[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [20 août 1191.) 579 l’Assemblée actuelle est composée en grande partie (le propriétaires, qui ont intérêt à s’opposer aux remboursements des particuliers qui demandent à être remboursés. Ajoutez, encore, que la diversité d’opinions que vous voyez dans cette Assemblée demande des éclaircissements ultérieurs. Laissons mûrir ces réflexions, laissons ceux qui prononceront sur cette grande question, si les personnes qui ont linancé pour obtenir des offices seigneuriaux étaient vraiment propriétaires d’une partie des justices seigneuriales, ou si elles avaient seulement un exercice attaché à la nomination volontaire de l’administration de la justice des seigneurs, qui, pouvant rembourser, étaient conséquemment les maîtres de refuser le droit d’exercice. Je conclus l’ajournement à la prochaine législature. Plusieurs membres : Aux voix! aux voix! M. Chassey. Je n’ai qu’une raison à opposer à l’ajournement. (Aux voix! aux voix!) Voiià 4 jours que l’on discute sur ce projet de décret; il est certain que la question est douteuse ; mais, pourtant, il paraît que les opinions peuvent se résoudre en cet instant ; et pourquoi? parce que cela ne tient pas à des éclaircissements de fait : cela tient à l’examen d’un contrat, et à la suite de l’exécution de ce contrat. Je ne m’explique point sur la question de savoir s’il faut ou non une indemnité, parce que dans l’état des choses, elle ne gît point en faits, elle est purement question de droit. Conséquemment après 3 jours de délibération on peut bien décréter le 40. Et voici, encore un motif plu3 pressant : à supposer qu’il y eût une résolution pour éconduire la demande des officiers seigneuriaux en indemnité, il en est une partie qui tient des provisions du roi, sur la présentation des seigneurs ; il en est une partie dont la finance a été versée daos le Trésor public. Eh bien ! sous prétexte de cet ajournement, vous les évinceriez, vous les reculeriez et vous leur feriez un tort irréparable. Je dis donc que vous ne pouvez pas prononcer l’ajournement. (L’Assemblée ferme la discussion.) Plusieurs membres : Aux voix ! Le renvoi à la prochaine législature ! MM. Chassey, Gaultier-Biauzat et BLau-juinais. On n’a pas dit : à la prochaine législature. Noix diverses : Si! si ! — - Non! nonl M. le Président. Je pose la question d’ajournement pur et simple. M. Régnier. Je demande la priorité pour l’ajournement à la prochaine législature. (L'Assemblée, consultée, accorde la priorité à cette dernière motion.) M. Merlin. Je demande la division et je demande à lire un projet de décret qui renferme l’amendement de M. Chassey. Plusieurs membres : L’ajournement ! M. Chassey. Je demande à être entendu pour la division. Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix ! (L’Assemblée, consultée, prononce l'ajournement à la prochaine législature du projet de décret présenté par le comité de judicature.) Plusieurs membres soutiennent que l’Assemblée n’a entendu décréter qu’un ajournement indéfini et non pas un ajournement jusqu’à la prochaine législature. M. le Président consulte l’Assemblée sur ce point défait. (L’Assemblée, consultée, confirme son vote d’ajournement à la prochaine législature.) M. Chassey. Je ne viens pas m’opposer à la décision de l'Assemblée; personne n’est plus que moi soumis à ses décrets ; mais je crois entrer dans ses vues en lui proposant une chose qui lui paraîtra, sans nul doute, invariablement juste et sur laquelle il est impossible de ne pas statuer en ce moment. Je ne parle pas des justices seigneuriales; mais il y a, au comité de liquidation et au bureau de judicature, de3 difficultés sur la liquidation de certains offices dont voici la nature : Il est des offices pour lesquels les officiers étaient tenus de prendre des provisions du roi sur la présentation du seigneur et, à ce sujet, ils payaient droit de marc d’or, tous les droits de mutations et autres; voilà, Messieurs, les officiers pour lesquels j’ai demandé la parole. Le jugement des difficultés soulevées à l’égard du mode de leur liquidation, avait été renvoyé après que vous auriez statué sur le sort des officiers des justices seigneuriales. Maintenant que vous venez de prononcer l’ajournement à la prochaine législature et que, par conséquent, la question reste toujours indécise, il va y avoir incertitude au comité de judicature. Je demande donc, Messieurs, que ces officiers qui ont versé leurs finances primitives au Trésor public, qui sont véritablement des officiers royaux, puisque les seigneurs n’avaient sur eux que le droit de présentation, et qu’ils étaient pourvus par le roi, ue ces officiers, dis-je, pour lesquel il s’élève es difficultés dans les bureaux de la liquidation, soient formellement exceptés de l’ajo-irnernent, qu’on statue sur leur sort, et que l’on dise s’ils seront payés par la nation ou par ceux qui ont reçu leurs finances. (Murmures.) Je dis, qu’on ne peut pas ajourner cet objet à la première législature, et je demande qu’il en soit fait un rapport particulier très incessamment. (Murmures.) Un membre : L’Assemblée décidera ces questions partiellement lorsqu’on lui fera le rapport de ces liquidations. Je demaude qu’on passe à l’ordre du jour. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) L’ordre du jour est un rapport des comités réunis des domaines , de la marine , des finances, d'agriculture et de commerce et d'aliénation, concernant V établissement d’une administration forestière. M. Pison du Galand, rapporteur. Messieurs, vous avez chargé vos comités réunis des domaines, de la marine, des finances, de l’aliénation des domaines nationaux et d’agriculture, de vous présenter le plan d’une nouvelle administration forestière. Par la loi du 11 septembre, vous nous [20 août 1791. J 5gQ l/Vssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. avez tracé les éléments de ce travail en déclarant qu’en matière d’eaux et forêts, la conservation et l’administration appartiendrait aux corps qui seraient établis à cet effet; qu’il serait fixé des règles pour la vente de ces domaines, et que les actions et contestations quelconques seraient portées aux tribunaux de districts. Ainsi, vous avez fixé les bases principales de notre travail, l’établissement d’administration forestière particulière, et la séparation de l’administration conservatoire et de la juridiction. Il n’est pas besoin de vous prouver la nécessité d’une administration particulière pour la conservation de 3 millions d’arpents debois, produisant annuellement 20 millions de revenu, revenu que les améliorations qui seront la suite du régime que vous allez établir porteront à 30 millions. Les forêts ci-devant domaniales ou ecclésiastiques doivent devenir ainsi entre les mains de la nation un objet important de revenu public, une ressource pour la marine infiniment précieuse, et qui aura l'avantage politique de rendre l’entretien de notre marine indépendant des nations étrangères. Une discussion approfondie a convaincu vos comités que, selon la mesure indiquée par vos décrets, un corps ou administration centrale devait êt>e la base de cette administration, tant pour surveiller les administrations secondaires et diriger d’une manière uniforme, dans tout le royaume, l’exécution des lois forestières, que pour combiner les intérêts respectifs de chaque département avec celui de la nation, soit en examinant les projets d’amélioration et en en soumettant les résultats au Corps législatif, 'soit en faisant connaître à celui-ci les sommes annuelles que l’on peut retirer du revenu des bois, et en préparant ses résolutions sur les dépenses nécessaires à la marche de cette administration. Trois classes de préposés employés dans les départements et les districts sous les ordres de cette administration centrale ont paru nécessaires pour assurer la bonne administration et la bonne exploitation des bois, savoir des gardes, des inspecteurs et des conservateurs. Les gardes seront chargés de la visite journalière des forêts, de prévenir et de constater les délits, et de reconnaître les délinquants dans l’étendue de leur garde. Les inspecteurs seront chargés d’une visite chaque mois dans l’étendue de leur inspection, pour s’assurer eux-mêmes de l’exactitude du service des gardes, reconnaître eux-mêmès les délits que les gardes auraient oublié de constater et les eu rendre responsables. Enfin, les conservateurs seront chargés d’une surveillance sur l’exactitude du service dans cette partie. La nécessité de ces soins, pour la conservation des bois, avait été reconnue dans la même administration, mais avec moins d étendue. Les ardes-marteaux étaient assujettis à des visites e nuit, les maîtres particuliers à des visites de six mois en six mois, et les grands maîtres à des visites continuelles; mais ces visites s’exécutaient avec inexactitude. Les maîtres avaient des ressorts trop étendus, trop inégaux pour en exiger rigoureusement l’assiduité de service. Le3 grands maîtres avaient la même excuse, et le gouvernement, souvent insouciant et toujours obéré, manquait de moyens pour donner du ressort à cette administration. Après les soins de la conservation, viennent ceux 'de la vente et adjudication. Les opérations préliminaires de balivage et de martelage désignent aux marchands et adjudicataires l’étendue de bois qui est eu vente, et les arbres qui, dans cette étendue, en font partie ou sont exceptés. A la vérité, une rectification ultérieure, sous le nom de récolement, assure que le marchand n’est pas sorti des limites qui lui étaient prescrites, qu’il n’a coupé que les arbres compris dans son adjudication et qu’il a respecté les autres. Dans l’ancien état, après qu’un arpenteur avait fait l’assiette, on traçait sur le local les limites de la vente; le garde-marteau, sous les yeux de la maîtrise, marquait les arbres qui devaient être vendus ou réservés après l’exploitation; la maîtrise venait reconnaître la coupe, et vérifiait l’état et l’identité des arbres conservés dans son enceinte. On a reproché à cette partie de l’ancienne administration de pécher tout à la fois, par une trop grande solennité et par défaut de surveillance. L’opération se faisait sous les yeux de la maîtrise collectivement; mais chaque officier ayant sa fonction particulière ; le procureur du roi celle de requérir, le greffier celte d’écrire, le choix et le triage des arbres roulait presque entièrement sur, le garde-marteau, et non seulement la propriété nationale tirait peu d’avantages du concours des préposés, mai3 la responsabilité, se divisant entre eux, son effet s’affaiblissait et devenait presque entièrement nul. C’étaient les mêmes officiers qui étaient ensuite chargés de faire le récolement, de vérifier leurs fautes, s’ils en avaient commis dans le choix des arbres ; de punir les malversations du marchand ou des adjudicataires, s’ils avaient refusé de les reconnaître. Le contrôle n’existait réellement que dans les visites des grands maîtres; mais la rareté de ces visites, la difficulté de les exiger, en rendaient l’effet, pour ainsi dire, illusoire. Vos comités ont trouvé, dans l’organisation qu’ils vous proposent, des moyens de* subvenir avantageusement aux opérations pour les marques particulières. Deux inspecteurs, chargés chacun de marteau particulier, seront tenus de faire le choix des baliveaux et des arbres réservés; l’un sera l’inspecteur nommé du district; son coopérateur sera choisi par le conservateur ou le préposé supérieur de l’arrondissement, chargé communément de la même fonction. Ces deux préposés s’éclaireront mutuellement, et leur responsabilité se multipliera sans s’affaiblir : étrangers l’un à l’autre, l’empreinte de deux marteaux est une sauvegarde plus sûre contre la fraude ou les falsifications; leur coïutelligence anticipée avec les marchands ou adjudicataires est à peu près impossible. Les conservateurs ou préposés supérieurs sont ensuite spécialement chargés, dans leur visite annuelle, de vérifier l’état de balivage et de martelage, et d’en rendre un compte spécial; et voilà déjà un premier contrôle de supériorité. Les récolements ou vérifications des coupes, auxquelles leurs autres occupations pourront bien ne pas leur permettre d’assister, seront faites au moins sous leurs ordres et en leur nom, r ar un inspecteur de leur dépendance qu’ils commettront à cet effet, et qui ne doit pas être le même que celui qui aura procédé au balivage et martelage ; et les conservateurs doivent constater personnellement l’état des coupes et exploitations, et en rendre compte; ils doivent vérifier tous les procès-verbaux de balivage, de martelage et de récolement. Ainsi, vos comités estimant avoir atteint le plus haut degré de perfection pour obvier aux fraudes ou au mauvais choix des arbres dans les ventes. Des tournées annuelles, faites par les 581 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 août 1791.] membres de l’administration, doivent éclairer encore le service local des départements, et prévenir jusqu’à la pensée de la connivence, par le danger continuel d’être surpris dans un moment inattendu. Les soins de l’amélioration doivent marcher de front avec ceux de la conservation et de la jouissance. Les conservateurs ou préposés supérieurs des départements sont chargés de rendre compte annuellement des améliorations dans les bois de leur arrondissement. Ils sont chargés de fournir des renseignements annuels sur le prix des bois de chauffage et de construction, afin d’éclairer l'administration centrale sur les marchés les plus avantageux; et les membres ou commissaires de cette administration sont chargés de vérilier , dans leurs tournées annuelles, les divers projets qui leur seront présentés. Nous n’avons pas cru que les corps administratifs dussent être chargés de cette administration. Ce n’est que par une surveillance extrêmement active qn’on peut maintenir l’exactitude du service; ce n’est que par des connaissances rurales, et par des notions locales acquises par l’ex-périerice, qu’on parvient à des améliorations, et ce n’est que par des opérations longues et pénibles qu’on prévient les abus et la fraude dans les coupes et dans les adjudications, ou qu'on en obtient la réparation. Nous avons pensé cependant que les conservateurs, en même temps qu’ils instruiraient l’administration centrale du résultat de leurs visites, devaient aussi en instruire les corps administratifs, et que ceux-ci devaient avoir la faculté de faire, quand ils le jugeraient convenable, des visites pour vérifier les comptes rendus par les conservateurs, et dénoncer les abus, soit à l’administration centrale, soit au roi, soit au Corps législatif. Telle est, Messieurs, l’idée sommaire du plan qui vous est présenté, et dont les détails se trouvent suffisamment développés dans le projet de décret que voici : L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : TITRE Ier. Des bois soumis au régime forestier. « Art. 1er. Les forêts et bois dépendant du ci-devant domaine de la couronne, et des ci-devant apanages; ceux ci-devant possédés par les bénéficiers, corps et communautés ecclésiastiques, séculiers et réguliers, et généralement tous les bois qui font ou pourront faire partie du domaine national, seront l’objet d’une administration particulière. « Art. 2. Les bois nationaux, ci-devant aliénés à titre de concession, engagement, usufruit, ou autre titre révocable, seront soumis à la même administration. « Art. 3. Les bois possédés en gruerie, grairie, segrairie, tiers et danger ou autrement, indivis entre lanation et les communautés, y seront pareillement soumis. « Art. 4. Les bois appartenant aux communautés d’habitants seront soumis à ladite administration, suivant ce qui sera déterminé. « Art. 5. 11 en sera de même des bois possédés par les maisons d’éducation et de charité, et par l’ordre de Malte. « Art. 6. Les bois appartenant aux particuliers cesseront d’y être soumis, et chaque propriétaire sera libre de les administrer et d’en disposer à l’avenir comme bon lui semblera. TITRE II. Organisation de V administration forestière. « Art. 1er. Il y aura, sous les ordres du roi, une administration centrale, sous le titre de conservation générale des forêts ; ses membres seront an nombre de 5, et auront le titre de commissaires de la conservation générale. « Art. 2. Les commissaires de la conservation n’agiront qu’en vertu d’une délibération prise en commun, à la pluralité des suffrages, et tiendront registre de leurs délibérations, qui seront signées parles membres présents à chaque séance. « Art. 3. Ils nommeront leur président annuellement, et le même membre ne pourra être réélu qu’aprèsunan d’intervalle. « Art. 4. Il y aura un secrétaire attaché à la conservation, lequel sera chargé de tenir les registres des délibérations, de signer les expéditions, et du dépôt des papiers, sous les précautions qui seront jugées convenables. « Art. 5. La conservation présentera à l’Assemblée nationale l’état des commis et employés nécessaires dans ses bureaux, pour ledit état être décrété ainsi qu’il conviendra. « Art. 6. Il y aura sous les ordres de la conservation générale un nombre de conservateurs, proportionné à l’étendue et à la distance relative des forêts, dans les départements où ils seront employés. « Art. 7. Il sera établi, sous chaque conservateur, un nombre suffisant d’inspecteurs, déterminé sur les mêmes bases. « Art. 8. Il sera établi, sous chaque inspecteur, le nombre de gardes nécessaires à la conservation des bois. « Art. 9. Le nombre et la répartition des préposés de la conservation générale seront fixés par un décret particulier, sauf les changements qui pourront être faits dans la suite, après avoir pris l’avis des commissaires. « Art. 10. En attendant le bornage général des bois et des coupes en dépendant, il y aura dans chaque division forestière un nombre suffisant d’arpenteurs attachés au service de la conservation. » Art. 11. Il y aura auprès des conservateurs une ou plusieurs places d’élèves, lesquels travailleront sous leurs ordres pour acquérir les connaissances propres àêlre admis aux emplois. Le nombre en sera déterminé par la conservation générale. « Art 12. Lorsqu’un élève aura 3 ans d’activité et l’âge qui sera ci-après fixé, il pourra lui être délivré une commission de suppléant, en vertu de laquelle il sera susceptible de remplir les fonctions des inspecteurs, lorsqu’il sera délégué à cet effet. « Art. 13. Les préposés de la régie d’enregistrement dans chaque district seront chargés du recouvrement des produits, j our en faire le versement, ainsique des autres deniers de leur recette. « Art. 14. Les corps administratifs rempliront le* fonctions de surveillance et autres, qui leur seront déléguées.