ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES, "m 260 [Convention nationale.] « An Rhin, de nouveaux avantages ont en partie réparé les résultats d’anciennes trahisons qui ne laissent plus que Landau à secourir. « Au Nord, Maubeuge est délivré. « Soldats de la patrie, tant d’efforts et de suc¬ cès sont votre ouvrage depuis trois mois. Qu’at¬ tendez-vous pour terminer la campagne de la li¬ berté par la ruine entière des tyrans? Saisissez cette arme si terrible pour eux : que la baïon¬ nette dans les reins, ils soient forcés de courir cacher leur honte dans leurs repaires; la France, délivrée de ses ennemis, vous devra à la fois le bonheur que lui promet l’affermissement de la liberté, et la gloire d’avoir triomphé de toutes les forces de l’Europe coalisée (1). » f Suivent les documents relatifs à la prise de Toulon.) I Les représentants du peuple envoyés par la Con¬ vention nationale, près l’armée dirigée contré Toulon, à leurs collègues composant le comité de Salut public de la Convention nationale (2). « Au quartier général d’Ollioules, le 28 fri¬ maire de l’an II de la République, une et indivisible. « Nous vous avions annoncé, citoyens collè¬ gues, que le résultat de l’affaire du 10 n’était que l’avant-coureur de plus grands succès. L’événement vient de justifier notre prédiction. « En conformité de votre arrêté toutes les mesures avaient été prises pour que les brigands, qui s’étaient lâchement emparés de l’infâme Toulon, en fussent bientôt chassés avec igno¬ minie. « Nous n’avons pas perdu un seul instant et avant même que toutes les forces attendues fussent réunies, nous avons commencé notre attaque. Elle a été principalement dirigée sur la redoute anglaise dominant les forts de l’Eguil-lette et de Balagnier, défendue par plus de 3,000 hommes, 20 pièces de canon et plusieurs mortiers. Les ennemis avaient épuisé les res¬ sources de l’art pour la rendre imprenable et nous vous assurons qu’il est peu de forts qui présentent une défense aussi imposante et aussi inexpugnable que cette redoute. Cependant, elle n’a pu tenir à l’ardeur et au courage des braves défenseurs de la patrie. Les forces de cette division, sous les ordres du général La-borde et oh le général Dugommier s’est hono¬ rablement distingué, ont attaqué la redoute à 5 heures du matin, et à 6 heures le pavillon de la République y flottait; si ce premier succès coûte à la patrie environ 200 hommes tués et plus de 500 blessés, l’ennemi y a perdu toute sa garnison, dont 500 hommes sont prisonniers, (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 83. (2) Archives nationales, carton C 287, dossier 860, pièce 14 ; Moniteur universel fn° 95 du 5 nivôse (mer¬ credi 25 décembre 1793), p. 382, col. 1); Premier Bulletin de la Convention du 4* jour de la lre décade du 4e mois de l’an II de la République (mardi 24 dé¬ cembre 1793). — Aulard t Becueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 550. parmi lesquels on compte 8 officiers et 1 princi" pule napolitain. « La malveillance n’avait rien négligé pour faire manquer cette importante expédition, mais distribués dans les différentes colonnes, nous avons rallié ceux qu’on avait effrayés un instant : à notre Voix, au nom de la liberté, au nom de la République tous ont volé à la victoire, et la redoute anglaise, les forts de l’Eguillette et de Balagnier ont été emportés de vive force. « La prise de cette redoute, dans laquelle les ennemis mettaient tout leur espoir et qui était pour ainsi dire le boulevard de toutes les puis¬ sances coalisées, les a déconcertés; effrayés de ce succès, ils ont abandonné dans la nuit les forts de Malbosquet et du Pommet; ils ont fait sauter ce dernier, de désespoir; ils ont évacué aussi les redoutes Rouge et Blanche, la redoute et le fort Faron. Ils ont pris des mesures pour mettre leur flotte à l’abri de notre canon et de nos bombes qui n’ont cessé de les accabler. « La flotte est dans ce moment hors de la grande rade; les ennemis ont embarqué beau¬ coup de Toulonnais et la plus grande partie de leurs forces; ils ont pourtant laissé des troupes au fort Lamalgue et dans la ville pour protéger leur retraite. « Nous sommes maîtres de la croix des signaux, du fort Lartigue et du cap Brun, nous espérons que dans la nuit nous serons maîtres de Lamal¬ gue et demain nous serons, dans Toulon, occupés à venger la République. « Plus de 400 bœufs, des moutons et des cochons, seules troupes que le pape ait envoyées avec quelques moines, des fourrages, des pro¬ visions de toute espèce, des tentes, tous les équipages que les ennemis avaient dans leurs forts et redoutes et plus de 100 pièces de gros calibre sont en notre pouvoir. « Nous vous donnerons sous peu de jours l’état de ceux qui se sont le plus distingués et à qui nous aurons accordé des récompenses; vous verrez par cet état que nous avions tiré de la division de Nice toutes les forces qui se trou¬ vaient disponibles et que nous n’avons rien négligé pour accélérer la prise de cette ville à jamais exécrable. « Notre première lettre sera datée des ruines de Toulon. « Nous ne vous avons pas écrit plus tôt par la raison qu’étant à cheval depuis plusieurs jours et plusieurs nuits, nos moments ont été telle¬ ment employés que nous n’avons pu disposer d’un seul pour vous écrire. « Ricobd; Fréron ; Robespierre jeune. « P.-S. Notre collègue Barras, qui se trouve à la division commandée par le général La Poype, nous a annoncé la prise de vive force de toutes les hauteurs de la montagne de Faron et de l’évacuation de la redoute et du fort de ce nom et de 80 prisonniers, y compris un lieutenant-colonel anglais. Il vous fera part des succès que cette division a obtenus, et qui sont le résultat et l’exécution du plan arrêté par le comité de Salut public. « En un mot, l’attaque générale a été si bien combinée que dans vingt-quatre heures tous les postes ont été attaqués et occupés par les deux divisions de l’armée de la République. « Salut et fraternité. « Fréron; Ricord; Saliceti; Robespierre jeune. »