jCt’UTenlîon nationale. J AHC1I1VËS PARLEMENTAIRES. { 3 nivôse an lf ( 23 décembre 1-793 208 autre expédition au ministre de la justice, qui en rendra compte à la Convention nationale (1). » Suit la lettre de l’accusateur public au tribunal criminel du département du Nord qui a motivé le décret ci-dessus (2). L’accusateur public au tribunal criminel du département du Nord, aux Président et membres de la Convention nationale, à Paris. « Législateurs, « Aucun de vos décrets n’a érigé en tribunaux révolutionnaires les tribunaux criminels éta¬ blis pour juger les délits ordinaires, d’après le mode indiqué par les lois sur la police de sûreté, et par celle de la justice criminelle et de l’insti¬ tution des jurés. Ces tribunaux sont cepen¬ dant autorisés de juger, d’après le mode indi¬ qué par la loi du 19 mars dernier, les délits repris en ladite loi et en celles des 7 et 9 avril suivants, ils ont encore une attribution parti¬ culière relativement aux émigrés, soit qu’ils leur soient renvoyés par les Commissions mili¬ taires dans les cas déterminés par la loi soit par les départements, quand ils ont jugé le fait d’émigration et qu’il n’est point accompagné de circonstances qui le rendent de la compétence exclusive desdites Commissions militaires. Ces attributions extraordinaires à celles de notre institution primitive donnent lieu aujourd’hui à une foule de réquisitions qui nous embar¬ rassent. D’abord, votre loi du 11 août 1792, sur la police de sûreté générale, est exécutée par les corps administratifs avec une insouciance déplorable; 2° les municipalités ne suivent point la filière de l’autorité de l’Administration de district; celle-ci passe par-dessus celle de l’Administration du département, et celle-ci enfin non seulement ne s’aperçoit point de la violation de la marche tracée par la loi, mais ne distingue point, dans les délits contre-révolution¬ naires, ceux que les tribunaux criminels peuvent juger d’après les lots précitées, mais nous font à cet égard des réquisitions d’après lesquelles il est aisé de voir qu’ils confondent ce qui peut être de la compétence du tribunal criminel d’avec ce qui est de la compétence exclusive du tribunal révolutionnaire établi à Paris. Ce n’est pas tout, des comités de surveillance et autres m’adressent directement des instruc¬ tions de procédures contre-révolutionnaires, et prétendent qu’il est inutile qu’ils les fassent passer par la filière d’aucune autorité adminis¬ trative et sans savoir si le délit qu’ils me trans¬ mettent est de la compétence de ce tribunal, ou de celle du tribunal révolutionnaire à Paris, ils me requièrent de les faire juger. « Bévolutionnairement, si ces mêmes comi¬ tés instruisent d’un délit qui ne puisse être jugé que par le juré de jugement, ils le transmettent de piano au directeur du juré près le tribunal du district, sans aucune intervention, sans aucune instruction de la part du juge de paix à qui il me paraît qu’ils devraient renvoyer ces sortes de délits, pour que l’instruction s’en fasse (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 62. (2) Archives nationales, carton Dm 183, dossier Douai. d’après les formes préparatoires à un jugement ordinaire par jurés. Ainsi donc, législateurs, je considère en ce moment ces délits sous deux rapports; ou, comme rentrant dans le cercle de l’ autorité de la loi de la police de sûreté ordi¬ naire, ou comme ayant trait à la police de sûreté générale, d’après la loi du 11 août 1792. Quant aux premiers, je ne vois nulle part que les comi¬ tés de surveillance et autres puissent communi¬ quer directement avec les directeurs du juré, et il me semble qu’ils doivent renvoyer ces pro¬ cédures à l’instruction du juge de paix qui, en observant ce que prescrit la loi sur la police de sûreté ordinaire, doit les transmettre, s’il y a lieu à mandat d’arrêt, au directeur du juré près le tribunal du district. « Quant aux seconds, c’est-à-dire à ceux qui .sont dans le cas d’être jugés par le tribunal révolutionnaire à Paris, ou par le tribunal cri¬ minel d’après les formes indiquées par la loi du 28 mars dernier, concernant les émigrés, ou par celle du 19 mars concernant les cas y expri¬ més, ainsi que dans celles des 7 et 9 avril, je crois que les comités doivent renvoyer leurs opéra¬ tions aux autorités indiquées par ladite loi du 11 août 1791, c’est-à-dire à la municipalité, qui doit suivre à son tour la marche indiquée par ladite loi. J’estime au moins que si le comité de surveillance, qui est une autorité constituée, peut passer la filière de l’Administration du district, au moins elle doit ne pas sauter par¬ dessus celle de l’Administration du département, qui connaît pour quels objets elle doit nous requérir de nous transporter dans les lieux qu’elle nous désigne pour juger d’après le mode indiqué par la loi du 19 mars dernier. Cette raison me paraît d’autant plus convaincante, que d’après la lettre et l’esprit de cette loi, la seule Administration du département peut nous faire une semblable réquisition pour les cas exprimés dans les lois, et qu’à l’exception des réquisitions des représentants du peuple inves¬ tis de pouvoirs illimités par la Convention natio¬ nale, ü ne paraît pas qu’aucune autre autorité puisse nous en faire; qu’il paraît au contraire que sans qu’il y ait une loi formelle, c’est mettre l’ordre public en subversion, c’est confondre tous les pouvoirs, c’est tendre à l’anarchie que de s’écarter de la marche sagement tracée pâl¬ ies décrets, et substituer un arbitraire qui jjeut donner lieu à mille abus, à des lois sages faites pour les prévenir. « Ces réflexions, législateurs, naissent de deux exemples que me fournit le comité de sur¬ veillance de la ville de Lille. « L’un consiste dans l’envoi qu’il a fait direc¬ tement au directeur du juré près le tribunal du district d’un délit d’échange illicite d’assignats contre du numéraire, délit dont il aurait dû renvoyer la connaissance à un juge de paix en lui adressant ses opérations, pour servir de notes et de renseignements à ce juge; l’autre, en m’adressant directement, pour un délit contre-révolutionnaire, de la compétence exclu¬ sive du tribunal révolutionnaire à Paris la réqui¬ sition dont je joins l’original. « Législateurs, les circonstances du moment sont aussi difficiles qu’impérieuses; les lois de circonstance laissent beaucoup de vide; je n’ai dans ma place aucun aide; la population de ce département est immense, il est aujourd’hui le théâtre de la guerre et vous ne pouvez vous dissimuler qu’il contient beaucoup d’ennemis plus ou moins cachés de notre révolution. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 3 nivôse an II OQCÏ . (23 décembre 1793 « Les délits de toute espèce y sont donc très multipliés, et leur poursuite est nécessairement assujettie à des formes, à des règles que je ne peux, ni ne dois violer. Je veux continuer de faire mon devoir avec zèle, avec courage. Mais pour éviter Scylla, je voudrais ne point tomber dans Cbarybde. Je prends donc la confiance de vous demander si dans les délits qui ne sont pas contre-révolutionnaires, l’instruction que peut en faire un corps administratif quelconque, celle que peut en faire un comité quelconque, même celui de surveillance, peuvent dispenser ces administration et comités d’adresser leurs opérations au juge de paix, et enfin s’ils peuvent les adresser de piano au directeur du juré près le tribunal du district. « Je demande, secondement, si, relativement aux délits qui intéressent la sûreté générale de la République, et qui doivent être jugés par le tribunal révolutionnaire, ou par le tribunal cri¬ minel d’après les lois précitées, ce tribunal doit déférer à d’autre réquisition de les juger et de se déplacer à cet effet, qu’à celle du departement qui, selon moi, doit recevoir ces procédures par la filière des deux corps administratifs qui lui sont subordonnés, ou directement par les comités de surveillance qui sont une autorité constituée. « Au surplus, dès que l’Administration du département me les transmet, je n’ai aucune observation à faire, sauf celles qui peuvent résulter de l’incompétence du tribunal relative¬ ment aux objets transmis. « L’accusateur public au tribunal criminel du département du Nord, « Ranson. » « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de législation [Merlin (de Douai), rapporteur (1)], sur la pétition du ci¬ toyen Picart, notaire public au département de Seine-et-Mame, résidant à Lizy-sur-Ourcq, ci-devant membre du directoire du district de Meaux, relative aux ordres donnés par l’accusa¬ teur public du tribunal criminel du département de Seine-et-Mame, pour le faire transférer dans la maison de justice de ce département en exé¬ cution de la loi du 7 frimaire dernier, à l’effet d’y être jugé comme prévenu de malversation dans les biens nationaux, nonobstant une décla¬ ration du juré d’accusation du district de Meaux, du 17 du même mois, portant qu’il n’y a pas lieu à accusation contre lui, non plus que contre les citoyens Lhoste, Godart, Marest, Aucher, Le-sucier, Martin et Scoquart; « Considérant que le juré d’accusation du dis¬ trict de Meaux a donné la déclaration ci-dessus mentionnée, avant la publication de la loi du 7 frimaire dernier, et que cette loi n’a dérogé en rien à la disposition de la loi du 16 septem¬ bre 1791, d’après laquelle un prévenu déchargé par un juré d’accusation, ne peut être repris et poursuivi de nouveau, que lorsqu’il survient con¬ tre lui de nouvelles charges; qu’ainsi il n’est besoin d’aucune mesure particulière pour em¬ pêcher de nouvelles poursuites, qui ne peuvent légitimement avoir lieu hors du cas qui vient d’être rappelé ; « Déclare qu’il n’y a pas lieu à délibérer. « Le présent décret ne sera pas imprimé. « Le ministre de la justice en adressera une expédition manuscrite au tribunal criminel du département de Seine-et-Marne (1). » Suit la pétition du citoyen Picart (2). Pétition du citoyen Picart, notaire public au département de Seine-et-Marne, résidant à Lizy-sur-Ourcq, aux citoyens représentants du peuple à la Convention nationale. « Citoyens, « En 1790, l’exposant fut élu membre du directoire du district de Meaux, département de Seine-et-Marne. Huit mois après qu’il eût été remplacé par les administrateurs de 1792, c’est-à-dire au mois d’octobre de cette année, les citoyens Moussin et Lucy furent commis pour faire la vente du mobilier de la ci-devant abbaye de Chelles. Il paraît que ces commissaires, au lieu de se borner à la vente du mobilier, ven¬ dirent différents objets dépendant de l’im¬ meuble, comme portes, fenêtres, parquets. Ces dégradations occasionnées sans doute par l’impéritie des commissaires étaient étrangères aux administrateurs de 1790 et ne pouvaient pas être attribuées à ceux de 1792. * « Cependant, le 6 octobre dernier (vieux style), l’exposant et les autres dénommés au procès-verbal ci-joint, ainsi que Lucy, l’un des commissaires, ont été mis en arrestation par mandat du comité révolutionnaire de Meaux, de l’ordre injonctif du citoyen Duportail, délé¬ gué du citoyen Dubouchet dans le département de Seine-et-Marne, comme prévenus d’être fau¬ teurs, complices et adhérents des délits de dila¬ pidations du mobilier national et dégradations des propriétés immobilières de même nature et notamment de la riche maison ci-devant abbaye de Chelles. « Le 17 frimaire, après deux mois d’incarcé¬ ration, le juré d’accusation a déchargé tous les détenus, à l’exception des commissaires Lucy et Moussin. « D’après la loi sur le jury criminel, cette décharge prononcée par le jury d’accusation devait être définitive. Cependant l’accusateur public du département de Seine-et-Marne a écrit au commissaire national de Meaux de faire transférer à Melun même les prévenus acquittés par le jury d’accusation pour être jugés par le tribunal criminel nonobstant la décision du jury d’accusation, prétendant que d’après la loi du 7 frimaire qui n’était même pas promulguée à Meaux lors du jury du 17 fri¬ maire, ce jury ne devait pas prononcer et que les prévenus devaient être traduits directement devant le tribunal criminel pour être jugés con¬ formément à la loi du 17 frimaire. (1) D’après la minute du document qui se trouve aux Archives nationales, carton C 286, dossier 849. 1*0 SÉRIE. T. LXXXII. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 63. (2) Archives nationales, carton Dm 276, dossier Lizy-sur-Ourcq. 14