[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 février 1791. J 575 Un membre à droite : Il y a des étrangers dans ie côté gauche. M. le Président. On me dit qu’il y a des étrangers dans la salle. J’invite les membres du côté droit qui le croient de vouloir bien les dénoncer avant que je renouvelle l’épreuve. Plusieurs membres à droite ; L’appel nominal! (Une nouvelle épreuve a lieu.) M. le Président. Je répète que je n’ai pas de doute : Il y a lieu à délibéter sur la motion de M. Vernier. ( Mouvement prolongé à droite.) Plusieurs membres à droite : L’appel nominal! MM. d’André, de Mirabeau, Begnaud (de Saint-Jean-d’ Àngêly) et plusieurs autres membres déclarent qu’il y a lieu à délibérer. M. le Président. Gomme une grande partie de ceux-là même qui ont opiné contre la motion voient clairement qu’il y a lieu à délibérer, je prononce le décret : «‘L’Assemblée nationale décrète qu’il y a lieu à délibérer. » M. de Folleville. Je persisle à demander l’appel nommai. Jamais il ne fut réclamé dans une circonstance plus intéressante : il s’agit d’un ajournement dent l’effet serait désastreux; iia pour but d’éloigner la déclaration d’un principe dont la violation produirait à l’instant même une émigration nombreuse. Je persiste donc, pour ces raisons, à demander l’appel nominal. ( Applaudissements à l'extrême droite.) J'ajouterai aux considérations que je viens de présenter, qu’on a craint qu’il n’y eût des étrangers dans la salle. M. de Cazalès. Il faut mettre aux voix la motion, parce qu’alors, s’il y a du doute, on demandera l’appel nominal. M. de Mirabeau. Ii n’y a pas ie plus léger doute. La majorité de l’A-sembiée a évidemment décrété qu’il y a lieu à délibérer. M. le Président. Je mets aux voix la motion de M Vernier; en voici les termes : « L’Assemblée nationale décrète que la loi sur les émigrations est ajournée; que cependant la question est renvoyée à des commissaires pris dans tous les comités, pour examiner s’il y a lieu, ou non, à un projet de loi qui puisse se concilier avec la Constitution, et en faire rapport mercredi 9 mars. » M. le Président, après avoir consulté l’Assemblée, déclare que la motion est adoptée. Plusieurs membres à l'extrême droite : Il y a du doute! L’appel nominal! M. d’André. Quand la majorité est aussi évidente et que cependant on réclame l’appel nominal, ü est une pratique constante, c’est de mettre aux voix la question de savoir s’il y a du doute. On a notamment suivi cet usage quand j’avais l’honneur de présider. La majurité est évidente; mais comme beaucoup de personnes opposées à l’avis qui a passé le reconnaissent, ainsi que moi, elle sera bien plus évidente encore quand on consultera l’Assemblée sur le doute. On évitera ainsi l’appel nominal. Plusieurs membres : U faut faire une nouvelle épreuve. M. Foucault-Lardimalie. Je demande la parole. M. le Président. Je vais renouveler l’épreuve. (L’Assemblée est consultée à nouveau.) M. le Président. L’Assemblée adopte la motion de M. Vernier. Plusieurs membres à droite : li y a doute! L’appel nominal! Plusieurs membres : Il faut mettre aux voix la motion de M. d’André. ( Applaudissements .) M. le Président. Je vais consulter l’Assemblée sur la question de savoir, s’il y a eu, ou non, du doute sur le résultat ne la délibération. (L’Assemblée, consultée, décide qu’il n’y a pas eu de doute.) M. le Président. En conséquence, la motion de M. Vernier e.M décrétée. La séance est levée à cinq heures du soir. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 28 FÉVRIER 1791. Nota. — M. Barrère ayant fait imprimer et distribuer une opinion sur le respect du à la loi, nous l’insérons ci-dessous comme faisant partie des documents parlementaires de l’Assemblée nationale. Discours sur le respect du à la loi par M. Barrère, député à V Assemblée nationale. Pour être libres, il faut être esclaves des lois,. disait aux Romains l'orateur philosophe qu’ils appelèrent le père de la patrie : voilà les paroles qu’il faut adresser aux Français au moment où ils ont conquis la liberté ; car la loi ne peut se soutenir que par un respect inviolable pour elle et par l’exécution servile de tout ce qu’elle commande. La philosophie n’a rien imaginé de plus sublime que d’assirp ttir chaque membre de la société, par l’expression de la volonté générale, pour les rendre tous vraiment libres, en les affranchissant du joug arbitraire d’une ou de plusiems volontés individuelles. Il n’est pas d’autres éléments de la liberté publique que les sacriiices habituellement faits par chaque citoyen à l’empire de la loi, et l’abjuraiion constante de toute autorité qui n’est pas la sienne. Le reutiment et le dogme trop ig mrés de l’égalité politique sont, dans de bons gouvernements, le premier bienfait de la loi. Les hommes, étant tous égaux à ses yeux, ne lardent pas à s’apercevoir qu’ils sont égaux les uns aux autres ; et cette opinion, ou plutôt ce ,-enûm nt intime une fuis affermi dans L'esprit des citoyens, on voit disparaître aussitôt toute autre supériorité que