200 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.] biens qui ont autrefois été dans les mains et possession des communautés. Ainsi fait et rédigé en l’hôtel de ville ordinaire de Courtiches, en présence des officiers municipaux dudit lieu, par les habitants du village, corps et communautés de Courtiches, en leur assemblée tenue extraordinairement, les jours, mois et an que dessus. Signé à l’original : J.— Philippe Bonnier de Reynancourt, Bonnet, Jean-Chrysostôme Dubus, G.-M. Madoux, J. -P. Ru-truille,Pfiilippe-Joseph Ville, P.-M.Leleu, L.-C. Dubus, Mathieu Dubus, J. Pluchard, F.-J. Salez, A.-J. Marquisy, Jean-Philippe Gossart, Baudin, J. Dubois, F.-J. Lambert, P.-J. Olivier, Loy, D.-J. Cavelon, Duhem, Gassajet; ne varietur , Denetier. PROCÈS-VERBAL L'assemblée de la communauté de Bouvignies, dans lequel sont contenues ses doléances , plaintes et remontrances , etc., etc. Aujourd’hui , vingt-deux mars mil sept cent quatre-vingt-neuf, en l’assemblée convoquée au son de la cloche, en la manière accoutumée, sont comparus dans l’église dudit Bouvignies, par-devant nous, François-Joseph Biencourt, bailli substitut dudit lieu, Louis Fontenier, Charles de Rosne, Jean-Baptites Piedanna, François Dulieu, Louis Dupuis, Toussaint Joveau, Jean-Baptiste de Lecroix, André de Lobet, Frédéric de Letrier, Jean-Baptiste de Rosne , Pierre-Albert Liénant, Jacques Flou, Guillaume Dupas, Jacques Bahoult, François Quent, Maximilien de i’Etainbes, Philippe Contignies, André Datioche, Pierre-François d’Or-chies, François de Reynancourt, Joseph Ibel, Antoine de Reux, Pierre-Joseph Rompteau, Adrien Delain, Etienne-François Briquet fils, Âpolman, Biseau, Joseph Lucas, Franquiilain Sablon, Noël Joveau, Jean-Baptiste Biseau, Jean-Baptiste Dufour, Laurent Brouillard, Benoît Dupas, Adrien de Reux, Jacques Herbault, André Herbault, Louis-Charles Fontenier, Pierre-Joseph de Lecroix, An-nable de l’Erive, Jean-Baptiste Savelon, Jean-Baptiste de France, Jude, Joseph Thomas, Gille Ca-thelin, Martin Herbaut, Tranquillen Rossel, Pierre-Joseph Coulon, Alexis Carpentier, Pierre-Joseph Dussart, Louis de Gobelle, Pierre-Joseph l’Espagnol, Paul Piédanne, Antoine de Reux, François Mousseur, Jean-Etienne Broutin, Antoine Broutin, Joseph de Lerve fils, Jacques Lacquement, Jacques Leprètre, Charles de Rome, Charles Dudart, Jean-Etienne Hache le jeune, Joseph Durieux, Louis l’Espagnol, Michel de Rosne, Antoine de Marceaux, Louis Lambert, Jean-Baptiste Joveau, Pierre Ta-vernier, Joseph Flou, Jean-Baptiste d’Héry, Martin Catelin, Jean-Baptiste Bousquelle, Pierre-François Des Fontaine, François Fontenier, Philippe Hen-nart, Jean-Baptistede France, Jean-Baptiste Treoult, Célestin Dereux, Gos Joveau, Charles-Louis Pon-tieux, Jean-Baptiste Lefèvre, Louis Deffontaine, Jean-Baptiste Lemaine, Jean -Baptiste Desmons, Jean-Baptiste Baudouin, François Dubraille, Jean-Baptiste Fovaux, Juret, Dusart, Martin Bonnet, Pierre-Jean Lubret, Albert Hémard, Jean-Baptiste Carpentier, Louis Dutouquet, Nicolas Loubert, Jean-Bapiiste Coron, Pierre Masingue, François Dumoulin, Jean -Baptiste Bourg;uelle, François Fontenier, Célestin d’Auchy, Pierre-Joseph de Lerne, Jean-Baptiste Beaucamp, Prosper Herbaye, Jérôme Hache, Lainé, Jean-Baptiste de Reynan-cour, François Houdart, Antoine Bonnet, Pierre-Joseph Dupire, Michel Hennart, Simon Massin-gire, Noël Delestier, Jean-Baptiste Dupont, César-Auguste Becquet, Pierre Héronier, Eugène Nequiert, Jean-Baptiste d’Orchies, Pierre Cocher, Jean-Baptiste Ghoteaul, Pierre-Joseph Marceaux, Pierre-Joseph Moneau, Louis Demanceaux, Jean-Baptiste Fonteiner, Venant, Meguien, Michel Blervaque, Antoine Phlismazunque, François Dusart, Antoine de Foite, Etienne-François Criquet père, Louis de Saulty, Riquet père, Martin de Bachy, Pierre He-rend, “Jean-Baptiste Moreau, Jean-Baptiste Delau-noy, Pierre-François Tourtois, César-Auguste de Leplanque, Tous nés Français, âgés de vingt-cinq ans, compris dans les rôles des impositions, habitants de cette communauté, composée de trois cent trente-deux feux, lesquels, pour obéir aux ordres de Sa Majesté, portés par ses lettres données à Versailles le 24 janvier et le 19 février dernier, pour la convocation et tenue des Etats généraux de ce royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant général de la gouvernance de Douai, dont ils nous ont déclaré avoir une parfaite connaissance, tant par la lecture qui vient de leur être faite que par la lecture et publication ci-devant faites au prône de la messe de paroisse au-devant de la porte principale de l’église, nous ont déclaré qu’ils allaient d’abord s’occuper de la rédaction de leur cahier de doléances, plaintes et remontrances, et en effet, y ayant vaqué, nous ont représenté ledit cahier, qui a été signé par ceux desdits habitants qui savent signer, et nous, après l’avoir coté par première et dernière page et paraphé ne varietur au bas d’icelle. Pour à quoi satisfaire ils ont l’honneur de représenter très-humblement à Sa Majesté le présent cahier, d’eux signé, les plaintes, doléances et remontrances des charges dont ils sont annuellement et journellement cotisés, soit par rapport aux terres qu’ils font valoir par leurs mains, soit par rapport à leurs consommations personnelles, soit enfin pour une infinité d’autres charges qu’ils sont obligés de supporter sans le concours des deux autres ordres ; à cet effet, ils ont dressé le présent cahier comme s’ensuit : 1° Les habitants de Bouvignies composant le tiers-état payent annuellement une somme considérable au receveur des Etats de Lille, pour les vingtièmes ordinaires ; MM. les ecclésiastiques et nobles de la province de Flandre, quoiqu’ils possèdent des biens immenses, ne payent presque rien. 2° Leurs possessions ne sont point fidèlement déclarées; il conviendrait d’en faire l’arpentage dans toutes les communautés pour les connaître ; il faudrait aussi faire imprimer un tableau de toutes les terres, prairies, bois de chaque bailliage par communauté, dont les exemplaires seraient déposés au greffe de chaque bailliage et un autre dans les fermes ou greffe de chaque communauté, afin que l’on pût s’y conformer pour les impositions. 3° Tous les occupeurs de terres de Bouvignies payent également aux receveurs desdits Etats de Lille une somme considérable annuellement, pour les cinq tailles ordinaires et la double taille ; le clergé et la noblesse ne payent rien du tout pour ces objets. 4° La capitation est imposée annuellement par les Etats, sur tous les habitants des communautés, sans qu’ils en connaissent les facultés, ce qui devrait être fait par les magistrats des lieux qui sont plus à portée de connaître les facultés de leurs concitoyens. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.] 201 5° Les vingtièmes royaux et sous pour livre imposés par édit du Roi de 1749 et depuis montent à une somme considérable, puisque la communauté de Bouvignies a payé, pour les années 1783, 1784 et 1786, une somme de 2,115 florins 14 partars 8 deniers par chaque année, somme qui sûrement n’a point été versée entière dans les coffres de Sa Majesté, puisque le recouvrement de cette dite somme emporte de trop grands frais selon l’administration actuelle, ce qui serait beaucoup moins onéreux si les rôles en étaient donnés par les greffiers des communautés du royaume qui sont à portée de connaître les changements d’occupation annuellement. 6° On est forcé de dire que les impositions actuelles sur les terres de Bouvignies sont aussi fortes que l’étaient les rendages dans la quinzième année de ce siècle; que la plus grande partie des laboureurs vont à leur ruine totale si elles ne sont modérées ; cependant quelques-uns demandent que les terres soient encore surchargées d’une taille de faux frais annuellement pour les secours des pauvres, quoique les revenus de la communauté soient suffisants pour y fournir, mais ils observent aussi qu’un pauvre ne doit point faire l’aumône à un autre pauvre, parce qu’ils sont égaux entre eux. 7° Les impôts sur les vins, bières et eaux-de-vie sont des plus exorbitants; les ecclésiastiques et nobles de la province ne payent rien, quoique ce soit eux qui en fassent la plus grande consommation, et que leurs facultés les mettent plus à portée d’y faire honneur ; en effet, l’eau-de-vie est payée au bureau des Etats de la province par les roturiers à trois livres cinq sous le pot, et par les ecclésiastiques et nobles à cinquante sous, différence d’autant plus injuste, que les plus riches payent le moins. Quand les Etats de Lille ont établi des cantines de fraude, il y a environ trois ans ; ils vendaient l’eau-de-vie à vingt-cinq sous le pot, et y gagnaient encore. 8° Pour le bien du royaume, le soutien de l’Etat et la décharge du tiers, il conviendrait que le clergé et la noblesse payassent exactement tous ces impôts, tailles et autres charges, comme les roturiers, sans distinction. 9° 11 serait aussi nécessaire que les deniers provenant des communautés des provinces de campagne soient portés et versés dans les coffres du Roi par des préposés dans tout le royaume, parce que dans ce cas les Etats des provinces ne pourraient plus s’enrichir ni graisser les mains des créatures qui leur sont attachées, au préjudice des sujets du Roi et de Sa Majesté même ; cela étant ainsi, le tiers-état serait déchargé de presque la moitié de ce qu’il paye annuellement, ce qui ne manquerait pas de faire fleurir l’Etat, de voir renaître les puissances du royaume. 10° Cela étant, il ne faudra plus que des assesseurs dans chaque communauté et un collecteur ou receveur, qui sera chargé de remettre les deniers au sieur préposé de chaque bailliage, qui portera chez le Roi le produit des impositions gratis , les revenus de sa charge lui étant payés pour cela. 11° Quanta l’impôt à lever sur les habitants des villes closes, les rôles en seront dressés par les magistrats sur tous les bourgeois dont ils connaissent les facultés et dont les deniers seront employés à solder les troupes de Sa Majesté; s’il y avait de la courtresse, il y sera supplée par ordre du Roi. 12° Il se perçoit encore des impôts pour presque toutes les denrées, comme l’huile à brûler, les chandelles, la cire, le cuir, le tabac; la culture est même gênée; il faut faire les déclarations, il y a des droits sur les bestiaux, sur les briques, tuiles, et généralement sur tout. De plus on paye dans l’intérieur du royaume, pour passer d’une province à une autre, des droits sur presque toutes sortes de denrées : c’est ce qui paraît injuste pour les sujets d’un même Roi, car ils devraient avoir le droit de tirer sans impôts, d’un bout du royaume à l’autre, les choses nécessaires à la vie, et, ce qui concerne le tout étant réciproque, alors il ne serait plus nécessaire d’employés, qui pourraient être reculés aux barrières de la frontière ; toutes ces contributions surchargent considérablement tous les sujets de Sa Majesté, et nous croyons qu’un seul impôt une fois payé annuellement par tous les sujets du royaume ne leur serait point si onéreux. 13° Un laboureur ou cultivateur ensemence une partie de terres en orge ou escourgeon et une autre partie en houblon; il paye les contributions pour les parties de terres qui sont aveties de ces denrées ; cependant s’il faut de la bière pour son usage et consommation, il faut qu’on paye encore l’impôt au receveur des Etats : on peut donc dire qu’on paye l’impôt de l’impôt même, comme si l’on mettait un impôt sur le' blé crû sur les terres déjà chargées d’impositions. La bière est une denrée de première nécessité ; les pauvres habitants et les soldats sont les seuls qui en souffrent; elle est cependant de cinq à six livres la rondelle de soixante-douze pots. La grande consommation du vin se fait par les nobles et ecclésiastiques, et ils sont exempts d’impôts. 14° Il est encore à représenter très-humblement à Sa Majesté, que le clergé et la noblesse ont, en qualité des seigneurs de haute justice, des plan-tis considérables de bois blancs et d’ormes qui bordent les chemins de leurs juridictions et qui empêchent les rayons du soleil de pénétrer sur les terres voisines ; que ces ombrages et les eaux qui tombent de leurs rameaux sur lesdites terres ensablent leurs racines , causent un tort des plus considérables aux habitants de la campagne, puisqu’il y a plus de 100 pieds de terrain sur lesquels on ne recueille presque riefi. On sait que les lois défendent de pareilles plantations; cependant personne n’oserait se pourvoir contre ces abus, crainte de s’attirer des procès ruineux. Pour quoi nous prions Sa Majesté de vouloir renouveler ses ordonnances à cet égard. Le parlement de Flandre a porté un arrêt le 14 août 1780, par lequel il est ordonné que les arbres et haies qui avoisinent les chemins s oient coupés, sous prétexte qu’ils empêchent le soleil de pénétrer sur lesdits chemins, à dessein, soi-disant, de les rendre plus praticables, en ordonnant également que lesdits chemins soient élargis à la concurrence de 22 pieds, et cet arrêt paraît de plus injuste et de plus rigoureux, en ce qu’il n’est observé que contre les particuliers qui ont des droits acquis de planter vis-à-vis leur héritage, puisque les flégards leur appartiennent suivant l’article 6 du chapitre Ier de la coutume de cette gouvernance; quant aux plantis des seigneurs, on les laisse subsister; il y a plus, c’est qu’ils s’emparent aujourd’hui des places des abattis des arbres de particuliers pour y exercer les leurs ; on ne doit point être surpris de cet arrêt rigoureux, parce qu’il a été porté à l’avantage des seigneurs dont Messieurs de la cour font partie, ce pour exercer les mêmes plantations dans Leurs terres. 202 [Etats gên. i�.Câhiers.] ARCHIVES PAltLEMËNTA!ÏÏES. fflSiHiage dé Dottal.j 15° Le grand nombre des pigeons dévastent les campagnes dans le temps de la moisson et des semailles, sans qu’on puisse y apporter secours, parce que, le plus souvent, ils appartiennent au clergé ou à la noblesse, qui sans doute en font commerce, parce qu’ils sont trop UombreUx pour leur consommation, abus qui doit être réformé, pour quoi nous avons toute confiance en la bonté de Sa Majesté, qui voudra bien faire réformer cet abus. 16° Il n’est qüe trop commun que, dans toutes les provinces du royaume, les abbayes et seigneurs particuliers lèvent sur leurs vassaux des droits de lods et ventes à chaque mutation de leurs héritages, connus sous les noms et titres des dixièmes ou cinquièmes deniers ; ils soutiennent que ceS droits leur aopartieniient depuis plusieurs siècles, à quoi on répond qu’il est possible, mais aussi on leur observera que ces mêmes droits ont varié dans tous les temps, puisqu'ils ont toujours été contestés ; les tribunaux du royaume peuvent attester cette vérité, puisqu’ils ont toujours retenti de ces sortes de contestations ; ces droits sont des plus onéreux au peuple: par exemple, le seigneur de Bouvignies a perçu sur ses vassaux, pendant plusieurs années, le dixième denier à la vente ou achat de leurs héritages ; cependant il vient de reconnaître solennellement que ces droits des dixièmes ne lui étaient pas dus par ses vassaux ; il ne réclame plus sur les habitants que deux sous d'entrée et deux Sous d’issue, conformément à ses titres. Les sommes ci-devant indûment payées ne doivent-elles pas être refondées aux vassaux qui les ont avancées t Gela paraît incontestable; cependant il n’ën fait rien, et il y a plus, il exige’et. se fait payer les cinquièmes deniers à la venté des héritages; lorsque le vendeuret l’acheteur sont tous deux forains, il perçoit encore le dixième denier; lorsqu’ils achètent des héritages des forains, il exige encore pareil droit s’ils prennent à cours de rentes certaine somme de deniers au moment qu’ils affectent leurs héritages, si le crédit rentier est forain de sa juridiction ; cependant le débit rentier, au bout de trois, quatre à six ans, rembourse les sommes qu’il a levées, et le droit seigneurial ne lui est point remis. Cette vexation paraît d’autant plus injuste, puisque la somme qu’il a prise et les fonds qu’il a aliénés n'étaient que momentanés. C’est au plus grand des monarques que ses sujets ont leur très-humble recours pour voir réprimer de pareils abus. Il exerce encore ce même droit sur les terres, fiefs et cotteries qui sont de sa mouvance, comme aussi le double de la rente sur les mains fermes et cotteries à la mort de l'héritier et autres droits, tels que les retraites pour surcharger les vassaux de nouvelles rentes, s’il veut retenir l’héritage qu’il a acquis, etc. 17° Depuis plusieurs années les Etats de Lille, ont une quantité de chevaux étalons qu’ils achètent à grand prix aux frais de la province, et qu’ils envoient dans plusieurs endroits delà châtellenie pour faire saillir les juments, avec défense de les faire saillir par d’autres. L’expérience cependant nous fait voir que les élèves étaient beaucoup plus beaux avant cette institution qu’ils ne le sont aujourd’hui, parce que la plus grande partie des étalons ne sont point propres pour l’agriculture; lie plus, cette institution inutile est extrêmement onéreuse aux provinces, tant par les frais d’achat que par les nourritures et gages des conducteurs; il n’y a aucun lieu de craindre que les étalons appartenant aux particuliers manquent jamais dans les provinces. 18° L’administration de la justice est défectueuse en ce qu’elle est trop lente par la facilité qu’ont les plaideurs de mauvaise foi de faire des chicanes sur les formes et sur mille autres bagatelles qui sont étrangères à l’objet sur lequel on plaide; il ne se trouve qüe trop souvent des personnes qûi mangent eu démarches et en sollicitations le double de la chose pour laquelle ils plaident; il serait donc à désirer que le gouvernement s’occupât des moyens propres à rendre les procédures plus courtes et par conséquent moins onéreuses au peuple; on verrait par là bien des injustices réprimées par la facilité qu’un chacun aurait à se faire rendre ce qui serait dû. Le commerce est à l’abri de ces malheureux et funestes inconvénients, à cause dë la sage institution des juges-consulS. 19° La vénalité des charges de judicature est encore Un de ces abus contre lequel on ne saurait trop réclamer. Les charges étant vénales, des personnes riches et souvent ineptes les achètent, et par là sont en droit de disposer de la fortune et de la vie des peuples en rendant la justice, sans que quelquefois ils en connaissent les premiers éléments, ce qui n’aurait pas lieu si les charges se rendaient au concours, car alors les plus savants et les plus dignes en seraient revêtus, et il faudrait de plus supprimer les épices et consignations, caries frais sont Souvent la cause que bien des personnes se trouvent obligées d’abandonner leurs droits faute de pouvoir y satisfaire. 20° Les tribunaux subalternes, tels qu’ils se trouvent dans les campagnes du royaume, sontmal organisés en ce que les magistrats sont nommés par les seigneurs hauts justiciers, ce qui fait souvent que les droits des particuliers sont mal défendus lorsqu’ils sont opposés à ceux desdits seigneurs. Pour prouver la vérité de ce que nous avançons, l’abbaye de Marchiennes s’est emparée des marais, du vivier et sec marais en 1759, quoiqu’ils avaient été cédés aux habitants des communautés pour l’usage, la paissori et nourriture dé leurs bestiaux ; cette abbaye céda 320 rasières aux communautés, sous de grandes charges gui sont annuellement d’une coupe d’avoine à chaque rasière de terre, plus une dîme de huit gerbes du cent, savoir cinq pour ladite abbaye et trois pour les curés, en outre, le double de la rente tous les quarante ans. Quelle vexation! et elle en retient 400 rasières et plus, à son profit au grand préjudice des paroisses de Bouvignies et Marchiennes, quoique ledit Bouvignies se soit défendu seul pendant un grand nombre d’années, à cause que le magistrat dudit Marcbien-nes était vendu à ceux de qui il tenait leur charge; ceux de Marchiennes ne se sont jamais unis à ceux de Bouvignies pour défendre leurs droits, ce qui a obligé le magistrat dudit Bouvignies, lassé d'une procédure qui leur était tout à fait ruineuse, de transiger forcément en faveur des religieux de Marchiennes. Pour obvier à ces inconvénients, nous demandons et requérons que les magistrats des paroisses de campagne soient choisis à la pluralité des voix et renouvelés tous les ans lors de la rédaction des comptes, ou prorogés d’après une assemblée de commune, si on est content de leur administration. Les habitants des communautés ci-contre ont l’honneur de se jeter aux pieds du plus juste des rois pour obtenir la révision et révocation de ladite transaction de 1759; c’est ce qui ferait le bonheur et l’avantage desdites communautés, lesquelles rendraient à jamais leurs louanges et bbligations à Sa Majesté. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Railliage dé Dottàh] 20g 21° La communauté de Bouvignies est composée de trois cent trente-deux chefs de familles ou feux, dont la moitié sont pour ainsi dire dans le cas d’être aumônes à cause de la cherté des blés et des autres denrées qui sont de première nécessité, ce qui a été occasionné par l’exportation des blés permise immodérément. Nous espérons que le gouvernement ne permettra plus dans la suite de pareilles exportations, qui sont la cause des calamités présentes ; pour le bien commun, nous mandons et requérons que dans toutes les villes ou autres endroits où on fait le marché au blé et autres grains, il soit permis aux habitants de ces campagnes de pouvoir acheter leurs grains comme les bourgeois sans distinction, soit pour faire marchandise comme autrement ; ce qui parait bien juste, puisque ces denrées de nécessité proviennent de la campagne, objet qui mérite absolument toute l’attention du gouvernement, de qui nous avons l’honneur d’attendre la révocation des ordonnances des magistrats des villes qui ont été portées à cet égard. 22° Les dîmes ont été accordées par les particuliers aux ecclésiastiques pour récompense de l’administration des sacrements, et pour donner au peuple les instructions dont il avait besoin pour le spirituel ; aujourd’hui, vu la population actuelle, les prêtres qui se trouvent dans les paroisses ne sont plus suffisants pour en remplir les fonctions pour lesquelles les dîmes ont été accordées; suppliant Sa Majesté que les décimateurs soient obligés de mettre à leurs frais dans toutes les paroisses des prêtres en assez grande quantité pour instruire le peuple tant pour le spirituel que pour le temporel; on pourrait les prendre, ces prêtres, dans toutes les abbayes qui sont si fréquentes en France, où il se trouve un grand nombre de religieux oisifs qui devraient se faire un plaisir de rendre ce service à l’Etat, et alors on verrait des enfants écoles dont partie d’eux pourrait former des sujets capables de rendre service à Sa Majesté et au public. Les abbayes même devraient être aussi des écoles publiques de charité. Les peuples supportent aussi le poids des ordres mendiants plus que les nobles et ecclésiastiques. 23° Les dîmes ne remplissent aucunement les charges de leur primitive institution. Le pape Gelase, dans le canon Quatuor, Xll, cause XXVIIe, question II, ordonne le patronage des biens de l’Église en quatre portions savoir : une pour l’évêque, la deuxième pour les prêtres qui desservent l’autel, la troisième pour les pauvres, et la quatrième pour les fabriques. Si cette institution était remplie, les curés seraient bien dotés, au lieu que la plupart sont à portion congrue, et eux-mêmes une charge pour la communautés; il n’y aurait plus de pauvres, et les crimes et délits seraient plus rares, la construction et l’entretien des églises ne seraient plus une surcharge pour les habitants. 24° Le Roi, par ses lettres patentes du 13 août 1773, assujettit dans la Flandre maritime le gros décimateur aux réparations, reconstructions et entretien des églises et presbytères. Le peuple de la Flandre walonne sollicite de la justice et de la bonté de Sa Majesté que cette loi leur soit rendue commune pour les mêmes raisons, et ces mêmes motifs repris dans lesdites lettres patentes de 1773 et dans le mémoire présenté au nom de la province. 25° La dîme, qui est pour les décimateurs un revenu net, sans qu’ils soient obligés de faire aucune dépensé pour là culture des têrrës qui les produisent, n’est pas imposée selon la valeur réelle, ce qui est injuste; par exemple, il se trouve dans bien des communautés des dîmes qui valent jusqu’à 6,000 florins et qui ne sont imposées que sur le pied de 14 bonniers de terre; cependant un propriétaire qui aurait ce même nombre de terre ne retirerait que 500 florins de fermage, et il serait obligé de payer autant que le décimateur qui retire 6,000 florins, par conséquent douze fois autant que ledit décimateur; pour mettre de la proportion dans l’imposition des dîmes avec celle des terres, il faudrait qu’une dîme qui produit 6,000 florins fût imposée sur le pied de 168 bonniers; cette imposition, quoique légale selon les règles de propoftion, serait encore plus onéreuse aux cultivateurs qu’aux décimateurs, car ledit cultivateur est tenu à une infinité de frais pour la culture de ses terres, auxquels les décimateurs ne sont nullement exposés. 26° Le terrage, les rentes foncières et les droits seigneuriaux, sont des revenus qui n’emportent pas plus de frais à celui qui les perçoit que la aime ; ils doivent par conséquent être imposés sur leur valeur réelle comme ladite dîme. 27° Nous demandons qu’il soit permis aux habitants de la campagne d’avoir des moulins à bras ou à cheval pour l’utilité des habitants de la province, parce qu’il manque des moulins à eau; donc ils ne sont pas fréquents, et qü’il est bien des temps que les moulins ne peuvent tourner par le manquement des vents ; alors les particü-culiers pourraient se servir de ces sortes de moulins pour se procurer de la farine pour faire leur pain, et que lesdits moulins ne soient suceptibles d’aucune imposition. 28° C’est aussi le désir des habitants de la province qu’il n’y ait qu’une même aune, une même mesure, un même poids, et la seule façon de compter par livre de France. 29° Il serait également à désirer que les familles roturières partageassent également tous les fiefs et nobles ténements qui leur seraient acquis par succession de leurs auteurs, et que la disposition en soit libre entre les mains de tous ceux qui en possèdent en propriété; en conséquence qu’il soit dérogé à toutes ces coutumes qui ont cette disposition, et que l’aîné des héritiers, soit en ligne directe oü collatérale, n’aura pas plus dans les fiefs qüe les frères ou sœurs, ou autres héritiers. 30° Nous désirons pareillement et requérons la suppression du droit de franc-fief, qui gêne et intéresse infiniment les habitants du tiers , soit dans l’achat, soit dans la possession que plusieurs appréhendent d’acheter des terres-fiefs, à cause des droits qu’ils sont tenus de payer à chaque mutation. 31° Le désir des habitants de la communauté de Bouvignies serait qüe le cahier général qui sera dressé au bailliage de Douai pour être envoyé aux États généraux, soit imprimé, et qu’il en soit délivré un exemplaire à chaque communauté, afin que lesdites communautés puissent voir si leurs vœux y sont renferniés. Et de suite les habitants, après avoir mûrement délibéré sur le choix des députés qu’ils sont tenus de nommer en conformité desdits lettres du Roi et règlement y annexé, et les voix ayant été par nous recueillies en la manière accoutumée, la pluralité des suffrages s’est réunie en faveur des sieurs Jean-Michel de Rosne, Jean-Este Martal, pour Albert Fontènier èt Nicolas Loübeft, qui ont 204 [États gen. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.] accepté ladite commission et promis de s’en acquitter fidèlement. Ladite nomination des députés ainsi faite, les-dits habitants ont en notre présence remis aux-dits sieurs de Rosne, Maital, Fontenier et Lou-bert, leurs députés, le cahier, afin de le porter à Rassemblée qui se tiendra le 30 du présent mois de mars devant M. le lieutenant général, et leur leur ont donné tous pouvoirs requis et nécessaires, à l’effet de le représenter dans ladite assemblée pour toutes les opérations prescrites par l’ordonnance susdite de M. le lieutenant général, comme aussi de donner pouvoirs généraux et suffisants, de proposer, remontrer et consentir tout ce qui peut concerner le besoin de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration de la propriété générale du royaume et le bien de tous et de chacun les sujets de Sa Majesté. Et de leur part, lesdits députés se sont présentement chargés du cahier des doléances de ladite communauté dudit Bouvignies, ont promis de le porter à ladite assemblée et de se conformer à tout ce qui est prescrit et ordonné par lesdites lettres du Roi, règlement y annexé et ordonnance susdatée, desquelles nominations des députés, remise de cahier, pouvoirs et déclarations, nous avons à tous lesdits comparants donné acte et avons signé, avec ceux desdits habitants qui savent signer et avec lesdits députés, notre présent procès-verbal, ainsi que le duplicata, que nous avons présentement remis auxdits députés pour constater leurs pouvoirs, et le présent sera déposé aux archives ou secrétariat de cette communauté lesdits jour et an susdit. Sigué de Rosne, Jean-Baptiste Marlot, P.-A. Fontenier, N. -J. Loubet, Massingue, J. -B. Moreau, D.-J. Carneau, J.-B. Sauvelon, J.-M. Lubré, J. -B. Piédans, Louis Fontanier, Briquet fils, C.-J. Moreau, H.-J. Dupas, Joseph Delérive fils, T.-J. Fauveau, J.-C. Carpentier, Gilles Cathelin, Beauchamp, Pierre-Joseph de Lecroix, A. -J. üe-laire, J.-B. Fauveau, P.-A. Deraux, J.-B. Dupont, Louis Pierrat, P.-M. Humart, J.-B. Wacher, F.-G. Delobelle, P.-J. Defontaine, P.-P. Herbage, A.-C. Cathelin, Louis Lambert, J.-B. Fortenir-Du-rieux, P.-J. Courtois, P.-J. Hermand, G. -A. Del-planque, J.-M. Debachy, N.-F. Riquier, P.-J, Haend, J. -F. Desaulty, J.-B. Desmons, A.-J. Briquet, F.-D. Huvet, vicaire de Bouvignies, Varoquier, greffier, Bienéourt. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants de la communauté de Flines. L’an 1789, le 23 mars, nous, manants et habitants du village de Flines, nés Français, âgés de vingt-cinq ans et au-dessus, assemblés ce jour-d’bui au lieu ordinaire des assemblées dudit Flines, à effet de procéder à la rédaction du cahier de doléances, plaintes et remontrances qu’il nous est enjoint de former pour présenter à Sa Majesté, le tout en exécution des lettres du Roi du 19 février dernier et règlement y annexé, et de l’ordonnance de M. le lieutenant général de la gouvernance de Douai du 7 du présent mois, à la formation duquel cahier avons procédé à ladite injonction de MM. les lieutenants et échevins dudit Flines, comme il s’ensuit. 1° Nous remontrons pour premier chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce qu’aucune personne du tiers-état du plat pays n’a part dans l’administration des vingtièmes et autres impôts réels ou personnels; nous demandons en conséquence qu’il y ait des assemblées provinciales dans lesquelles nous soyons représentés par des députés librement choisis. 2° Nous remontrons pour deuxième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que l’abbaye de Flines jouit de plusieurs places, telles que celle de Montreux et autres, sans titres; nous demandons en conséquence que ces places appartiennent à notre communauté. 3° Nous remontrons pour troisième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que les seigneurs de différents cantons de Flines se sont emparés du droit de plantis sur les flégards; nous demanderons que ces plantis appartiennent aux propriétaires des terres adjacentes auxdits flégards, étant tenus aux réparations des chemins. 4° Nous remontrons pour quatrième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que Madame l’abbesse de Flines a le droit de nommer les échevins dudit Flines ; nous demandons en conséquence qu’ils soient nommés par la communauté tous les deux ans. 5° Nous remontrons pour cinquième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que l’on assiste une partie des pauvres de -Flines avec les revenus des biens communaux, ce qui fait que notre répartition est diminuée annuellement. Nous demandons en conséquence qu’il soit défendu d’assister les pauvres avec lesdits revenus. 6° Nous remontrons pour sixième chef de doléances, quenous avons à nous plaindre de ce que l’abbaye de Flines fait valoir des bois, prairies et terres à labour sans payer presque de vingtièmes ni tailles. Nous demandons que ladite abbaye soit, pour ce qu’elle fait valoir, comme les habitants du lieu, de même M. le curé. 7° Nous remontrons pour septième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que le chapitre d’Arras et autres jouissent d’une dîme à huit du cent, audit Flines; nous demandons que cette dîme soit abolie et que la communauté soit chargée de la réédification de l’église ainsi que des autres charges y relatives. 8° Nous remontrons pour huitième chef de doléances, que nous avons à nous plaindre de ce que les seigneurs jouissent de plusieurs droits seigneuriaux tel que dixième et soixantième denier, à la vente d’un transport, relief, etc. Nous demandons que ces droits soient abolis. 9° Nous remontrons pour neuvième chef de doléances, qpe nous avons à nous plaindre de ce que nous payons beaucoup d’impôts sur les boissons ; nous demandons que lesdits impôts soient modérés, et que les ecclésiastiques et nobles les payent comme les habitants. 10° Nous remontrons que les terres de notre terroir sont imposées trop haut à proportion de celles des villages voisins, en payant trois florins du bonnier pour les tailles et quelquefois plus. 11° Nous demandons le reculement des barrières aux frontières. 12° Nous remontrons que Messieurs des Etats de Lille nourissent plusieurs chevaux entiers pour procurer des élèves ; nous demandons qu’il n’y ait plus de ces chevaux, et que nous soyions libres d’en avoir où nous voudrons. 13° Et enfin nous demandons qu’il soit arrêté que les Etats généraux seront assemblés périodiquement à des termes convenus.