663 [Assemblée nationale, j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 décembre 1789,] glé d’après les principes de la Constitution et le besoin de l’Etat ; 5° La création d’une somme d’obligations nationales de 350 millions, remboursables dans l’espace de sept ans, sur le pied de 50 millions par an, porlant intérêt à 5 0/0, librement négociables entre particuliers, et reçues comme espèces dans toutes les caisses publiques et particulières, à partir du 1er janvier 1790 ; 6° La nomination d’une commission chargée de la liquidation générale des dettes de toute espèce échues au 1er janvier, et des arrérages de rente échus au Ier juillet dernier -, 7° Que la caisse nationale satisfera à tous les engagements de l’Etat, à partir du 1er juillet 1789, sans avoir égard à l’arriéré, et que toutes les dépenses seront acquittées régulièrement, à partir du 1er janvier. (Divers passages du discours de M. le marquis de Montesquiou excitent de fortes rumeurs.) Quelques membres demandent l’impression du discours (les mêmes rumeurs se renouvellent). — Cette demande n’a pas de suite. M. le comte «le I*ar«lieu. Je demande qu’il soit décrété qu’on ne recevra plus de motion nouvelle jusqu’à ce que l’Assemblée ait accepté ou rejeté le plan du comité des finances ; que les amendements seuls serontentendus;que la séance de demain commencera à neuf heures précises, et qu’elle ne se terminera pas qu’il n’ait été pris une résolution. M. de Cazalès. Tout l’échafaudage de finance attaché au plan qu’on vous a lu, et sur lequel on veut que vous décidiez si hâtivement, n’a été présenté au comité qu’une demi-heure avant de l’être à l’Assemblée. La motion de M. de Pardieu est décrétée à une grande majorité. M. Treilhard (1). Messieurs, je ne me propose pas de discuter les détails du plan qui vous a été lu hier ; j’en laisse le soin aux personnes plus versées que moi dans ces sortes de matières. Mais j’ai remarqué que ce plan était fondé sur la somme de 400 millions qu’on pouvait se procurer par la vente de biens du domaine ou des possessions du clergé. A l’égard des biens du domaine, ils sont dans vos mains, et vous pouvez en disposer avec toute liberté ; quant aux possessions ecclésiastiques, je crois que j’aurai contribué à ranimer la confiance publique, et que j’aurai par conséquent bien mérité de la patrie, si je prouve que vous pouvez disposer de 400 millions de ces possessions, sans diminuer les revenus affectés aux frais du culte, et au soulagement des pauvres, et sans inspirer la moindre alarme aux créanciers actuels du clergé. Je crois aussi, Messieurs, qu’il est de mon devoir de vous prémunir contre les insinuations de certaines personnes qui semblent n’accorder les secours nécessaires à l’Etat sur les possessions du clergé, que sous la condition que vous lui laisserez une entière administration de ses biens : rien ne me paraîtrait plus téméraire, plus impolitique, et plus inconstitutionnel qu’un pareil engagement de votre part; vous ne pouvez, au (1) La motion de M. Treilhard est incomplète au Moniteur. contraire, vous trop hâter pour l’intérêt de l’Etat, pour l’intérêt de la religion, et surtout pour l’intérêt des titulairés actuels, qui méritent la plus grande faveur, de retenir dans vos mains l’administration des biens ecclésiastiques. C’est ce que je me propose de démontrer avec le plus de précision qu’il me sera possible. M. le marquis de Foucault-Ijardinalie. Tous avez décidé qu’on se renfermerait dans la discussion du plan proposé. L’opinant doit être mis à l’ordre, ou je dois y être mis moi-même. M. le Président. Oui , vous devez y être mis. (Les réclamations continuent , on délibère , et l’Assemblée décide que M. Treillhard doit être entendu.) M. Treilhard reprend : Votre décret du 2 novembre porte : « que tous les biens ecclésiastiques sont à la disposition de la nation, à la charge de pourvoir d’une manière convenable, aux frais du culte, à l’entretien de ses ministres, et au soulagement des pauvres, et d’après les instructions des provinces ». Rien de plus clair que le texte de cette loi : elle déclare le droit de disposer des biens ecclésiastiques résidant dans la nation ; elle annonce que ces biens sont grevés des frais du culte, de l’entretien des ministres et du soulagement des pauvres ; enfin elle assure aux provinces une surveillance faite pour garantir l’acquit de ces charges. Cependant quelques personnes contestent encore le droit de la nation sur les biens ecclésiastiques; on cherche à circonscrire ce droit dans la simple faculté de répartir les produits de ces biens ; on essaye d’en fixer invariablement l’administration dans le clergé ; on repousse l’idée d’un salaire pour les ministres de l’Eglise; enfin on ne craint pas d’annoncer que la nation ne saurait directement et sans l’intervention du clergé, verser sur les pauvres les secours qui leur seront nécessaires. Il faut peu connaître l’esprit de votre décret, et faire au texte une violence bien étrange, pour en tirer des conséquences pareilles ; car enfin si la nation est investie du droit de disposer, comme on n’en saurait douter, elle a, à plus forte raison, le droit d’administrer; et tant qu’elle pourvoira d’une manière convenable , aux frais du culte , à l’entretien des ministres , et au soulagement des pauvres, qui pourrait se plaindre avec quelque justice? On peut donc, sans difficulté , retirer au clergé et reprendre l’administration des biens ecclésiastiques. J’ajoute, que si la nation le peut, elle le doit. Voici mes motifs : L’embarras inséparable d’une gestion temporelle ne peut que détourner les ministres de l’Eglise, des études et des devoirs de leur état. « Le service qu’ils doivent, dit l’abbé Fleury, ne consiste pas seulement à réciter l’office , il faut que tout leur temps et toute leurviey soient employés. » Dans les premiers siècles, les ministres du culte n’avaient d’autres revenus que les offrandes volontaires des fidèles ; et ces premiers jours, il faut en convenir, ne sont pas les moins beaux et les moins heureux de l’Eglise. L’ambition ne tarda pas à suivre la permission qui fut donnée au clergé de posséder des immeubles: les plainles touchantes qu’ont faites à ce sujet