271 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [1 4 juillet 1791.] Plusieurs membres : Ce n’est pas là la question. M. Démeiinier. J’ai répondu il y a un instant à des qucstio is qui avaient été posées au comité de Constitution; on a demandé que les explications contenues dans ma réponse fussent rédigées en projet de décret. Voici la première proposition : « Le déc et du 21 juin, qui suspend l’exercice de la sanction et de l’acceptation, ainsi que des fonctions du pouvoir executif entre les mains du roi, subsismra tant que l’acte constitutionnel entier n’aura pas été présenté au roi et accepté par lui. » Voici la seconde disposition : « Dans le cas où, soit le roi actuel, soit tout autre roi, n’accepterait pas purement et simplement l’acte constitutionnel qui lui sera présenté, il sera censé avoir abdiqué la couronne, et l’Assemblée nationale le déclarera déchu du trône. » ( Murmures à droite.) M. Roederer. Gela préjuge la question! M. Rabaud Saint-Etienne. Voici une autre rédaction de la deuxième disposition proposée par M. üémeunier : « Celui qui sera chargé du pouvoir exécutif suprême ne pourra régner qu’il n’ait accepté l’acte constitutionnel qui lui sera présenté par le corps constituant. » Voix diverses : Aux voix! aux voix! L’ordre du jour ! (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) Plusieurs membres demandent le renvoi de la suite de la discussion à la séance de demain. (Ce renvoi est décrété.) M. le Président. Je viens de recevoir une pétition relative à la délibération actuelle ; elle est signée de 1Ü0 personnes. Je me suis engagé, vis-à-vis de la députation qui l’a apportée, à la présenter à l’Assemblée. L’Assemblée veut-elle en entendre la lecture? (Non! non!) (L'Ass mblée, consultée, décrète que la pétition ne sera pas lue.) M. Prieur. On ne peut pas s’empêcher... (Bruit.) M. Rarnave. Le décret que l’Assemblée vient de rendre, et dont l’objet est de renvoyer la lecture d’une pétition annoncée parM. le Président, n’est pas et ne peut pas être de la pa t de l’Assemblée le relus d’entendre des propositions, des instructions de quelque part qu’elles puissent venir sur l’objet qui est actuellement mis en délibération : la question que nous traitons ne peut que gagner à être parfaitement éclaircie. Je crois que le décret qui vous est proposé par les comités est juste dans les principes constitutionnels établis, qu’il est bon, qu’il est utile dans L-s circonstances, qu’il est et sera appuyé partout par l’opinion publique (Murmures,); car je suis loin d’appeler l’opinion publique le bourdonnement momentané que produisent autour d’eux quelques écrivains, peut-être stipendiés, et qu’ils voudraient nous donner ensuite comme notre régulateur. Là où est la raison est l’intérêt public, la loi n’a qu’à y placer un fanal, et là se rangera toujours l’opinion publique, là se rallieront toujours les bons citoyens. (Applaudissements.) Ainsi donc, persuadé que, pour l’opinion publique comme pour la sagesse de la délibération qui va suivre, il est important que tout soit entendu, que tout soit d scuté. Je demande que l’Assemblée nationale décrète, dès à présent, que demain, à l’ouverture de la séance, la pétition présentée sera lue. (Cette motion est mise aux voix et adoptée.) M. le Président lève la séance à trois heures et demie. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU JEUDI 14 JUILLET 1791, AU MATIN. Opinion sur un conseil d’ exécution électif et national, par M. Pétiou (l). Je suppose que le roi soit conservé dans ses fonctions, et c’est dans ceite hypothèse uniquement que je propose l’opinion suivante : Les partisans les plus exagérés du roi sont forcés de convenir de deux points essentiels: 1° c’est que le roi est au moms un homme faible, facile à se laisser entraîner, capable de devenir l’instrument des complots les plus funestes ; 2° c’est que, dans les circonstances où il se trouve abandonné à lui-même, ou, ce qui est pis encore, aux hommes criminels qui l’environnent, il ne peut plus inspirer de confiance à la nation (2). Or, le peuple ne peut être rassuré : il ne peut trouver de garants certains que dans des membres choisis dans son sein pour composer un conseil d’exécution. Je prie qu’on écoute cette idée avec le calme de la raison, et qu’on ne la repousse par aucune prévention particulière; elle est aussi grande en elle-même que salutaire dans ses effets; et il n’en est pas, j’ose le dire, qui convienne même à notre position actuelle. Pour les affaires les plus simples de la vie, on donne un conseil à un homme qui ne peut pas administrer ses biens, qui est incapable de stipuler ses droits; et lorsqu’il s’agit des plus giands intérêts dont un homme puisse jamais ê re chargé ; lorsqu’il s’agit de gouverner une nation entière , on ne donnerait pas un conseil au chef dont la faiblesse et l’incapacité mettent à chaque instant la chose publique en péril ! Rien, sans doute, ne serait plus extravagant. Le cas, je le sais, n’est pas prévu par notre Constitution; mais, d’abord, elle n’est pas finie; et combien d’autres cas n’ont été ni prévus ni déterminés! Si un roi tombait dans une imbécillité absolue, le remê le n’existe pas non plus (1) Cette opinion a été publiée et distribuée parM. Pé-tion au cours des débats sur les événements relatifs à la fuite du roi et de sa famille; elle se rattache donc aux documents parlementaires de cette époque, et c’est à ce titre que nous la publions. (2) Je ne me suis pas donné le temps de relire ni de revoir les épreuves; le moment était pressant : si quelques fautes m’étaient échappées, on me les pardonnera. (Note de l'opinant .)