§$ [Assemblée nationale.] ARCHIVÉS RaRLËMËRTAÏRëS. [30 août 1791.] Ce projet de décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale décrète que M. Per-ronet, premier ingénieur des ponts et chaussées, auquel l’Assemblée a décrété pour traitement tout ce dont il jouissait à différents titres, touchera pour 1790 la totalité d’une pension de 5,000 livres, et que son traitement actuel sera compté à partir du Ie* janvier 1791. » (Ce décret est adopté.) M. de Wiinpfen. Messieurs, le 21 de ce mois, M. l’abbé Fauchet a été dénoncé à l’Assemblée nationale, après l’avoir été au tribunal de district de Bayeux, pour des imprimés et des discours qü’il avait avancés; mais, le jour même où l’As emblée a prononcé le décret* il y avait déjà à Bayeux des commissaires du département pour concilier le différend. Hier, en rentrant chez moi, j’ai trouvé une lettr e et un arrêté de la municipalité. L’arrêté est fort long, mais il peut se résumer ; il résulte de ce document que la municipalité et un membre du Directoire ayant eu une entrevue avec M. Fauchet, ce dernier est convenu qu’il avait quelques torts; mais il s’est plaint qu’on lui imputait des imprimés qui n’étaient pas de lui. La municipalité désirerait que, puür le rétablissement de la paix dans ce département, l'Assemblée nationale voulût bien su-pendre l’exécution de son décret : j’appuie cette demande. Plusieurs membres : Non ! cela ne se peut pas ! M. liavie. Le résultat de la procédure commencée au tribunal de Bayeux peut seul prouver si, en effet, M. Fauchet est innocent des faits qui lui ont été imputés; et s’il n’est pas coupable, il sera innocemé par le jugement. Je demande donc que l’Assemblée passe à l’ordre du jour. Plusieurs membres : Oui ! oui ! l’ordre du jour 1 (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. d’André, au nom du comité diplomatique. Messieurs, je n’ai d’autre rapport à faire à l’Assemblée que de lui lire les diverses pièces qui nous ont été remises par le ministre des affaires étrangères. Voici d’abord la lettre du ministre : « Paris, le 24 août 1791. « En conséquence du décret de l’Assamblée nationale, Messieurs, j’ai prescrit au sieur Bâcher, chargé de nos affaires en Suisse, de se rendre auprès du prince-évêque de Bâle. Ce chargé d’affaires n'a pas différé à se transporter à Porentruy, et il vient de me rendre compte de sa mission et de m’adresser la réponse dü prince-évêque. Je joins ici copie de ces pièces ; je vous prie, Messieurs, de vouloir bien les mettre sous les yeux de l’Assemblée nation Hé. « Signé : DÊ MONTMORIN. « Voici la lettre de M. le princè-évêquè de Pâle à M. de Montmorin. « A Porentruy, le 12 août 1791. « Monsieur, « J’ai reçu la lettre qüè Votre Excellence m’a fait l’honnéür dé m’écrire, le 4 de ce mois courant, et M. Bâcher, qui me l’a remise, m’eu a expliqué plus particulièrement le motif et le but. « Je ne saurais trop exprimer à Votre Excellence l’étonnement et la douleur que m’a causés le doute qui a été manifesté sur mes véritables dispositions à l’égard de la France, et je me félicite de me trouver en mesure de les détruire. « Je Vous prie instamment, Monsieur, d’assurer l’Assemblée nationale que mon attachement pour la nation française comme pour le roi est invsb riable, que les liens qui Subsistent entre la France et ma principauté me sont infiniment précieux, que je rngar e comme sacrées les obligations qu’ils m’impusent, et que je m’empresserai. dans toutes les occasions, de prouver ma fidélité à lès remplir. Tels sent. Messieurs, mes véritables sentiments. Ils sont invariables, et je prie Votre Excellence d’en être l’interprète, tant auprès de l’Assemblée nationale qu’auprès de Sa Majesté. « Mon ministre à Paris ne m’â pas laissé ignorer les différentes motions qui ont été faites, nommément celle d’occuper, dès à présent, les gorges des montagnes qui sont dans ma principauté. Si Vous Voulez bien? Monsieur, vous donner la peine de relire le traité sur lequel on a appuyé celte étrange motion, vo is VOUS convaincrez quelle porte entièrement à faux. Les obligations qui me sont imposées supposent que la France a des ennemis ou dés adversaires à combattre. Or, il n’en existe pas dans ma principauté, et je ne Vois aücüne disposition â portée de moi qui en indique. S’il eu est d’intemiotl, cette intention simplement présumée né suffit pas pour établir le casus fcèdéris. Dès que ce cas existera, le moment ne remplir mes engagements existera pareillement, ét, je le répète, je serai fidèle à les remplir. « Gcs réflexions, Monsieur, auraient été plus décentes de la part de M. l’évêque de Lydda, que le rôle de délateur dont il a cru devoir se charger. J’avoue que les inculpations qü’il s’est permises m’ont d’autant plus affecté* que je devais lui supposer d’autres sentiments pour moi, que ceux qu’il a manifestés. Il a dû son existence à mes prédécesseurs et il a joui pendant 7 à 8 années des mes bienfaits et de ma confiance ; mais il me paraît que M. l'évêque de Lydda a cru devoir briser des lieos qui* sans doute, le gênaient depuis longtemps, c’est vraisemblablement par le même motif qu’il a tâché de rendre suspecte la cour de Vienne, dont il a de tous les temps été le protégé. « Je vous demandé pardon, Monsieur, de cet épisode ; je l’aurais épargné à Votre Excellence, si je n’avais jugé devoir faire connaître l’homme qui s’est constitué mon accusateur, qui me calomnie, et qui, oubliant le caractère dont il est revêtu, n’a pas rougi de surprendre la religion de l’Assemblée nationale. « J’ai l’honneur d’être, etc... « Signé : Le prince-évêque de Bâlé.» Voici maintenant la relation de la mission de M. Bâcher près le prince-évêque de Bâle. « Pour se conformer à la dépêche du ministre du 4 août 179 î, le chargé des affaires de France un Suisse s’est rendu à Porentruy le 11 de ce mois. Le prince-évêque de Bâle lui envoya aus-Lôt M. de BiliieUx, conseiller aulique, pour lui faire compliment sur son arrivée, et lui offrir un équipage et un lôgement âu château, où il fut reçu, aü bas de l’escalier, par M. le baron de Roggen- [Assemblée nationale.] ARCHIVES MRLEMÉNÎ AIRES. [30 août 1791.1 59 bàch, grand-maréchal dé la cour, et conduit ensuite dans les appartements du prince Qui vint au-devant de lui ju-qu’aü milieu de la deuxième antichambre, accompagné de deux chanoines de sa cathédrale. « Après les compliments d’usage, et la remise de ma lettre de créance, Son Alessë entama un entretien confidentiel, dans lequel je parvins facilement à lui faire comprendre, que le meilleur moven d’en imposer aux malintentionnés, et de rétablir promptement le Calme et la tranquillité dans ses Etats, était dé manifester, d’ühe manière irréfragable, son attachement connu aux véritables principes sur lesquels elle est et a toujours été de remplir ses engagements confédéraux, dans tous les cas prévus par les traités subsis ànts. « J’assurai en échange Son Altesse, qu’ePe pouvait compter, dans tous les temps, Sur l’intérêt que la uation française et le roi ne cesseraient de prendre à tout ce qui pourrait contribuer à sa satisfaction et à la prospérité de son pays. . , . « Le prince-évêque m’a répondu de la manière la plus affectueuse qu’il taisait consister tout son bonheur à mériter la coniinnation de la protection, de la bienveillance de la France et de Sa Majesté, et qu’il n’avait négligé jusqu’ici aucune occasion d’entretenir et de cultiver une bonne intelligence avec tous les département qui l’avoisinent, en même temps qu’il était entré en correspondance de bon voisinage avec les municipalités de la monarchie qui confinent à ses Etats. « Le prince-évêque m’a confié ses peines et dévoilé toutes les ma iffiuvres du ci-devant conseiller fiengn6r,pour opérer une insurrection générale tant à Porentruy que dans l’évèché de Bâle. Il s’est idaint en même temps de l’illusion dans laquelle il entretenait ses sujets fugitifs rassemblés en grande partie du coté de Delle dans le département du Haut-Rhin, auxquels il faisait toujours espérer du secours et de l’appui ; ce qui m’a paru surtout affecter le souverain aü delà de toute expression, c’est de voir que M. l’évêque de Paris, oncle de M. Reug er, paraissait avoir pris à tâche de donner une fausse couleur aux dispositions et aux sentiments de Son Altesse envers la France, qui n’avaient cependant jamais varié et qu’elle avait fait connaître lorsque l’occasion s’en était présentée. « M. de Griffeneg, délégué impérial, avec lequel j’ai eu plusieurs conversations, m’a assuré que la cour de Vienne verrait toujours avec plaisir le prince-évêqüe remplir ses engagement confédéraux envers la France et conserver par ce moyeD la neutralité et l’inviolabilité de son territoire; que c’était là l’article de ses instructions que l’emnereur lui avait le plus recommandé; que ce n’était qu’à regret que Sa Majesté Impériale s’était vue forcée d’appuyer sà médiation d’un corps de 460 hommes dont l’entretien sur le pied de guerre lui était onéreux, en même temps qu’il était à charge aü prince-évêque; que du moment où la France voudrait se charger de ne plus accorder d’asile à M. Rengner et de faire dissiper les mécontents sur la frontière du côté de B> ifort et Delle, la prolooga'ion du séjour des troupes autrichiennes deviendrait inutile dans l’évêché de Bâle, puisqu’alors les invasions des bandits ne seraient plus à craindre. « Le délégué impérial s’est infiniment loué de la conduite des districts et municipalités du département du Doubs, qui ont fait main basse sur plusieurs bandits qui avaient cherché eu derniet lieu à pénétrer dans l’évêché de Bâle du côté de Saint-Léger. « M, de Griffeneg m’ayant-témoigné, de la manière la plus obligeante, qu’il était fort aise d’avoir trouvé une occasion de me parler avec confia nee et amitié, j’ai répondu de mon mieux à sa prévenance. Il m’a ensuite dit qu’il avait adontéferôle de médiateur entre le prince et ses sujets ; qu’il avait écouté depuis 4 mois, avec une patience à toute épreuve, tous ceux qui prétendaient avoir à se plaindre, qu’il avait examiné attentivement leurs griefs, et les réclamations successivement faites, et qu’à l’exception du droit de chasse, auquel on avait donné en efiet une extension très arbitraire et oppressive pour les gens de campagne, il n’avait trou véqu - des objets minutieux, et dont il ne valait presque pas la peine de faire mention ; que le droit de chasse serait limité, de manière à le rendre pre-que nul ; et que, quant aux a très abus qui s’étaient successivement introduits, on déférerait à la demande que les États du pays, qui se rassembleront le 5 de septembre prochain, feront pour en obtenir la réforme. « Le délégué impérial m’a ensuite communiqué les ordres qu’il avait de ne laisser éloigner aucun des soldats de plus d’un quart de lieue de Porentruy, afin d’éviter soigneusement tout ce qui pourrait donner le moindre ombrage à nos frontières, et jeter le moindre nuage sur les dispositions pacifiques de Sa Majesté Impériale envers la France, Il a ajouté ensuite que, pour convaincre toute la Suisse de la bonne intelligence et de l’harmonie qui subsistaient entre les deux monarchies, il voulait m’accompagner avec Mi de Bil-lieux, pendant 12 iieues. « Diocèse de l’évêché de Bâle. » « Le prince-évêque de Bâle a supporté avec toute la modération possible la perte de la plus grande partie de son dio< èse, qui comprenait tout le dépanement du Haut-Rhin ; et n’a point troublé l’évêque de Colmar dans l’exercice de ses fonctions ecclésiastiques. Ii attend avec résignation, de la justice de la nation française, l’indemnité qui pourra lui être due. « Possession du prince-évêque de Bâle en Alsace. « Le prince-évêaue de Bâle a prévenu son ministre prés de la Diète de Ratisbonne, que sou intention étant d’eDtrer en négociations avec la France au sujet des dédommagements qui lui étaient dus eu qualité de prince étranger posses-sionné eu Alsace, et qu’il n’attendait à cet effet que les ouvertures et les offres qui lui seraient faites. « Emigrants français. « Il n’y a que très peu d’émigrants français dans l’évê« hé de Bâle ; on fait filer ceux qui se présentent à mesure qu’ils arrivent. Le désir que Son Altesse a d’observer un bon voisinage, ne lui permettra jamais d’accorder asile aux Français qui auront démérité de leur patrie, et, à la première réquisition, elle ne manquera pas de faire partir tous ceux dont le séjour dans ses Etats pourrait déplaire. 60 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 août 1791.1 « Conseil du prince. « Le conseil du prince-évêque de Bâle est principalement composé de M. de Gleresse et de M. de Malher, chanoines de sa cathédrale, de M. le baron de Roggenbach, son neveu, et de M. le conseiller de Billieux. Je me suis particulièrement entretenu avec chacun d’eux, les connaissant depuis fort longtemps, surtout les deux derniers. Ils m’ont tous répété ce que le prince et le délégué impérial m’avaient dit séparément sur l’origine des troubles de l’évêché de Bâle, et sur les dispositions où l’on était d’employer tous les moyens praticables pour les pacifier d’une manière satisfaisante pour les Etats assemblés et pour tout le pays en général. « Le chapitre de la cathédrale de Bâle craint que le prince-évêque ne s’occupe uniquement que du dédommagement qui lui est dû pour ses possessions en Alsace, et que les intérêts des chanoines dans le département du Haut-Rhin ne soient négligés. « Le droit de chasse, tel que le délégué impérial l’a restreint, avec le consentement du priue* - évêque, est un sacrifice pour ses chanoines ; et comme ils voient que la cour de Vienne est disposée à accueillir quelques autres demandes des sujets, qui sont à la vérité de peu de conséquence, la médiation du délégué impérial paraît les contrarier infiniment. « M. de Roggenbach m’a dit que la noblesse n’avait pas grand’chose à perdre dans l’évêché de Bâle, puisque les princes-évêques avaient successivement attiré à eux tous les droits régaliens et droits féodaux un peu considérables ; qu’elle n’était donc que faiblement intéressée aux changements qui pourraient être la suite de la convention actuelle des Etats du pays. » M. de Billieux ne doute nullement qu’on ne parvienne incessamment à un rapprochement entre le prince et ses sujets, sur la présentation qui sera faite par les états du pays à Son Altesse des griefs dont le redressement est nécessaire. Dès lors, il ne s’agira plus que d’éloigner M. le conseiller Rengueret ses adhérents de3 frontières de l’évêché, et d’exécuter en France l’article du traité qui ne permet pas de souffrir sur le territoire de l’une ou de l’autre domination des perturbateurs du repos public. M. Renguer, comme criminel d’Etat, serait même dans le cas d’être extradé en exécution des traités entre la couronne de France et l’évêché de Bâle. « Soleure, le 15 août 1791. « Signé : BACHER. » J’ai encore diverses lettres anonymes ..... M. E