76 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 avril 1791.J avec la même franchise, avec tout le désintéressement de quelqu’un qui n’a rien, qui ne veut rien de la marine, qui et depuis plus de dix ans en est séparé. En attendant cependant, soyez sans alarmes, jamais la marine ne fut en meilleur état, ses vaisseaux mieux entretenus, ses magasins plus soignés, ses officiers plus instruiis et plus exercés, son administration plus éclairée et plus capable : dans cet état des choses on peut heureusement se passer de l’intervention prochaine d’un comité de marine, et des idées exagérées d’hommes à prétentions. On pourrait sans danger renvoyer à une autre législature, pour donner le temps aux passions de se calmer; c’est, je le crois, ce qu’il y aurait de mieux à faire. Un seul objet manque et flétrit le reste, je parle de l’indiscipline et de l’insubordination des équipages. Que le retour à l’ordre soit votre ouvrage, et alors, Messieurs, il ne vous restera qu’à désirer que toutes les parties du service public soient disposées comme la marine. Il est un article déjà décrété lequel il me semble que vous pouvez rappeler ici, parce qu’il détruit tout sujet légitime de plainte; c’est l’aptitude de toutes les classes de citoyens à être admis comme officiers sur les vaisseaux de l’Etat. Mais, pour fournir au ministre de la marine quelques données certaines pour la base du travail que vous lui demanderiez, je vous propose de décréter le petit nombre des articles suivants : « Art. 1er. L’Etat entretiendra une marine exclusivement militaire. « Art. 2. Il sera établi des écoles pour l’instruction et la discipline de ceux qui seront admis à prétendre aux places d’officiers au service de la marine de l’Etat. « Art. 3. Toutes les classes des citoyens auront un droit égal à être admis aux écoles de la marine de l’Etat. « Art. 4. Le ministre de la marine sera tenu de rédiger sur ces principes un plan d’organisation d’une marine militaire pour être rapporté et discuté à la première législature. » Plusieurs membres à droite demandent l’impression du discours de M. Loynes de La Goudray. M. I�oynes de La Condray. La question préa-M. Moreau de Saint-Méry. L’auteur demande lui-même la question préalable. Je demande à mon tour que le discours de l’antipréopinant soit imprimé. (L’Assemblée, consultée, décrète l’impression des discours de M. Louis Monneron et de M. Loynes de La Goudray.) M. le Président. D’après le recensement du scrutin pour la nomination des deux commissaires qui doivent installer le tribunal de cassation, Messieurs FréteauetGoupil-Prét'eln ont réuni la pluralité des suffrages. En conséquence je les proclame commissaires pour installer le tribunal de cassation. M. le Président donne lecture de deux lettres : L’une des ouvriers des travaux publics de la section de l’ile Saint-Louis, qui invitent MM. les députés à l'Assemblée nationale à assister au service qu’ils font célébrer samedi 16 avril 1791, à 9 heures précises, en l’église de Sainl-Louis-en-l’Ue, pour M. Honoré Riquetti de Mirabeau. L’autre de MM. Dutremblay, Devaiues, Condorcet, Lavoisier, Rouillé Delétang, commissaires de la trésorerie. Cette lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Chargés de garder le dépôt des contributions que la volonté du peuple consacre au maintien de ses droits, nous veillerons sur. ce trésor de la liberté, qui ne sera plus employé que pour la conserver ou pour la défendre. « Exécuteurs fidèles des décrets de l’Assemblée nationale, eux seuls régleront notre conduite. La limite qu’ils nous ont marquée nous sera toujours sacrée, et nous jurons entre vos mains de n’oublier jamais que ces dons du peuple qui, déposés dans la caisse commune, n’ont pas cessé de lui appartenir, ne doivent être dépensés que pour lui et par le vœu de ses représentants, seuls juges de ses besoins, seulsinterprètesdesavolonté. « Nous ne perdrons jamais de vue que la certitude du bon ordre dans le Trésor national est le seul moyen de faire supporter à des hommes les privations que les contributions leur imposent, et de perpétuer cette confiance dans la foi publique, que la courageuse justice de l’Assemblée nationale a su créer au milieu d’une révolution, et maintenir dans le sein des orages. « Nous regarderons comme un encouragement honorable la surveillance habituelle et immédiate qu’elle exercera sur nous. Nous mettrons notre gloire à nous montrer à elle occupés sans cesse d’éloigner cette obscurilé, cette complication qui amènent le désordre, en donnant les moyens de le dissimuler; à nous pénétrer de cette maxime, qu'il n'y a d'utile que ce qui est juste , et d'honnête que ce qui peut être public. « L’embarras dans les finances est pour un peuple libre le premier pas vers la corruption, ui n’est qu’un esclavage déguisé. Le monstre e l’inégalité se nourrit de ces richesses égarées qu’entassent ses mains avides. C’est avec l’or des nations que la perfidie forge leurs fers, que la tyrannie achète ses armes; et les arides détails de nos fonctions s’ennobliront à nos yeux, par l’idée que les gardiens du Trésor public sont aussi les soldats de la liberté. « Nous demandons à l’Assemblée, d’après ses propres décrets, de donner à l’établissement destiné pour la réunion de toutes les recettes et de toutes les dépenses, le nom de trésorerie nationale. Il rappellerait à tous les citoyens le fondement sacré sur lequel doit reposer leur confiance. « Nous vous prions, Monsieur le Président, de vouloir bien présenter à l’Assemblée nationale l’expression de notre fidélité et de nos hommages. « Nous sommes avec respect, Monsieur le Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs. Les commissaires de la trésorerie , Dutremblay, Devaines, Condorcet, Rouillé Delétang, Lavoisier. M. deCrillon propose de statuer immédiatement sur la demande exprimée dans cette lettre et présente le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que l’établissement formé par un de ses précédents décrets pour la réunion de toutes les recettes et de toutes les dépenses, portera, à l’avenir, le nom de Trésorerie nationale. » (Ce décret est adopté.)