488 [Convention nationale ! ARGHIVKS PARLEMENTAIRES, i 11 an J* ■ t Ier décembre 1793 « Sans doute, mes concitoyens, je serais bien criminel si j’avais gardé ces papiers dans l’inten¬ tion d’empêcher la propagation des lumières; mais vous voyez comment et pour quelle cause ils sont restés chez moi. Je n’ai pas attaché la moindre idée de délit à cette action. Si je l’avais crue illicite, j’aurais pu me cacher, j’aurais pris des précautions. Ah ! j’étais loin de prévoir qu?elle pût me compromettre aussi cruellement. Je suis innocent, j’en atteste cedx qui me con¬ naissent particulièrement. J’ai, depuis la Révo¬ lution, fait tous les sacrifices qui étaient en mon pouvoir : habits, sabres, souliers, argent; j’ai tout donné avec plaisir pour mes frères d’armes. J’âi été scrutiné pour ma place, pour le club, pour un certificat de civisme, partout on m’a rendu justice. Vous m’avez toujours donné votre confiance, mes concitoyens; cette action ne peut me la faire perdre. Je me confie entièrement à la justice du représentant du peuple et du co¬ mité de surveillance; ils s’empresseront, mieux instruits des faits, de rendre la liberté et l’hon¬ neur à un père injustement accusé, et le bonheur à une famille désolée. « Signé : Moulin. » Compte rendu du Moniteur universel (1). Un représentant du peuple écrit de Cherbourg que l’on a trouvé chez le directeur de la poste 400 livres pesant de lois et rapports imprimés, de Bulletins et d’autres papiers que la Conven¬ tion ou le conseil exécutif faisait passer dans l’arrondissement ; ce fonctionnaire criminel vendait ce papier 7 sous la livre ; on en a trouvé chez différents particuliers qui le lui avaient acheté. Le prévaricateur se nomme Leroy. Maribon-Montaut. Si jamais il fut commis un grand attentat, c’est sans doute celui que l’on vous dénonce. Quand j’étais en commis¬ sion, j’ai souvent écrit ou au comité de Salut public ou à la Convention; mes lettres ne sont pas toutes parvenues; et, loin de recevoir tous les journaux, et surtout les journaux jiatrio-(1) Moniteur universel [n° 73 du 13 frimaire an II (mardi 3 décembre 1793), p. 296, col. 2]. D’autre part, le Mercure universel [12 frimaire an II (lundi 2 décembre 1793), p. 191,’ col. 2] rend compte de la dénonciation de la Société républicaine de Cher¬ bourg dans les termes suivants : « Le ministre de l’intérieur transmet 4 la Con¬ vention une lettre de la Société républicaine de Cherbourg. Elle a trouvé chez un directeur de la poste 400 livres pesant de Bulletins de la Conven¬ tion, encore scellés du cachet national et une plus grande quantité de ces mêmes Bulletins d ans une maison particulière et qu’il n’avait point envoyés à leur destination. Cet administrateur vendait sept sous la livre ces Bulletins. « Il se nomme « Leroy, ajoute le ministre, et ce nom convient « bien à un scélérat. » « La Convention décrète que : « 1° Celui qui a dénoncé ce directeur a bien servi la chose publique; « 2° Que ce directeur sera traduit au tribunal révolutionnaire; _ « 3° Que tout fonctionnaire qui aura retardé ou suspendu l’envoi des journaux ou des Bulletins de la Convention sera renvoyé au tribunal révolution¬ naire; « 4° Que les administrateurs des postes, qui n’en¬ verront pas les paquets à leur direction seront com¬ pris à l’article précédent. » tes, Mont j’avais besoin pour les distribuer aux soldats, j’en recevais toujours un nombre insuf¬ fisant. Il faut faire un grand exemple. Je de¬ mande que la Convention décrète que le dénon¬ ciateur a bien mérité de la patrie; que le dé¬ noncé sera traduit au tribunal révolutionnaire, et que cette dernière mesure est générale. Ces propositions sont décrétées. La séance se lève à 4 heures 3/4 (1). Signé : Romme, président; Roger Ducos, Philippeaux, Frecine, Merlin (de Thion-ville), Reverchon, Richard, secrétaires. PIÈCES ET DOCUMENTS NON MENTIONNÉS AU PROCÈS-VERBAL MAIS QUI SE RAP¬ PORTENT OU QUI PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SÉANCE DU II FRIMAIRE AN II (DIMANCHE 1er DÉCEMBRE 1793). I. Une députation du Club des Cordeliers demande la proscription jusqu’à la PAIX DE l’or ET DE L’ARGENT MONNAYÉS (2). Suit le texte de la pétition du Club des Cordeliers d'après un document des Archives nationales (3). Club des Cordeliers. « Du 11 frimaire an II de la République française, une et indivisible. «Législateurs, « La surveillance et la crainte ont forcé l’aris¬ tocratie à se cacher dans l’ombre, mais tous ses traits ne sont pas encore émoussés; portez-lui les derniers coups en décrétant une mesure salu¬ taire qui la condamne à un silence éternel, Par un profond raffinement de perfidie, les ennemis du bien public pourraient être tentés de rétablir la circulation du numéraire en petite partie, afin d’avoir un nouveau moyen de l’ac¬ caparer encore et de le. faire passer chez l’étran¬ ger. Ce projet liberticide ne serait pas moins l’effet des manœuvres de Pitt que de la lâcheté des feuillants qui, depuis le sage décret qui confisqua leurs stupides reliques et leurs écus cachés, affectent aujourd’hui de faire reparaître leurs espèces. Eh quoi ! une masse d’assignats hypothéqués sur dix milliards de propriétés na¬ tionales ne suffit-elle pas pour fournir à tous nos besoins et donner au commerce la plus grande activité? C’est sur cette monnaie que la dette publique doit être uniquement liquidée. « Législateurs, le club des Cordeliers pense qu’il serait aussi dangereux qu’impolitique de (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 298. (2) La pétition du club des Cordeliers il’ est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 11 fri¬ maire an II; mais il y est fait allusion dans les comptes rendus de cette séance publiés par le Mo¬ niteur universel, le Mercure universel, Y Auditeur na¬ tional, les Annales patriotiques et littéraires et le Journal du Soir. (3) Archives nationales, carton C 285, dossier 831. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES I 41 frimairc an 11 489 1 i«r décembre 1793 iaixe reparaître, avant la paix, une matière qui -doit être le signe de l’abondance, et ne sonner ■qu’après la mort des despotes et l’anéantisse¬ ment de tous les ennemis de la liberté. Nous demandons la proscription du numé-raire en or ou en argent à compter du jour où vous rendrez ce salutaire décret ; « Que toute circulation en soit défendue à au¬ cun citoyen sous peine d’être regardé comme suspect et arrêté comme tel; « Que dans un mois, à compter du décret, tout particulier, marchand, négociant et même tout individu qui serait salarié par un culte quelconque soit tenu de déposer, apporter à la Monnaie tout ce qu’il pourrait avoir en matière •d’or ou d’argent, sans exception, pour en faire l’échange contre des assignats; « Que tout contrevenant à cette utile mesure soit banni du territoire de la République; « Que les ouvriers et marchands en matières d’or et d’argent soient employés selon leurs talents, à la fabrication des armes et dans les manufactures et ateliers qui sont sous l’admi¬ nistration de la République. » Législateurs, décrétez que la Monnaie sera désormais appelée : Dépôt de là fortune publique , sous la sauvegarde du peuple ; et que ces mots y seront inscrits : Le salut de la République est as¬ suré pour jamais; son génie, ses vertus et son cou/rage anéantiront dans tous les temps les efforts du despotisme. Pour garantir l’inviolabilité de ce dépôt sacré, ordonnez que ses agents seront sous la surveillance de la République entière, que les directeurs et tous autres employés à la Monnaie, dont le plus grand nombre a été nommé par les valets du tyran, soient expulsés de ces places qui m’appartiennent qu’à de vrais républi-oains. Il importe qu’une liste d’hommes probes et vertueux soit proposée par le peuple dans les Sociétés populaires et dans les comités de sur¬ veillance, ou comité de Salut public, qui sera autorisé à choisir provisoirement le nombre ■d’agents nécessaire, jusqu’à ce que par l’affiche de leurs noms, de leurs professions précédentes et de la Société qui les aura présentés, ils puis¬ sent être soumis à l’épuration et acceptés défi¬ nitivement et temporairement par la Conven¬ tion nationale. Ordonnez, comme mesure indis¬ pensable, qu’on mette sous le scellé et qu’on Vérifie les matières monnayées et autres qui peuvent être inventoriées, comme à constater •celles qui ne le sont pas; que jusqu’à la élôture et vérification de cet inventaire, ainsi qu’à l’apu¬ rement des comptes, tout directeur et agent de la Monnaie sera mis en arrestation, et que les ouvriers seront surveillés. Confiez à la garde partielle de chaque section ce dépôt intéressant ; les Parisiens en répondront à la République, et c’est assurer qu’aucun effort humain ne pour¬ rait attenter à son inviolabilité. Potet; Bourgeois. » Compte rendu du Moniteur universel (1). Une députation du club des Cordeliers, admise à la barre, présente une pétition, par laquelle il (1) Moniteur universel [n° 72 du 12 frimaire an II (lundi 2 décembre 1793), p. 292, col. 2]. D’autre demande la proscription de l’or et de l’argent monnayés jusqu’à la paix. Cette pétition est renvoyée au comité de Salut public. II. Lettre des représentants Soubrany et Richaud, commissaires près l’armée de la Moselle par laquelle ils annoncent la PROCHAINE ATTAQUE DE KaISERI.AUTERN (1). Suit le texte de cette lettre d'après un document des Archives nationales (2). Soubrany et Richaud, représentants du peuple près l'armée de la Moselle, à la Convention nationale. « Au quartier général de l’armée de la Moselle, à Wiflerbach (sic), le 7 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « Nous vous avions annoncé, le 4, la marche de l’armée sur Pirmasens; à peine avions-nous fait deux lieues, que nous apprîmes qu’il était évacué, nous en étions encore éloignés de trois grandes lieues. Le général le fit occuper, et ra¬ mena l’armée à Deux-Ponts. Ce mouvement a retardé d’un jour les projets du général sur Kaiserlautern, mais sans y rien changer. Il est parti le 5 avec une colonne de 26,000 hommes qui ont couché à Limback, nous sommes arrivés le lendemain à Schewberg (sic) sans avoir eu le plaisir de joindre les Prussiens. Le même jour, une autre colonne de 18,000 hommes, partie de part, V Auditeur national (n° 436 du 12 frimaire an II (lundi 2 décembre 1793), p. 2] et le Mercure universel [12 frimaire an II (lundi 2 décembre 1793), p. 186, col. 2] rendent compte de la pétition du club des Cordeliers dans les termes suivants ; I. Compte rendu ded' Auditeur national. Une dépulalion de ta Société des Cordeliers de¬ mande que tous les citoyens soient obligés de por¬ ter leur numéraire à la trésorerie nationale, pour être échangé contre des assignats, et que le numé¬ raire ne soit remis en circulation que lorsque les tyrans seront terrassés et qu’une paix constante et durable assurera le bonheur de tous les Français. Renvoyé au comité des finances. II. Compte rendu du Mercure universel. Une députation de patriotes Cordeliers propose que tout citoyen soit tenu d’échanger contre des assignats les matières d’or et d’argent qu’il .peut avoir. Honneurs de la séance. (1) La lettre des représentants Soubrany et Rü chaud n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 11 frimaire an II; mais en marge du do¬ cument qui existe aux Archives nationales, on lit j « Renvoyé au comité de Salut public, le 11 fri¬ maire an II. Philippeaux, secrétaire. » (2) Archives du ministère de la guerre : Armées du Rhin et de la Moselle, carton 2/24. Aulard : Ré* cuetl des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 19.