[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 juillet 1790.] 7jQ l’Aisne, se trouvent Soissons et Laon. Le comité s’est décidé en faveur de Soissons. M. de Yismes. je réclame, pour la conservation de l’évêché deLaon,les principes mêmes du comité. Laon est au centre du département; il a eu, pour être le chef-lieu d’administration, le vœu des deux tiers des électeurs de ce département. Son diocèse se trouve en entier dans le département de l’Aisne, qui ne comprend au contraire qu’une partie de celui de Soissons; on ne doit point sacrifier à de petites convenances particulières l’intérêt général des administrés, qui, pour la plupart, ont déjà leurs habitudes religieuses dirigées vers Laon. La position même de cette ville veut que l’évêché soit dans le même lieu que l’administration, pour que l’évêque et son conseil soient perpétuellement sous la surveillance des administrateurs. (L’avis du comité est adopté.) M. Boislandry. Il n’y a point d’évêché dans le département du Haut-Rhin. Le comité a choisi Uolmar pour le siège de l’évêché. M. Guittard se plaint de ce que cette ville a tous les avantages, et réclame en faveur de Quie-ville. L’avis du comité est adopté. M. Boislandry. Les villes de Vesoul, Gray et Luxeuii, dans le département de la Saône, sollicitent également le siège de l’évêché. Le comité s’est décidé en faveur de Vesoul. M. Muguet de liant hou réclame pour Gray. Après avoir entendu quelques observations pour et contre, l’avis du comité est adopté. M. Boislandry. Les trois évêchés de Dol, Saint-Malo et Rennes, se trouvent dans le même département. Le comité s’est déterminé en faveur de cette dernière ville. (L’avis du comité est adopté.) M. Boislandry. Le comité a été d’avis d’éla-hlir à Saint-Rrieuc l’évêché du département des Côtes-du-Nord. (Cet avis est adopté.) M. Boislandry. Dans le département du Finistère se trouvent les villes de Saint-Pol-de-Léon et Quimper; ni l’une ni l’autre ne sont centrales; Saint-Pol cependant approche davantage du centre; mais le comité a cru devoir se décider en faveur de Quimper, à cause de sa population. M. Prudhomme réclame pour Saint-Pol-de-Léon. L’avis du comité est adopté. M. Boislandry. Château-Gontier, Mayenne et Laval, dans le département de la Mayenne, sollicitent également le siège épiscopal. La ville de Laval, plus centrale et plus pçupiée, a été préférée par le comité. M. Manpetit réclame pour Mayenne. M. Allard pour Château-Gontier. L’avis du comité est adopté. M. Boislandry. Plusieurs villes prétendent au siège épiscopal du département de Seine-et-Qise; la ville de Pontoise a envoyé une députation extraordinaire pour exposer ses motifs. Sa population est un de ses moyens principaux : mais elle ne peut être comparée à celle de la ville de Versailles, qui, malgré les émigrations, est portée à plus de 52,000 âmes; c’est pourquoi le comité a préféré cette ville. M. Massien, curé de Sergy, observe que, entre autres considérations, l’Assemblée nationale ne veut pas que les évêques soient courtisans, et que celui de Versailles le deviendrait infailliblement ; il demande la préfence pour la ville de Pontoise. L’avis du comité est adopté. M. Boislandry. Il y a deux évêchés dans le département de l’Yonne, l’un à Sens et l’autre à Auxerre. Auxerre est le chef-lieu de département; elle réclame, à ce titre, l’évêché. Sens représente que, quoique moins bien située, ses communications avec le reste du département sont faciles; elle s’autorise surtout d’une convention faite en présence du comité de Constitution, lors de la détermination des chefs-lieux de département ; par cette convention, un établissement particulier a été promis à la ville de Sens. Le comité propose de donner l’évêché à cette ville. M. Bouchotte réclame en faveur d’Auxerre. M. Anne-Etienne-Marie de La Forge. Auxerre est au centre du département. Sens est à l’extrémité. L’administration du département a manifesté son vœu en faveur d’Auxerre. Les dispositions de l’Assemblée ne me permettent pas de m’étendre; je m’en réfère donc à ces deux considérations. On ne peut y opposer qu’une prétendue promesse faite par le comité de Constitution de procurer à la ville de Sens une indemnité quelconque. Quoi qu’il en soit de cette promesse, on ne doit pas s’y arrêter, parce qu’un comité n’a pas le droit d’engager l’Assemblée ; s’il en était autrement, il serait inutile de se réunir en assemblée, et les comités seraient les seuls législateurs. M. Jaillant présente des considérations eu faveur de Sens. L’Assemblée décrète l’avis du comité. L'ordre du jour de deux heures étant arrivé, on demande que la discussion soit suspendue et renvoyée à une séance extraordinaire qui aurait lieu demain au soir. Cette proposition est adoptée. M. de La Touche monte à la tribune. {Un grand silence s’établit.) M. de La Touche. Messieurs, je vais parler au nom de M. Louis-Joseph-Philippe de France, duc d’Orléans, et la lettre que je vais lire sera déposée sur le bureau avec d’autres pièces (1). « Londres, le 3 juillet 1790. « Je vous prie, Monsieur, de mettre le plus tôt possible et en mon nom, sous les yeux de l’Assemblée nationale, les faits dont l’exposé est ci-dessous. « Le 25 du mois dernier j’ai eu l’honneur d’écrire au roi, pour prévenir Sa Majesté que je me (1) La lettre du duc d’Orléans étant tronquée au Moniteur, nous en empruntons le texte au journal Le Point du Jour , tome XI, p. 405. 720 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [6 juillet 4790.] disposais à me rendre incessamment à Paris : ma lettre a dû arriver à M. de Montmorin le 29 du même mois. J’avais depuis pris en conséquence congé du roi d’Angleterre et fixé mon départ à aujourd'hui, 3 juillet, après-midi ; mais ce matin, M. l’ambassadeur de France est venu chez moi et m’a présenté un monsieur qu’il m’a dit être M. de Boin ville, aide de camp de M. de Lafayette, envoyé de Paris par son général, le mardi 29, pour une mission auprès de moi. Alors ce M. de Boin-ville m’a dit en présence de M. l’ambassadeur que M. de Lafayette me conjurait de ne pas me rendre à Paris, et parmi plusieurs motifs qui n’auraient pu fixer mon attention, il m’en a présenté un plus important, celui des troubles qu’exciteraient des gens malintentionnés qui ne manqueraient pas de se servir de mon nom. Le résumé de ce message et de cette conversation est certifié par M. l’ambassadeur de France, dans un écrit dont j’ai l’original entre les mains et dont copie signée de moi est ci-jointe; sans doute, je n’ai pas dû compromettre légèrement la tranquillité publique, et j’ai pris le parti de suspendre toute démarche ultérieure ; mais ce n’a pu être que dans l’espoir que l’Assemblée nationale voudrait bien, encetteocca-sion, régler la conduite que j’ai à tenir, et voici les raisons sur lesquelles j’appuie cette demande. « A l’époque de mon départ pour l'Angleterre, ce fut M. de Lafayette qui me fit le premier, au nom du roi, la proposition de me charger de la mission que Sa Majesté désirait me confier. Le récit de la conversation qu’il eut avec moi à ce sujet est consigné dans un exposé de ma conduite, que je me proposais de rendre publique, seulement après mon retour à Paris, mais que d’après ce nouvel incident je prends le parti de publier aussitôt, comme aussi d’en faire déposer l’original sur le bureau de l’Assemblée ( Voy . ce document annexé à la séance de ce jour). « On y verra que parmi les motifs que M. de Lafayette me présenta pour accepter cette mission, un des principaux fut, dis-je, que mon départ ôtant tout prétexte aux malintentionnés de se servir de mon nom pour exciter des mouvements tumultueux dans Paris, lui, M. de Lafayette, en aurait plus de facilité pour maintenir la tranquillité de la capitale ; et cette considération fut une de celles qui me détermina. Cependant j’ai accepté cette mission et la capitale n’a pas été tranquille ; et si, en effet, les fauteurs de ces tumultes n’ont pas pu se servir de mon nom pour les exciter, ils n’ont pourtant pas craint d’en abuser dans vingt libelles, pour tacher d’en fixer les soupçons sur moi. « 11 est enfin temps de savoir quels sont les gens malintentionnés dont toujours on connaît les projets, sans cependant pouvoir jamais avoir aucun indice qui mette sur leurs traces, soit pour les punir et pour les réprimer; il est temps de savoir pourquoi mon nom servirait plutôt que tout autre de prétexte à des mouvements populaires ; il est temps enfin qu’on ne me présente plus ce fantôme sans me donner aucun indice de sa réalité. , « En attendant, je déclare que, depuis le 25 du mois dernier, mon opinion est que mon séjour en Angleterre n’est plus dans le cas d’être utile aux intérêts de la nation et au service du roi ; qu’en conséquence, je regarde comme un devoir d’aller reprendre mes fonctions de député à l’Assemblée nationale ; que mon vœu personnel m’y porte ; que l’époque du 14 juillet, d’après les décrets de l’Assemblée, semble m’y rappeler plus impérieusement encore et qu’à moins que r Assemblée ne décide d’une façon contraire et ne me fasse connaître sa décision, je persisterai dans ma résolution première. J’ajoute que si, contre mon attente, l'Assemblée jugeait qu’il n’y a lieu à délibérer sur ma demandé, je croirais en devoir conclure qu’elle juge que tout ce qui m’a été dit par le sieur de Boinviile, doit être considéré comme non avenu ; et que rien ne s’oppose à ce que j’aille rejoindre l’Assemblée dont j’ai l’honneur d’être membre. Je vous prie, Monsieur, après avoir fait connaître ces faits à l’Assemblée nationale, d’en déposer sur le bureau le présent détail, signé de moi, et de solliciter la délibération de l’Assemblée à ce sujet. « J’envoie copie de la présente lettre à Sa Majesté par M. de Montmorin et à M. de Lafayette. « Signé : L.-Ph. d’Orléans. » M. le Présideat. M. de Lafayette a demandé la parole. M. de Lafayette. D’après ce qui s’est passé entre M. le duc d’Orléans et moi, au mois d’octobre, et que je De me permettrais pas de rappeler s’il n’en entretenait lui-même l’Assemblée, j’ai cru devoir à M. le duc d’Orléans, de l’informer que les mêmes raisons qui l’avaient déterminé à accepter sa mission pouvaient encore subsister, et que peut-être on abuserait de son nom pour répandre sur la tranquillité publique quelques-unes de ces alarmes que je ne partage point, mais que tout bon citoyen souhaite écarter d’un jour desliné à la confiance et à la félicité commune. Quant à M. de Boinviile, il habitait l’Angleterre depuis six mois ; il était venu passer quelques jours ici, et à son retour à Londres il s’est chargé de dire à M. le duc d’Orléans ce que je viens de répéter à l’Assemblée. Permettez-moi de saisir cette occasion, comme chargé par l’Assemblée de veiller, dans cette époque, à la tranquillité publique, de lui exprimer sur cet objet mon opinion personnelle. Plus je vois s’approcher la journée du 14 juillet, plus je me confirme dans l’idée qu’elle doit inspirer autant de sécurité que de satisfaction. Ce sentiment est surtout fondé sur les dispositions patriotiques de tous les citoyens, sur le zèle de la garde nationale parisienne et de nos frères d’armes qui arrivent de toutes les parties du royaume; et comme les amis de la Constitution et de l’ordre public n’ont jamais été réunis en si grand nombre, jamais nous ne serons plus forts. M. Armand Grontaud de Biron. Dans le temps d’un régime despotique et arbitraire, le soupçon seul pouvait perdre un bon citoyen, l’écarter de ses foyers, l’exiler de son pays: la liberté ne permet" pas ces excès. M. d’Orléans a fait beaucoup pour elle. Il est accusé depuis huit mois ; depuis huit mois, aucuns des gens qui l’accusent ne se sont fait connaître; aucun fait n’a justifié ces accusations. Je demande que M. d’Orléans vienne rendre compte de sa conduite, et prendre part à la fête nationale qui s’apprête. M. Duquesnoy. Si tous ceux d’entre nous contre lesquels on a fait des libelles de toute espèce, ou permis des inculpations de tout genre, s’étaient absentés, l’Assemblée nationale serait dissoute depuis plusieurs mois. M. d’Orléans a quitté l’Assemblée, parce qu’il était chargé d’une mission du roi. Quand il vous a écrit qu’il acceptait cette mission, vous n’avez pas trouvé mauvais qu’il s’absentât. Lorsque, à l’archevêché, M. de Menou a demandé qu’il fût rappelé pour rendre