[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [7 juillet 1790.J 743 « Le relevé des distances de toutes les communautés, pris collectivement, prouve que la totalité est éloignée d’Embrun de dix-huit cents lieues, tandis que son éloignement de Gap n’est que de douze cent cinquante. « Sur cent quatre-vingt-douze communautés qui composent le département, cent-trente-huit sont plus près de Gap que d’Embrun, deux à unedis-tance égale, et cinquante et une seulement plus éloignées de la première de ces deux villes. « Ajoutez à cette différence la facilité des communications, qui doit être une des plus puissances considérations en faveur d’un établissement aussi utile au département que le siège épiscopal. « On ne peut disconvenir que les routes ouvertes sur Gap dans tous les sens ne soient praticables en tout temps et dans toutes les saisons, tandis que les routes qui conduisent à Embrun sont plus difficiles, principalement en hiver, où la neige apporte des obstacles quelquefois insurmontables. La communication des trois quarts du département avec cette ville est même souvent interrompue par la crue des eaux de la Durance et par divers torrents qui s’y jettent. «La ville de Gap est située dans une plaine agréable et jouit d’un climat très tempéré; celle d’Embrun, située sur un rocher, sous un climat plus rigoureux, est confinée presque au fond des Alpes et rapprochée des frontières du Piémont. « Non seulement aucun motif de bien public ne milite en faveur de cette dernière ville, mais elle n’a pas les caractères particuliers qu’exige un établissement épiscopal. Trois mille âmes forment toute sa population et il est difficile de concevoir quelle serait l’occupation de douze vicaires exerçant, sous leur évêque, les fonctions curiales dans une paroisse aussi bornée. « La population de Gap est de huit mille âmes. Cinq à six mille sont dans la ville; le reste est dispersé dans son territoire qui est très étendu et ne forme avec la ville qu’une seule et même paroisse. «En vain, la ville d’Embrun cherche à faire valoir, dans un mémoire remis au comité ecclésiastique, l’utilité de ses établissements. Il est vrai qu'elle possède un collège, qui jouissait de quelque réputation sous les jésuites ; mais depuis la suppression de cette société, cet établissement a déchu d’une manière bien frappante. La ville de Gap a aussi un collège bâti dans le couvent des Jacobins, en bon état, et régulièrement distribué ; des raisons particulières ont fait transférer les études dans une maison plus commode. Il faut espérer qu’une nouvelle et plus sage administration réformera les erreurs de l’ancienne. Quoi qu’il en soit, on n’a aucune prétention sur le collège d’Embrun. « Le séminaire de Gap est tel qu’on peut le désirer. Les bâtiments, augmentés depuis peu de temps, sont commodes et spacieux. Il est placé dans le voisinage du palais épiscopal et de l’église cathédrale, dont l’étendue est relative à la population de la ville. « On allègue l’importance et la valeurdes biens-fonds du chapitre d’Embrun ; mais ces biens-fonds sont rentrés dans les mains de la nation et vont passer dans celles des citoyens qui voudront les acquérir. « Les égards que demande la ville d’Embrun pour elle, Briançon et Mont-Dauphin, sous le rapport des villes frontières, mériteraient certainement une sérieuse attention, s’il s’agissait de quelque établissement militaire. Ges villes ont toujours une garnison dont la solde, consommée dans leur enceinte, supplée aux ressources locales qui peuvent leur manquer. « Toutes les communautés du Haut-Dauphiné, accoutumées à communiquer avec la ville de Gap pour le tribunal de l’élection, continueront facilement cette communication pour les besoins du culte; ce qui, sans doute, a moins d’inconvénient que de forcer le district de Serres, dont une grande partie est située dans un climat chaud, à faire quatorze, seize, dix-huit lieues pour se rendre à Embrun et dans un climat très froid, auand il faudra recourir au siège épiscopal. Le décret de l’Assemblée nationale qui le fixerait dans cette ville, serait regardé, par les deux tiers du département, comme un arrêt de condamnation qui les priverait de toute relation avec le chef de l’Eglise. Une disposition si contraire au bien général ne pourrait avoir lieu sans porter le préjudice le plus notable à la religion dont il est si important de conserver les précieux restes dans l’esprit des peuples. « On doit considérer enfin que le département des Hautes-Alpes étant un des plus faibles et des plus pauvres du royaume, il est à désirer qu’on lui conserve le siège épiscopal qui entraînera le moins de dépenses et qui, par ses rapports et sa situation, exigera d’un peuple agricole moins de sacrifices en déplacements, en frais et en perte de temps. « D’après cet exposé le district de Gap espère que l’Assemblée nationale, prenant en considération les puissants motifs qui appuient sa demande, conservera dans la ville de Gap le siège épiscopal que le bien de la religion et l’intérêt public réclament également. » Plusieurs membres réclament la parole. (On crie : aux voix ! aux voix !) M. le Président consulte l’Assemblée, qui décrète qu’Embrun sera le siège de l’évêché du département des Hautes-Alpes. (La suite de la délibération est ajournée à la séance de demain au matin.) M. le Président proclame la liste des membres qui composeront la députation qui doit assister, au nom de l’Assemblée, à la distribution des prix de l’Université, savoir: MM. Le Pelletier. Ghristin , Bourdon, curé. D’Estourmel. Regnard. Mathieu de Montmorency. Alexandre de Beauharnais. De Goulmiers, abbé d’Abbecourt. Gouttes, curé. Papin. Sentelz. Landreau, curé. De la Rochefoucauld, card. Moutier. Merceret, curé. La séance est levée à 10 heures du soir.