. AGHARD DE BONVOULOIR, député du département de la Manche , ci-devant Cotentin (1). Messieurs, dans un moment où tout annonce que nous allons avoir besoin de l’armée pour défendre les limites de l’empire, tout nous invite à prendre dans une sérieuse considération le maintien de la discipline et la position affreuse où se trouvent les officiers qui en sont le nerf. Jamais peut-être la France n’a eu plus de besoin d’avoir de bonnes armées, et jamais ses armées, tant de terre que de mer, n’ont été dans un état plus critique. Une armée sans discipline n’est qu’un ramassis d’hommes incapables de résistance. Occupons-nous donc de cette grande considération, afin que nos ennemis, voyant notre contenance, renoncent à des projets qu’ils n’ont peut-être fondés que sur la supposition de notre faiblesse dans un moment où les liens de la discipline militaire paraissaient avoir été brisés exprès pour nous livrer à leur discrétion. Empressons-nous de les rétablir* Si nous tardons, nous n’aurons plus réellement d’armée; nous l’aurons détruite nous-mêmes. Et si quelque partie de ce beau royaume devient la proie de nos voisins, nous devons en être responsables. Nous pouvons avoir à combattre demain des armées aguerries, et surtout disciplinées. Il serait insensé de se flatter qu’il suffit du nombre, du courage des individus et de quelques séductions pour les vaincre. C’est l’ensemble, et non la multitude, c’est l’ordre et la tactique qui gagnent les batailles. Ce sont les batailles qui décident du sort des empires. C’est la discipline qui conserve les armées. C’est la conduite des officiers et l’obéissance des soldats qui les rendent victorieuses. Ceux qui vous diraient le contraire, ceux qui croiraient pouvoir impunément démonter tous les ressorts de la force publique, et les rétablir à leur gré ; ceux qui vanteraient des ressources justement suspectes, comme si elles étaient éprouvées; ceux qui hasarderaient de nous laisser ainsi à découvert devant un ennemi entreprenant, et ne craindraient pas d’exposer d’aussi grands intérêts : ceux-là seraient les véritables ennemis de la patrie, qu’ils compromettraient par malice on par ignorance, mais toujours de fait. (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. Ce seraient des traîtres ou des insensés également d’accord avec nos ennemis pour nous livrer sans défense. Cette discipline qui fait la force des armées n’est point le fruit d’un moment. Elle a pour base les mœurs; elle se mûrit par l’habitude; elle dépend beaucoup de l’opinion. Ce n’est qu’à la longue qu’un officier acquiert la 1 confiance de sa troupe ; ce n’est qu’à la longue que l’esprit de corps se forme et qu’un régiment devient bon. Tous les jours nous entendons le récit de nouveaux attentats. Tous les jours on cite des soldats révoltés, des officiers massacrés. N’est-il pas temps d’arrêter le cours de tant de crimes ? Tous ces excès dérivent de la même source et se perpétuent par la même cause. Des factieux les commandent, et notre indifférence les autorise. Les officiers du régiment de Beauvoisis attaqués, blessés, mis en fuite par leurs soldats; M. de Macnemara massacré par des grenadiers ; le brave Mauduit coupé en morceaux par son propre régiment, dont les remords ne peuvent réparer la perte, et cent autres traits pareils qui nous ont été dénoncés, demeurent sans vengeance. On dirait que dans ces temps malheureux le crime seul trouve des défenseurs; il trouve au moins des apologistes qui savent le pallier; et personne n’élève la voix pour l’ordre et la justice!.. . Faut-il le dire enfin? Les jurys militaires ne trouvent pas un coupable, surtout lorsque le crime est capital. L’Assemblée nationale fait des lois : mais’ à quoi serviront-elles, si nous les laissons sans force? Non seulement on nous reproche cette inexplicable indifférence, mais on va même jusqu’à oser nous accuser de renfermer dans notre sein les instigateurs qui suscitent les peuples à les violer. C’est sans doute une calomnie. Mais de grands crimes se commettent sous nos yeux, nous les voyons, et nous ne les empêchons pas! Des clubs, sous le faux nom d’amis d’une Constitution qu’ils renverseront par leurs excès, sollicitent publiquement les soldats à l’insubordination, à la révolte contre leurs officiers, à les chasser, à les assassiner. « Chassez vos officiers, dit-on aux sous-ofliciers, et vous aurez leurs places... » Et c’est à des soldats, à des hommes dont on dit qu’on cherche à relever l’existence, qu’on veut rendre dignes du nom honorable de citoyen, qu’on ose proposer de devenir officiers en marchant sur le corps de ceux auxquels la loi leur ordonne d’obéir! On sait que, dans une grande garnison, des soldats français ont été dire à des Suisses : « Si nous renvoyons nos officiers, renverrez-vous « les vôtres?... » Ces braves Suisses ont répondu avec indignation: « Nous?... nous serons « fidèles aux lois qui nous ordonnent de leur « obéir; » et ils ont été aussitôt renouveler à leurs officiers l’assurance de leur attachement et de leur fidélité. Malheureux et trop braves soldats de Château-vieux, qui avez dû expier votre erreur par le supplice... que je vous plains! On avait osé vous dire qu’en vous révoltant vous seriez plus honorés : on vous avait peint vos officiers comme des traîtres; vous vous êtes laissé surprendre par des imposteurs; vous avez payé votre erreur de la vie.. Mais ceux qui vous ont conduits dans cet horrible précipice, à quels tourments ne devraient-ils pas être dévoués. Us sont responsables de votre sang. C’est à vos compatriotes, s’ils I peuvent les connaître un jour, c’est à la France 106 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 juin 1790.] entière à vous venger en faisant punir par un supplice bien mérité ceux qui ont été la cause de votre mort. Malheureuses victimes de leurs calculs! Ces conspirateurs qui vous ont séduits, entraînés, ont-ils eu le courage, pendant le cours de la procédure qui vous a condamnés, de venir Crier aux juges, à la nation : Arrêtez ! faites grâce 1 C’est nous qui sommes les vrais coupables ; c’est nous qui avons séduit, trompé leur simplicité. Nous leur avons déguisé le crime ; nous le leur avons présenté sous les apparences de l’honneur, du patriotisme; nous avons eu de la peine à nous faire entendre; ils ont résisté très longtemps : mais une fois persuadés, ils ont persévéré dans leur erreur avec un courage qui prouve ce qu’ils auraient fait pour une meilleure cause. L’emploi qu’ils ont fait de ce courage était coupable; ils ont mérité la mort; ils l’ont subie; et cette justice nécessaire a laissé dans tous les cœurs un sentiment profond de pitié et d’horreur ..... peut-être d’estime!.... C’est un grand exemple pour leurs compatriotes! exemple qui n’était pas nécessaire pour les rendre fidèles, mais qui servira à les rendre moins faciles à persuader. Il servira à prouver aux soldats qui veulent conserver leur honneur, qu’ils ne peuvent s’écarter un instant de l’observation de la loi sans s’exposer à se voir entraîner dans les plus grands crimes, et à mourir honteusement de la mort des lâches. Eh bienl ces crimes se commettent encore tous les jours sous nos yeux, sans mystère comme sans obstacle. Nous ne pouvons ignorer que dans presque toutes les garnisons il y a des cabarets où l’on paye là dépense des soldats; que l’armée est partagée en sous-officiers et soldats qu’on tient en fermentation pour les décider à se défaire de leurs officiers, et ces mêmes officiers qui voient préparer les moyens de les faire chasser par leurs sous-officiers et soldats. Ceux qui ont suscité les crimes de Nancy sont les mêmes hommes qui suscitent ceux d’aujourd’hui. Dominateurs dans ces clubs soi-disant amis de la Constitution, c’est de ces foyers que partent les ordres et le venin qui va s’insinuer dans l’esprit et corrompre le cœur de tous les soldats; et voilà pourquoi on avait tant à cœur de les y faire aller. Les barbares! ils provoquent les soldats aux crimes qui sont utiles à leurs desseins secrets, pour les abandonner ensuite froidement au châtiment! Car, en dernière analyse ;... on leur conseille èn secret dans les cabarets de violer les lois de la discipline : on les enivre avec du vin préparé; on leS excite par des plaisirs : ou les suborné avec de l’argent.... Mais, en public, on est obligé de les condamner; et ces malheureux instruments qu'on emploie finissent par être des victimes abandonnées, comme les Suisses deChâ-teauvieux, par leurs corrupteurs, qui deviennent ainsi leurs véritables bourreaux . On va jusqu’à nous faire l’injure de dire que quelques-uns même de nous font usage de ces moyens toupables; du moins on nous accuse de les autoriser. Repoussons cette odieuse calomnie eh faisant enfin justice, et prenant des moyens efficaces pour arrêter le cours de ces attentats. C’est par le ministre de la guerre que nous devions être avertis officiellement de l’état critique où se trouvent les troupes : rendons-le fes-onsable des insurrections qui peuvent résulter e sa négligence. On vous dit que les officiers manquent de patriotisme, qu’ils sont ennemis de la Constitution ..... Mais qui tient ce langage? Ceux qui ont besoin de leurs places, qu’ils ont promises en payement des crimes qu’ils ont achetés ..... Quelle épreuve avons-nous de l’incivisme des officiers? En croirons-nous les comptes infidèles que nous avons reçus de l’affaire du régiment de Beauvoisis, comptes démentis hautement par le colonel, par les officiers et par les procès-verbaux ? Peut-on croire que si ces sous-officiers succombent aux tentations qu’on leur offre pour remplacer leurs officiers, la patrie puisse compter davantage sur des hommes qui n’auront obtenu leurs places qu’à force de crimes? Comment ces nouveaux officiers, qui ne seront parvenus qu’en violant toutes les lois de la discipline, établiront-ils leur autorité sur leurs soldats, hier leurs camarades, et toujours leurs égaux? Croit-on que ceux-ci ne soient pas empressés de parvenir par la même voie? Et qu’aurons-nous à leur dire, quand ils voudront avoir leur tour dans ce pillage et défaire ce qu’ils auront fait? Quel fond pourrons-nous faire sur une armée corrompue, indisciplinée, dépourvue d’officiers accrédités, et ayant l’habitude du commandement? Pourra-t-elle résiter à nos ennemis du dehors, dont les armées aguerries sont parfaitement disciplinées? N’aurons-nous pas tout à craindre, pour notre propre liberté, d’une multitude d’hommes sans frein, sans bien, avertis par l’essai que nous leur aurions laissé faire de leurs propres forces, qu’ils peuvent tout oser? Si un ambitieux sait s’emparer de leur confiance en les associant à partager ses conquêtes, rétablir par leurs forces à son profit et à nos dépens ce régime féodal que vous vous applaudissez tant d’avoir aboli : quels dangers ne peuvent-ils pas faire courir à ceux mêmes qui les auront dégagés du frein des lois, et qui se flattent, peut-être bien légèrement, de les avoir toujours sous leurs étendards ? ..... Mais non ..... Si quelques individus sont gangrénés, le soldat français, en général, est encore pur, l’honneur fait la base de son caractère : qu’on l’abandonne à lui-même , toute son énergie sera en tribut à la gloire et à la vertu. Il est confiant, franc, loyal; il suffit de le préserver de ces hommes dangereux qui l’égarent. La gangrène dont on cherche à vicier l’armée française prend sa source dans les déclamations des ‘clubs soi-disant amis de la Constitution, dans les calomnies que l’on répand jusque dans cette enceinte ; dans les adresses injurieuses aux officiers, dont l’Assemblée souffre la leeture sans improbation, ou au moins sans information légale; dans l’assurance que ces clubs donnent journellement aux sous-officiers, de remplacer immédiatement tous les officiers, moyen odieux de rendre ces sous-officiers, jusqu’ici les premiers coopérateurs des officiers dans le maintien de la discipline, leurs plus dangereux ennemis. Ce qui vient de se passer au Mans est une preuve de l’autorité que ces clubs exercent dans les départements, en rivalité, en opposition même, aux corps administratifs, aux municipalités et aux tribunaux; qui sont obligés de céder, je ne dis pas seulement à leur influence, mais à leur volonté absolue, bien plus active et plus forte que le pouvoir exécutif. Le régiment ci-devant de Chartres vivait en paix sous la protection des Lois* au Mans, généralement aimé et estimé de tous les citoyens, ce qui est attesté par les certificats authentiques des (Assemblée nationale.] ARCHfVÇS PARLEMENTAIRES. (4 juin 1790.] 107 corps administratifs et de la municipalité. Un mai avait été élevé à la porte de l’évêque : il est abattu pendant la nuit. On en accuse les dragons. ïl n’y a aucune preuve contre eux ; toutes les présomptions même les déchargent dé cette accusation ; mais les dragoûs n’ont pas voulu chasser leurs officiers ; ils concourent ensemble au maintien de la tranquillité publique ; à l'exécution des ordres de la municipalité..... Le club veiit qu’ils partent, malgré le désir de la municipalité et du département, sans avoir demandé l’ordre du pouvoir exécutif. Et le ministre même nous laisse ignorer qu’il a été obligé de déférer à la volonté du club. Ce qui s’est passé au Mans contre le régiment de Chartres, arrive à peu près à Limoges. Le ministre a été obligé, sur la demande d’un club, d’en faire partir un régiment qui était toujours demeuré fidèle aux lois et à la dissi-pline. Souffrirons-nouà que cés Clubs, ces prétendus amis de la Constitution, empêchent ainsi l’exécution des décrets et méconnaissent les pouvoirs établis pour les faire respecter ? Déjà ces clubs instruits, on présumant que, dans un mois, on enverra les lettres de convocation, pour la législature qui doit gous remplacer. déjà ces clubs désignent nos successeurs, et ménacént, Si on en nomment d’autres, de soulever le peüple. Déjà, on connaît dans les départements ces futurs législateurs : c’eât ainsi qu’ils ont envoyé des hommes qui doivent remplir les places ecclésiastiques! et celles des trïbunahk : de manière que c'est souvent un homme inconnu des électeurs qu’ils sont obligés de nommer, jparCë qq’ïi n’y aurait pas de sûreté d’en nommer qn àutré ; éàt-ce là le Voeu libre du peuple � et peut-on appeler libre uhe nation où de pareils actes dé despotisme sont commis, et où les lois âoiit satiô force pour les repousser ? Cette puissance des clübs à été en quelque sorte consacrée sous nos Veux, puisque, pour être admis dans une place, il fallait auparavant avoir été initié au club des Jacobins de Paris. C’est là que des évêques, des curés ont été recevoir leur pouvoir et leür consécration; c’est là que des généraux yont recevoir le bâton de commandement. Ce hoqveau genre de despotisme qui entreprend d’asservir également barméè, petit détruire ainsi toute la force de la nation, et nous rendre là cpnquête facile de nos voisins. On doit peut-être tenir quelque compte aux officiers français de leur dévouement, de leur courage, et de la vertu dont ils ont besoin pour résister à tânt ù’nutragés, â tant de corruptions dont on les environne; au torrent épouvantable dont tous les efforts tendent à leur faire perdre la confiance qu’ils ont méritée, et n’a-t-on pas essayé aussi de les corrompre eux-mêmes ? de les soulever contre leurs officiers Supérieurs et généraux ? Ne ies a-t-on pas entraînés un moment à faire des pétitions, former des comités, afin de s’autoriser de leur imprudence pour établir ceux qu'on devait faire tenir ensuite à leurs soldats contre eux-mêmes ? Si quelques individus* si même quelques régiments* en petit nombre, ont ce reproche à se faire, s'ils se sont laissé égarer un moment-, bientôt ils ont senti et expié par leurs remords cette erreur passagère. Si pous laissons supsisfer l’état actuel des chose�, nohs contribuons par notre silence (car je suis loin de penser qu’aucun membre de l’Assemblée soit complice), nous contribuons à tous les crimes qui se commettent tous les jours. Empressons noûs donc de rétablir l’ordre en faisant exécuter les lois. Si je ne préférais pas le salut de ma patrie à ce sentiment si naturel qui m’attache à plusieurs officiers du nombre de ceux que la vertu seule retient dans un poste qui ne leur présente plus que des dégoûts et des dangers (et Certes* c’est bien la presque totalité \ j’aurais 'été le premier à dire.... ou on veut conserver dans V armée les officiers actuels, et alors On leûr doit l'appui des lois auxquelles ils obéissent et ’qûHls défendent ; ou on n'en veut pins, et alors ïl faut le dire 'franchement. Qu'on épargné àUx ôffvciefs les horreurs de la position où ils sont , et dans laquelle il ’eSt barbare de les laisser ; et aux sous-officiers et soldats, des crimes par lesquels il n'est pas nécessaire qu’on les fassent passée pour leur faire prendre les places des officiers, si c'est là le hui ’qu'on se propose. Donnez-leur leur retraite , et pourvoirez à la récompense de leurs services passés. Mais loin de moi là tentation de céder à un mouvement d’intérêt personnel dont ma patrie serait la victime, et dont la générosité de ces braves officiers s’indignerait ; ils mettent heureusement pour nous, ils mettent encore de là gloire à servir une patrie qui les abandonne, à tenir tin poste périlleux. Profitons de ce sentiment pendant qu’il subsiste, dans un moment où nbüs àvons besoin de toutes nos forcée • cqeillez encore les fruits d’un arbre dont Vous atfez Voulu couper les racines. Rétablissons l’ordre et la discipline dans l’armée, ou bien, au premier choc des étrangers, nous verrons tout s’écrouler avec rapidité : que nous servira notre Constitution, quand nos provinces seront la conquête des peuples voisins ? J’entends dire que l’anarchie est complète. Je pense moi qu’il n’est point impossible de rétablir l’ordre et la discipline, si les clubs cessaient enfin d’abreuver les soldats du leurs pçisons ; si au lieu de les égarer par un faux patriotisme, on ne leur vantait que le véritable, qui est le dévouement aux lois et l’amour de l’honneqr si on soutenait l’autorité, au lieu de la contrarier eu tout ; si enfin, ouvrant les yeux sur l’abîme dans lequel des factieux, des intrigants, de§, philosophes, des ignorants, des traîtres peui-etre, peuvent précipiter notre malheureuse patrie, nous songions sérieusement à préparer des défenses de l’espèce de celles qui décident dü sort des années, au lieu de nous amuser à des lieux communs de métaphysique ; si enfin on rappelait seulement le soldat français à ses principes naturels, si on rendait sa confiance à ses officiers ; nous trouverions encore des armées françaises. Nos grenâ+ diers sont encore de la même trempe qup èeux de Denain, de Fontenoi et de Bergheii.� Mais ces grenadiers, si justes appréciateurs du. rpéritè militaire qui ne consiste pas seulement dans la bravoure, savent si leurs officiers ne leur sont pas nécessaires, et s’il est aisé de les remplacer, On parle d’un complot à peu près général, d’expulser les officiers par la viotepçe et même d'eq massacrer quelques-uns désignés. Ce complot n’est encore qne dans la résolution des conspirateurs ; il ne circule encore que dans les clubs où l’on sait qu’il a été agité. Car jè suis loin dp croire les soldats de l’armée capables d’y avoir adhéré. Plusieurs régiments auxquels on a osé eri faire des insinuations ont répondu d’une manière digne de cet honneur qui à toujours caractérisé le sol* dat français. 108 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 juin 1790.] L’imagination a peine à se prêter à la eroyance d’un pareil projet. Mais, faut-il le dire? déjà plusieurs événements trop constatés autorisent toutes les défiances, et accréditent des bruits qui eussent été tout à fait incroyables dans tout autre temps. Les officiers occupent leurs places sous l’autorité de la loi. S’ils ne méritent plus sa protection, elle doit prononcer légalement leur destitution. Tant qu’elle ne l’aura pas prononcée, elle doit les protéger avec énergie. Qui de nous peut dire que ce n’est pas là notre devoir? et ne serait-ce pas méconnaître cette souveraineté de l’Assemblée nationale, dont on nous parle tous les jours, que de douter qu’elle n’en ait la possibilité comme elle en a le droit? Nous nous rendons donc coupables si nous n’en déployons pas toute la puissance dans cette grande circonstance, avec la force nécessaire pour faire respecter les lois et y soumettre tous les militaires, depuis le premier grade jusqu’au dernier. Je pense donc que l’Assemblée nationale doit mander le ministre de la guerre pour qu’il reode compte de l’armée et des précautions qu’il a dû prendre pour arrêter les désordres qui la détruisent : et qu’elle doit le rendre personnellement responsable des insurrections qui arrivent dans les régiments, toutes les fois qu’il n’aurait point employé les moyens que lui donne la loi pour les prévenir ; car c'est un crime égal contre la sûreté de l'Etat que de démanteler ses forteresses ou de dissoudre ses armées. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BRIOIS DE BEAUMETZ. Séance du samedi 5 juin 1790, au matin (1). M. le Président ouvre la séance à neuf heures du matin. M. Defermon , secrétaire , fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier. M. Chabroud, autre secrétaire , lit le procès-verbal relatif ,à l’assistance de l’Assemblée à la cérémonie de la Fête-Dieu. M. le Président fait donner lecture de l’état suivant des décrets acceptés ou sanctionnés par le roi: « 1° Le décret de l’Assemblée nationale, du 29 du mois dernier, concernant l'emprisonnement à Brest, du sieur de Martinet; « 2° Le décret du même jour, relatif à l’émeute qui a eu lieu au marché de Tours, le 26 mai, à l’occasion du prix des grains ; « 3° Le décret du 31, qui fixe définitivement à Melun l’administration du département de Seine-et-Marne ; « 4° Le décret du même jour, relatif à la détention actuelle à Valence, de trois officiers du régiment de Grenoble, artillerie, en garnison dans cette ville ; « 5° Le décret du premier de ce mois, concer-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. nant les élections faites dans les assemblées primaires du département du Haut-Rhin ; « 6° Le décret du même jour, qui déclare non aveuu l’arrêt rendu par le parlement de Pau, lé 8 mai, contre les officiers municipaux actuels de Sauveterre, ainsi que tout ce qui s’en est ensuivi ; « 7° Le décret du même jour, portant que les receveurs-généraux des finances et ceux des impositions de Paris fourniront, tous les mois, un état de leur recette, tant sur l’arriéré de 1789, que sur les acomptes de 1790 ; « 8<> Le décret du même jour, portant que la Caisse d’escompte fournira au Trésor public la somme de vingt millions en billets assignats; « 9° Le décret du même jour, sur les billets assignats, leur nombre, leur valeur, leur somme et leur titre; « 10° Le décret du même jour, portant que la nouvelle municipalité de Paris, aussitôt qu’elle sera formée, fera l’examen des anciens règlements relatifs aux étaux des boucheries; « 1 1° Le décret du même jour, concernant l’ancienne milice bourgeoise d’Amboise ; « 12° Le décret du même jour, qui déclare non avenus les arrêts rendus par le parlement de Toulouse, les 11 décembre, 12 janvier et 30 mars dernier, à l’occasion du renouvellement des consuls de la ville de Mirepoix, ainsi que tout ce qui s’en est ensuivi ; « 13° Le décret du 2, pour protéger la libre circulation des grains dans le département du Cantal, et autoriser la municipalité de Murat à faire un emprunt de la somme de 24,000 livres ; « 14° Le décret du même jour, concernant les poursuites à exercer, et les précautions à prendre contre les brigands et les imposteurs qui séduisent, trompent et soulèvent le peuple, notamment dans les départements du .Cher, de la Nièvre, de l’Ailier et de la Corrèze; « On s’occupe dans ce moment de l’expédition des lettres patentes sur ce décret, et elles seront incessamment envoyées, et spécialement dans ces quatre départements ; « 15° Sa Majesté a donné des ordres pour l’exécution du décret du 31 mai, portant qu’il sera délivré aux députés extraordinaires de Châtelle-rault et de toute autre ville, des expéditions en forme des décrets sanctionnés, qui autorisent la libre circulation des grains ; « 16° Et, enfin, a approuvé l’instruction du même jour, sur la vente des domaines nationaux. « Signé : Champion de Cicé , Archevêque de Bordeaux. M. le Président. J’ai reçu de M. le garde des� sceaux une note relative à une réclamation de l'ambassadeur d' Angleterre concernant le collège des Écossais à Paris. J’en donne lecture : « M. le comte de Montmorin vient de faire part à M. le garde des sceaux, d’une réclamation que lui a adressée, au nom de sa cour, M. Fitz-Gérald, ministre plénipotentiaire de Sa Majesté Britannique, près du roi, contre l’extension contingente, sur le collège des Ecossais, du décret de l’Assemblée nationale relatif à la propriété des biens ecclésiastiques. « Signé : CHAMPION DE CiCÉ , Archevêque de Bordeaux. » Suit une copie de la note de M. Fitz-Gérald , ainsi conçue :