599 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mors.] sans qu’on puisse se prévaloir à cet égard d’aucun privilège. DEMANDES PARTICULIÈRES. Art. 1er. Demander le rachat des corvées seigneuriales, et la répartition des corvées royales, converliesen argent sur les trois ordres. Art. 2. Que les colombiers soient fermés du 10 mars au 20 juin de chaque année, et la destruction du lapin. Art. 3. Que toutes les rentes foncières et seigneuriales, même celles aux gens de mainmorte, soient toujours remboursables à la volonté du débiteur, quoi que constituées sur des héritages de champs. Fait et arrêté en l’église de Guibeviile, Fan 1789, le treizième jour d’avril, et ont tous les habitants dits, présents et dénommés au procès-verbal de ce jour, contenant mention de rédaction du présent cahier et nomination des députés, dressé par M. le bailli de ces lieux et qui savent signer : Signé Thomine; Fraiteau; Jayard; Girard; Thomas Monv; Bouquet; Cottard de Guibeviile. Bérenger. Signé et paraphé ne varietur, au désir de notre procès-verbal de ce jour, contenant nomination de députés, fait par nous, Pierre-Joseph Mésenge, licencié ès lois, procureur au châtelet de Paris, bailli, juge civil, criminel et de police des bailliages et châtellenie, graver et voyer de Guibeviile et dépendances, et M. Georges-François Billard, notaire greffier, cejourd’hui 13 avril 1789. Signé Mésenge et Billard. CAHIER Des doléances , remontrances et plaintes far les hâtants de la paroisse d' Herbeville (1). L’an 1789, le 16 avril, à neuf heures du matin ; Après l’assemblée convoquée au son de la cloche, en la manière accoutumée. Nous, habitants de la paroisse d’Herbeville, dépendants du châtelet de Paris, tous nés Français, compris au rôle des impositions de ladite paroisse, étant tous assemblés dans la Chambre à ce destinée, pour obéir aux ordres du Roi portés en ses lettres données à Versailles le 24 janvier dernier pour la convocation et tenue des Etats généraux du royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant civil au châtelet de Paris, dont du tout nous avons une pleine et entière connaissance, par les lectures et publications qui en ont été faites le dimanche 12 du présent, tant au prône de la messe paroissiale, qu’issue de ladite messe, au devant de la principale porte de l’église d'Herbeville, ladite assemblée convoquée en exécution des ordres, règlements et ordonnances, à l’effet de rédiger le cahier de doléances, plaintes et remontrances de cette paroisse, ainsi que pour délibérer sur le choix des députés que nous sommes tenus de nommer entre nous, nous étant occupés de la rédaction dudit cahier, avons arrêté nos doléances, plaintes et remontrances dans la forme suivante : Art. 1er. La taille, capitation, industrie, vingtième et autres impositions de la paroisse d’Herbeville, sont portées à un taux considérable, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l Empire. ' eu égard à la valeur du terrain dont est composé son territoire, ce qui absorbe une grande partie des produits du cultivateur et lui ôte la faculté du pouvoir cultiver avec soin les biens qu’il fait valoir et y donner les engrais nécessaires ; ces biens sont classés , dans les rôles des tailles de cette paroisse, en deux classes, faisant, l’une dans l’autre, ensemble 14 livres 15 sous l’arpent ; on ne peut classer le terrain d’Herbeville en deux classes ; il le faut au moins en quatre, eu égard à sa situation, et le meilleur du terrain d’Herbeville ne peut être classé, pour un quart, qu a raison de 12 livres l’arpent; un quart, qui est un sol inférieur, à 10 livres, un quart, qui n’est que pierrailles en côtes et vallées, souvent entraîné par les eaux venant de bois, à 6 livres, et un quart, qui n’est que sablon et friches, entouré de bois aussi en côte, à 4 livres l’arpent. En sorte que le terrain d’Herbeville ne devrait être classé ensemble qu’à raison de 8 livres l’arpent, et les impositions réparties au prorata sur les habitants qui possèdent et cultivent leurs biens à raison des classements ci-dessus. Art. 2. Les droits de contrôle, centième denier, franc-fief et autres, établis et tarifés par l’arrêt du conseil de 1782, sont considérablement augmentés depuis leur établissement ; il n’y a plus de règle pour leur perception, qui devient arbitraire par chaque employé, au point que les sujets sont souvent tourmentés pour doublement et forcement de droits qui n’ont jamais été perçus dans leur principe, ce qui ôte leur tranquillité et les empêche de finir leurs affaires, qui, faute d’être terminées, occasionnent des procès dispendieux que l’Etat peut éviter par un nouveau tarif de ces droits pour être stable à toujours, sans novation. Art. 3. Le gibier de toute espèce dans les bois et plaines est un fléau considérable pour le cultivateur, qui a le désagrément de cultiver, fumer et ensemencer son terrain, sans production, ce qui lui ôte tout secours, non-seulement pour lui et sa famille, mais encore l’empêche de payer ses fermages et impositions dont il est chargé à raison des biens qu’il cultive. Le lapin, gibier désastreux, doit être entièrement détruit ; les lois faites jusqu’à présent à cette occasion n’ont point eu d’exécution par les entraves que les officiers de capitainerie ont introduits dans les règlements qu’ils ont faits à cet égard. Art. 4. La capitainerie de Saint-Germain en Lave, dans laquelle la paroisse d’Herbeville est comprise, doit être réduite à ses premières limites pour les plaisirs de Sa Majesté, seulement ; le surplus est actuellement occupé en partie par des particuliers, la plupart sans fief ni terrain, qui achètent des cantons de chasse sur les terres de différents seigneurs, et qui en abusent par la quantité du gibier de toute espèce qu’ils y laissent. Pour parvenir à la destruction du lapin, il faudrait que les habitants en eussent la permission, et ils la demandent, de les fureter et panneauter pendant les temps qui leur seront prescrits ; cela éviterait beaucoup de plaintes et d’abus. Art. 5. Les corneilles sont encore des oiseaux désastreux qui font un tort considérable aux cultivateurs, lesquelles, après les semences des blés, lorsqu’ils commencent à lever, dans la dernière saison, les arrachent et les mettent sur terre. Les habitants d’Herbeville demandent qu’il leur soit permis de les détruire par les moyens qu’ils trouveront les plus convenables. A l’égard des pigeons, animaux qui pillent les 600 |États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.) récoltes, lesdits habitants requièrent que les règlements rendus dans ces circonstances soient exécutés. Art. 6. Les habitants demandent en outre qu’il leur soit permis d’éplucher leur blé lorsqu’ils en auront besoin et de faucher leurs prairies superficielles, lorsqu’ils le jugeront nécessaire, afin d’eviter le dépérissement. Art. 7. Que l’édit donné à Versailles au mois de novembre 1787 concernant ceux qui ne font pas profession de la religion catholique, comme les protestants et autres sujets de Sa Majesté, pour la plupart nés Français, qui participent à tous les subsides et aux besoins de l’Etat, soit exécuté. Art. 8. Que les chemins pour aller au marché de Maule, qui est le plus prochain des habitants d’Herbevilie, pour vendre leurs grains et denrées, soient réparés, ainsi que le pont de l’entrée de Maule, qui est inaccessible et presque détruit. Art. 9. Les habitants d’Herbeville, pleins de confiance dans l’ordre du tiers-état dans les assemblées qui se tiendront, adhèrent dès à présent à tout ce qui aura été arrêté à la pluralité des voix pour la satisfaction de notre souverain monarque, le bien de l’Etat et le soulagement des peuples. Fait et arrêté en notre assemblée, les jour et an ci-dessus indiqués, et avons signé. Louis Pasquier ; G. Roussel ; N. Glaquin ; Peaux ; Pigeon ; Reaux ; Deborge ; Joseph Pigeon; J. -B. -Claude Du Corps. Paraphé ne varietur , par nous, prévôt d’Herbeville. Signé Lequenes. CAHIER De remontrances et d’instructions que les habitants composant le tiers-état de la paroisse d'Herblay, désirent être insérées dans le cahier général du tiers-état de la prévôté et vicomté de Paris, hors les murs, pour les prochains Etats généraux (1). Lesdits habitants demandent : OBJETS PRÉLIMINAIRES. Art. 1er. Que les délibérations aux Etats généraux soient toutes formées en comptant les suffrages par tête et jamais par ordre. Art. 2. Que lorsqu’il s’agira de la constitution nationale, de celle des Etats généraux ou de l’octroi des subsides, la majorité ne soit déclarée acquise que par les deux tiers des suffrages. Art. 3. Que, pour tous les autres sujets de délibération, même pour régler la répartition des subsides, il soit arrêté que la pluralité sera suffisante. Art. 4. Qu’ afin que les députés, en s’occupant de l’intérêt public, n’en soient distraits par aucun intérêt personnel, il soit résolu qu’il y aura à leur égard suspension pour toutes affaires civiles et interruption de toute prescription pendant le cours de la tenue des Etats généraux, et encore six semaines après. Art. 5. Que, ces points réglés, il soit statué que les représentants de la nation ne s’occuperont d’abord que de la constitution nationale et de celle des Etats généraux, et qu’il ne sera rien réclamé sur aucun objet, avant que sur ceux-ci, ce qui aura été réglé soit sanctionné par le concours de l’autorité royale. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire. CONSTITUTION NATIONALE. Qu’il soit reconnu et arrêté : Art. 1er. Que la France est une monarchie héréditaire à laquelle est appelée la seule famille dont est le Roi régnant; qu’il n’y succède que les mâles qui sont Français et nés en légitime mariage en suivant l’ordre de la primogéniture. Art. 2. Que les individus qui composent la nation sont répartis en trois ordres : celui du clergé, celui de la noblesse et celui du tiers-état. Art. 3. Que la nation en corps est représentée par les Etats généraux. Art 4. Que les Etats généraux sont formés des députés de la nation, savoir • d’un quart au plus de l’ordre du clergé ; d’un quart au plus de la noblesse et de moitié au moins du tiers-état. Art. 5. Que le pouvoir législatif appartient à la nation assemblée des Etats généraux conjointement avec le Roi. Art. 6. Que l’effet de ce pouvoir est de n’obliger la nation à ce que les Etats généraux ont réglé que pour le temps d’une tenue à l’autre et une année après. Art. 7. Qu’au Roi seul appartient le pouvoir exécutif pour en user selon les lois. Art. 8. Que la puissance législative et la puissance exécutrice soient indépendantes de telle autre autorité que ce puisse être-; que ce qu’elles règlent en matière de gouvernement et d’administration publique fixe ce qui est juste ou injuste. Art. 9. Que tout sujet, de tel ordre ou tel rang qu’il soit, doit être soumis et inviolablement attaché à ce que prescrivent ces deux puissances. Art. 10. Qu’étant impossible que le Roi exerce seul et par lui-même la puissance exécutrice dans toute son étendue, ceux à qui il en confie une portion n’en puissent être revêtus ni dépouillés qu’ainsi qu’il est réglé par les lois. Art. 11. Que les cours souveraines ont le dépôt des lois et qu’elles en doivent faire l’enregistrement, mais qu’elles ne puissent les modifier ni rien augmenter. Art. 12. Que le Roi ne peut être supposé avoir l’intention ou la seule faculté de faire ce que les lois prohibent; que, par cette raison, ceux à qui il communique quelque partie de son pouvoir sont incapables d’en avoir abusé, s’ils contreviennent aux lois, de tel motif ou prétexte qu’ils s’autorisent. Art. 13. Que l’intérêt public exige qu’un délit de ce genre ne puisse être graciable en aucun cas. Art. 14. Que s’il arrivait que la puissance ou le crédit du coupable le pût soustraire aux recherches des cours souveraines, il appartiendra aux Etats généraux de le leur dénoncer et faire livrer. Art. 15. Que la liberté des personnes, les propriétés, les rangs, les privilèges soient tellement inviolables que nul n’en puisse être privé que selon les lois. Art. 16. Que ce n’est point une atteinte donnée à la liberté personnelle, aux propriétaires et aux privilèges, que l’exercice du pouvoir législatif, pour les restreindre et modifier selon que peut exiger le bien général. Art. 17. Que les subsides nécessaires à la puissance exécutrice doivent être supportés par tous les citoyens de tel ordre qu’ils soient, en proportion du rang et des facultés qui déterminent l’intérêt qu’ils ont à la protection du gouvernement. Art. 18. Que les subsides ne peuvent être accordés ou consentis que par les seuls Etats généraux.