52 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Tableau (suite) 39 Lettre du commissaire des revenus nationaux, à laquelle sont joints plusieurs exemplaires de l’état de situation, au 10 floréal, présent mois, de la confection des rôles de la contribution mobiliaire de 1792 dans les départemens de la République (1). 40 Lettre du citoyen Fressinet, employé dans les charrois de l’armée d’Italie, qui offre à la patrie la somme de 50 liv., et annonce que, depuis les bords du Var jusqu’aux rives de la Seine, il a vu les espérances des plus belles récoltes. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [Paris, 15 flor. U] (3). « Citoyens représentans, Le service des charrois de l’armée d’Italie m’appelant à Paris, je viens vous annoncer une agréable vérité. Depuis les bords du Var jusques aux rives de Seine, la providence, connaissant nos besoins nous promet une récolte des plus abondantes et surtout des plus précosses. Sçavez-vous pourquoi, Citoyens représentans les bleds sont si beaux cette année ? C’est parce que les prêtres ne les ont pas bénis; c’est encore (1) P.-V., XXXVI, 315. (2) P.-V., XXXVI, 315 et XXXVII, 85. (3) C 302, pl. 1083, p. 1. parce que le sol de la France se régénère avec les français; c’est encore parce que la terre de la liberté se purge de cette horde d’esclaves dévoués à la volonté despotique des tyrans qui veulent perdre la liberté et les peuples qui en jouissent; c’est enfin parce que Dieu aime les patriotes; aussi la patrie reconnaissante devrait-elle placer l’image de cet Etre suprême dans le Panthéon français avec ces vers connus : Loin de rien dire ici de cet Etre suprême, Gardons en l’adorant un silence profond. Le mistère est immense et l’esprit se confond, Pour dire ce qu’il est, il faut être lui-même. Je joints à ma pétition cinq assignats de dix livres pour aider à subvenir aux fraix de la guerre. Salut, hommage et respect ». Fressinet. 41 Un membre du Comité de salut public [BARERE] fait part des nouvelles que le Comité a reçues. « Ce n’est pas aujourd’hui le cri de la victoire, >» dit-il; c’est l’attitude du courage : Landrecies » est tombé au pouvoir de l’Autrichien, nos » batteries ont été démontées. » Le rapporteur lit une lettre du général Ferrand, qui rend compte de cet événement sans en donner les détails (1). [Du Q.G. de Réunion-sur-Oise, 12 flor. II]. «Landrecies n’est plus en notre pouvoir; ses batteries démontées ne lui ont pas permis une (1) P.-V., XXXVI, 315. Bln, 15 flor. 52 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Tableau (suite) 39 Lettre du commissaire des revenus nationaux, à laquelle sont joints plusieurs exemplaires de l’état de situation, au 10 floréal, présent mois, de la confection des rôles de la contribution mobiliaire de 1792 dans les départemens de la République (1). 40 Lettre du citoyen Fressinet, employé dans les charrois de l’armée d’Italie, qui offre à la patrie la somme de 50 liv., et annonce que, depuis les bords du Var jusqu’aux rives de la Seine, il a vu les espérances des plus belles récoltes. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [Paris, 15 flor. U] (3). « Citoyens représentans, Le service des charrois de l’armée d’Italie m’appelant à Paris, je viens vous annoncer une agréable vérité. Depuis les bords du Var jusques aux rives de Seine, la providence, connaissant nos besoins nous promet une récolte des plus abondantes et surtout des plus précosses. Sçavez-vous pourquoi, Citoyens représentans les bleds sont si beaux cette année ? C’est parce que les prêtres ne les ont pas bénis; c’est encore (1) P.-V., XXXVI, 315. (2) P.-V., XXXVI, 315 et XXXVII, 85. (3) C 302, pl. 1083, p. 1. parce que le sol de la France se régénère avec les français; c’est encore parce que la terre de la liberté se purge de cette horde d’esclaves dévoués à la volonté despotique des tyrans qui veulent perdre la liberté et les peuples qui en jouissent; c’est enfin parce que Dieu aime les patriotes; aussi la patrie reconnaissante devrait-elle placer l’image de cet Etre suprême dans le Panthéon français avec ces vers connus : Loin de rien dire ici de cet Etre suprême, Gardons en l’adorant un silence profond. Le mistère est immense et l’esprit se confond, Pour dire ce qu’il est, il faut être lui-même. Je joints à ma pétition cinq assignats de dix livres pour aider à subvenir aux fraix de la guerre. Salut, hommage et respect ». Fressinet. 41 Un membre du Comité de salut public [BARERE] fait part des nouvelles que le Comité a reçues. « Ce n’est pas aujourd’hui le cri de la victoire, >» dit-il; c’est l’attitude du courage : Landrecies » est tombé au pouvoir de l’Autrichien, nos » batteries ont été démontées. » Le rapporteur lit une lettre du général Ferrand, qui rend compte de cet événement sans en donner les détails (1). [Du Q.G. de Réunion-sur-Oise, 12 flor. II]. «Landrecies n’est plus en notre pouvoir; ses batteries démontées ne lui ont pas permis une (1) P.-V., XXXVI, 315. Bln, 15 flor. 53 SÉANCE DU 15 FLORÉAL AN II (4 MAI 1794) - N° 41 plus longue résistance; telle est la lettre que je reçois en ce moment du général de division Fromentin et dont je vous envoie copie. «Après l’attaque du 7, j’en avais tenté une seconde le 10. Nos efforts ont été vains; la faiblesse et le délabrement de la division de Cambrai, qui avait perdu presque toute son artillerie, ne lui a pas permis d’appuyer ma gauche. «Les divisions de droite de l’armée se sont battues avec vigueur; trois cents hommes et plusieurs chevaux ont été taillés en pièces par les escadrons du 22e de cavalerie et du 12e de dragons. Quant aux détails de la prise de cette place, je n’en ai encore aucuns; dès qu’il m’en sera parvenu je m’empresserai de vous les adresser. « Salut et fraternité. Ferrand (1) . L’amour de la patrie, ajoute-t-il, reprend de l’énergie par les revers : il n’y a que la lâcheté ou la malveillance qui a ou qui sème les alarmes... Les Romains vendoient le terrein sur lequel campoit Annibal. Le Comité s’occupe des moyens d’attaquer les places de l’ennemi. Ici le rapporteur donne quelques détails qui doivent immortaliser les vainqueurs de Cour-tray, de Fûmes et de Menin. Il observe que l’ardeur des Républicains a emporté ces trois villes en trois jours, quand la perfidie autrichienne n’a obtenu Landrecies qu’après deux mois d’intrigues (2). BARERE : Si j’avais la bassesse de parler à la cour d’un roi je déguiserais ce revers; ces ménagements industrieux conviennent mal à des républicains. Si j’étais en présence des factions; je présenterais cet événement avec l’art nécessaire pour faire paraître leur joie scandaleuse et souterraine lorsque la République cesse un instant d’être heureuse; mais je parle aux représentants d’un peuple libre, et je dois leur dire que la victoire a été un instant absente du camp français. L’armée du Nord en rappelle, c’est à vous de l’y maintenir par une attitude ferme; c’est de ce lieu qu’est toujours sorti l’exemple du dévouement et du courage. Déjà avant-hier, avant même que le comité eût la certitude de la prise de Landrecies, des hommes qui se disent citoyens formaient des plaintes de ce que cette nouvelle n’arrivait pas assez vite et de ce qu’on cherchait à déguiser le succès de l’ennemi. Nous avons apprécié cette impatience hypocrite, et nous dénonçons à la Convention, par forme d’accusation morale et civique, cette secte nouvelle, héritière des factions punies, composée d’hommes qui, affectant un zèle immodéré pour les intérêts du peuple, sont les premiers à l’alarmer, à l’effrayer et à empoisonner ses succès. Se plaçant à l’affût de mauvaises nouvelles, en créant quand il n’en vient point, les pressentant par leurs vœux impies, et les exagérant quand il en existe quelques-unes, on les voit s’apitoyer sur les succès de la campagne, sur les forces des ennemis, sur la tactique des Autrichiens; mais notre tactique, à nous, c’est de les (1) Mon., XX, 380. (2) P.-V., XXXVI, 316. observer et de les découvrir, comme la tactique des armées est de combattre les ennemis jusqu’au dernier soupir. On a jeté l’alarme parce que Landrecies est pris ! Que diraient donc ces lâches alarmistes si d’autres places étaient prises, si des places importantes étaient attaquées et se rendaient ? Proposeraient-ils de perdre la liberté ? proposeraient-ils de lâches transactions, ces hommes qui ne balancent jamais trente victoires avec un échec ? L’ennemi a la carte géographique du courage ou de la lâcheté de ceux qui défendent les places ou les frontières. Est-ce à nous d’avoir cette échelle honteuse ? Ne nous y méprenons pas; ce n’est pas l’amour de la patrie qui s’alarme, c’est la haine de la République qui se relève d’un ton hypocrite. L’amour de la patrie reprend de l’énergie par des revers; il n’y a que la lâcheté ou la malveillance qui a ou qui sème des alarmes. « Combattez, nous écrivent de Lille, le 12 de ce mois, Richard et Choudieu, représentants du peuple près l’armée du Nord; combattez de tous vos moyens les alarmistes; ce sont des contre-révolutionnaires ». Le patriote ne voit en tout que le salut de la patrie; il ne s’abandonne jamais à ces spéculations de désastres; elles annoncent le désir du malheur public. L’aristocratie chassée de Paris et reléguée dans des maisons d’arrêt, ou se ralliant dans les départements autour de quelques calomnies, relève la tête au plus léger succès de l’ennemi. C’est à la Convention à rabaisser sans cesse ces insolentes espérances; c’est à la Convention à relever le courage et l’esprit public de l’intérieur, à les mettre à la hauteur du courage et de l’esprit public des armées. Les Romains vendaient le terrain sur lequel campait Annibal; le comité s’occupe des moyens d’attaquer les places de l’ennemi. Déjà la guerre est portée avec succès sur son territoire; trois de leurs places ont été au pouvoir de la République en trois jours, et ce n’est qu’après deux mois d’intrigues, de perfidies et d’attaques, que Landrecies a été pris. N’avons-nous pas aussi pris Courtray, Fumes et Menin ? Et ici je dois faire connaître à la Convention des détails glorieux pour l’armée du Nord qui est dans la Flandre maritime, qui nous sont donnés par le général Pichegru. Le 9, le général de division Moreau, qui occupait le front de l’attaque, fit, avec le général de brigade Vandamme, une reconnaissance sur la place pour examiner si elle pouvait être enlevée de vive force; il fut convaincu que les nouvelles fortifications, quoiqu’en terre, la mettaient parfaitement à l’abri d’un coup de main, et que nous ne pourrions le tenter sans nous exposer à perdre plusieurs mille hommes, ce qui le détermina à en ordonner le bombardement, qui commença dans l’après-midi du même jour et fut continué toute la nuit. Le lendemain matin il fit faire une sommation au général Arnersten, commandant dans la place, qui, comptant sur des secours de la part de l’armée ennemie, répondit simplement qu’accoutumé à faire son devoir il ne se rendrait pas. Sur cette réponse, le bombardement recommença, malgré le vœu de nos troupes qui demandèrent toutes l’assaut. Le général Vandamme ayant observé que les fossés, larges et profonds, dont la place était environnée, ne permettaient pas que l’on 53 SÉANCE DU 15 FLORÉAL AN II (4 MAI 1794) - N° 41 plus longue résistance; telle est la lettre que je reçois en ce moment du général de division Fromentin et dont je vous envoie copie. «Après l’attaque du 7, j’en avais tenté une seconde le 10. Nos efforts ont été vains; la faiblesse et le délabrement de la division de Cambrai, qui avait perdu presque toute son artillerie, ne lui a pas permis d’appuyer ma gauche. «Les divisions de droite de l’armée se sont battues avec vigueur; trois cents hommes et plusieurs chevaux ont été taillés en pièces par les escadrons du 22e de cavalerie et du 12e de dragons. Quant aux détails de la prise de cette place, je n’en ai encore aucuns; dès qu’il m’en sera parvenu je m’empresserai de vous les adresser. « Salut et fraternité. Ferrand (1) . L’amour de la patrie, ajoute-t-il, reprend de l’énergie par les revers : il n’y a que la lâcheté ou la malveillance qui a ou qui sème les alarmes... Les Romains vendoient le terrein sur lequel campoit Annibal. Le Comité s’occupe des moyens d’attaquer les places de l’ennemi. Ici le rapporteur donne quelques détails qui doivent immortaliser les vainqueurs de Cour-tray, de Fûmes et de Menin. Il observe que l’ardeur des Républicains a emporté ces trois villes en trois jours, quand la perfidie autrichienne n’a obtenu Landrecies qu’après deux mois d’intrigues (2). BARERE : Si j’avais la bassesse de parler à la cour d’un roi je déguiserais ce revers; ces ménagements industrieux conviennent mal à des républicains. Si j’étais en présence des factions; je présenterais cet événement avec l’art nécessaire pour faire paraître leur joie scandaleuse et souterraine lorsque la République cesse un instant d’être heureuse; mais je parle aux représentants d’un peuple libre, et je dois leur dire que la victoire a été un instant absente du camp français. L’armée du Nord en rappelle, c’est à vous de l’y maintenir par une attitude ferme; c’est de ce lieu qu’est toujours sorti l’exemple du dévouement et du courage. Déjà avant-hier, avant même que le comité eût la certitude de la prise de Landrecies, des hommes qui se disent citoyens formaient des plaintes de ce que cette nouvelle n’arrivait pas assez vite et de ce qu’on cherchait à déguiser le succès de l’ennemi. Nous avons apprécié cette impatience hypocrite, et nous dénonçons à la Convention, par forme d’accusation morale et civique, cette secte nouvelle, héritière des factions punies, composée d’hommes qui, affectant un zèle immodéré pour les intérêts du peuple, sont les premiers à l’alarmer, à l’effrayer et à empoisonner ses succès. Se plaçant à l’affût de mauvaises nouvelles, en créant quand il n’en vient point, les pressentant par leurs vœux impies, et les exagérant quand il en existe quelques-unes, on les voit s’apitoyer sur les succès de la campagne, sur les forces des ennemis, sur la tactique des Autrichiens; mais notre tactique, à nous, c’est de les (1) Mon., XX, 380. (2) P.-V., XXXVI, 316. observer et de les découvrir, comme la tactique des armées est de combattre les ennemis jusqu’au dernier soupir. On a jeté l’alarme parce que Landrecies est pris ! Que diraient donc ces lâches alarmistes si d’autres places étaient prises, si des places importantes étaient attaquées et se rendaient ? Proposeraient-ils de perdre la liberté ? proposeraient-ils de lâches transactions, ces hommes qui ne balancent jamais trente victoires avec un échec ? L’ennemi a la carte géographique du courage ou de la lâcheté de ceux qui défendent les places ou les frontières. Est-ce à nous d’avoir cette échelle honteuse ? Ne nous y méprenons pas; ce n’est pas l’amour de la patrie qui s’alarme, c’est la haine de la République qui se relève d’un ton hypocrite. L’amour de la patrie reprend de l’énergie par des revers; il n’y a que la lâcheté ou la malveillance qui a ou qui sème des alarmes. « Combattez, nous écrivent de Lille, le 12 de ce mois, Richard et Choudieu, représentants du peuple près l’armée du Nord; combattez de tous vos moyens les alarmistes; ce sont des contre-révolutionnaires ». Le patriote ne voit en tout que le salut de la patrie; il ne s’abandonne jamais à ces spéculations de désastres; elles annoncent le désir du malheur public. L’aristocratie chassée de Paris et reléguée dans des maisons d’arrêt, ou se ralliant dans les départements autour de quelques calomnies, relève la tête au plus léger succès de l’ennemi. C’est à la Convention à rabaisser sans cesse ces insolentes espérances; c’est à la Convention à relever le courage et l’esprit public de l’intérieur, à les mettre à la hauteur du courage et de l’esprit public des armées. Les Romains vendaient le terrain sur lequel campait Annibal; le comité s’occupe des moyens d’attaquer les places de l’ennemi. Déjà la guerre est portée avec succès sur son territoire; trois de leurs places ont été au pouvoir de la République en trois jours, et ce n’est qu’après deux mois d’intrigues, de perfidies et d’attaques, que Landrecies a été pris. N’avons-nous pas aussi pris Courtray, Fumes et Menin ? Et ici je dois faire connaître à la Convention des détails glorieux pour l’armée du Nord qui est dans la Flandre maritime, qui nous sont donnés par le général Pichegru. Le 9, le général de division Moreau, qui occupait le front de l’attaque, fit, avec le général de brigade Vandamme, une reconnaissance sur la place pour examiner si elle pouvait être enlevée de vive force; il fut convaincu que les nouvelles fortifications, quoiqu’en terre, la mettaient parfaitement à l’abri d’un coup de main, et que nous ne pourrions le tenter sans nous exposer à perdre plusieurs mille hommes, ce qui le détermina à en ordonner le bombardement, qui commença dans l’après-midi du même jour et fut continué toute la nuit. Le lendemain matin il fit faire une sommation au général Arnersten, commandant dans la place, qui, comptant sur des secours de la part de l’armée ennemie, répondit simplement qu’accoutumé à faire son devoir il ne se rendrait pas. Sur cette réponse, le bombardement recommença, malgré le vœu de nos troupes qui demandèrent toutes l’assaut. Le général Vandamme ayant observé que les fossés, larges et profonds, dont la place était environnée, ne permettaient pas que l’on 54 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE cédât à leur ardeur, plusieurs répondirent : « Eh bien, puisque les fossés sont un des plus grands obstacles à la prise de la place, nous vous demandons à y arriver les premiers; nos corps les combleront, et nos camarades monteront alors facilement». (Vifs applaudissements). Croyez-vous qu’avec de tels soldats vous avez à vous attrister sur les chances inséparables de la guerre ? et pensez-vous que ceux qui veulent combler de leurs corps les fossés pour que les seconds bataillons attaquent une place, laissent longtemps la frontière déshonorée par les hordes autrichiennes ? Partout règne l’audace de la République et la soif de la gloire (1). (Vifs applaudissements ) . 42 [BARERE] rend compte ensuite du combat de la frégate la Pomone contre un vaisseau anglais très-supérieur en force, auquel elle n’a cédé qu’après trois heures du combat le plus opiniâtre et le mieux soutenu (2). BARERE : Je vous ai annoncé le dernier jour un revers maritime, une frégate prise par l’ennemi; mais cet événement même est couvert de gloire pour la marine de la République. L’équipage de la Pomone ne s’est rendu qu’à la supériorité des forces et qu’après avoir perdu tous ses mâts, et après que les marins de la République ont longtemps combattu contre l’Anglais d’une main, tandis que de l’autre ils éteignaient le feu qui dévorait notre frégate. La Pomone était parvenue à désemparer le commandant anglais de son grand mât de hune et avait soutenu le combat avec avantage, lorsqu’une bordée d’une des autres frégates lui abat son grand mât majeur, lequel en tombant entraîne dans sa chute la perte du mât d’artimon. Cette perte n’empêchait pas la Pomone de tirer, et le feu même qui prit à son bord ne ralentit point l’ardeur des braves républicains qui la montaient, et ce n’est qu’après plus de 3 heures de combat que cette frégate s’est rendue; elle avait réussi à éteindre le feu qui faisait craindre pour ceux qui y étaient renfermés (3) . Aux sentimens consolans qu’inspire cette résistance héroïque, se mêle la joie des nouvelles prises faites sur l’ennemi (4). BARERE : Nos marins ont été plus heureux; l’aviso dont le nom rappelle un zélé républicain, l’aviso le Lazousky a fait une prise sous le feu du canon de la forteresse espagnole. (1) Mon., XX, 380; J. Sablier, n° 1298; J. Mont., n° 173; J. Fr., n° 588; Débats, n° 592, p. 184-187; M.TJ. XXXIX, 252; C. Eg. n“ 625; Audit, nat. n° 589; Feuille Rép., n° 306; J. Paris, n° 490; Ann. patr., n° 489; J. Matin, n° 681; Rép., n° 136; J. Per-let, n° 590; J. IJniv., n° 1624; J. Perlet, n° 591; S. Culottes, n° 444; Arm. R.F., nos 156 et 157; Mess. soir, n° 625. (2) P.-V., XXXVI, 316. Bin, 15 flor. (3) Mon., XX, 381; J. Fr., n° 588; Feuille Rép., n° 306. (4) P.-V., XXXVI, 316. Il donne ici lecture de la lettre du cn Farjenet, capitaine de l’aviso le Lazousky, datée du 5 flor. H: « Etant dans l’ouest de Saint-Sébastien, les républicains qui composaient l’équipage de l’aviso le Lazousky ont eu connaissance, à cinq heures du matin, de deux bricks qui longeaient la terre à la distance d’une demi-lieue. Nous les chassâmes le plus près possible, et, voyant que nous ne pouvions plus approcher sans compromettre l’aviso qui aurait été jeté à terre par le calme, nous mîmes nos deux embarcations à la mer, et de suite de braves républicains plus courageux les uns que les autres s’embarquèrent et furent à la poursuite de ces deux navires, qui commençaient à entrer dans une baie lorsque nos braves sans-culottes, qui avaient déjà fait deux lieues de chemin pour les avoir, s’approchèrent d’eux. On leur tira de terre plusieurs coups de canon. Ceci ne les intimida pas; au contraire, ils redoublèrent de courage, et malgré la canonnade de ces gueux-là, ils réussirent à amariner le navire le plus près, qu’ils ont trouvé chargé de blé. De suite ils voulurent aller sur l’autre, qui tirait tant qu’il pouvait des coups de pierrier et de fusil pour demander du secours; il en reçut par le moyen de 25 chaloupes qui furent le remorquer. Alors nos braves sans-culottes, ne se trouvant pas assez forts, furent obligés de s’en retourner. Quelque temps après 5 ou 6 de ces chaloupes vinrent armées pour chercher à s’emparer de celui qui était en notre pouvoir. On les laissa bien accoster, et lorsqu’elles furent à portée de fusil on leur fit changer de route par le moyen de la mousque-terie et de deux pierriers qu’il y avait dans nos embarcations. Ces lâches, qui étaient au moins deux cents, ont tiré deux ou trois coups de pierrier et ont bien vite viré de bord à terre. Nos braves sans-culottes leur ont bien montré qu’ils n’avaient pas peur d’eux. Aujourd’hui nous venons de faire entrer dans le pertuis ladite prise. » Farjenet. BARERE : Ce n’est pas à cette seule expédition que la marine s’est bornée; cette journée ne sera pas si malheureuse si j’apprends à la Convention la prise de vingt bâtiments ennemis, soit corsaires, soit marchands, tous chargés d’objets de première nécessité. Un de ces bâtiments pris a cela de remarquable en notre faveur : c’est qu’il était destiné pour l’Angleterre, et qu’il lui apportait de Portugal une grande quantité d’or et d’argent pour solder les assassins de la République. Le trésor public de la France fera expier à ce métal les crimes qu’il fait commettre en le consacrant aux subsistances du peuple qui combat pour sa liberté. Voici le tableau des prises (1). Prises entrées au port de Brest Un sloop anglais chargé de tan, sortant de Plymouth. Un navire anglais de 400 tonneaux, chargé de salaisons et autres marchandises. (1) Mon., XX, 381. 54 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE cédât à leur ardeur, plusieurs répondirent : « Eh bien, puisque les fossés sont un des plus grands obstacles à la prise de la place, nous vous demandons à y arriver les premiers; nos corps les combleront, et nos camarades monteront alors facilement». (Vifs applaudissements). Croyez-vous qu’avec de tels soldats vous avez à vous attrister sur les chances inséparables de la guerre ? et pensez-vous que ceux qui veulent combler de leurs corps les fossés pour que les seconds bataillons attaquent une place, laissent longtemps la frontière déshonorée par les hordes autrichiennes ? Partout règne l’audace de la République et la soif de la gloire (1). (Vifs applaudissements ) . 42 [BARERE] rend compte ensuite du combat de la frégate la Pomone contre un vaisseau anglais très-supérieur en force, auquel elle n’a cédé qu’après trois heures du combat le plus opiniâtre et le mieux soutenu (2). BARERE : Je vous ai annoncé le dernier jour un revers maritime, une frégate prise par l’ennemi; mais cet événement même est couvert de gloire pour la marine de la République. L’équipage de la Pomone ne s’est rendu qu’à la supériorité des forces et qu’après avoir perdu tous ses mâts, et après que les marins de la République ont longtemps combattu contre l’Anglais d’une main, tandis que de l’autre ils éteignaient le feu qui dévorait notre frégate. La Pomone était parvenue à désemparer le commandant anglais de son grand mât de hune et avait soutenu le combat avec avantage, lorsqu’une bordée d’une des autres frégates lui abat son grand mât majeur, lequel en tombant entraîne dans sa chute la perte du mât d’artimon. Cette perte n’empêchait pas la Pomone de tirer, et le feu même qui prit à son bord ne ralentit point l’ardeur des braves républicains qui la montaient, et ce n’est qu’après plus de 3 heures de combat que cette frégate s’est rendue; elle avait réussi à éteindre le feu qui faisait craindre pour ceux qui y étaient renfermés (3) . Aux sentimens consolans qu’inspire cette résistance héroïque, se mêle la joie des nouvelles prises faites sur l’ennemi (4). BARERE : Nos marins ont été plus heureux; l’aviso dont le nom rappelle un zélé républicain, l’aviso le Lazousky a fait une prise sous le feu du canon de la forteresse espagnole. (1) Mon., XX, 380; J. Sablier, n° 1298; J. Mont., n° 173; J. Fr., n° 588; Débats, n° 592, p. 184-187; M.TJ. XXXIX, 252; C. Eg. n“ 625; Audit, nat. n° 589; Feuille Rép., n° 306; J. Paris, n° 490; Ann. patr., n° 489; J. Matin, n° 681; Rép., n° 136; J. Per-let, n° 590; J. IJniv., n° 1624; J. Perlet, n° 591; S. Culottes, n° 444; Arm. R.F., nos 156 et 157; Mess. soir, n° 625. (2) P.-V., XXXVI, 316. Bin, 15 flor. (3) Mon., XX, 381; J. Fr., n° 588; Feuille Rép., n° 306. (4) P.-V., XXXVI, 316. Il donne ici lecture de la lettre du cn Farjenet, capitaine de l’aviso le Lazousky, datée du 5 flor. H: « Etant dans l’ouest de Saint-Sébastien, les républicains qui composaient l’équipage de l’aviso le Lazousky ont eu connaissance, à cinq heures du matin, de deux bricks qui longeaient la terre à la distance d’une demi-lieue. Nous les chassâmes le plus près possible, et, voyant que nous ne pouvions plus approcher sans compromettre l’aviso qui aurait été jeté à terre par le calme, nous mîmes nos deux embarcations à la mer, et de suite de braves républicains plus courageux les uns que les autres s’embarquèrent et furent à la poursuite de ces deux navires, qui commençaient à entrer dans une baie lorsque nos braves sans-culottes, qui avaient déjà fait deux lieues de chemin pour les avoir, s’approchèrent d’eux. On leur tira de terre plusieurs coups de canon. Ceci ne les intimida pas; au contraire, ils redoublèrent de courage, et malgré la canonnade de ces gueux-là, ils réussirent à amariner le navire le plus près, qu’ils ont trouvé chargé de blé. De suite ils voulurent aller sur l’autre, qui tirait tant qu’il pouvait des coups de pierrier et de fusil pour demander du secours; il en reçut par le moyen de 25 chaloupes qui furent le remorquer. Alors nos braves sans-culottes, ne se trouvant pas assez forts, furent obligés de s’en retourner. Quelque temps après 5 ou 6 de ces chaloupes vinrent armées pour chercher à s’emparer de celui qui était en notre pouvoir. On les laissa bien accoster, et lorsqu’elles furent à portée de fusil on leur fit changer de route par le moyen de la mousque-terie et de deux pierriers qu’il y avait dans nos embarcations. Ces lâches, qui étaient au moins deux cents, ont tiré deux ou trois coups de pierrier et ont bien vite viré de bord à terre. Nos braves sans-culottes leur ont bien montré qu’ils n’avaient pas peur d’eux. Aujourd’hui nous venons de faire entrer dans le pertuis ladite prise. » Farjenet. BARERE : Ce n’est pas à cette seule expédition que la marine s’est bornée; cette journée ne sera pas si malheureuse si j’apprends à la Convention la prise de vingt bâtiments ennemis, soit corsaires, soit marchands, tous chargés d’objets de première nécessité. Un de ces bâtiments pris a cela de remarquable en notre faveur : c’est qu’il était destiné pour l’Angleterre, et qu’il lui apportait de Portugal une grande quantité d’or et d’argent pour solder les assassins de la République. Le trésor public de la France fera expier à ce métal les crimes qu’il fait commettre en le consacrant aux subsistances du peuple qui combat pour sa liberté. Voici le tableau des prises (1). Prises entrées au port de Brest Un sloop anglais chargé de tan, sortant de Plymouth. Un navire anglais de 400 tonneaux, chargé de salaisons et autres marchandises. (1) Mon., XX, 381.