[Assemblée nationalo.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790. J à l’accusé qu'il se trouve parmi les jurés trois individus, sur la probité desquels il n’ait aucun doute, pour être sûr qu’il ne sera pas injustement condamné. Les accusés et surtout leurs conseils sauront bientôt quels sont les hommes, dans un département, sur la droiture et la loyauté desquels on peut compter ; quels sont ceux au contraire dont il faut se délier ; et c’est un avantage sans doute que cette nécessité ou chacun sera de connaître et d’étudier les hommes par l’idée que cette connaissance pourra uu jour lui être utile. Mais ce qui a décidé vos comités, c’est qu’ils ont craint que si un citoyen, venu de loin pour être juré, semblait n’être comparu devant le tribunal qne pour y être récusé, les autres ne se dégoûtassent bientôt d’y venir, et d’être ainsi déplacés sans utilité pour la société. L’opinion publique est si flexible lorsqu’elle n’est pointencore appuyée sur l’expérieuce, qu’elle doit être ménagée avec soin, et soutenue contre Ja plus légère impression du ridicule ou de, la malveillance. 11 ne faut pas non plus sacrifier des avantages solides et durables à l’idée d’une pet fec-iion que le temps pourra toujours donner, et dont la recherche trop obstinée compromettrait l’existence même de l’établissement auquel elie est attachée. C’est de cette manière que nous croyons pouvoir assurer qu’il existera en France des jurés, saus que les citoyens puissent se plaindre qu’on ajoute à leurs devoirs un devoir trop düîieüe à remplir ; et si ia malveillance ou la paresse essayaient encore de présenter des obstacles, nous leur dirions : La France entière a demandé des jurés, elle a applaudi au décret qui les lui assure; mais cet établissement sublime, ii faut savoir l’acheter de quelque gêne, et le mériter par quelques sacrifices. Les hommes eu font de si ridicules et de si incommodes aux préjugés, de si dangereux à leurs passions ; l’iiumanitô et la justice n’ont-elles aucun droit pour en exiger d’eux? Peuvent-ils payer tous les avantages d’une institution, avec laquelle on pourrait braver les efforts mêmes de la tyrannie, puisque le peuple ne cessera pas d’être libre tant que ce formidable pouvoir de juger, cette puissance qui s’applique a tous les moments et à tous les individus, restera dans son sein ; d’une institution qui, ajoutant de nouveaux rapports d’égalité et d’une mutuelle dépendance à ceux qui lient déjà les hommes entre eux, renforce par là non seulement le sentiment de la justice, mais encore tous les sentiments de bienveillance et de fraternité que notre Constitution a voulu établir, et qui seuls peuvent rendre les hommes heureux et bons! Hàtons-nous, Messieurs, pendant notre jeunesse politique, lorsque le feu de la liberté nous anime et que ce saint enthousiasme de générosité et de veriu, qui [ lace toujours ses devoirs avant ses intérêts, dure encore; avant que, refroidis par le temps, nous soyons retombes dans cette sphère secondaire où l’on sait plutôt juger que sentir, où l’activité de l’esprit, quittant les grands objets qui Font occupé, ne s’exerce [dus que sur des intérêts individuels et locaux; iiâtons-nous, dis-je, d’incorporer à notre Constitution un principe conservateur de vie et de liberté, qui la défende de l’action des ans et lutte saus cesse contre les efforts des passions et contre les erreurs et les dangers de l’inconstance. Unissons l’avenir et le présent dans les soins d’une prudente combinaison; hâtons-nous en lin de créer cet établissement qui doit constamment ramener les hom-61 mes aux principes de leur gouvernement, et qui, formant une trace profonde dans leurs mœurs, rendra toujours sensible la route de la vérité et de la justice. Reprenons aussi cette simple et sublime théorie des anciens peuples, de régler les mœurs par les institutions; ayons toujours devant les yeux cette vérité, que le gouvernement est la véritable source de la moralité et de la corruption des hommes. Gomme dans le monde physique, les grands mouvements de la nature enveloppent et dirigent les mouvements locaux; de même c’est de la morale et des institutions publiques que les individus reçoivent leur détermination et la règle habituelle de leur conduite et de leurs actions : une constante expérience l’a prouvé. Le même pays, qui a produit des hommes libres et fiers, sous une Constitution libre, voit maintenant on peuple hypocrite et rusé sous un gouvernement artificieux et fourbe. Sous un gouvernement ignorant et superstitieux, les hommes sont superstitieux et crédules; sous un régime despotique et barbare, les hommes sont insensibles et durs; enfin nos voisins ont encore conservé cette énergie de pensées et cette élévation d’âme qu’ils doivent à leurs institutions. Si donc les vices et les vertus des peuples tiennent à la nature de leur gouvernement, si les décrets des législateurs sont aussi bien des principes de morale que des règles d’obéissance, s’ils peuvent également influer sur les actions des hommes et sur leurs sentiments, qu’ils choisissent entre la fausseté et la droiture, entre ia fourberie et ta loyauté, entre la superstition et les lumières, entre la barbarie ou l’humanité. Pour vous, Messieurs, votre choix est fait depuis longtemps, et vos intentions sont connues; eiies ont été d’abord consignées dans cet immortel ouvrage qui a servi d’inauguration à nos travaux, dans ce monument impérissable des droits de tous les hommes : c’est aussi là que nous avons puisé nos principes et nos bases, et c’est en vous présentant les conséquences de vos propres maximes, que nous osons compter, Messieurs, sur votre approbation et sur vos suffrages. PROJET DE LOI sur la police de sûreté, la justice criminelle et V institution des iurés. DE LA POLICE DE SURETE. TITRE I°r. De l’institution des officiers de police. Art. 1er. La police de sûreté sera exercée par les officiers qui vont être indiqués, concurremment entre eux, sauf les attributions particulières qui pourront être faites à chacun d’eux. Art. 2. Le juge de paix de chaque canton sera chargé des fonctions de la police de sûreté; il y aura dans chaque département un certain nombre d’officiers de la maréchaussée (1) chargés d’exercer, concurremment avec les juges de paix, les fonctions de la police. Art. 3. Les officiers de police auront le droit de faire agir la force publique pour l’exécution de leurs mandats. (i) Il sera fait incessamment un rapport particulier sur l’établissement des maréchaussées. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (27 novembre 1790. 1 TITRE II. Du mandat d’amener et du mandat d’arrêt. Ai t. 1er. Tout officier de police aura droit, dans les eus déterniinés ci-après, de donner un ordre pour l'aire comparaître devant lui les prévenus de crime ou délit; cet ordre s’appellera mandat d'amener. Art. 2. Le mandat d'amener sera signé de l’olfi-cier de police et scellé de son sceau, le prévenu y sera nommé ou désigné le plus clairement qu’il sera pos i b i e ; il sera exécutoire par tout le royaume, aux conditions prescrites par les articles 9 et 10 du titre V, et copie en sera laissée à celui qui est désigné dans le mandat. Art. 3. Le mandat d'amener comiendra l'ordre d’amener l'inculpé devant l'officier de police et de Je conduire d’abord, s’il le demande, devant la municipalité du lieu où il sera trouvé. Art. 4. Le porteur du mandat d'amener sera tenu de demander d’abord à ['inculpé s’il entend obéir au mandat. Si celui-ci répond qu’il est prêt d’obéir, de ce moment, et s’il obéit, il sera sous la proiecuon de la loi, et il ne pourra être usé envers lui d’aucune menace ou violence quel-p conque, sous peine, contre ceux qui s’en ren-j ciraient coupables, d’être poursuivis criminellement. Art. 5. Aucun citoyen ne peut refuser de venir rendre compte aux officiers publics des faits qu’on lui impute, et s’il négligé ce uevoir, il se rend coupable de désobéissance envers la suciéié. Art. 6. Si l’inculpé refuse d’obéir, ou si, après avoir déclaré qu’il est prêt d’obéir, n tente de s’évader, le porteur du mandat d'amener pourra employer la force pour le contraindre; mais il sera tenu d'en user avec modération et humanité. Arl. 7. Le porteur du mandat d’amener conduira d’abord l’inculpé, s’il le demande, devant le maire, ou à son défaut, un autre officier municipal du lieu où il a éié trouvé, et dans ce cas il présentera le mandat à cet officier et le iera viser par lui. Art. 8. Si l’officier de police devant qui l’inculpe est amené, trouve, après l’avoir entendu, qu’il y a lieu à le poursuivre criminellement, il donnera ordre qu’il soit envoyé à la maison d'arrêt du tribuual de district: cet ordre s’appellera mandat d'arrêt. Art. 9. Le mandat d’arrêt sera également signé et scellé de l’officier de police, lequel tiendra registre de tous ceux qu’il délivrera; il Sera remis à celui qui doit conduire le prévenu en la maison d’arrêt, et copie en sera laissée a ce dernier. Art. KJ. Le mandat d’arrêt contiendra le nom du prévenu et sou domicile, s’il l’a déclaré, ainsi que le sujet de l’arrestation, faute de quoi le gardien de la maison d’arrêt ne pourra recevoir, sous peine ü’êtie poursuivi comme coupable de détention arbitraire. Arl. 11. Aucun dépositaire de la force publique ne pourra entrer* dans la maison u’un citoyen, pour quelque motif que ce soit, sans un mandat de police ou ordonnance de justice. TITRE III. Fondions particulières de l'officier de la maréchaussée . Art. 1er. Tous ceux qui auront connaissance d’un meurtre ou d’une mort dont la cause est inconnue et suspecte, seront tenus d’en donner avis sur-le-champ à la police, dans la personne de l’officier de maréchaussée du lieu, ou à sou defaut, du plus voisin, lequel se rendra incontinent sur les lieux. Ar. 2. Dans les cas énoncés dans l’article précédent, rinhumaiion du mort ne pourra être èlre faite qu’après que l’officier de la maréchaussée se sera rendu sur les lieux et aura dressé un procès-verbal détaillé de l’état du cadavre et de toutes les circonstances, en présence de deux, notables au moins, qui signeront l’acte avec lui. Art. 3. L’officier de police, assisté des notables, entendra les parents, amis, voisins ou domestiques du décédé, ou ceux qui se sont trouvés en sa compagnie avant son décès, il tiendra note sur-le-champ de leurs déclarations et les interpellera de les signer. Art. 4. L’officier de police défendra que qui que ce soit sorte ue la maison ou s’éloigne du lieu dans lequel le mort aura été trouvé, et ce jusqu’à la clôture du procès-verbal et des déclarations, a peine contre les contrevenants d'être saisis sur-le-champ et poursuivis comme prévenus du délit. Art. 5. L ûfficier de police fera saisir sur-le-champ celui ou ceux qui seront prévenus d’avoir été les auteurs ou complices du meurtre, et après les avoir entendus, il pourra les faire conduire à la maison d’arrêt du tribunal de district, pour l’accusation être présentée au juré, ainsi qu’il va être dit plus bas. Art. 6. En cas qu’ils ne puissent être saisis sur-ie-cbamp, i’officier de police donnera un mandat d'amener puur les faire comparaître devant lui. Art. 7. Dans le cas de meurtre ou de mort dont la cause est inconnue et suspecte, s’il y a indice de crime, l’oflicier de maréchaussée sera personnellement tenu de faire 1 s premières poursuites, sans attendre aucune réquisition et sans y préjudicier. Art. 8. Lorsque le juge de paix du canton aura été averti dans les cas ci-uessus, il sera également tenu de s’y transporter aussi tôt, et ce procéder dans la forme qui vient d’être prescrite. TITRE IV. Du flagrant délit . Art. 1er. Lorsqu’un officier de police apprendra qu’il se commet un délit grave dans un lieu, ou que la tranquillité publique y aura été violemment troublée, il sera tenu de s’y transporter aussitôt, d’y dresser procès-verbal détaillé du corps du délit, quel qu’il soif, et de toutes ses circonstances; enfin de tout ce qui peut servir à conviction ou à décharge. Art. 2. En cas de flagrant délit, ou sur la clameur publique, l’officier de police fera saisir et amener devant lui les prévenus, sans attendre les déclarations des témoins; et si les prévenus ne peuvent être saisis, il délivrera un mandat d'amener pour les faire comparaître devant lui. Art. 3. Tout dépositaire de la force publique, et même tout citoyen, sera tenu de s’employer pour saisir un homme tiouvé en flagrant délit, ou poursuivi par la clameur publique comme coupable d’un délit et l’amener devant l’officier de police le plus voisin. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790-1 Art. 4. Tout homme fortement soupçonné à’être coupable d’un délit déjà dénoncé, comme dans le cas où on le trouverait saisi d’effets volés ou d’instruments servant à faire présumer qu’il est auteur du délit, sera amené devant l’officier de police, par tout dépositaire de la force publique, et même par tout citoyen, sauf à ce dernier à être responsable de sa méchanceté. Art. 5. L’officier de police recevra les éclaircissements donnés par les prévenus, et s’il les trouve suflisants pour détruire les inculpations formées contre eux, il ordonnera qu’ils soient remis sur-le-champ en liberté Art. 6. Si le prévenu n’a pas détruit les inculpations, il en sera usé à son égard ainsi qu’il sera statué ci-après. TITRE V. De la dénonciation du tort personnel ou de la plainte. Art. 1er. Tout particulier, qui se prétendra lésé par le délit d’un antre particulier, pourra porter ses plaintes à la police, devant un juge de paix ou officier de maréchaussée. Art. 2. La dénonciation du tort personnel, ou la plainte, pourra être rédigée par ta partie, ou son londé de procuration spéciale, ou par l’ofti-cier de police, s’il en est requis. Art. 3. La plainte sera signée et datée par l’officier de police; elfe sera également signée et affirmée par celui qui l’aura faite, ou par son fondé de procuration spéciale. Il sera fait mention expresse de leur signature ou de leur refus de signer, à peine cle nullité. Art. 4. Celui qui aura porté plainte, aura vingt-quatre heures pour s’en désister, auquel cas elle sera biffée < t anéantie; à moins que l’officier de police n’ait jugé convenable de la prendre pour dénonciation; ce qu’il sera tenu de faire dans tous les délits qui intéressent ie public. Art. 5. L’officier de police qui aura reçu la plainte, tiendra également note de la déclaration sommaire des témoins produits par l’auteur de cette plainte. Il sera tenu aussi d’ordonner que les personnes et les lieux seront visités, et qu’il en sera dressé procès-verbal toutes les fois qu’il s’agira d’un délit dont les traces peuvent être constatées. Art. 6. Dans le cas où l’officier de police qui a reçu la plainte est celui du lieu du délit, il pourra, d’après les charges, délivrer un mandat d'amener contre le prévenu, pour l’obliger à comparaître et de lui fournir des éclaircissements sur le fait qu’on lui impute. Art. 7. Néanmoins, en vertu du mandat d'amener, le prévenu ne pourra être coniramt a venir que s’il est trouve dans les deux jours de la date du mandat, à quelque distance que ce puisse être; ou passé les deux jours, s’il est trouve da; s la distance de dix iieues du domicile de l’officier qui l’a signé. Art. 8. Si,aprè3 les deux jours, le prévenu est trouvé au delà des dix lieues, il en sera donné avis à l’officier de police qui a signé Je mandat ; et Je prévenu sera gardé à vue, jusqu’à ce que le juré ait prononcé s’il y a lieu ou non à accusation à son égard. Art. 9. Pour cet effet, quatre jours après la délivrance du mandat d'amener , si le prévenu n’a pas comparu devant l’officier qui l’a signé ; celui-ci enverra la copie de la plainte et la note des 63 déclarations des témoins au greffe du tribunal de district, pour y être procédé ainsi qu’il sera prescrit ci-après. Art. 10. Si néanmoins le prévenu est trouvé saisi des effets volés, ou d’instruments servant à faire présumer qu’il est l’auteur du délit, il sera amené sur-le-champ devant l’officier de police qui aura signé le mandat d'amener , quels que soient la distance et le délai dans lesquels il aura été saisi . Art. 11. Dans le cas où l’officier de police qui a reçu la plainte n’est pas celui du lieu du délit, mais seulement celui de la résidence habituelle ou momentanée du prévenu, .il pourra toujours donner un mandat d'amener devant lui; et après les quatre jours, si le prévenu n’est pas comparu ou amené, l’affaire avec toutes les pièces sera egalement renvoyée au greffe du tribunal de district du lieu du délit. Art. 12. Enfin, dans le cas où l’officier de police qui a reçu la plainte n’est ni celui du lieu du délit, ni celui de la résidence du prévenu, il sera tenu de renvoyer l’affaire avec toutes les pièces devant le juge de paixdulieu du délit, pour qu’il soit déterminé par celui-ci s’il y a lieu ou non à délivrer le mandat d'amener. Art. 13. Lorsque le prévenu comparaîtra par devant l’officier ne police, il sera examine sur-le-champ, ou au plus lard dans les vingt-quatre heures; et s’il resuite des éclaircissements qu’il n’y a aucun sujet d’iuculpation contre lui, l’officier de police le renverra en liberté. Art. 14. Lorsque le prévenu ue donnera pas des éclaircissements suffisants pour détruire les inculpations, alors si le délit est de nature à mériter peine afflictive, l’officier de police, soit celui du fieu du délit, soit celui de la résidence du prévenu, délivrera un mandat d’arrêt pour faire conduire a la maison d’arrêt du district du lieu du défit. Art. 15. Si le délit est de nature à mériter une peine infamante, te prévenu sera également envoyé à la maison d’arrêt; à moins qu’il ne fournisse caution suffisante ne se représenter lorsqu’il eu sera besoin, auquel cas il sera laissé à la garde de ses amis qui l’auront cautionné. Art. 16. Si le délit n’est pas de nature à mériter peine afflictive ni infamante, ie prévtnu ne pourra être conduit à la maison d’arrêt; mais celui qui a porté plainte à la police, sera renvoyé à se pourvoir par la voie civile. L’Assemblée nationale se réserve de régler ce qui concerne les mendiants et vagabonds, et les punitions correctionnelles qui pourront être prononcées par l’ofiicier de police. Art. 17. Le refus de l’officier de police de délivrer un mandat d’ amener ou un mandat d'arrêt contre un prévenu n’étant qu’une décision provisoire de la police, celui qui a porte sa plainte, pourra se pourvoir ultérieurement ainsi qu’il sera présent ci-après. TITRE VI. De la dénonciation civique , Art. 1er. Tout homme qui aura été témoin d’un attentai, soit contre la linerié et la vie d’un autre homme, soit coure la sûreté publique ou individuelle, sera tenu u’en donner aussitôt avis à l’of-licier de police du lieu du délit. Art. 2. L’officier de police demandera au dénonciateur s’il est prêt ou non à signer et aflir- G 4 mer sa dénonciation, et s’il veut donner caution de la poursuivre. Art. 3. Si le dénonciateur signe sa dénonciation, l’affirme et donne caution de la poursuivre. le juge sera tenu d’ordonner aux témoins, qu’il indiquera, de venir faire devant lui leur déclaration sommaire. Art. 4. Sur cette déclaration sommaire, le dénonciateur pourra demandera l’officier de police un mandat d'amener le prévenu, lequel mandat ne pourra être refusé. Art. 5. Il sera observé à l’égard de la dénonciation civique ce qui est porté dans les articles 4, 5, 7, 8, 9 et 10 du litre de la dénonciation du tort personnel, ou de la plainte. Art. 6. Si les éclaircissements donnés par le prévenu ne détruisent pas l’inculpation, l’officier de police sera tenu d’envoyer le prévenu à la maison d’arrêt, ou de le recevoir à caution, si le délit n’est pas de nature à emporter peine afflictive. Art. 7. Si les éclaircissements donnés détruisent l’inculpation, l’olficitr de police renverra le dénoncé en liberté, sauf au dénonciateur à se pourvoir devant le juré, à présenter son accusation ainsi qu’il sera prescrit plus bas, et sauf au dénoncé à se pourvoir en dommages et intérêts. Art. 8. Si le dénonciateur refuse de signer et d’affirmer sa dénonciation, ou s’il ne donne pas caution de la poursuivre, l’officier de police ne sera pas tenu d’y avoir égard ; il pourra néanmoins d’office prendre connaissance des faits, entendre les témoins et, s’il y a lieu, mander le prévenu, et l’envoyer à la maison d’arrêt, sauf à en être personnellement responsable, s’il est prouvé qu’il ait agi avec haine ou passion. DE LA JUSTICE. TITRE 1er. De la procédure devant le tribunal de district et du juré d'accusation . Art. lor. Il sera désigné dans chaque tribunal de district un juge pour remplir, dans les matières criminelles, les fonctions qui vont être désignées. Art. 2. Ce juge s’appellera directeur du juré : il sera pris à tour de rôle, tous les six mois, parmi les membres composant le tribunal de district, le président excepté. Art. 3. Celui qui, sur le mandat d’arrêt d’un officier de police, aura fait, au gardien de la maison d’arrêt, remise du prévenu, en prendra reconnaissance : il remettra les pièces au greffier du tribunal, et en prendra pareillement reconnaissance : il rapportera à l’officier de police ces deux actes visés dans le jour par le directeur du juré. Art. 4. Aussitôt après avoir délivré son visa, ou, au plus tard, dans les vingt-quatre heures, le directeur du juré entendra le prévenu et examinera les pièces remises, pour vérifier si l’inculpation est de nature à être présentés au juré. Art. 5. Aucun acte d’accusation ne pourra etre présenté au juré, que pour un délit emportant peine affîctive ou infamante. Art. 5. Dans le cas où il n’y a point de partie plaignante ou dénonciatrice, soit que l’accusé soi présent ou non, si le directeur du jury trouve, [27 novembre 17S0.] par la nature du délit, que l’accusation ne doit pas être présentée au juré, il assemblera, dans les vingt-quatre heures, le tribunal, lequel prononcera sur cette question après avoir entendu le commissaire du roi. Art. 7. Si, dans le même cas, il trouve que, par la nature du délit, l’accusation doit être présentée au juré; ou si, contre son opinion, le tribunal Ta décidé ainsi, il dressera l’acte d’accusation . Art. 8. Dans le cas où il y a une pariie plaignante ou dénonciatrice, le directeur du juré ne pourra ni dresser l’acte d’accusation, Di porter au tribunal la question mentionnée en l’article 6, si ce n’estaprès deux jours révolus depuis la remise du prévenu en maison d’arrêt, ou des pièces au greffe du tribunal; mais ce délai passé sans que la partie ait comparu, il sera tenu d’agir ainsi qu’il est prescrit par les articles précédents. Art. 9. Lorsqu’il y aura une partie plaignante ou dénonciatrice, et qu’elle se présentera au directeur du juré par elle-même ou par un fondé de procuration spéciale dans le susdit délai de deux jours, l’acte d’accusation sera dressé de concert avec elle. Art. 10. Si le directeur du juré et la partie ne peuvent s’accorder soit sur tes faits, soit sur la nature de l’accusation, chacun d’eux pourra rédiger séparément sou acte d’accusation. Art. 11. Si le directeur du juré ne trouve pas ledéiit de nature à être présenté au juré, la partie pourra néanmoins dresser seule son acte d’accusation. Art. 12. Les actes d’accusation seront toujours communiqués au commissaire du roi avant d'être présentés au juré; si le commissaire du roi trouve que, d’après ia loi, ie délit est de nature à mériter peine afflictive ou infamante, il exprimera son adhésion par ces mots: La loi autorise. Au cas contraire, il exprimera son opposition par ceux-ci: La loi défend. Dans ce dernier cas, la question pourra être portée au tribunal du district, qui la décidera dans les vingt-quatre heures. Art. 13. Dans tous les cas où le corps du délit aura pu être constaté par un procès-verbal, il sera nécessaire de le joindre à I acte d’accusation pour être présenté conjointement devant le juré. Art. 14. L’acte d’accusation contiendra le fait et toutes ses circonstances : celui ou ceux qui en sont l’objet y seront clairement désignés : ia nature du délit y sera déterminée aussi précisément qu’il sera possible. Art. 15. Daus tous les cas ci-dessus énoncés, s’il resuite un acte d’accusation, le directeur du juré fera assembler les jurés dans la forme qui sera déterminée au titre X. Art. 16. Les jurés étant assemblés au jour indiqué, ie directeur du juré leur lera prêter d’abord, en présence du commissaire du roi, le serment suivant : « Citoyens, vous jurez et promettez d’examiner « avec attention les témoins et les pièces qui vous « seront présentes et d’en garder le secret ; vous « vous expliquerez avec loyauté sur l’acte d’ac-« cusatiou qui va vous être remis; vous ne sui-« vrez ni les mouvements de la haine et de la « méchanceté, ni ceux de la crainte ou de l’af-« feclion. » Art. 17. Le directeur du juré exposera aux jurés l’objet de l’accusation et leur expliquera avec clarté et simplicité les fonctions qu’ils ont à remplir : les pièces de la procédure leur seront re-[Àssembiée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [27 novembre 1790.] mises, à l’exception de la déclaration sommaire des témoins ; ensuite ils se reliront seuls dans leur cli ambre. Art. 18. Le plus ancien d’âge sera leur chef, les présidera et sera chargé de recueillir les voix. Art. 10. Les jurés liront d’abord les pièces; ils entendront ensuite les témoins qui seront pro-tluiis, ainsi que la partie plaignante ou dénonciatrice, si elle est présente ; cela fait, ils délibéreront entre eux. Art. 20. S’ils trouvent que l’accusation doit êîre admise, ils mettront au bas de l’acte cette formule affirmative ; La déclaration du juré est : oui, il y a lieu. S’ils trouvent que l’accusation ne doit pas être admise, ils mettront au bas de L’acte cette formule négative : La déclaration du juré est : non, il n'y a pas lieu. Art. 21. Dans le cas mentionné en l’article 10, où le directeur du juré et la partie plaignante ou dénonciatrice auraient présenté chacun un acte d’accusation différent, les jurés. détermineront celle des deux accusations qui doit avoir lieu, en mettant au bas de l’acte la formule affirmative, et au bas de l’autre acte, la formule négative; et si aucune des deux accusations ne le r paraît devoir être admise, ils mettront la formule négative au bas des deux actes. Art. 22. S’ils estiment qu’il y a lieu à une accusation, mais différente de celle qui est portée dans l’acte ou les actes d’accusation, ils mettront au bas : La déclaration clu jure est : il n'y a pas lieu à la présente accusation. Dans ce cas, le directeur du juré fera entendre devant lui les témoins, à l’effet de dresser un nouvel acte d’accusation dans la forme prescrite ci-dessus. Art. 23. Dans tous les cas, les déclarations des jurés seront signées par leurs chefs, et remises par lui, en leur présence, au directeur du juré, lequel en dressera un acte. Art. 24. Le nombre de huit jurés sera absolument nécessaire pour former un juré d’accusation, et les trois quarts des suffrages pour déterminer qu’il y a lieu à une accusation. Art. 25. Si les jurés prononcent qu’il n’y a pas lieu à l’accusation, le prévenu sera mis en liberté et ne pourra plus être poursuivi à raison du même fait, à moins que, sur de nouvelles charges, il ne soit présenté un nouvel acte d’accusation. Art. 26. Lorsque le juré d’accusation aura déclaré qu’il y a lieu à accusation, le directeur du juré rendra sur-le-champ une ordonnance de prise de corps contre l’accusé, d’après laquelle, s’il n'est pas déjà arrêté, il sera saisi en quelque lii u qu’il soit trouvé, et amené devant le tribunal criminel. Art. 27. Le nom de l’accusé, ainsi que sa dési-gnuiion et son domicile, s’il est connu, seront marqués précisément dans l'ordonnance de prise de corps; elle contiendra en outre la copie de l’acte d’accusation, ainsi que l’ordre de conduire directement l’accusé en la maison de justice du tribunal criminel. Art. 28. S'il n’échoit pas peine afflictive, mais infamante, et que le prévenu n’ait pas été déjà reçu à caution, le directeur ou juré rendra contre lui une ordonnance de prise de corps, sauf à l’accusé à demander sa liberté, laquelle lui sera accordée en donnant caution. Art. 29. Si, au contraire, le prévenu a déjà été reçu à caution, l’ordonnance contiendra seulement l’injonction à l’accusé de comparaître à tous les actes de la procédure, et d’élire domicile lre Série. T. XXI. dans le lieu du tribunal criminel, le tout à peine d’v être contraint par corps. Art. 30. Dans tous les cas, il sera donné copie à l’accusé tant de l’ordonnance de prise de corps, ou à l’effet de se représenter, que de l’acte d’accusation. _ Art. 31. D’après l’ordonnance de prise de corps, si l'accusé ne peut pas être saisi, l’on procédera contre lui, ainsi qu’il sera dit au titre des contumaces. Art. 32. Lorsque le juré d’accusation aura déclaré qu’il n’y a pas lieu à accusation, le directeur du juré en donnera avis à l’officier de police qui a déivré le mandat d’amener, afin que, dans le cas mentionné dans l’article 8 du titre V de la police, il fasse cesser sui-le-champ toute poursuite ou détention du prévenu. TITRE II. Formation du tribunal criminel. Art. 1er. Il sera établi un tribunal criminel pour chaque département. Art. 2. Ce tribunal sera composé d’un président nommé par les électeurs du département, et de deux juges pris tous les trois mois, et par tour, dans les tribunaux de districts, de telle sorte que le jugement ne pourra être rendu qu’à quatre juges Art. 3. Il y aura près du tribunal criminel un accusateur public, également nommé par les électeurs du département. Art. 4. Un commissaire du roi sera toujours de service près du tribunal criminel; ce commissaire du roi sera celui du tribunal de district établi dans la même ville. Dans le cas de maladie ou d’absence forcée, il pourra être suppléé par celui du district ie plus voisin. Ari. 5. II y aura près du tribunal criminel un greffier nommé également par les électeurs du département. Art. 6. L’accusateur public sera nommé pour dix ans, le président pour douze, et le greffier sera à vie. TITRE III. Fondions particulières du président. Art. 1er. Le président, outre les fonctions de juge qui lui sont communes avec les autres membres du tribunal criminel, est de plus personnellement chargé d’entendre l’accusé au moment de sou arrivée, de faire tirer au sort les jurés, de les convoquer, de tes diriger dans l’exercice des fonctions qui leur sont assignées par la loi ; de leur exposer l’affaire, même de leur rappeler leur devoir ; il présidera à toute l’instruction. Art. 2. Le président du tribunal criminel peut prendre sur lui de faire ce qu’il croira utile pour découvrir la vérité, et la loi charge son honneur et sa conscience d’employer tous ses efforts pour eu favoriser la manifestation. TITRE 1Y. Fonctions de l'accusateur public. Art. 1er. L’accusateur public sera principalement chargé de poursuivre les délits sur les actes d’accusation admis par les premiers jurés. 5 66 [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.] Art. 2. Il sera également chargé de suivre l’exécution des ordres qui pourront lui être adressés par la législature et par le roi pour la poursuite des crimes. Art. 4. Dans le cas où la recherche de quelques crimes, autres que le crime de lèse-nation, aura été ordonnée par la législature ou par le roi, les ordres seront adressés directement à l’accusateur public; il les transmettra aux officiers de police et veillera à ce qu’ils soient exécutés par les voies et suivant les formes ci-dessus établies. Art. 4. L’accusateur public aura la surveillance sur tous les officiers de police du département : en cas de négligence de leur part, il pourra les avertir ou les réprimander; en cas de faute plus grave, il pourra les déférer au tribunal criminel, lequel, selon la nature du délit, prononce les peines correctionnelles déterminées par la loi. Art. 5. Si l’accusateur public trouve qu’un officier de police soit dans le cas d’être poursuivi pour prévarication dans ses fonctions, il pourra le mander, recevoir ses éclaircissements; et, s’il y a lieu, donner au directeur du juré la notice des faits, les pièces et la déclaration des témoins, pour que celui-ci dresse l’acte d’accusation et le présente au juré, dans la forme ci-dessus prescrite. TITRE V. Des fonctions du commissaire du roi. Art. 1er. Dans tous les procès criminels, soit au tribunal de district, soit au tribunal criminel, le commissaire du roi prendra communication de toutes les pièces et actes, et assistera à l’instruction. Art. 2. Le commissaire du roi pourra toujours faire aux juges, au nom de la loi, toutes les réquisitions qu’il jugera convenables, desquelles il lui sera délivré acte. Art. 3. Lorsque le directeur du juré, ou le tribunal criminel, n’auront pas jugé à propos de déférer à la réquisition du commissaire du roi, l’instruction ni le jugement n’en pourront être ni arrêtés, ni suspendus, sauf au commissaire du roi du tribunal criminel à former sa demande en cassation après le jugement, ainsi qu’il va être détaillé ci-après. TITRE VI. Procédure devant le tribunal criminel. Art. 1er. Nul homme ne pourra être poursuivi criminellement et jugé que sur une accusation reçue par un juré, composé de huit citoyens. Art. 2. Si le juré a déclaré qu’il y a lieu à accusation, le procès et l’accusé, dans le cas où il sera détenu, seront envoyés, par les ordres du commissaire du roi, au tribunal criminel du département, et ce dans les vingt-quatre heures de la signification qui lui aura été faite de l’ordonnance de prise de corps. Art. 3. Néanmoins , dans les deux cas ci-après, savoir : si le juré d’accusation est celui du lieu où est établi le tribunal criminel, ou si l’accusé est domicilié dans le district où siège le tribunal, l’accusé aura le droit de demander à être jugé par l’un des tribunaux criminels des deux départements les plus voisins. Art. 4. L’accusé ne pourra cependant exercer ce droit, qu’autant que le tribunal criminel qu’il est autorisé à décliner dans les deux cas ci-dessus, se trouve établi dans une ville au-dessous de 40,000 âmes. Art. 5. Lorsque l’accusé se trouvera dans l’un des deux cas mentionnés dans l’article 3 ci-dessus, l'ordonnance de prise de corps, après avoir énoncé l’ordre de le conduire dans fa maison de justice du tribunal criminel du département, dénommera en outre les villes des deux tribunaux criminels les plus voisins, entre lesquels l’accusé pourra opter. Art. 6. Dans les cas mentionnés ci-dessus, si l’accusé est détenu dans la maison d’arrêt, il ! notifiera au greffe son option dans les vingt-quatre heures de la signification qui lui aura été faite de l’acte d’accusation : après lequel temps il sera envoyé à la maison de justice, soit du tribunal direct, soit de celui qu’il aura choisi. Art. 7. Si, dans les mêmes cas, l’accusé n’avait pu être saisi sur le mandat d’envoi de l’officier de police, mais seulement en vertu de l’ordonnance de prise de corps, il sera conduit, , par celui qui en est porteur, devant le juge de paix du lieu où il sera trouvé, pour y passer la déclaration de l’option dont il vient d’être parlé, ou de son refus de la faire, de laquelle déclaration le juge de paix gardera minute et délivrera expédition au porteur de l’ordonnance. Art. 8. Le porteur de l’ordonnance, après avoir remis l’accusé dans la maison de justice du tribunal direct, ou de celui qu’il aura choisi, remettra également au greffe la déclaration de l’accusé ainsi que l’ordonnance de prise de corps. Art. 9. Le greffier donnera connaissance de ces deux actes à l’accusateur public; et si le tribunal, que l’accusé a préféré, n’est pas le tribunal direct, l’accusateur public fera notifier ces actes au greffe de ce dernier tribunal; et sur la réquisition qu’il en fera par l’acte même de notification, les pièces lui seront renvoyées. Art. 10. Dans tous les cas, vingt-quatre heures au plus tard après l’arrivée de l’accusé et la remise des pièces au greffe, il sera entendu par le président, en présence de l’accusateur public et du commissaire du roi; le greffier tiendra note de ses réponses, laquelle sera remise au président pour servir de renseignement seulement. Art. 11. Tout accusé pourra faire choix d’un ou deux amis, ou conseil pour l’aider dans sa défense, sinon le président lui désignera un conseil ; mais il ne pourra jamais communiquer avec l’accusé que deux jours après qu’il aura été amené. Art. 12. Le premier de chaque mois, le président du tribunal criminel fera tirer au sort douze jurés sur la liste, de laquelle il sera parlé au titre XI. Art. 13. Le 15 de chaque mois, s’il y a quelque affaire à juger, le juré de jugement s’assemblera sur la convocation qui en sera faite. Art. 14. L’accusateur public sera tenu, aussitôt après l’interrogatoire, de faire ses diligences de manière que l’accusé puisse être jugé à la première assemblée du juré qui suivra son arrivée. Art. 15. Si l’accusateur public ou l’accusé ont des motifs de demander que l’affaire ne soit pas portée à la première assemblée du juré, ils présenteront leur requête en prorogation de délai au tribunal criminel, lequel décidera si cette prorogation doit être accordée. Art. 16. Si le tribunal criminel juge qu’il y a lieu d’accorder la demande, ce délai ne pourra [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.] néanmoins être prorogé au delà de l’assemblée de jurés, qui orna lieu le 15 du mois suivant. Art. 17. La requête en prorogation de délai sera présentée avant le 5 de chaque mois, époque de la convocation du juré. Art. 18. Le nombre de douze jurés sera absolument nécessaire pour former un juré de jugement. Art. 19. Le juge, en présence du public et du commissaire du roi, fera prêter à chaque juré séparément le serment suivant : « Citoyen, vous «jurez et promettez d’examiner avec l’attention « la plus scrupuleuse les charges portées contre « un tel... de n’écouter ni la haine ou la nié-« chanceté, ni la crainte ou l’affection ; de vous « décider d’api ès les témoignages et suivant « votre conscience et votre intime et profonde « conviction, avec l’impartialité et la fermeté qui « conviennent à un homme libre. » Art. 20. Le serment prêté, les jurés prendront place tous ensemble sur des sièges séparés du «public et des parties, et ils seront placés en face de l’accusé et des témoins. Art. 21. De ce moment, ils ne pourront communiquer avec personne par écrit, parole ou ge te, jusqu à ce qu’ils aient fait leur déclaration, sauf les éclaircissements qu’ils pourront demander, suivant la forme qui va être appliquée. TITRE VIL De l'examen et de la conviction. Art. 1er. En présence des juges, de l’accusateur public, du commissaire du roi, des jurés et du public, l’accusé comparaîtra à la barre, libre et sans fers; le président lui dira qu’il peut s’asseoir, lui demandera son nom, âge, profession et demeure, dont il sera tenu note par ie greffier. Art. 2. Le président avertira l’accusé d’être attentif à tout ce qu’il va entendre ; il ordonnera au greffier de lire l’acte d’accusation : après quoi if rappellera clairement à l’accusé ce qui y est contenu ; il lui dira : « Voilà de quoi vous êtes accusé ; vous allez entendre les charges qui seront produites contre vous. » Art. 3. L’accusateur public, ainsi que la partie plaignante, s’il y en a, feront entendre leurs témoins : ceux-ci, avant de déposer, prêteront serment de parler sans haine et sans crainte , de dire la vérité , toute la vérité , rien que la vérité. Art. 4. La liste des témoins qui doivent déposer sera notifiée à l’accusé, vingt-quatre heures au moins avant l’examen. Art. 5. Après chaque déposition, le président demandera à l’accusé s’il veut répondre à ce qui vient d’ètre dit contre lui. L’accusé pourra, ainsi que ses amis ou conseils, dire, tant contre les témoins que contre leur témoignage, ce qu’il jugera utile à sa défense ; il pourra les questionner. L’accusateur public, les jurés et le président pourront aussi demander les éclaircissements dont ils croiront avoir besoin. Art. 6. Le témoin sera toujours tenu de déclarer d’abord si c’est de l’accusé présent qu’il entend parler. Art. 7. Lorsque les témoins de l’accusateur public et de la partie, s’il y en a, auront été entendus, l’accusé pourra faire entendre les siens; l’accusateur public ou la partie plaignante pourront également les questionner et dire sur eux 67 ou leur témoignage tout ce qu’ils jugeront nécessaire. Ait. 8. Les témoins ne pourront jamais s’interpeller entre eux. Art. 9. L’accusé, ainsi que ses amis ou conseils, pourra demander que les témoins produits contre lui soient introduits et entendus séparément, même après qu’ils auront déposé ; il pourra demander encore que ceux qu'il désignera se re-iirent de l’auditoire, et qu’un ou plusieurs d’entre eux soient introduits et entendus de nouveau, séparément ou en présence les uns des autres. Art. 10. L’accusateur public aura la même faculté à l’égard des témoins produits par l’accusé. Art. 11. L’accusé pourra faire entendre des témoins pour prouver qu’il est homme d’honneur et de probité, incapable de commettre le ciime qu’on lui impute. Les jurés auront tel égard que ne raison à ces témoignages. Art. 12. Pendant l’examen, les jurés et les juges pourront prendre note de ce qu’il leur paraîtra important, pourvu que la discussion n’en soit ni arrêtée ni ralentie. Art. 13. Ne pourront être entendus en témoignage un père et une mère contre leurs enfants ni les enfants contre leurs père et mère, aïeul ou aïeule; unjfrèreet une sœur contre leurs frère et sœur, un mari contre sa femme ou une femme contre son mari. Art. 14. Du moment qu’un homme sera arrêté, il est défendu à qui que ce soit de rien imprimer ou publier contre lui, sous peine de punition infamante contre les contrevenants. Art. 15. Tous les effets trouvés lors du délit ou depuis, pouvant servir à conviction, seront représentés à l’accusé, et il lui sera demandé de répondre personnellement s’il les reconnaît. Art. 16. A la suite des dépositions, l’accusateur public sera entendu ; l’accusé ou ses amis pourront lui répondre ; enfin, le président fera un résumé de l'affaire, la réduira à ses points les plus simples, fera remarquer aux jurés les principales preuves pour ou contre l’accusé: après quoi il leur dira de se retirer dans leur chambre, en leur recommandant de suivre leur conscience, de décider avec impartialité et de déclarer ce qu’ils trouveront, eu gens d’honneur et de probité, être la vérité. Art. 17. Geia fait, il ordonnera que l’accusé ou les accusés soient reconduits à la maison de justice. Art. 18. Lorsque les jurés seront retirés seuls dans leur chambre, iis délibéreront entre eux. Art. 19. Les jurés seront tenus de délibérer d’abord et d’aller aux voix sur le point de savoir s’ils trouvent le fait constant ou non ; s’il résulte de la délibération que le fait est constant, ils passeront de suite à une seconde délibération et iront aux voix sur le point de savoir si l’accusé ou les accusés sont convaincus de l’avoir commis. Art. 20. Les cinq sixièmes des voix seront absolument nécessaires, soit pour déclarer que le délit est constant, soit pour déclarer que l’accusé est convaincu. Art. 21. Les jurés seront tenus de prononcer, par une seule et même déclaration, sur tous les accusés compris dans le même acte d’accusation, en commençant toujours par le principal accusé, s’il y en a un. Art. 22. Le juré ne pourra prononcer que sur ce qui est porté dans l’acte d’accusation, quelle que soit la déposition des témoins ; il pourra cependant prononcer en atténuation du même genre 68 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.J du délit, par exemple : Si un homme est accusé d’assassinat ou de meurtre, il pourra déclarer qu’il est convaincu d’homicide à son corps défendant seulement; s’il est accusé de vol aveceffraction, il pourra déclarer qu’il est convaincu de vol simple, etc. Art. 23. Le juré sera compétent pour décider non seulement du fait matériel, mais encore s’il a été commis malicieusement ou non, avec ou sans intention de nuire involontairement ou à dessein; ainsi il pourra déclarer qu’un tel . . . est convaincu d’un homicide involontaire seulement, ou à son corps défendant , etc. Art. 24. Lorsque les jurés auront fini de délibérer, ils feront avertir le président et rentreront immédiatement dans l’auditoire. Art. 25. Le président leur demandera s’ils ont suivi, dans leur décision, les règles établies par la loi pour leur délibération ; il dira à chacun d’eux de le jurer : après quoi il s’adressera au chef du juré, et il lui demandera quelle est la déclaration du juré ; celui-ci lui dira : « Sur mon honneur et ma probité la déclaration du juré est que, etc. » Art. 26. La déclaration du juré sera toujours positive et simple; elle portera : « Le délit énoncé dans l’acte d’accusation est prouvé, ou n’est pas prouvé ; un tel ... . n’est pas convaincu ; un tel ... . est convaincu d’avoir fait telle chose volontairement, ou involontairement ; malicieusement, ou non; avec ou sans intention de nuire. » Art. 27. Le greffier recevra la déclaration des jurés par l’organe de leur chef, et en leur présence il l’inscrira sur le registre du tribunal ; elle sera signée de lui et du président : après quoi les jurés se retireront, et leur fonction sera finie. Art. 28. Si l’accusé est déclaré non convaincu du fait porté dans l’acte d’accusation, et qu’il ait été inculpé sur un autre par les dépositions des témoins, l’accusateur public pourra demander au président de faire arrêter le prévenu. A l’occasion du nouveau fait, le président, après avoir pris du prévenu fi s éclaircissements qu’il voudra donner, pourra, s’il y a lieu, le renvoyer devant un juré d’accusation avec les témoins, pour être procédé à une nouvelle accusation. Art. 29. Dans ce cas, le juré d'accusation pourra être celui du district dans le chef-lieu duquel siège le tribunal criminel. Art. 30. Si l’accusé est convaincu du fait porté dans l’acte d’accusation, il ne pourra jamais être poursuivi pour raison du nouveau fait, qu’autant que celui-ci mériterait une peine plus forte que le premier; auquel cas il sera sursis à l’exécution de la première peine jusqu’au jugement de la seconde accusation. Art. 31. Si la déposition d’un témoin est évidemment fausse, le président en dressera procès-verbal ; il pourra d’office, et sur la réquisition de l’accusateur public ou de l’accusé, le faire arrêter sur-le-champ, et le renvoyer par-devant le juré de district du lieu pour prononcer sur l’accusation dont l’acte, dans ce cas, sera dressé par le président lui-même. TITRE VIII. Du jugement et de l'exécution. Art. 1er. Lorsque l’accusé aura été déclaré non convaincu, le président prononcera que l'accusé est acquitté de l’accusation et ordonnera qu’il soit mis sur-le-champ en liberté. Art. 2. Tout particulier, ainsi acquitté, ne pourra plus être repris, ni accusé pour raison du même fait. Art. 3. Lorsque l’accusé aura été déclaré convaincu, le président, en_ présence du public, le fera comparaître et lui donnera connaissance de la déclaration du juré. Art. 4. Sur cela le commissaire du roi fera sa réquisition pour l’application de la loi. Art 5. Le président demandera à l’accusé s’il n’a rien à dire pour sa défense ; lui, ses amis ou conseils ne pourront plus plaid* r que le fait est faux, mais seulement qu’il n’est pas défendu ou qualifié crime par la loi, ou qu’il ne mérite pas la peine dont le commissaire du roi a requis l’application. Art. 6. Les juges prononceront ensuite et sans désemparer la peine établie par la loi, ou acquitteront l’accusé, dans le cas où le fait, dont il est convaincu, n’est pas défendu par elle. Art. 7. Les juges donneront leur avis à haute voix en présence du public, eu commençant par le plus jeune et finissant par le président. Art. 8. Si les juges sont partagés pour l’application de la loi, l’avis le plus doux passera ; s’il y a plus de deux avis ouverts, ou si deux juges soi t réunis à l’avis le plus sévère, ils appelleront des juges du tribunal de district pour les départager. Art. 9. Le président, après avoir recueilli les voix, et avant de prononcer le jugement, lira le texte de la loi sur laquelle il est fondé. Art. 10. Le greffier écrira le jugement, dans lequel sera inséré le texte de la loi, tu par le président. Art. 11. Lorsque le jugement aura été prononcé à l’accusé, il sera sursis pendant trois jours à son exécution. Art. 12. Le condamné aura le droit de se pourvoir en cassation contre le jugement du tribunal : à cet effet il sera tenu dans le susdit délai de trois jours de remettre sa requête eu cassation au greffier, lequel lui en délivrera reconnaissance. Celui-ci remettra la requête au commissaire du roi, qui sera tenu de l’envoyer aussitôt au ministre de la justice, après en avoir délivré reconnaissance au greffier. Art. 13. Le commissaire du roi pourra également demander, au nom de la loi, la cassatioa du jugement ; il sera tenu, dans le même délai de trois jours, d’en passer sa déclaration au greffe. Art. 14. Les demandes en cassation ne pourront être fondées que sur la violationdes formes prescrites à peine de nullité, soit dans l’instruction, soit dans le jugement ou sur la fausse application de la loi. Art. 15. Les requêtes en cassation seront adressées directement au ministre de la justice, lequel sera tenu, dans les trois jours, d’en donner avis au président et d’en accuser la réception au commissaire du roi, qui eu donnera connaissance au condamné. Art. 16. Dans le cas où la demande en cassation aura été présentée par le condamné, elle ne pourra être jugée qu’après un mois révolu, à compter du jour de la récepiion de la requête ; et pendant ce delai le condamné pourra faire parvenir au tribunal de cassation, par Je ministre de la justice, les moyens qu’il voudra employer. Art. 17. Le tribunal de cassation confirmera ou [Assemblés nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.) 69 annullera le jugement. Dans ce dernier cas ;L exprimera, dans sa décision, le motif de la r �s-sation, et renverra le procès à un autre triuunal criminel. Art. 18. Dans le cas où l’on se pourvoirait contre le second jugement, si le tribunal de cassation trouve qu’il présente les mêmes motifs de cassation, il en référera à la législature. Celle-ci déclarera qu’elle est la véritable signification de la loi ; le tribunal de cassation sera tenu d’y conformer sa dérision ; et en cas qu’il y ait lieu d’annuler le jugement, il renverra à un nouveau tribunal criminel. Art. 19. Le ministre de la justice enverra sans délai la décision du tribunal de cassation au président du tribunal criminel et au commissaire du roi, lequel en donnera connaissance à l’accusé. Art. 20. Lorsque le jugement aura été annulé, l’accusé sera toujours renvoyé en personne devant le tribunal criminel, indiqué par le tribunal de cassation. Art. 21. Dans le cas où le jugement aura été annulé, à raison de fausse application de la loi, le tribunal criminel rendra son jugement sur la déclaration déjà nite par le juré, après avoir entendu l’accusé ou tms conseils, ainsi que le commissaire du roi. Art. 22. Dans le cas où le jugement aura été annulé, à raison de violation ou d’omission de formes importantes dans l’examen et la déclaration du juré, l’accusé ainsi que les témoins seront de nouveau entendus par-devant des jurés qui seront assemblés à cet effet. Art. 23. Passé le délai de trois jours, mentionné en l’article 16, s’il n’y a point eu de demande en cassation, ou dans les vingt-quatre heures après la réception de la décision qui aura rejeté cette demande, la condamnation sera exécutée. Art. 24. Cette exécution se fera sur les ordres du commissaire du roi, qui aura le droit à cet effet de requérir l’assistance de la force publique. Nota. Il manque ici plusieurs articles sur la prononciation du jugement et sur la forme de l’exécution. Nous avons cru devoir attendre pour les proposer, que l’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui en sera fait par ses comités, ait déterminé les diffé-entes peines qui doivent être-appliquées aux délits, et surtout qu’elle se soit expliquée sur la grande question de la peine de mort. Art. 25. La décision des jurés ne pourra jamais être soumise à l’appel ; si néanmoins tous les juges et le commissaire du roi étaient unanimement d’accord pour trouver que les jurés se sont trompés, ils tireront au sort entre eux pour savoir lequel aura le droit de choisir, parmi les assistants, deux citoyens éligibles, qui seront adjoints aux douze jurés pour donner une nouvelle déclaration, à la majorité des six septièmes. Art. 26. Ce nouvel examen ne pourra avoir lieu que dans le cas seulement où l’accusé aurait été déclaré convaincu, et jamais lorsqu’il aurait été acquitté. Art. 27. Le silence le plus absolu sera observé dans l’auditoire; les témoins et les défenseurs de l’accusé seront tenus de s’exprimer avec décence et modération. Si quelque particulier s’écartait du respect dû à la justice, le président pourra le reprendre, le condamnera une amende, et même à garder prison jusqu’au terme de huit jours, suivant la gravité du cas. Art. 28. Lorsqu’un accusé aura été acquitté, il pourra présenter requête pour obtenir de la société une indemnité, sur laquelle requête 11 sera statué par le tribunal criminel. Art. 29. Le tribunal criminel sera compétent pour connaître des intérêts civils, résultant des procès criminels. TITRE IX. Des contumaces . Art. 1er. Si, sur l’ordonnance de prise de corps ou de se représenter en justice, l’accusé ne comparaît pas et ne peut être saisi, le président du tribunal criminel rendra une ordonnance portant qu’il sera fait perquisition de sa personne, et que chaque citoyen est tenu d’indiquer l’endroit où il se trouve. Art. 2. Cette ordonnance, avec copie de celle de prise de corps, sera affichée à la porte de l’accusé et à son domicile élu, ainsi qu’à la porte de l’église du lieu de son domicile, ou à la porte de l’auditoire pour ceux qui ne sont pas domiciliés ; elle sera également notifiée à ses cautions, s’il en a fourni. Art. 3. Cette ordonnance sera proclamée dans les lieux ci dessus énoncés pendant deux dimanches consécutifs, à peine de nullité; passé ce temps, les biens de l’accusé seront saisis. Art. 4. Huitaine après la dernière proclamation, le président du tribunal rendra une seconde ordonnance, portant qu’un tel... est déchu du titre de citoyen français, que toute action en justice lui est interdite pendant tout le temps de sa contumace, et qu’il va être procédé contre lui, malgré son absence. Cette ordonnance sera signifiée, proclamée et affichée aux lieux et dans la même forme que dessus. Ari. 5. Après un nouveau délai de quinzaine, le procès sera continué dans la forme qui est prescrite pour les accusés présents, à l’exception toutefois que les dépositions des témoins seront reçues par écrit. Art. 8. Aucun conseil ne pourra se présenter pour défendre l’accusé eontumax sur le fond de son affaire; seulement s’il est dans l’impossibilité absolue de se rendre, il enverra, par un fondé de procuration spéciale, son excuse, dont la légitimité pourra être plaidée par ses amis et décidée par le tribunal. Art. 7. Dans le cas où le tribunal trouverait l’excuse légitime, il ordonnera qu’il sera sursis à l’examen et au jugement pendant un temps qu’il fixera, eu égard à la nature de l’excuse et à la distance des lieux. Art. 8. Les condamnations qui interviendront contre un accusé eontumax seront exécutées, en les inscrivant dans un tableau qui sera suspendu au milieu de la place publique. Ari. 9. L’accusé eontumax pourra en tout temps se représenter, en se constituant prisonnier, et donnant connaissance au président de sa comparution; de ce jour, tous jugements en procédures faites contre lui seront anéantis, sans qu’il soit besoin d’aucun jugement nouveau : il en sera de même s’il est repris et arrêté. Art. 10. Il rentrera également dans tous ses droits civils; à compter de ce jour, ses biens lui seront rendus, ainsi que les fruits de ceux qui auront été saisis, à la déduction des frais de régie et de ceux du procès. Art. 11. Il sera de nouveau procédé à l’examen et au jugement de l’accusé eontumax qui se sera représenté ; néanmoins les dépositions écrites des 70 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.) témoins décédés pendant son absence seront produites, pour y avoir tel égard que de raison par les jurés. Art. 12. Dans le cas même d’absolution, l’accusé qui a été contumax, n’obtiendra aucune indemnité; et le juge lui fera en public une réprimande pour avoir douté de la justice et de la loyauté de ses concitoyens; il sera de plus condamné, par forme de correction seulement, à garder prison pendant un temps, qui ne pourra excéder un mois. Art. 13. Pendant toute la vie de l’accusé, tant qu’il sera contumax, le produit de ses biens saisis sera versé dans la caisse du district; néanmoins s’il y a une femme et des enfants, ils pourront demander la distraction à leur profit d’une somme, laquelle sera fixée par le tribunal criminel. Art. 11. Après la mort de l’accusé, prouvée légalement, ou lorsqu’il a atteint l’âge de 80 ans, ses biens saisis seront restitués à ses héritiers légitimes. TITRE X. De la manière de former le juré d' accusation. Art. 1er Le procureur-syndic de chaque district formera, tous les trois mois, la liste des citoyens qui doivent servir de juré dans les accusations ; elle sera envoyée à chacun des membres qui en fera partie. Art. 2. Cette liste sera composée de trente citoyens éligibles aux administrations de district et de département. Art. 3. Le tribunal de district indiquera celui des jours de la semaine, qui servira à l’assemblée du juré d’accusation. Art. 4. Huitaine avant le jour, le directeur du juré fêta tirer au sort en présence du commissaire du roi et du public, huit citoyens sur la liste des trente, pour en former le tableau du juré d’accusation. Art. 5. S’il y a lieu d’assembler les jurés d’accusation, ceux qui doivent le composer seront avertis, quatre jours d’avance, de se rendre au jour tixé, sous peine de 30 livres d’amende, et d’être privés du droit d’éligibilité et de suffrage pendant deux ans. Art. 6. Lorsque les citoyens inscrits sur la liste dos trente, formée par le procureur-syndic, prévoiront pour l’un des jours d’assemblée du juré quelqu’obstacle qui pourrait les empêcher de s’y rendre, s’il arrivait qu’ils y fussent appelés par le sort, ils en donneront connaissance au directeur du juré deux jours au moins avant celui de la formation du tableau des huit, pour lequel ils désirent d’être excusés. Art. 7. La valeur de cette excuse sera jugée dans les vingt-quatre heures par ie tribuuàl de district. Art. 8. Si l’excuse est jugée suffisante, lenoin de celui qui l’a présentée sera retiré du nombre de ceux sur lesquels le tableau des huit sera tiré au sort. Si elle est jugée non valable, son nom sera soumis au sort. Art. 9. S’il est du nombre des huit désignés nar le sort il lui sera signifié que son excuse a été jugée non valable, qu’il est sur le tableau des jurés, et qu’il ail à se rendre au jour fixé pour l’assemblée. Copie de cette signification sera laissée à un des officiers municipaux du lieu de son domicile. Art. 10. Tout juré qui ne se sera pas rendu sur la sommation qui lui en aura été faite, sera condamné aux peines mentionnées dans l’article 5. Sont exceptés de la présente disposition ceux qui seraient retenus pour cause de maladie. Art. 11. Dans tous les cas, s’il manquait un des jurés au jour indiqué, le directeur du juré le fera remplacer par un des citoyens de la ville pris au sort dans la liste des trente, et subsidiairement parmi les éligibles. TITRE XI. De la manière de former h juré du jugement. Art. 1er. Tout citoyen éligible aux administrations de département et de district se fera inscrire avant le 15 de décembre, au plus tard de chaque année, comme juré de jugement, sur un registre qui sera tenu, à cet effet, par le secré-taire-grel'lier de chaque district. Art. 2. Le procureur syndic du district enverra, dans les quinze derniers jours de décembre, une copie de ce registre au directoire de département, et en fera remettre un exemplaire à chaque municipalité de son arrondissement. Art. 3. Ceux qui auront négligé de se faire inscrire pendant le mois de décembre, au plus tard, seront privés des droits de suffrages à toute fonction publique, pendant le cours de l’année suivante. Art. 4. Ne pourront être jurés les officiers de police, les juges, les commissaires du roi, l’accusateur public, les procureurs généraux syndics et procureurs syndics des administrations; ainsi que tous les citoyens qui ne sont pas portés sur la liste des éligibles; les ecclésiastiques et les septuagénaires en sont dispensés. Art. 5. Sur tous les citoyens éligibles inscrits dans les régis 1res des directoires, le procureur général syndic du département eu choisira, tous les trois mois, deux cents qui formeront la liste du juré du jugement. Celte liste sera imprimée et envoyé ‘ à tous ceux qui la composeront. Art. 6. Les deux tiers de la liste, autant qu’il sera possible, seront pris parmi les citoyens de la ville où siège le tribunal criminel, qui se seront fait inscrire. Art. 7. Un citoyen ne pourra, sans son consentement, être placé plus d’une fois sur la liste, pendant la révolution d’une année; et si, pendant les trois mois qui; sou nom sera sur la liste, il a assisté à une assemblée de juré, il pourra s’excuser d’en remplir une seconde fois les fonctions : le tout à moins qu’il n’habite la ville même du tribunal criminel. Art. S. Nul ne pourra être juré de jugement dans la même affaire où il aurait été juré d’accusation. Art. 9. Lorsqu’il s’agira de former, le premier de chaque mois, le tableau des douze jurés, ainsi qu’il est dit art. 12, tit. IV, le président du tribunal criminel, en présence du commissaire du roi et de deux officiers municipaux, lesquels prêteront le serment de garder le secret, présentera à l’accusateur public la liste des deux cents jurés ; celui-ci aura la lâcullé d’en exclure vingt sans donner de motif; ie reste des noms sera mis dans ie vase, pour être tiré au sort, et former le tableau des douze jurés. Art. 10. Le tableau sera présenté à l’accusé, qui pourra récuser ceux qui ie composent. Ils seront remplacés par le sort. [27 novembre 1790.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Art. 11. Lorsque l’accusé aura exercé vingt récusations; celles qu’il voudrait présenter ensuite devront être fondées sur des causes dont le tribunal jugera la validité. Art. 12. Cette récusation de vingt jurés pourra être faite par plusieurs coaccusés, s’ils se concertent ensemble pour l’exercer; et s’ils ne peuvent s’accorder, chacun d’eux séparément pourra récuser dix jurés. Art. 13. Dans ce dernier cas, chacun d’eux récusera successivement un des jurés, jusqu’à ce que sa faculté de récusation soit épuisée. Art. 14. Lorsque les citoyens inscrits sur la liste des deux cents, formée par le procureur général syndic, prévoiront, pour le 15 du mois suivant, quelqu’obstacle qui pourrait les empêcher de se rendre à l’assemblée du juré, ils en donneront connaissance au président du tribunal criminel, deux jours au moins avant le premier du mois, pendant lequel ils désirent être excusés. Art. 15. La valeur de cette excuse sera jugée dans les vingt-quatre heures, par le tribunal criminel. Art. 16. Si l’excuse est jugée suffisante, le nom de celui qui l’a présentée, sera retiré du nombre de ceux sur lesquels le tableau des douze sera tiré au sort; si elle jugée non valable, son nom sera soumis au sort. Art. 17. S’il est du nombre des douze qui doivent composer le juré, il lui sera signifié que son excuse a été jugée non valable; qu’il est sur le tableau du juré, et qu’il ait à se rendre au jour fixé pour l’assemblée du juré. Copie de cette signification sera laissée, en outre, aux ofliciers municipaux du lieu de son domicile. Art. 18. Tout juré qui ne se sera pas rendu sur la sommation qui lui en aura été faite, sera condamné en 50 livres d’amende, et à être privé du droit d’éligibilité et de suffrage pendant deux ans. Sont exceptés de la présente disposition, ceux qui seraient retenus pour cause de maladie. Art. 19. Dans tous les cas, s’il manquait un des jurés au jour indiqué, le directeur du juré le fera remplacer par un des citoyens de la ville, pris au sort dans la liste des deux cents. TITRE XII. Des prisons et maisons d'arrêts. Art. 1er. Il y aura auprès de chaque tribunal de district une maison d’arrêt pour y retenir ceux qui y seront envoyés par un mandat d’oflicier de police, et auprès de chaque tribunal criminel une maison de justice pour détenir ceux contre lesquels il sera intervenu une ordonnance de prise de corps, indépendamment des prisons qui pourront être établies comme peine. Art. 2. Les procureurs généraux syndics veilleront, sous l’autorité des directoires, à ce que ces différentes maisons soient non seulement sûres, mais propres et saines, de manière que la santé des personnes détenues ne puisse être aucunement altérée. Art. 3. La garde de ces maisons sera donnée par le directoire, sur la piésentation de la municipalité du lieu, à des hommes d’un caractère et de mœurs irréprochables, lesquels prêteront serment de veiller à la garde de ceux qui leur seront remis, et de les traiter avec douceur et humanité. Art. 4. Les gardiens de maisons d’arrêt, maisons 71 de justice, ou geôliers de prisons seront tenus d’avoir un registre signé et paraphé à toutes les pages par le président du tribunal. Art. 5. Tout exécuteur de mandat d’arrêt, d’ordonnance de prise de corps, ou de jugement de condamnation à prison, sera tenu, avant de remettre la personne qu’il conduit, de faire inscrire en sa présence sur le registre l’acte dont il est porteur. L’acte de remise sera écrit de suite. Le tout sera signé tant par lui que par le gardien ou geôlier, qui lui en donnera copie signée pour sa décharge. Art. 6. Nul gardien ou geôlier ne pourra recevoir ou retenir aucun homme, qu’en vertu des mandats, ordonnances ou jugements dont il vient d’être parlé, à peine d’être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire. Art. 7. Le registre ci-dessus mentionné contiendra également, en marge de l'acte de remise, la date de la sortie du détenu, ainsi que l’ordonnance ou le jugement en vertu desquels elle a eu lieu. Art. 8. Dans toutes les villes où il y aura soit une maison d’arrêt, soit une maison de justice, soit une prison, un des officiers municipaux du lieu sera tenu de faire, au moins deux fois par semaine, la visite de ces maisons. Art. 9. L’officier municipal veillera à ce que la nourriture des détenus, soit suffisante et saine; et, s’il s’aperçoit de quelque tort à cet égard contre la justice ou l’humanité, il sera tenu d’v pourvoir par lui-même, ou d’y faire pourvoir’ par la municipalité, laquelle aura le droit de condamner le geôlier à l’amende, même de demander sa destitution au directoire de département, sans préjudice de la poursuite criminelle contre lui, s’il y a lieu. Art. 10. La police des maisons d’arrêt, de justice et de prison appartiendra à la municipalité du lieu. Art. 11. En conséquence, si quelque détenu, usait de menaces, injures ou violence, soit à l’égard du gardien ou geôlier, soit à l’égard des autres détenus, l’officier municipal pourra ordonner qu’il sera resserré plus étroitement, renfermé seul, même mis aux fers en cas de fureur ou de violence grave, sans préjudice de la poursuite criminelle, s’il y a lieu. Art. 12. Les maisons d’arrêt ou de justice seront entièrement distinctes des prisons qui pourront être établies pour peine, et jamais un homme condamné ne pourra être mis dans la maison d’arrêt; ni un homme arrêté, même décrété, dans une prison. TITRE XIII. Des moyens d'assurer la liberté des citoyens contre les détentions illégales ou autres actes arbitraires. Art. 1er. Tout homme, quelle que soit sa place ou son emploi, autres que ceux à qui la loi donne le droit d’arrestation, qui donnera, signera, exécutera Tordre d’arrêter un citoyen, ou qui l’arrêtera effectivement, si ce n’est pour le remettre sur le champ à la police, dans les cas déterminés par la présente loi, sera puni comme coupable du crime de détention arbitraire. Art. 2. Nul homme, dans les cas où sa détention est autorisée par la loi, ne peut être conduit que dans les lieux légalement et publiquement désignés par l’administration du département [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 novembre 1790.] 72 pour servir de maison d’arrêt, de maison de justice ou de prison, sous la même peine contre ceux qui le conduiraient, détiendraient ou prêteraient leur maison pour le détenir. Art. 3. Quiconque aura connaissance qu’un homme est détenu illégalement dam un lieu, est tenu d’en donner avis à un des ofliciers municipaux, ou au juge de paix du canton. Il pourra aussi en faire sa déclaration, signée de lui, au greffe de la municipalité ou du juge de paix. Art. 4. Ces officiers publics, d’après la connaissance qu’ils en auront, seront tenus de se transporter aussitôt et de faire remettre en liberté la personne détenue, à peine de répondre de ieur négligence, et même d’être poursuivis comme coupables du crime de détention arbitraire, s’il est prouvé qu’ils avaient connaissance de la détention. Art. 5. Personne ne pourra refuser l’ouverture de sa maison pour cette recherche : en cas de résistance, l’officier municipal, ou le juge de paix, pourra se faire assister de la force nécessaire, et tous les citoyens seront tenus de prêter main-forte. Art. 6. Dans le cas de détention légale, l’officier municipal, lors de sa visite dans les maisons d’arrêt, de justice ou prisons, examinera ceux qui y sont détenus, et les causes de leurdétention ; et tout gardien ou geôlier sera tenu, à sa réquisition, de lui représenter la personne de l’arrêté, sans qu’aucun ordre puisse l’en dispenser : et ce, sous peine d’être poursuivi comme coupable du crime de détention arbitraire. Art. 7. Si l’officier municipal, lors de sa visite, découvrait qu’un homme est détenu sans que sa détention soit justifiée par aucun des actes mentionnés dans les articles 5 et 6 du titre XII, il en dressera sur-le-champ procès-verbal, fera conduire le détenu à la municipalité, laquelle, après avoir de nouveau constaté le fait, le mettra définitivement en liberté, et dans ce cas poursuivra la punition du gardien ou geôlier. Art. 8. Les parents, voisins ou amis de l’arrêté, porteurs de l’ordre de l’officier municipal, lequel ne pourra le refuser, auront aussi le droit de se faire représenter la personne du détenu, et le gardien ne pourra s’eu dispenser qu’en justifiant de l’ordre exprès du juge, inscrit, sur son registre, de le tenir au secret. Art. 9. Tout gardien qui refuserait de montrer au porteur de l’ordre de l’officier municipal la personne de l’arrêté sur la réquisition qui lui en serait faite, ou de montrer l’ordre du juge qui le lui défend, sera poursuivi, ainsi qu’il est dit, article 6 et autres. Art. 10. Pour mettre les officiers publics ci-dessus désignés à portée de prendre les soins qui viennent d’être recommandés à leur vigilance et à leur humanité, lorsque l’inculpé sera mené devant les officiers municipaux, ainsi qu’il est dit, art. 6 du titre II, ceux-ci, après avoir pris note du mandat d’amener, entendront l’inculpé, et les plaintes qu’il pourrait taire des violences ou injures exercées contre lui en l’arrêtant : ils en dresseront procès-verbal, et l’enverront au juge de paix. Art. 11. Lorsque le prévenu aura été envoyé à la maison d’arrêt du district, copie du mandat sera remise à la municipalité du lieu, et envoyée à celle du domicile du prévenu, s’il est connu; celle-ci en donnera avis aux parents, voisins ou amis du prévenu. Art. 12. Le directeur du juré donnera égale-menQavis. auxdites municipalités de l’ordonnance de prise de corps rendue contre le prévenu, sous peine d’être suspendu de ses fonctions. Art. 13. Le président du tribunal criminel sera tenu, sous la même peine, d’envoyer auxdites municipalités copie du jugement d’absolution ou de condamnation du prévenu. Art. 14. Il sera tenu à cet effet, dans chaque municipalité, un registre particulier pour y tenir note des avis qui leur auront été donnés (fj. (L’Assembléeordonne l’impression de ce rapport qui reçoit beaucoup d’applaudissements.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur les droits d’enregitrement des actes civils et judiciaires. M. Ocfcriuon, membre du comité d'imposition -, donne successivement lecture du tarif. Les articles 1 et 2 sont adoptés sans discussion, ainsi qu’un article 3 additionne!, proposé par le rapporteur. M. Merlin demande que l’article 3 du comité soit retiré de la discussion afin qu’il y soit statué dans une autre section du tarif. Cette proposition est adoptée. M. Heurtault-Lanicrville propose de placer l’article 5 du projet du tarif dans la quatrième section de la première classe. Après une courte discussion cet amendement est rcjelé par la question préalable. M. lôecrétot demande la parole sur l’article 8 etobserve qu’au moyen du droit d’enregistrement, auquel vont être soumis les contrats d’assurance, il est juste de tes affranchir de la surtaxe du papier auquel ces actes étaient assujettis. M. Defennon répond que cette surtaxe n’aura pas lieu, d’après les dispositions de l’article 1er du projet, article qui a été ajourné par l’Assemblée dans la séance du 22 novembre. L’amendement est retiré. M. ©efcrmoii donne ensuite lecture des articles décrétés au cours de la présente séance. En voici le texte: Tarif des droits d' enregistrement qui seront perçus sur les actes civils et judiciaires , et sur les titres de propriété. PREMIÈRE CLASSE. PREMIÈRE SECTION. Actes sujets au, droit de 5 sols pour 100 livres : Art. 1er. « Les cautionnements faits et reçus en justice pour des sommes déterminées dans quelques tribunaux que ce soit; Art. 2. « Les cautionnements des trésoriers, receveurs et commis, pour sûreté des deniers qui leur sont confiés; (1) II sera fait un titre particulier pour les procès de faux, de banqueroute, do péculat, de concussion et de malversation dans le maniement des deniers, etc.