[États généraux.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. • [13 juin 1789. J 93 Bailliage de Gex. MM. du Clergé, nul ne s’est présenté. MM. de la Noblesse, nul ne s’est présenté. MM. des Communes, nul ne s’est présenté. Bailliage de Gien. MM. du Clergé, nul ne s’est présenté. MM. de la Noblesse, nul ne s’est présenté. MM. des Communes, se sont présentés, MM. Bazin, Janson et ont remis leurs pouvoirs. Sénéchaussée de Guéret et Haute-Marche. MM. du Clergé, nul ne s’est présenté. MM. de la Noblesse, nul ne s’est présenté. MM. des Communes, se sont présentés MM. de Châ-teau-Favier, Tournyol-Duclos, Bandy de la Chaux, Grelet de Beauregard, et ont remis leurs pouvoirs. Bailliage de HaguenauWissembourg. MM. du Clergé, nul ne s’est présenté. MM. de la Noblesse, nul ne s’est présenté. MM. des Communes, se sont présentés MM. de Fla-chslanden et Hell, et ont remis leurs pouvoirs. Sénéchaussée d’ Hennebond. MM. des Communes, se sont présentés MM. de la Ville-le-Roulx, Coroller Dumoustoir, Corentin-le-Floch, et ont remis leurs pouvoirs. A neufheures du soir, M. le Doyen a suspendu l’appel et conlinué la séance à demain neuf heures du matin. M. Camus, l’un des secrétaires, s’est chargé des pouvoirs remis sur le bureau. ÉTATS GÉNÉRAUX. Séance du mercredi 13 juin 1789. CLERGÉ. La Chambre du clergé délibère sur l’invitation qui lui a été faite par les communes de se réunir à elles pour la vérification des titres. Les débats sont longs et très-vifs, mais rien n’est décidé. NOBLESSE. La Chambre de la noblesse continue la délibération commencée sur l’invitation des communes pour la vérification des pouvoirs. M. le comte de Lally-Tollendal (1), dit : Messieurs, je ne trouve rien qui puisse justifier la déclaration qui nous a été faite hier par l’ordre du tiers. La raison qu’il en donne n’est vraisemblablement qu’un prétexte. S’il eût désiré sincèrement d’adopter le plan de conciliation proposé par le Roi, s’il n’y eût vu d’autres obstacles que les modifications que la majorité de la Chambre avait (1) Le discours de M. le comte de Lally-Tollendal n’a pas été inséré au Moniteur. cru devoir y apporter, il eût pu nous inviter à retirer ces modifications comme il nous invite à nous réunir à lui, pour vérifier en commun. Mais quel le qu’ait été son in tention, quelleque soit sa faute, qu’il prétendra sûrement justifier par les nôtres réelles ou supposées, il n’en est pas moins vrai que le parti auquel il vient de s’arrêter est un grand malheur. C’est pour le prévenir, que Messieurs du bailliage de Tours ont fait une motion qui méritait tout l’intérêt de la Chambre, et sur laquelle on n’a pas encore délibéré ; que moi j’en ai fait une qui n’était peut-être pas indigne de quelque attention et sur laquelle on n’a pas délibéré ; que M. le duc de Liancourt en a proposé une qu’il n’a pas encore pu faire entendre depuis dix jours; qu’enfin soixante-seize membres de cette Assemblée ont voté de toute la force de leur âme et de leur raison, pour l’acceptation pure et simple du plan proposé par le Roi. Ne dissimulons rien, Messieurs, et puisque nous sommes ici pour dire la vérité à la nation et au Roi, commençons par savoir l’entendre nous-mêmes. Les alarmes exprimées par plusieurs d’entre nous ont paru exagérées, chimériques, presque pusillanimes, La situation des Etats généraux, la nôtre, n’avaient rien, disait on qui dût inquiéter. La sécurité devait être entière. A Dieu ne plaise que je relève ces expressions avec amertume ! très-certainement nous étions tous de bonne foi. La même conviction, le même patriotisme portait les uns à communiquer des craintes qu’ils croyaient salutaires, les autres à partager une tranquillité qui leur paraissait fondée. Mais j’insiste sur cette circonstance, afin qu’elle nous serve de leçon pour l’avenir. Les alarmes les plus vives sont moins effrayantes que la sécurité de l’homme qui dort sur les bords d’un précipice. Enfin, l’événement a parlé. Le tiers nous invite à faire nos vérifications en commun avec lui, quoiqu’il sache que nous les avons faites séparément, ce qui annonce qu’il les regarde comme nulles. Le tiers arrête qmil se constituera en Assemblée active, que les députés qui ne seront pas dans la même salle que lui, seront regardés comme absents de l’Assemblée, qu’ils seront appelés et attendus un seul jour, ce qui est se déclarer par le fait en Assemblée nationale, quoique l’expression n’y soit pas , c’est de toutes les prétentions la moins modérée, ce sera, si l’on veut, la moins juste ; mais enfin cette prétention est formée , elle est solennellement proclamée. Je ne vois ici que deux partis à prendre. Ou rester inébranlables dans la résolution que la Chambre a prise, et qu’elle a fait déclarer à l’ordre du clergé, à celui du tiers et aux commissaires du Roi ; mais alors point de conciliation à espérer. Ou sacrifier cette résolution au besoin de la paix, au désir d’écarter tous les malheurs qu’entraînerait une scission, et il y aura encore espoir de conciliation. Que le premier cri de la noblesse française ait été celui de la fermeté, je le conçois ; on lui a dit qu’elle était menacée, on lui a parlé de dangers. Mais la patrie si souvent sauvée par votre courage ne redoute aujourd’hui que ce même courage, ou plutôt elle vous en demande un plus sublime encore. C'est, Messieurs, de vous vaincre vous-mêmes pour vaincre les autres ; c’est, dans l’instant même où vous êtes offensés, de parler de paix et de conciliation et ce sefa la première fois peut-être qu’il en aura été parlé dans les Etats généraux avec quel- 94 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {13 juin 1789.] [États généraux.] que réalité, avec quelque efficacité-, c’est enfin de vous reporter au plan proposé par le Roi, et de n’être pas arrêtés par l’idée de rétracter vôtre résolution à cet égard. Ou le tiers acceptera, et alors les Etats généraux existeront; les ordres seront formés; ils se seront reconnus ; séparés comme réunis, il existera tôt ou tard entre eux un moyen de correspondance et de concert. Ou le tiers n’acceptera pas et alors quelle force, quel avantage acquerra la noblesse par sa conduite généreuse, par ses sacrifices pour la paix, par sa réunion avec le clergé qui a déjà adopté le plan conciliatoire et avec le Roi qui l’a proposé! Mais, Messieurs, il faut que notre sacrifice soit aussi noble, aussi patriotique, aussi entier qu’il peut l’être. J’insiste donc pour que le plan du Roi soit accepté purementet simplement, sans aucune modification, sans aucun préambule, sans aucune autre déclaration que celle par laquelle vous l’accepterez. C’est le seul moyen de ne laisser aucun prétexte au refus de l’offre que nous allons faire, c’est le seul moyen de fermer la bouche aux détracteurs de la noblesse. Ils n’ont pas craint de nous reprocher un acte équivoque, obscur, qui annulait, disaient-ils, le plan que nous.prétendions accepter, qui tour à tour était une instruction, ou un arrêté, suivant le besoin que l’on avait de l’une ou de l’autre expression ; que ne diront-ils pas sur l’arrêté proposé par MM. les commissaires, plus long, plus sévère aujourd’hui qu’il ne l’était hier, et hier il l’a paru trop ! Combien de dénégations, de discussions, ne se permettront-ils pas d’élever sur cet arrêté ! Imposons silence à la calomnie, rétractons brièvement, franchement, loyalement, l’instruction donnée à nos commissaires sur le plan du Roi, déclarons solennellement que nous acceptons ce plan dans son entier, purement et simplement, et rappelons-nous ce mot d’un grand Empereur qui rétractait un de ses décrets : Ne craignons pas d'être contredits, ne craignons pas de nous contredire nous-mêmes, toutes les fois qu'il est question de maintenir la justice. A la majorité de 173 voix contre 79, elle prend l’arrêté suivant. La proposition du tiers-état nécessite, de la part de l’ordre de la noblesse , le développement des principes qui l’ont dirigé. Il doit cet hommage à la nation ; il doit cet égard à l’ordre du tiers-état. Les députés de la noblesse, réunis dans leur Chambre, avant d’avoir vérifié leurs pouvoirs, ont dû suivre, pour cette vérification, les usages des précédents Etats ; ils les ont suivis. Ces usages étaient une conséquence nécessaire de la loi constitutive de la séparation des ordres et de leur mutuelle indépendance ; loi que la noblesse a toujours considérée comme conservatrice du trône, de la liberté et de la propriété des citoyens. L’ordre du tiers-état n’a point adopté la même marche. Lorsqu’il a désiré que la vérification des pouvoirs fût convertie en une vérification commune, l’ordre de la noblesse a dû exposer ses raisons pour y procéder séparément ; il les a exposées par l’organe de ses commissaires conciliateurs, en les chargeant d’annoncer préalablement que la presque totalité des cahiers de ses députés les autorise à la renonciation des privilèges pécuniaires. H a dû croire que ce préalable terminerait à l’instant plusieurs difficultés, et faciliterait le moyen de mettre en activité les Etats généraux. Dans l'espoir d’une conciliation, l’ordre de la noblesse a encore proposé que, lorsqu’on s’occuperait de l’organisation des Etats généraux, on examinerait les inconvénients ou les avantages d’une vérification séparée ou commune, afin qu’il y fût statué pour l’avenir. Enfin, le Roi a fait proposer un plan de conciliation. Sa Majesté demande que ce plan soit accepté ou tout autre. L’ordre de la noblesse délibère à l’instant qu’tl accepte le plan proposé par les commissaires du Roi ; et, d’après leur vœu, réunit au fonds de la proposition les précautions qui lui paraissent convenables ; en conséquence, il charge ses commissaires concilia teurs de rappeler à la conférence ce que la noblesse avait arrêté précédemment, qu’elle vérifierait ses pouvoirs dans son sein, et prononcerait sur les contestations qui surviendraient lorsqu’elles n’intéresseraient que ses députés parliculiers, et qu’elle en donnerait une connaissance officielle aux autres ordres. Quant aux autres difficultés survenues ou à survenir sur les députations entières pendant la présente tenue des Etats généraux seulement, l'ordre de la noblesse a proposé que chaque ordre chargeât des commissaires, conformément aux désirs du Roi, de les discuter avec ceux des autres ordres, pour qu*3, sur leur rapport, il y fût statué d’une manière uniforme, s’il était possible, dans les trois Chambres séparées; et que, dans le cas où on ne pourrait y parvenir, le Roi serait supplié d’être leur arbitre. Maintenant la nation peut juger si elle doit imputer à la noblesse l’inquiétante inertie des Etais généraux, dans le moment où la France entière attend le rétablissement de la constitution, où le Roi et les créanciers de l’Etat comptent sur des sacrifices. L’ordre de la noblesse croit n’avoir à répondre sur la proposition du tiers-état qu’en l’invitant à ne pas rejeter l’arbitrage du Roi pour les pouvoirs non contestés et non jugés, et à ne pas se refuser plus longtemps au moyen de conciliation qu’a proposé Sa Majesté, et dont l’adoption doit accélérer la marche des trois ordres vers les grands objets qui intéressent essentiellement la nation. L’ordre de la noblesse, fidèle à ses commettants, déclare qu’il va s’en occuper sans relâche. La séance est levée. COMMUNES. Séance du matin (l). M. Bailly, doyen, ouvre la séance. M. Camus fait lecture du procès-verbal de la séance du jour d’hier. C’est le premier qui ait été faite. M. le Doyen dit que pour répondre aux intentions de l’Assemblée, il avait eu l’honneur d’adresser à Sa Majesté une copie de la délibération du 10 de ce mois, et de l’adresse qui devait lui être présentée par une députation en exécution de cette délibération, pour que Sa Majesté en eût connaissance ce matin, dans le cas où elle ne pourrait pas recevoir la députation. (1) Le Moniteur ne donne qu’une courte analyse de cette séance.