SÉANCE DU 22 BRUMAIRE AN III (12 NOVEMBRE 1794) - N09 12-13 149 pendant le mois de vendémiaire, des biens nationaux divisés en 145 lots et estimés 85888 L, ont été vendus 669215 L. Insertion au bulletin et renvoi au comité des Finances (62). 12 Le citoyen Lambert, défenseur de la patrie, demande des secours. Renvoyé au comité des Secours (63). 13 Sept pauvres cultivateurs de la commune de Chéu, département de l’Yonne, ont été condamnés à des amendes au-dessus de leurs fortunes, pour avoir laissé pacager leurs vaches dans les bois nationaux. Ils demandent qu’il soit sursis à l’exécution du jugement du tribunal du district de Mont-Armance [ci-devant Saint-Florentin] et que leur pétition soit renvoyée au comité des Domaines pour faire un rapport. La Convention nationale passe à l’ordre du jour dans les termes suivants : La Convention nationale, après avoir entendu la pétition des citoyens Jean Guignard et six autres cultivateurs de la commune de Chéu, département de l’Yonne, qui demande qu’il soit sursis à l’exécution du jugement du tribunal du district de Mont-Armance, qui les condamne en des amendes pour des bestiaux conduits dans les bois et qu’on renvoie leur pétition au comité des Domaines pour faire un rapport, passe à l’ordre du jour. Le présent décret sera inséré au bulletin de correspondance (64). [Sept pauvres cultivateurs de la commune de Chéu, département de l’Yonne, ont été condamnés en des amendes exhorhitantes et au-dessus de leurs fortunes, pour avoir laissé aller leurs vaches dans des bois de la nation provenons d’un émigré, quoi que ces bois soient âgés de 10 années, et que leurs bestiaux n’ayant fait aucun dommage et qu’ils eussent coutume des les y faire pacager. Ils demandent qu’il soit sursis à l’exécution du jugement du district de Mont-Armance et que l’on renvoie leur pétition au comité des Domaines pour faire un rapport .] (65) (62) P.-V., XLIX, 120. (63) P.-V., XLIX, 120. (64) P.-V., XLIX, 120-121. Moniteur, XXII, 486; J. Mont., n° 32; Rép., n° 53 (suppl.); Bull., 24 brumaire (suppl.). (65) C 326, pL. 1416, p. 4. J. Fr., n° 778, mention. [Louis Besson, Jean Gouley, Nicolas Besson, Jean Guignard, Nicolas Yot, Symphorien Legros, Nicolas Millon, tous pauvres cultivateurs manouvriers présentent une pétition à la Convention nationale, Chéu, s. d.] (66) Exposent Louis Besson, cultivateur, Jean Gouley, manouvrier, Nicolas Besson, manou-vrier, Jean Guignard, laboureur et Nicolas Yot, manouvrier, Symphorien Legros et Nicolas Millon, manouvrier, tous de la commune de Chéu, district de Mont-Armance, ci-devant Saint-Florentin qu’ils viennent d’être traduis devant le tribunal du district de Mont-Armance, ci-devant Saint-Florentin, et condamnés a des amendes et restitutions considérables ainsi qu’il est facile de s’en convaincre par les avertissements qui viennent de leur etre donnés par le receveur de la régie nationale. Mais que ces condamnations sont aussi injustes qu’exhorbitantes, par les procès-verbaux dressés on y reconnoitra qu’ils n’étoient point en délits, en effet les bois dans lesquels paturoient leurs bestiaux sont âgés de dix ans. Les anciennes lois les regardoient en défense à l’âge de sept ans et les nouvelles a l’age de cinq ans de maniéré que les bestiaux a ces âges ne peuvent y faire de dégâts. Dependroit-il donc d’un garde de dire tout a coup vos bestiaux commettoient des dégâts par ce qu’il y a du taillis dans les bois de dix ans ou qui ont acquis l’age ou la loi les regarde en état de défenses : sans doute si la justice n’avait pas de bases plus certaines le législateur se seroit inutillement donné la peine de faire des loix pour reconnoître et faire connoitre a quel âge les bois ne craignent plus la dent des bestiaux, ce seroit inutillement que nos législateurs auroient dit que les bois sont en réserve, c’est à dire que l’on ne doit point y mener de bestiaux jusqu’à ce qu’ils ayent acquis l’âge de cinq ans. D’après le rapport même du garde il est reconnu que les bois dans lesquels les bestiaux des exposants paturoient étoient âgés de dix ans. Si ce bois est endomagé comme le dit le garde ce ne sont point les exposants qui en sont les auteurs, on peut moins leur imputer qu’au garde lui-même s’il n’a pas fait son devoir dans les tems et d’après son sistème qui a été adopté par les juges du tribunal de St Florentin il en resulteroit que les bois seroient toujours en reserve et les habitans des campagnes privés de la ressource d’y faire jamais pâturer leurs bestiaux et les domages, peines et amendes seroient toujours dans le cas d’être prononcés. Par exemple un délit est comis dans des taillis âgés d’audessous de cinq ans, ce délit est réparé par le délinquant qui paye les amende et restitution suivant le sisteme du garde et des juges de St Florentin, il repouse un nouveau taillis sur le bois ou il y a eu un délit quoique tout le restant soit passé l’age de cinq ans, s’il y va des bestiaux cela fait un nouveau délit aussi punissable que le premier, la (66) C 326, pl. 1416, p. 11. 150 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE peine de l’amende et restitution a été prononcée une première fois, ceci est bien entendu pour le tort que cela fait au bois en ce que cela se trouve en moindre coupe lorsqu’elle vient a faire et cependant de la manière dont l’entendent les juges cette réparation pourroit se faire a l’infini. Ce n’est pas là ce que les législateurs ont voulu, ce n’est pas là ce que la justice doit vouloir et les exposans pleins de confiance dans la sagesse des loix esperent que les jugemens rendus contre eux n’auront pas d’exécution. Si au defaut de la loi ils eussent été prévenus que les bestiaux ne dévoient pas pâturer dans les bois dont il s’agit par les raisons qu’il y poussoit en quelque part des tallis, ils se croi-roient en tort! mais la loi leur a permis mais rien ne leur a été [illisible] ils se croyent sans tort. Il est bon d’observer que de tems immémorial et en vertu d’un titre bien autentique les habitans de Chéu ont eu et conservé le droit de mener et faire paitre leurs bestiaux dans les bois et ont agit lorsqu’ils ont acquis l’age prononcé par la loi. Le séquestre n’a pas plus de droit de les empecher que Tardieu Malessye ne l’avoit lui-même. Les exposant pleins de confiance dans la justice nationale demandent à être déchargé des condamnations contr’eux prononcés quil ne pourroient acquitter qu’en vendant leurs bestiaux pour la plus grande partie. Jean Gouley, Louis Besson. [Symphorien Legros et Nicolas Millon, manou-vriers de Chéu, à la Convention nationale, s. d.] (67) Aux citoyens Représentants du peuple près la Convention nationale. Exposent Simphorien Legros et Nicolas Millon, manouvriers demeurant à Chéu, district de Mont-Armance, ci-devant Saint-Florentin, département de l’Yonne, disans que le 14 prairial dernier, il auroit été dressé procès verbal contreux parce que la fille de Legros et la femme de N. Millon auroint laissé échaper 4 vaches et 2 veaux qui paissaient librement dans des taillis de 7 ans appartenant cidevant à Tardieu, situés dans la commune de Chéu et maintenant séquestrés. Que malgré que ces biens soient en deffense puisqu’ils ont 7 ans de l’aveu même des gardes, ainsi qu’il est constaté par leur procès verbal dont copie est jointe aux pièces et que lors que Tardieu en était en possession, les bestiaux y paturoient journellement, ils ont été condamnés, scavoir Legros en 250 L d’amende, et Millon en 360 L, lesquelles sommes si elles sont exigés des exposants, les réduiront pour etre payées à la mendicité, pourquoy ils ont recours à l’autorité supérieure et la supplient de faire (67) C 326, pl. 1416, p. 4. Les signatures ne sont pas de la même écriture que le texte. modérer ces amendes sous les promesses de ne jamais récidiver. Nicolas Millon, Simphorien Legros. [ Procès-verbal dressé à l’encontre de Symphorien Legros] (68) Cejourd’huy deux prairial deuxième année de la République française devant nous Antoine Lenormand juge de paix et de police correctionnelle du canton de Mont-Armande cy-devant Saint-Florentin, sont comparus les citoyens Corne Babeuille et Nicolas Chevallier tous deux gardes nationaux, ledit Babeuille demeurant à Jaulges, le dit Chevallier demeurant à Percey, lesquels nous ont dit et rapporté que ce jourd’hui sur les trois heures après midy faisant leur ronde ordinaire pour veiller à la conservation des biens nationaux confiés à leur inspection étant parvenu à l’heure que dessus au bois du Souvois size au finage de Chéu, ils auroient trouvé la fille de Simphorien Legros manouvrier, demeurant à Chéu et une autre fille a eux inconnu, qui gardoient à garde faite quatre vaches, un veau et deux porcs, dont deux vaches sont poil rouge et les deux autres et le veau sont poil noir fleury, dans ledit bois dont l’age n’est actuellement que de sept ans, ou il y a beaucoup de délits de commis, le dit bois étant beaucoup vilipendé par les dégâts que sy commettoient journellement; sur quoi ils auroient demandé à la fille du dit Legros pourquoi elle menoit ainsy pacager ses vaches dans ledit bois, elle leur auroit répondu que le dit bois avoit neuf ans et qu’il lui etoit permis di aller, que sur la réponse lesdits Babeuille et Chevallier lui auroit représenté que quoique le dit bois eut neuf ans, ils ne l’ai fait pas di croire et un taillis actuellement de l’age de deux a trois ans et que consequament elle ni d’autre n’a droit d’y mener, ni faire pacager leurs bestiaux, et ont à ladit fille Legros dresser procès verbal sur laquelle déclaration elle nous auroit répondu qu’elle ne nous craignait pas, et que nous faisions notre devoir de tout quoi ils ont crue devoir venir aussitôt nous faire leur présent rapport qu’ils nous ont assurés par serment partout conforme a la vérité, avons ledit Babeuille et Chevallier signés avec nous; fait par double minute les jours et an que dessus, signé Nicolas Chevallier et Corne Babeuille et Lenormand, juge de paix dûment enregistré a St florentin le cinq prairial du courant par le cler qui a reçu dix sols. L’an deux de la République française une et indivisible le dix sept prairial à la requete du citoyen agent national près la maitrise des eaux et forêts de Sens, y demeurant, poursuitte à diligence du citoyen commissaire national pour le tribunal du district St-Florentin y demeurant, François Thérazé Agneau Mourée huissier audiancier au tribunal du District de (68) C 326, pl. 1416, p. 6.