SÉANCE DU 5 MESSIDOR AN II (23 JUIN 1794) - N° 53 129 Représentants, j’ai pensé que, l’autorité du comité ayant été méconnue par un député en mission, je devais m’adresser aux dépositaires de l’autorité du peuple pour obtenir ma liberté pleine et entière, et recouvrer la sécurité qui doit accompagner partout les citoyens qui s’honorent de leur dévouement à la patrie. J’ai pensé que la Convention nationale seule pouvait me faire jouir de cette garantie sociale qui fait la base du bonheur public. Je me jette donc dans le sein de la Convention avec cet abandon d’une âme vraiment républicaine; je ne demande que la pleine et entière exécution de l’arrêté du comité de salut public du 18 prairial, et la faculté de me faire remettre mes armes, mes papiers comptables, mes équipages, mes chevaux. Quand je pense que j’ai été obligé de remettre mes armes entre les mains de l’ex-pro-cureur Galland, aristocrate forcené, je m’étonne de ne m’en être pas servi pour purger la terre de cet ennemi de mon pays; mais le respect pour la loi m’a seul retenu. Représentants, faites rendre la liberté à mon frère, faites moi rendre mes armes, afin que j’aille aider mes frères d’armes à exterminer nos ennemis du dehors; je vous en réponds pour ma part. Pour vous, représentants, veillez toujours; exterminez les ennemis intérieurs; veillez surtout sur les prêtres de toutes les couleurs; ils sont les soutiens de toutes les factions dirigées contre la liberté. Us persécutent sans relâche tous les patriotes qui comme moi ont osé se montrer en hommes libres. Guffroy appuie cette pétition, qui est renvoyée, avec son discours, au comité de salut public (1) . [m/s applaudissements ]. Renvoyé au comité de salut public. 53 « Sur la pétition de Joseph Leblond, adjudant-général, Un membre [GUFFROY] rend compte des alarmes et de l’oppression des patriotes de la commune d’Arras (2) . [Guffroy a pris aussi-tôt la parole pour appuyer la pétition, et certifier la véracité des faits, ainsi que le patriotisme brûlant des 5 opprimés. Il a dénoncé formellement la conduite de son collègue Lebon, et il en a tracé le tableau le plus hideux. «Le système affreux des Chaumette et des Hébert, disoit-il, n’est pas encore détruit. L’athéïsme s’est encore montré à Arras, et Joseph Lebon qui fut prêtre fanatique, entouré d’ex-capucins, d’ex-moines, d’exchanoines et de laquais de ci-devant qu’il a placés dans les administrations, après en avoir chassé les amis de la liberté, n’a pas honte de favoriser cette doctrine perverse. Tous les députés qui ont parcouru ce département, ont dit qüe les corps constitués étoient épurés et (1) Mon., XXI, 51. C. Eg., n° 675; M.U., XLI, 92; J. Perlet, n°639. Voir ci-après, n°53. (2) P.V., XL, 108. Voir n° 52 ci-dessus. généralement bien composés. Pourquoi donc Lebon a-t-il expulsé les patriotes pour y mettre des intrigans et ses créatures. Aujourd’hui tout est bouleversé. L’aristocratie et la malveillance triomphe (sic). Les patriotes sont arrachés à leurs familles et jetés dans les fers. La terreur et le découragement sont sur tous les fronts. On a vu des pères abandonner leurs femmes et leurs enfans, et prendre les armes en disant qu’ils préféroient se faire casser la tête par l’ennemi, à languir dans les cachots à côté du crime. Les habitans de la campagne ne veulent plug venir à Arras. Les voyageurs craignent d’y passer. Les agens de la commission des subsistances demandent leur changement, tous veulent fuir une commune où la vertu ne trouve plus d’azyle, et les 5 ou 6 patriotes qui ont échappé jusqu’à ce moment aux coups de leurs persécuteurs osent à peine élever la voix à la société populaire. » Guffroy a dit qu’il avoit remis des notes très-précises à ce sujet aux comités de salut public et de sûreté générale, et que l’esprit public étoit perdu à Arras si la convention ne se hâtoit pas d’y remédier] (1) . Il demande que la Convention nationale décrète : «1°. Que l’arrêté du comité de salut public du 18 prairial, qui met en liberté Joseph Leblond, adjudant-général et pétitionnaire; Gabriel Leblond, son frère, incarcéré de nouveau à Arras, malgré cet arrêté; Beugniet, président du tribunal criminel; Demulier, accusateur public; et Danten, officier municipal, sera pleinement exécuté; qu’en conséquence, les susnommés seront réintégrés dans la possession de tous leurs biens, meubles, effets et papiers comptables ou de commerce, sauf à eux à se pourvoir, pour dilapidations, contre qui il appartiendra; « 2°. Que les citoyens d’Arras & les membres qui ont connoissance de différens faits relatifs à la situation politique de la commune d’Arras les consigneront sur le papier, chacun séparément, et remettront leurs mémoires dans 3 jours aux comités de sûreté générale, de salut public et des décrets, réunis, pour servir à l’examen de la conduite de Joseph Lebon, député-suppléant, si fait n’a été; «3°. Charge les comités réunis ou le comité de salut public de faire incessamment un rapport sur la question de savoir s’il ne seroit pas utile d’envoyer incessamment à Arras et lieux circonvoisins, une commission de 3 membres pour y soutenir l’action du gouvernement révolutionnaire, en ravivant et soutenant la confiance et le courage des patriotes (2). « La Convention nationale renvoie ces différentes propositions au comité de salut public ». (1) C. TJniv., séance du 5 mess., p. 2446 et 2449; J. Perlet , n° 639; J. Sablier, n° 1396; J. Paris, n° 540; mentionné par J.-S. Culottes, n° 494. (2) J. Mont., n° 58; Mess. Soir, n° 673 [bis]; J. Fr., n° 637; M.U., XLI, 92; J. Lois, n» 634; Audit, nat., n° 638; mentionné par F.SJP., n° 354; Rép., n° 186. Voir ci-dessus, n° 52. 9 SÉANCE DU 5 MESSIDOR AN II (23 JUIN 1794) - N° 53 129 Représentants, j’ai pensé que, l’autorité du comité ayant été méconnue par un député en mission, je devais m’adresser aux dépositaires de l’autorité du peuple pour obtenir ma liberté pleine et entière, et recouvrer la sécurité qui doit accompagner partout les citoyens qui s’honorent de leur dévouement à la patrie. J’ai pensé que la Convention nationale seule pouvait me faire jouir de cette garantie sociale qui fait la base du bonheur public. Je me jette donc dans le sein de la Convention avec cet abandon d’une âme vraiment républicaine; je ne demande que la pleine et entière exécution de l’arrêté du comité de salut public du 18 prairial, et la faculté de me faire remettre mes armes, mes papiers comptables, mes équipages, mes chevaux. Quand je pense que j’ai été obligé de remettre mes armes entre les mains de l’ex-pro-cureur Galland, aristocrate forcené, je m’étonne de ne m’en être pas servi pour purger la terre de cet ennemi de mon pays; mais le respect pour la loi m’a seul retenu. Représentants, faites rendre la liberté à mon frère, faites moi rendre mes armes, afin que j’aille aider mes frères d’armes à exterminer nos ennemis du dehors; je vous en réponds pour ma part. Pour vous, représentants, veillez toujours; exterminez les ennemis intérieurs; veillez surtout sur les prêtres de toutes les couleurs; ils sont les soutiens de toutes les factions dirigées contre la liberté. Us persécutent sans relâche tous les patriotes qui comme moi ont osé se montrer en hommes libres. Guffroy appuie cette pétition, qui est renvoyée, avec son discours, au comité de salut public (1) . [m/s applaudissements ]. Renvoyé au comité de salut public. 53 « Sur la pétition de Joseph Leblond, adjudant-général, Un membre [GUFFROY] rend compte des alarmes et de l’oppression des patriotes de la commune d’Arras (2) . [Guffroy a pris aussi-tôt la parole pour appuyer la pétition, et certifier la véracité des faits, ainsi que le patriotisme brûlant des 5 opprimés. Il a dénoncé formellement la conduite de son collègue Lebon, et il en a tracé le tableau le plus hideux. «Le système affreux des Chaumette et des Hébert, disoit-il, n’est pas encore détruit. L’athéïsme s’est encore montré à Arras, et Joseph Lebon qui fut prêtre fanatique, entouré d’ex-capucins, d’ex-moines, d’exchanoines et de laquais de ci-devant qu’il a placés dans les administrations, après en avoir chassé les amis de la liberté, n’a pas honte de favoriser cette doctrine perverse. Tous les députés qui ont parcouru ce département, ont dit qüe les corps constitués étoient épurés et (1) Mon., XXI, 51. C. Eg., n° 675; M.U., XLI, 92; J. Perlet, n°639. Voir ci-après, n°53. (2) P.V., XL, 108. Voir n° 52 ci-dessus. généralement bien composés. Pourquoi donc Lebon a-t-il expulsé les patriotes pour y mettre des intrigans et ses créatures. Aujourd’hui tout est bouleversé. L’aristocratie et la malveillance triomphe (sic). Les patriotes sont arrachés à leurs familles et jetés dans les fers. La terreur et le découragement sont sur tous les fronts. On a vu des pères abandonner leurs femmes et leurs enfans, et prendre les armes en disant qu’ils préféroient se faire casser la tête par l’ennemi, à languir dans les cachots à côté du crime. Les habitans de la campagne ne veulent plug venir à Arras. Les voyageurs craignent d’y passer. Les agens de la commission des subsistances demandent leur changement, tous veulent fuir une commune où la vertu ne trouve plus d’azyle, et les 5 ou 6 patriotes qui ont échappé jusqu’à ce moment aux coups de leurs persécuteurs osent à peine élever la voix à la société populaire. » Guffroy a dit qu’il avoit remis des notes très-précises à ce sujet aux comités de salut public et de sûreté générale, et que l’esprit public étoit perdu à Arras si la convention ne se hâtoit pas d’y remédier] (1) . Il demande que la Convention nationale décrète : «1°. Que l’arrêté du comité de salut public du 18 prairial, qui met en liberté Joseph Leblond, adjudant-général et pétitionnaire; Gabriel Leblond, son frère, incarcéré de nouveau à Arras, malgré cet arrêté; Beugniet, président du tribunal criminel; Demulier, accusateur public; et Danten, officier municipal, sera pleinement exécuté; qu’en conséquence, les susnommés seront réintégrés dans la possession de tous leurs biens, meubles, effets et papiers comptables ou de commerce, sauf à eux à se pourvoir, pour dilapidations, contre qui il appartiendra; « 2°. Que les citoyens d’Arras & les membres qui ont connoissance de différens faits relatifs à la situation politique de la commune d’Arras les consigneront sur le papier, chacun séparément, et remettront leurs mémoires dans 3 jours aux comités de sûreté générale, de salut public et des décrets, réunis, pour servir à l’examen de la conduite de Joseph Lebon, député-suppléant, si fait n’a été; «3°. Charge les comités réunis ou le comité de salut public de faire incessamment un rapport sur la question de savoir s’il ne seroit pas utile d’envoyer incessamment à Arras et lieux circonvoisins, une commission de 3 membres pour y soutenir l’action du gouvernement révolutionnaire, en ravivant et soutenant la confiance et le courage des patriotes (2). « La Convention nationale renvoie ces différentes propositions au comité de salut public ». (1) C. TJniv., séance du 5 mess., p. 2446 et 2449; J. Perlet , n° 639; J. Sablier, n° 1396; J. Paris, n° 540; mentionné par J.-S. Culottes, n° 494. (2) J. Mont., n° 58; Mess. Soir, n° 673 [bis]; J. Fr., n° 637; M.U., XLI, 92; J. Lois, n» 634; Audit, nat., n° 638; mentionné par F.SJP., n° 354; Rép., n° 186. Voir ci-dessus, n° 52. 9