320 [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 novembre 1789.[ Du 28 juin 1790. 15. Jules François Paré, avocat au parlement, cour du Commerce, Dépose que, le dimanche 12 juillet dernier, il est allé au Palais-Royal sur les 6 heures du soir, accompagné d’un de ses amis; que là il a aperçu une grande fermentation dans le peuple; qu’ayant appris qu’un grand nombre de personnes qui étaient parties pour Versailles avaient été arrêtées sur la place Louis XV par les troupes, il s’y est rendu avec son ami, pour voir ce qui s’y passait; que, chemin faisant, il vit un grand nombre de personnes qui se sauvaient des Tuileries, disant que l’on tirait des coups de fusil au pont tournant ; qu’ayant continué de marcher il est arrivé sur le haut de la terrasse des Feuillants qui domine sur la place Louis XV ; que de là il aperçut les troupes rangées sur ladite place, et aperçut aussi un garde-française qui paraissait blessé à la tête et à une jambe ; que voyant le pont tournant dégagé, n’y ayant alors tout au plus que 30 personnes, il est descendu et s’est rendu dans le milieu de la place Louis XV vers la statue ; qu’après avoir parlé à plusieurs officiers commandant des détachements qui étaient alors sur la place, il a pris sa direction vers la rue Royale, pour gagner la rue Saint-Honoré ; qu'alors if vit arriver une scadron, marchant au grand trot, qui paraissait venir des boulevards ; qu’alors il s’est rangé dans les pierres pour le voir passer ; qu’ayant suivi des yeux cet escadron jusque vers la statue, il le vit du même pas tourner vers le pont tournant, et entrer toujours au grand trot dans les Tuileries ; qu’il ne peut dire que cet escadron fût commandé par le prince de Lambesc, ne le connaissant pas; qu’il a entendu ensuite tirer un grand nombre decoups de fusil, et craignant qu’il n’y ait du danger, il s’en est allé par la rue Saint-Honoré ; Ajoute qu’à l’instant où l’escadron est entré dans les Tuileries, il n’y avait que très-peu de personnes dans l’intérieur du jardin dans les environs du pont tournant. Nota. Eugène de Lorraine, duc d’Elbeuf, prince de Lambesc, colonel-propriétaire du régiment Royal-Àllemand, fut acquitté par le Châtelet de Paris. — Louis XV111 le nomma pair de France, par ordonnance royale du 4 juin 1814 ; mais le prince de Lambesc mourut en Bohême, en 1825, sans avoir pris séance à la Chambre des pairs. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE BOISGELIN, ARCHEVÊQUE D’AIX. Séance du samedi 28 novembre 1789, au matin (1). M. Salomon de La Saugerie, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance de la veille. M. Bourdon, citoyen de la ville de Dieppe et député de Normandie, présente, au nom du comité de Dieppe, et de plusieurs de ses concitoyens , l’offrande patriotique de 107 marcs 1 gros 54 grains 1/2 d’argenterie et 3 onces 3 gros, 70 grains d’or. L’Assemblée reçoit avec satisfaction cette offrande. M. Babaud de Saint-Étienne, secrétaire, donne lecture des adresses dont la teneur suit : Délibérations des communautés d’Argelès et d’Ausiaq, de celles d'Usin,de Caubios, de Gelos, et des habitants de la ville de Sauveterre en Béarn, par lesquelles ils adhèrent purement et simplement à tous les décrets de l’Assemblée nationale; ils ratifient en conséquence l’abandon fait par les députés de la province de tous ses privilèges particuliers, et leur donnent des pouvoirs illimités. Adresse du comité municipal de la ville de Crépy-en-Valois , dans laquelle il renouvelle ses sentiments d’adhésion aux décrets et l’Assemblée nationale ; il se plaint de n’avoir encore reçu aucuns décrets, même ceux sur les grains de la loi martiale; il la supplie de faire en sorte qu’il reçoive la collection complète de tous ses décrets le plus promptement possible. Adresse de félicitation, remerciement et adhésion de la commune de La Ferté-sur-Aube en Champagne; elle fait le don patriotique d’un ostensoir, d’un ciboire et de burettes d’argent. Adresse du même genre de la ville de Sanooins en Berry; elle demande un bailliage royal et une municipalité. Adresse des religieux Bénédictins du collège de Pau, qui, en cas de suppression, réclament une pension de 1,800 livres, et l’habileté à posséder les bénéfices-cures et là remplir les chaires de l’enseignement public,’ avec la moitié des honoraires attachées auxdites places. Adresse de la milice nationale de la ville de Toulouse, contenant l’expression du plus parfait dévouement pour l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale; elle s’élève avec la plus grande force contre les écrits ayant pour titre , l’un : « Déclaration de l’ordre de la noblesse de la sénéchaussée de Toulouse », l’autre : « Déclaration du clergé de la ville de Toulouse », et le dernier : « Droit des pasteurs sur les dîmes, en forme de remontrances à la natioD et au Roi, par les curés du clergé de ladite sénéchaussée. » Cette milice dénonce ces écrits comme séditieux, attentatoires à l’autorité de l’Assemblée nationale, et injurieux à la personne du Roi. Adresse de félicitations, remerciements et adhésion des communes de Surgères en Aunis; elles déclarent lâches et infâmes tous ceux qui refuseraient de se soumettre aux décrets de l’Assemblée nationale, et demandent une justice royale. Adresse de la municipalité de Béziers en Languedoc, contenant l’assurance de son respect et de sa soumission aux décrets de l’Assemblée nationale. Cette municipalité s’élève avec force contre la déclaration faite par la noblesse de la sénéchaussée de Toulouse. Adresse du même genre de la ville de Lodève en Languedoc : elle assure que la contribution patriotique du quart de ses revenus sera exactement payée; elle demande d’être le chef-lieu d’un département ou d’un district, le siège d’une justice royale , ainsi que d’une juridiction consulaire. Adresse des officiers municipaux de la ville de Donjon en Bourbonnais, contenant félicitations, remerciements et adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale , notamment à celui concernant la contribution patriotique. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. [Assemblée nationale. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 novembre 1789. 321 Adresse du même genre des représentants de la commune d’Aubignv-en-Berry ; elle demande d’être le chef-lieu d’un département. Adresse des officiers de la sénéchaussée de Lauzerte en Quercy, dans laquelle ils expriment leur admiration respectueuse pour l’Assemblée nationale, et leur parfaite soumission à ses décrets ; ils la supplient avec instance d’ordonner que tous ceux sanctionnés ou acceptés par le Roi leurs soient envoyés pour les enregistrer et faire exécuter, attendu qu’ils n’en ont encore reçu aucun, même celui concernant la justice criminelle. Adresse de la ville de Nérac, qui demande un décret qui autorise les municipalités à saisir et arrêter entre les mains des fermiers des décima-teurs, le produit des baux à ferme, et poursuivre par devant les juges des lieux la main-levée du quart des pauvres, qui, préalablement à tout autre payement, sera versé dans la caisse d’un bureau de charité, qui sera établi à cet effet; elle observe que, le payement du prix des baux à ferme des décimateurs se faisant ordinairement aux fêtes de Noël, le décret qu’elle sollicite devrait parvenir dans les provinces avant cette époque. Adresse de félicitations et de remerciements de la ville de Lorris, qui demande un district dans le département d’Orléans. Lettre du chapitre de Grignan, par laquelle il expose à l’Assemblée nationale, que la commune de Colvrizelles refusant de payer des dimes en nature, qui composent la majeure partie des revenus dudit chapitre, il se trouve exposé à manquer du plus étroit nécessaire, et il réclame d’une manière urgente la protection de l’Assemblée et un exprès commandement. Délibération et adresse du comité permanent de la ville de Saint-Jean de Gardonnenque en Languedoc, portant acte de reconnaissance, de respect et de parfaite soumission aux décrets de l’Assemblée nationale. Elle se réjouit de ce que les limites des provinces vont être effacées, leurs rivalités anéanties, les affections de leurs habitants confondues, et le titre de Français devenir le plus beau dont on puisse s’honorer. Elle se plaint de ce que la plupart des municipalités n’ont point encore reçu officiellement les décrets de l’Assemblée nationale , notamment ceux du mois d’août, et demande qu’ils soient envoyés à toutes les municipalités du royaume. Délibération de la ville de Troyes , contenant l’expression d’une adhésion parfaite à tous les décrets de l’Assemblée nationale. Pour manifester leur patriotisme , les officiers municipaux et représentants de la commune déposent leurs boucles d’argent entre les mains du secrétaire-greffier et arrêtent que tous les citoyens seront invités à faire la même offrande à la caisse nationale. M. Brunet de Latuque, député de Nérac. Messieurs, vous venez d'entendre la lecture d’une adresse par laquelle la ville de Nérac demande que le quart du revenu des dîmes soit saisi entre les mains des fermiers des décimateurs, pour être appliqué à la subsistance des pauvres. Les pauvres sont dans une grande détresse, il est instant de s’occuper de cette question et je prie l’Assemblée nationale de la prendre en sérieuse considération. M. Fréteau de Saint-Just. J’appuie la motion de M. Brunet de Latuque et je propose d’en renvoyer la délibération a l’une des prochaines séances du soir. Nous pourrons en attendant lre Série, T. X. lire le mémoire de M. Du Tremblay de Rubelle qui vient de nous être distribué, et qui a pour objet la destruction de la mendicité. (Voy. ce mémoire, annexé à la séance de ce jour.) M. Malouet. Dès le mois de septembre dernier, j’ai présenté un projet d’établissement pour la classe indigente qui répond parfaitement aux nécessités signalées par l’adresse de la ville de Nérac. Je demande qu’il ait la priorité. M. Gaultier de Biauzat. Avant que ce plan soit examiné et mis à exécution, des malheureux périront faute de subsistance. La décision que l’Assemblée portera sur la demande de la ville de Nérac sera nécessairement commune à tout le royaume ; elle ne peut pas faire la matière d’une séance du soir. L’Assemblée décide que cette affaire sera placée lundi à l’ordre de deux heures. Un membre demande que le décret qui donne aux députés extraordinaires des villes, des places dans la tribune, soit exécuté; il représente que la tribune réservée aux membres de la Commune de Paris n’est pas suffisante et qu’il en est de même pour l’état-major. — Cette affaire est renvoyée aux commissaires chargés de la disposition de la salle. M. le Président annonce que les pouvoirs de M. Regnard, député de Moulins, ont été vérifiés et trouvés en règle. — En conséquence, M. Regnard est admis à prendre séance en remplacement de M. le comte de Douzon, démissionnaire. M. le Président dit que l’ordre du jour appelle la délibération de V Assemblée sur les finances. M. Anson, au nom du comité des finances, fait un rapport renfermant l’état général des dépenses nécessaires dans les mois de novembre et décembre avec la recette probable pendant le même temps. ÉTAT DES DÉPENSES. Dépenses générales, 130,800,000 livres. Engagements du Trésor royal, 1,100,000 livres pour novembre. Engagements du Trésor royal. 1,700,000 livres pour décembre. Guerre, 8 millions pour novembre. Guerre, 7 millions pour décembre. Marine, 5 millions pour novembre. Marine, 6 millions pour décembre. Affaires étrangères, 700,000 livres pour novembre. Affaires étrangères, 800,000 livres pour décembre. Maison du Roi, 2,700,000 livres pour novembre. Maison du Roi, 2,700,000 livres pour décembre. Pensions, 1,700,000 livres pour novembre. Pensions, 1,700,000 livres pour décembre. Ponts et chaussées, 800,000 livres pour novembre. Ponts et chaussées, 800,000 livres pour décembre. Mendicité, 150,000 livres pour chaque mois. Travaux de charité, 230,000 livres pour chaque mois. Approvisionnement des grains en Hollande, 6 millions en novembre. Approvisionnement des grains en Hollande, 5 millions en décembre. Autres traites pour les grains, 2 millions pour les deux mois. 21