SÉANCE DU 2e JOUR DES SANS-CULOTTIDES AN II (JEUDI 18 SEPTEMBRE 1794) - N°* 45-46 269 contre ces lâches qui déchirent le sein de leur patrie ; allez terminer cette guerre désastreuse qui trop long-temps a occupé le courage des défenseurs de la République : la Convention armera vos bras, vous ne trahirez pas ses espérances : la Convention vous a vu défiler avec la douce émotion qu’elle éprouve toujours à la vue des braves défenseurs de la patrie. On applaudit. Sur la proposition de Chateauneuf-Randon, la pétition est renvoyée au comité de Salut public, pour y statuer sur le champ (87). 45 Un membre propose que la Convention nationale décrète que, par une conséquence du décret qui a supprimé le paiement des titres cléricaux, dont les biens rentrés dans le domaine de la République étoient chargés, tous les titres cléricaux encore subsistans soient annullés. La Convention renvoie cette proposition à son comité de Législation pour lui en faire un prompt rapport (88). 46 Un autre [Cambon] obtient la parole au nom du comité des Finances. Sur sa proposition, les deux décrets suivans sont rendus. a CAMBON, au nom du comité des Finances : Par votre décret du 16 thermidor vous avez excepté du dépôt, ordonné par la loi du 18 messidor, des sommes dues aux habitants des pays qui sont en guerre avec la République, celles qui étaient dues aux habitants des villes de Hambourg, Lubeck, Dantzig, Brême et Augsbourg. Un arrêté du comité de Salut public, du 12 fructidor, exempte également de ce dépôt les sommes dues aux villes d’Aix-la-Chapelle, Elberfeld, Grevel et Solingen. L’envoyé de la ville de Nuremberg, qui se dit libre , nous a présenté diverses pétitions tendantes à obtenir la même exception. Il vous observe que cette ville jouit du même titre que celles qui sont exemptées, qu’elle s’est prononcée fortement en faveur de la révolution française, que ce n’est que par la loi du plus fort qu’on l’a forcée de fournir un contingent dans la coalition. (87) Débats, n° 728, 543. Gazette Fr., n° 992 ; J. Perlet, n° 726 ; J. Mont., n° 142 ; Ann. Patr., n° 626 ; C. Eg., n° 761 ; J. Fr., n“ 725 ; Rép., n° 273 ; J. Paris, n° 627. (88) P.-V., XLV, 332. C 318, pl. 1287, p. 23, minute de la main de Roger Ducos, rapporteur. Décret n° 10 940. M. U., XLIII, 537 ; J. Perlet, n° 727. Des négociants de Paris vous ont soumis diverses considérations qui ont paru importantes à votre comité des Finances ; cependant il n’a pas cru être suffisamment autorisé pour prononcer cette exception par un arrêté, cette mesure devant être ordonnée par la Convention qui peut seule modifier les lois. En conséquence je suis chargé de vous présenter le décret suivant (89) : La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Cambon, au nom de] son comité des Finances, décrète [que] les débiteurs des habitans de la ville de Nuremberg sont exempts du dépôt ordonné par la loi du 18 messidor (90). b CAMBON : Le citoyen Penchein, payeur de la dixième partie des rentes, a observé, dans un mémoire qu’il a remis aux commissaires de la trésorerie nationale, que dans la partie dont il est chargé sont comprises les rentes dites ancien clergé. Les constitutions de ces rentes sont des années 1562 et suivantes à 1576. Depuis ce temps, et jusqu’à l’année 1719, les titres de ces rentes sont demeurés au même état que lors des constitutions, quoique ces rentes aient éprouvé divers changements dans leurs payements. En l’année 1719, et dans les années suivantes, en vertu d’arrêts du conseil des 26 octobre et 4 novembre 1719, et 9 juillet 1720, et autres subséquents, il a été procédé, par les commissaires nommés à cet effet, à la liquidation et fixation du produit net de ces rentes, à commencer du 1er janvier 1724 (lequel depuis cette époque jusqu’à ce jour n’a pas varié). Il a été, lors de ces liquidations, expédié à chaque rentier une espèce de titre nouvel desdites rentes, connu sous le titre d’ordonnance de liquidation, les originaux desquelles ordonnances de liquidation sont restés déposés aux archives du clergé. Ces ordonnances de liquidation depuis l’époque où elles ont été déposées, et dont on a remis à chaque rentier un double original en papier signé des commissaires qui étaient chargés de cette liquidation, ont été reconnues comme le seul et vrai titre desdites rentes dites ancien clergé; dans toutes les ventes, transports, et autres actes où ces rentes ont été désignées, ces ordonnances de liquidation ont toujours été annoncées comme le seul titre desdites rentes; pour les constitutions même à la trésorerie nationale on n’en reconnaissait point d’autres, et, lorsque les autres pièces étaient en règle, on passait outre à la liquidation desdites rentes. Ces rentes étaient employées dans la première classe comme (89) Moniteur, XXII, 1. J. Fr., n° 725 ; M.U., XLIII, 537 ; Rép., n° 3. (90) P.-V., XLV, 332. C 318, pl. 1287, p. 24, minute de la main de Cambon, rapporteur. Décret n° 10 934. Bull., 2e jour s.-c. (suppl.). Moniteur, XXII, 1. 270 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE exemptes de toutes retenues depuis la liquidation ordonnée en 1719. Actuellement qu’il s’agit de retirer les titres desdites rentes, le payeur qui en est chargé se trouve forcé de mettre au rebut beaucoup de rentiers qui ne rapportent point les originaux des ordonnances de liquidation de leurs rentes, ou qui ne rapportent que des copies collationnées faites sur lesdits originaux représentés et rendus. Tous ces rentiers se trouvent embarrassés, et ne savent à qui s’adresser pour retirer les originaux qui ont été déposés aux archives du clergé. Le décret du 21 frimaire de l’an II ne prononce rien sur ces rentes, et l’article XII de ce décret ne dispense du rapport des titres perdus que pour ceux d’une date antérieure à 1713, ce qui ne peut s’appliquer aux rentes de l’ancien clergé, puisque toutes les ordonnances de liquidation sont des années de 1719 et suivantes. Ces rentes étant fort anciennes, modiques dès leur origine, et étant subdivisées en petites parties, il n’est pas étonnant que les propriétaires aient négligé les titres originaires qui leur auraient coûté plus d’une année de la rente, surtout depuis qu’ils avaient obtenu un titre nouvel. Ces titres originaires étant des ordonnances de liquidation, qui sont daté de l’année 1719 et suivantes, on ne peut leur appliquer l’article XII du décret du 21 frimaire, qui ne dispense du rapport des titres perdus que lorsqu’ils sont antérieurs à l’année 1719. Le dépôt des minutes des ordonnances de liquidation était, avant la révolution, aux ci-devant Augustins ; depuis elles ont été transportées à la Bibliothèque Nationale, où il est impossible de s’en procurer des expéditions, soit parce que ces minutes sont dans le plus grand désordre, soit parce que la Bibliothèque n’est pas organisée pour délivrer ces expéditions. Les propriétaires de ces rentes sont dans le plus grand embarras ; non seulement ils ne peuvent pas mettre en règle ces parties des rentes, mais ils ne peuvent pas retirer leurs inscriptions définitives sur le livre de la dette consolidée, et recevoir le payement annuel de ce qui leur est dû par la nation. Votre comité des Finances a pensé qu’il était juste d’accorder au propriétaire de ces rentes la faculté mentionnée dans l’article XII de la loi du 21 frimaire, et de n’exiger de ce propriétaire que le double original de l’ordonnance de liquidation en papier, signé des commissaires, avec la déclaration par laquelle il se soumettra à représenter l’original au cas qu’il se trouve, sous peine d’être déchu de toute répétition envers la République. Voici le projet de décret que je suis chargé de vous présenter (91) : (91) Moniteur, XXI, 800. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Cambon, au nom de] son comité des Finances, décrète : Article premier. - Les propriétaires des rentes dites ancien clergé, qui, ne pouvant pas fournir les ordonnances de liquidation, ont remis le double original de cette ordonnance en papier, ou qui le remettront d’ici au premier frimaire prochain, seront admis en liquidation, en se soumettant à représenter l’original au cas qu’ils le retrouvent, sous peine d’être déchus de toutes répétitions. Art. IL - Le présent décret sera imprimé aux bulletins des lois et de correspondance (92). 47 Il est fait lecture d’une lettre des re-présentans du peuple près l’école de Mars, relativement aux alarmes que la malveillance s’est efforcée de répandre au sujet de cette institution. Cette lettre est vivement applaudie. La Convention nationale en ordonne l’insertion au bulletin (93). [Les représentants du peuple près l’école de Mars, au président de la Convention nationale, 2e jour des sans-culottides an II] (94) Citoyen Président, Avant hier trente fructidor nous nous sommes rendus à notre nouveau poste. Le camp des Sablons nous a présenté l’aspect le plus intéressant. Une règle sage et sévère y a formé des hommes pour la liberté, des défenseurs de la patrie, intelligens et instruits. Le patriotisme brille sur les visages des élèves de Mars et embrâse leurs cœurs. Chaque heure du jour a son emploi. La tactique, le génie, l’administration militaire, la pique sont tour à tour les objets de leurs études. Décadi, ces jeunes soldats ont éxécuté les manœuvres les plus compliquées avec une précision étonnante et les ont accompagnées de feux très soutenus. Les artilleurs tiraient cinq coups à la minute et chargeaient le sixième. Nous t’invitons à prévenir la Convention nationale que les mêmes manœuvres doivent se renouveller demain à trois heures et nous engageons nos collègues à venir jouir du coup d’œil flatteur qu’offrent les succès rapides des trois mille en-fans de Mars. (92) P.-V., XLV, 332-333. C 318, pl. 1287, p. 25. Décret n° 10 937, minute de la main de Cambon, rapporteur. Bull., 2e jour s.-c. (suppl.) ; Moniteur, XXI, 800 ; J. Fr., n° 725 ; M.U., XLIII, 537 ; Rép., n° 3 ; J. Perlet, n° 727 ; Ann. R. F., n° 1. (93) P.-V., XLV, 333. (94) C 318, pl. 1290, p. 18. Débats, n° 728, 543-544 ; J. Mont., n° 142 ; J. Fr., n° 725 ; M.U., XLIII, 531 ; Rép., n° 273 ; J. Perlet, n° 726.