[Assemblée nationale.] pendule d’une longueur déterminée, il suffira de connaître dans la suite le rapport de cette longueur à celte dix-millionième partie, pour en déduire d’une manière certaine le nombre cherché; 5° vérifier par des expérienc' s nouvelles, et faites avec soin, la pesanteur dans le vide d’un volume donné d’eau distillée prise au terme de la glace; 6° enfin réduire aux mesures actuelles de longueur les différentes mesures de longueur de surface ou de capacité usitées dans le commerce, et les différents poids qui y sont en usage, afin de pouvoir ensuite, par de simples règles de trois, les évaluer en mesures nouvelles, lorsqu’elles seront déterminées. On voit que ces diverses opérations exigent 6 commissions séparées, occupées chacune d’une de ces parties du travail. G ux à qui l’Académie eri confierait le soin, seraient en même temps chargés de lui exposer la méthode qu’ils se proposent de suivre. Nous nous sommes bornés, dans ce premier rapport, à ce qui regarde l’unité de mesure : nous nous proposons de présenter dans un autre le plan du système général qui doit être établi d’après cette unité. Eu effet, cette première détermination exige des opérations préliminaires qui demandent du temps et qui doivent être préalablement ordonnées par l’Assemblée nationale. Nous nous sommes cependant déjà assez occupés de ce plan; et les résultats des opérations, tant pour la mesure de l’arc du méridien, que pour le poids d’un volume d'eau donné, peuvent être prévus d’une manière assez approchée, pour que nous puissions assurer dès aujourd’hui, qmen prenant l’unité de mesure que nous venons de proposer, od peut former un système général où toutes les divisions suivent l’échelle arithmétique, et dont aucune partie ne renferme rien qui puisse gêner dans les usages habituels. Nous nous bornerons à dire ici que cette dix-millionième partie du quart du méridien, qui serait notre unité usuelle de mesure, ne différerait du pendu le simple que d’un 145e environ, etqu’ainsi l’une et l’autre unité conduisent à des systèmes de mesure absolument semblables dans leurs dispositions. Nous n’avons pas cru qu’il fût nécessaire d’attendre le concours des autres nations, ni pour se décider sur le choix de l’unité de mesure, ni pour commencer les opérations. En effet, nous avons exclu de ce choix toute détermination arbitraire; nous n’avons admis que des éléments qui appartiennent également à toutes les nations. Le choix du 45e parallèle n’est point déterminé par la position de la France; il n’est pas considéré ici comme un point fixe du méridien, mais seulement comme celui auquel correspondent la longueur moyenne du pendule et la grandeur moyenne d’une division quelconque de ce cercle; enfin nous avons choisi le seul méridien où l’on puisse trouver un arc aboutissant au niveau de la mer à ses deux extrémités et coupé par le parallèle moyen sans être cependant d’une trop grande étendue, qui en rende la me-ure actuelle trop difficile. Il ne se présente donc rien ici qui puisse donner le plus léger prétexte au reproche d’avoir voulu affecter une sorte de prééminence. Nous concluons, en conséquence, à présenter ce rapport à l’Assemblée nationale, en la priant de vouloir bien décréter les opérations proposées et les mesures nécessaires pour l’exécution de 397 celles qui doivent s’étendre sur le territoire de l’Espagne. Fait à l’Académie, le 19 mars 1791. Signé : Borda, la Grange, la Place, Monge, Gondorcet. Je certifie le présent extrait conforme à l’original et au jugement de l’Académie. A Paris, le 21 mars 1791. Condorcet, Secrétaire perpétuel. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE de m. de montesquiou. Séance du samedi 26 mars 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une adresse des administrateurs composant le directoire du département du Doubs, qui envoient le procès-verbal de l’assemblée électorale pour la nomination d’un membre du tribunal de cassation, et d’un suppléant; d’où il résulte que MM. Lapoule et Martin, tous deux députés à l’Assemblée nationale, ont réuni la presque totalité des suffrages; le premier, pour les fonctions de juge, et le second, pour celle de suppléant. Indépendamment de la confiance générale que ces deux hommes de loi avaient méritée, les électeurs ont pensé qu’une cour destinée à casser tous les jugemenls dans lesquels les décrets auraient été viciés, ne pouvait être mieux composée que de ceux qui avaient concouru à faire les lois dont ils dévalent assurer l’observation. (L’Assemblée accueille la lecture de cette adresse par des applaudissements.) Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une adresse et d’un extrait du procès-verbal de la société des amis de la Constitution de la ville de Sens, qui dénonce à l’Assemblée nationale un écrit portant pour litre : « Traduction fidèle et littérale du bref du pape à If/sr l'archevêque de Sens. M. Morin, au nom du comité des rapports. Messieurs, à l’époque de l’expulsion des jésuites, le collège qu’ris occupaient à Rodez fut érigé en collège royal par des lettres patentes qui attribuent à levêque seul le droit d’élire les deux professeurs de théologie, et aux administrateurs, connus sous le nom de bureau, celui de nommer aux autres places. La plus grande partie des professeurs de ce collège, non contents d’être réfractaires à la loi sur le serment des fonctionnaires publics, cherchaient à répandre et à propager dans la ville, et parmi les élèves, ses principes contre la Constitution. Le fanatisme s’allumait dans quelques têtes, et faisait déjà des progrès effrayants. Les membres du bureau du collège se sont empressés (l'éteindre uu foyer qui, comme ils le disent eux-mêmes, aurait pu causer un embrasement général dans le département, sans appeler ni attendre le concours de l’évêque, qui était lui-même réfractaire. Ils ont nommé à toutes les (l) Cette séance est incomplète au Moniteur, ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 mars 1791.J 398 [Assemblée nationale.] places des professeurs, qui ont désobéi à la loi, et notamment aux deux chaires de théologie. Les professeurs de théologie expulsés répandent aujourd’hui dans la ville, que les successeurs qu’on leur a donnés seront bientôt contraints de leur céder la place. Les écoliers, croyant que leurs maîtres actuels cesseront bientôt de l’être, ont moins de ménagements et de respect pour eux. Les maîtres, à leur tour, n’osent pas se servir de toute l’autorité de leur piace, dans la crainte qu’on leur inspire qu’ils en seront bientôt dépouillés. De là naît une interruption dans l’enseignement public, une insubordination incroyable de la part des élèves, et une lutte scandaleuse et alarmante pour la ville, entre les ci-devant et les actuels professeurs. Votre comité des rapports m’a chargé d’avoir l’honneur de vous présenter le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète que les professeurs de théologie du collège de Rodez, nommés par le bureau de ce collège en vertu d'une délibération du 8 mars dernier, seront maintenus provisoirement, jusqu’à ce qu’il ait été slatué sur ce qui regarde l’enseignement public. » (Ce décret est adopté.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre du chargé de pouvoir du ci-devant seigneur de Floyon; il se plaint de ce que le comité des rapports se soit fait servir, par la voie du garde de sceaux, les pièces d’un procès que ce seigneur a depuis dix ans avec la commune de Floyon et qui va être jugé par le comité contentieux des parties. M. Merlin. Le comité des rapports vous retrace dans ce moment l’image des anciens ministres de la justice qui, lorsqu’ils voulaient arrêter les suites d’un procès dont un tribunal était saisi légalement, en demandaient les pièces. Le procès dont on vous parle n’est pas le seul qui soit dans ce cas. Le ministre de la justice se plaint que, tous les jours, il lui arrive des lettres du comité des rapports qui suspendent le cours de la justice. Il est temps de réprimer ces abus ; l’établissement d’un semblable système serait le même que celui des lettres de cachet. Je demande que M. le Président soit chargé d’écrire au ministre de la justice que l’Assembléé n’ entend arrêter en aucune manière le cours de la justice contentieuse et qu’elle va donner des ordres à son comité pour que ce fait ne se renouvelle pas. Un membre : 11 y a un décret qui a renvoyé au comité des rapports l’affaire dont il s’agit. M. Merlin. Voici comment ce renvoi a été fait au comité. Chaque jour ou reçoit un très grand nombre d’adresses; on ne vient pas les lire a l’Assemblée. Les commis des bureaux eu prennent connaissance et mettent par apostille le nom du comité auquel l’affaire doit être renvoyée. C’est ainsi que celle dont on vous parle a été renvoyée au comité des rapports. Au surplus, cette affaire est entre les mains de la justice; l’Assemblée nationale ne peut donc autrement s’en occuper. M. Defermon. Je demande que le comité des rapports soit entendu. M. d’Aubergeon de Marinais. Il résulte de [26 mars 1791.] ce qui vient d’être dit que le comité des rapports est accusé. Souvenez-vous, Messieurs, que vous aviez décrété que les membres des comités seraient changés tous les quinze jours; j’observe que ce décret n’a pas été exécuté. J’observe, eu outre, que vous avez élevé au milieu de vous deux tribunaux d’inquisition : le comité des rapports et celui des recherches; et je crois que vous vous devez à vous-mêmes de les supprimer; mais je demande que vous en changiez du moins les membres. M. Chabroud. Les membres du comité des rapports sont prêts à abdiquer leurs fonctions quand on voudra; mais je soutiens que c’est à tort qu’on les a inculpés. M. le Président. Je vais mettre aux voix' la proposition de M. d’Aubergeou deMurinais. Plusieurs membres : L’ordre du jour! M. d’Aubergeon de Marinais. Je ne demande que l’exécution d’un décret. M. fiftewbell. C’est précisément parce qu’il y a un décret qu’il faut passer à l’ordre du jour. (L’Assemblée consultée adopte l’ordre du jour et décrète que ie comité des rapports sera entendu demain à l’ouverture de la séance pour rendre compte de l’affaire de Floyon.) M. SIébrard, secrétaire, donne lecture d’une lettre du ministre delà guerre, relativement à la situation actuelle des forces du royaume, aux dispositions faites pour le mettre en état de défense, aux mesures ultérieures à prendre pour le même objet, et à la dépense qui eu doit résulter. Voici des extraits de cette lettre : « L’Assemblée nationale a décrété, le 10 de ce mois, que le ministre de la guerre rendrait compte des mesures qu’il a dû prendre, en exécution des décrets pour la défense des frontières, ainsi que des mesures ultérieures qu’on pourrait prendre. Je vais en conséquence lui exposer successivement et les dispositions faites et celles qui pourraient y être ajoutées. « L’Assemblée a accordé, le 15 décembre dernier, au département de la guerre, une somme extraordinaire de 4 millions pour subvenir aux travaux et aux approvisionnements à faire dans ies places de guerre. Les ordres ont été donnés aussitôt pour mettre ces places en état de défense. Les travaux ont commencé par les chemins couverts, par les palissades, et les chefs d’artillerie ont pris des mesures pour l’achat des bois. La saisou est peu propre à ces travaux. Néanmoins on les a pressés sur les frontières qu’on regarde comme menacées. « L’Assemblée a décrété aussi que les régiments seraient portés au complet. J’avais déjà, à cet égard, prévenu ses désirs et donné, dès le mois de décembre, ies ordres nécessaires. « Les ordres ont aussi été donnés sur-le-champ à 30 régiments d’infanterie, qui doivent être portés au complet de 720 hommes; et à 20 régiments de cavalerie qui doivent se porter au complet de 670. L’activité qu’ils mettent à exécuter ces ordres a le plus grand succès; et, avant le mois de mai, la plupart auront atteint le grand complet. « L’état de l’armée comprenait, au 1er mars, non compris les officiers, 130,728 hommes; ainsi le non-complet n’était que de 10,000 hommes. ARCHIVES PARLEMENTAIRES.