[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [4 juin 1791.] 741 « Ces sommes ne pourront être prélevées sur ses biens qu’en vertu d’un jugement rendu par le tribunal criminel à la requête des demandeurs, sur l’avis du curateur et sur les conclusions du commissaire du roi. » M. Chabroud. L’amendement que je propose sur cet article, c’est qu’il soit encore nécessaire, pour la fixation des sommes à prélever en faveur de la femme, des enfants et des père et mère, que l’avis des parents qui auront nommé le curateur intervienne. M. Delavigne. Je demande que ce soient les voies ordinaires qui décident du prélèvement de ces sommes. M. lie Pelletier-Saint-Fargeau , rapporteur. J’adopte les amendements et je propose la rédaction suivante : Art. 6. « Ces sommes ne pourront être prélevées sur ses biens qu’en vertu d’un jugement rendu à la requête des demandeurs, sur l’avis des parents ou du curateur, et sur les conclusions du commissaire du roi. » {Adopté.) Art. 7. Les conducteurs des condamnés, les commissaires et gardiens des maisons où ils serontenfermés, ne permettront pas qu’ils reçoivent pendant la durée de leur peine aucuD don, argent, secours, vivres ou aumônes, attendu qu’il ne peut leur être accordé de soulagement qu’en considération et sur le produit de leur travail. « Ils seront responsables de leur négligence à exécuter cet article, sous peine de destitution. » M. Couppé. Il est impossible que vous empêchiez quelqu’un de faire l’aumône à un prisonnier et celui-ci de la partager avec son geôlier. De là je conclus que l’article est inutile. M. I�e Pelletier-Saint-Fargeau, rapporteur. Si vous n’établissez pas la défense de donner aux condamnés, alors celui qui aura de la fortune pourra obtenir toute sorte de soulagement et d’adoucissement dans son état; de plus il lui serait loisible d’employer à son évasion les sommes qu’il pourrait recevoir; d’ailleurs, vous avez décrété que le prisonnier aurait des secours par son travail et ce, pour qu’il soit porté au travail par son propre instinct. M. La Poule. Il serait barbare d’exclure les charités qui peuvent être faites aux condamnés. Je demande la question préalable sur l’article. M. Prieur. Si vous n’adoptez pas l’article du comité, vous donnez au condamné le moyen de rendre nulle la punition. En lui donnant la faculté de recevoir, vous lui fournissez les moyens d’économiser et d’amasser, et consé-uemment de corrompre son geôlier. C’est avec e l’or qu’on parvient à se procurer la liberté et à adoucir la rigidité des gardiens. Je demande que l’article soit adopté. M. Bouche appuie l’opinion de M. Prieur. (L’Assemblée ferme la discussion et décrète qu’il y a lieu à délibérer sur l’article du comité, qui est ensuite mis aux voix et adopté.) (La suite de la discussion est renvoyée à la séance de demain.) M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’une lettre de M. Amelot , commissaire du roi , près la caisse de l'extraordinaire, ainsi conçue : « Paris, le 4 juin 1791. « Monsieur le President, « Nulle considération particulière ne doit arrêter un administrateur responsable, lorsque le succès des opérations qui lui sont confiées se trouve essentiellement compromis. Je réclame, par votre organe, l’attention et la justice de l’Assemblée : l’objet au nom duquel je les invoque ne peut manquer de les obtenir. « Par deux décrets, l’un du 27 décembre 1790, pour la formation d’un bureau du Trésor public, l’autre du 16 mai dernier, article 8, pour la régie du droit d’enregistrement, l’Assemblée a reconnu la nécessité des différents degrés de surveillance indispensable dans toute administration publique, pour l’unité des principes et la sûreté du travail. Cependant le rapport fait jeudi dernier, au nom des commissaires de la caisse de l’extraordinaire, et le projet de décret présenté sur l’organisation des bureaux de son admi-nislration, la décomposent entièrement. Déjà ses ressorts se relâchent, son ensemble se détruit par la seule idée de l’anéantissement des degrés de surveillance que j’avais établis, dès le principe, sur les mêmes bases déjà décrétées pour le Trésor public. « Je supplie donc l’Assemblée, Monsieur le Président, de se faire rendre un compte plus détaillé des travaux de l’administration de la caisse de l’extraordinaire, et de nommer à cet effet douze commissaires ou un plus grand nombre, si elle le juge convenable. L’Assemblée ne verra pas avec indifférence ma sollicitude sur une administration importante qu’elle a créée, et qui mérite en cet instant les regards les plus attentifs, puisque son succès doit concourir si utilement à raffermissement de la Constitution. En effet, les domaines nationaux forment l’hypothèque de la dette publique : le gage qu’ils offrent à tous les créanciers de l’Etat repose sur les soins et l’activité de cette administration. Elle soutient seule le crédit national ; elle presse la rentrée des produits qui le garantissent; elle est enfin le séquestre de tous les créanciers de l’Etat. « Je suis, etc. « Signé : AMELOT. » Plusieurs membres : Au comité des finances 1 M. LeDélst de Botidoux. Il est inutile de renvoyer cette lettre au comité des finances pour avoir son avis, puisque c’est de son action qu’on se plaint ; ce renvoi tient par trop aux principes de l’ancien régime, sous lequel on renvoyait à l’intendant les plaintes portées contre lui. Il n’y a pas de difficulté à nommer les commissaires demandés par M. Amelot; je demande qu’il soit procédé à leur nomination. (L’Assemblée décide que douze commissaires seront nommés pour lui rendre le compte le plus ample de l’organisation de la caisse de l’extraordinaire.) Un membre propose que ces commissaires soient désignés par le président. M. Chabroud. Je m’oppose à cette motion. Ce relâchement dans la procédure pourrait bientôt