ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (8 novembre 1790.] 322 (Assemblée nationale.] Tels sont, Messieurs, les motifs qui nous ont dicté les quatre premiers articles de ce paragraphe. S’ils obtiennent votre approbation, la plupart des contestations de ce genre sont préjugées. Votre comité aura la gloire d’avoir, d’un Seul coup, tranché le nœud gordien. Nous avons pensé d’ailleurs que les échanges, faits et consommés de bonne foi, avant la convocation de l’Assemblée nationale, devaient être respectés. Les motifs eD sont développés dans une note qui se trouve à la fin de notre premier projet de décret ; nous y renvoyons. Le cinquième paragraphe a pour objet les engagements, les dons et concessions, et les baux à rente ou à cens des objets détachés et de peu de valeur, compris sous le titre de petits domaines. Ces genres d’aliénations n’ont pas donné lieu à des difficultés bien sérieuses. Nous avons pensé que toutes distractions du domaine, antérieures à l’année 1566, temps auquel l’inaliénabilité a été érigée en loi civile, pouvaient être confirmées ; nous avons sacrifié les principes du droit public à l’intérêt des particuliers et au repos des familles ; nous avons excepté de cet acte de bienfaisance, de cette espèce d’amnistie tous les actes où la clause de retour à la couronne a été insérée. Elle a dû continuellement avertir les acquéreurs que leur titre n’était que précaire; nous ravons considérée comme une réclamation perpétuelle, qui, à chaque instant, a interrompu la prescription. Les concessions à titre gratuit ou rémunéra-toire ne peuvent avoir un effet perpétuel en quelques termes qu’elles soient conçues ; elles sont toujours essentiellement résolubles; et dans les cas les plus favorables, jamais elles ne devraient se transmettre au delà de la postérité masculine du premier concessionnaire. Votre comité aurait pu vous proposer d’en faire une loi précise, mais il a craint qu’on n’en tirât de fausses conséquences. Le paragraphe sixième, qui termine le long projet qui va vous être proposé, renferme plusieurs maximes applicables à tous les genres d’aliénations ; presque toutes ont un même but : c’est de prévenir les usurpations totales ou partielles et de remédier aux abus d’une administration vicieuse ou négligée. L’article 33 oblige les détenteurs des domaines à des déclarations auxquelles ils ont toujours été assujettis, quoiqu’ils s’y soient souvent soustraits. Son exécution doit être surveillée par les assemblées administratives, et elle aura les suites les plus heureuses; elle fournira à l’administration toutes les instructions qu’il lui est si difficile de se procurer. Le domaine national, appelé alors domaine de la couronne , n’était autrefois sujet à aucune prescription. Comme nos lois l'avaient frappé depuis longtemps d’une inaliénabilité absolue, elles l’avaient, par cela même, rendu imprescriptible : le détenteur d’un objet domanial était toujours censé ne le posséder qu’à titre précaire essentiellement résoluble, et cette présomption le rendait incapable d’en acquérir la propriété; il était même assujetti à des déclarations réitérées qui interrompaient sa possession ; et s’il négligeait d’y satisfaire, l’omission de ces déclarations le constituait tellement en mauvaise foi que sa cause en devenait encore plus défavorable. D’ailleurs, la nation était alors très rarement convoquée, et dans ces assemblées connues sous le nom d 'Etats généraux , elle n’était représentée que d’une manière imparfaite : il était donc juste alors de la comparer à un mineur destitué de défenseurs, et dans cet état de faiblesse et d’inertie, on ne pouvait lui opposer une possession valable. Ces motifs ne subsistent plus aujourd’hui. Yos décrets ont rendu le domaine national au commerce : il pourra désormais être acquis et possédé à titre perpétuel et incoinmutable, et rien n’empêche qu’une possession longue, paisible et non clandestine ne puisse faire présumer le titre. La nation sera à l’avenir perpétuellement représentée. Une foule d’administrateurs distribués dans les différents départements, et sagement subordonnés les uns aux autres, veilleront au maintien et à la conservation de ses droits ; les usurpations deviendront bien difficiles dans ce nouvel ordre de choses; et ce qui semble mériter une grande considération, c’est que si le laps de temps ne pouvait jamais suppléer au titre, bien des gens craindraient d’acquérir un genre de propriété exposé à d’éternelles recherches ; il n’existe donc plus aucun motif qui puisse faire affranchir le domaine national des lois de la prescription : mais comme il ne pourra être aliéné qu’en vertu de décrets formels et authentiques ; que les aliénations seront assujetties à de grandes formalités ; que la perte du titre primitif ne pourra aisément se supposer, il est également juste et raisonnable d’exiger un temps plus long que pour les prescriptions ordinaires. Ces motifs ont déterminé votre comité à vous proposer l’article qui termine son projet de décret. Je finirai, Messieurs, ce trop long exposé par vous faire remarquer qu’en matière domaniale, il est bien plus aisé de fixer les principes et d’en tirer les conséquences, que d’en assurer l’application. Votre comité a rassemblé avec beaucoup de soins et de peines toutes les instructions qu’il a pu se procurer pour connaître les différentes distractions que le domaine avait souffertes, et les justes indemnités qu’il avait droit de réclamer: il a consulté les bureaux des finances, les chambres des comptes, les tribunaux des eaux et forêts, etc., et partout il a trouvé du zèle et du patriotisme; mais c’est sur les échanges qu’il a fait les découvertes les plus suivies. L’abus avait été poussé si loin en ce genre, que les ministres eux-mêmes avaient senti la nécessité d’y apporter un prompt remède. Ce projet sage avait occasionné un travail auquel un premier commis des finances s’est livré avec beaucoup de zèle, d’intelligence et de succès. Ses recherches ont produit sur les échanges un ouvrage considérable, qui forme un manuscrit in-4° de près de 800 pages, et qui fournit tou3 les détails désirables sur 102 échanges dont un grand nombre n’ont pas été consommés. Il commence à l’année 1647, et il ne finit qu’en 1786. M. de Villers du Terrage, auteur de ce recueil vraiment précieux, en a fait hommage à l’Assemblée nationale ; il Ta déposé au comité des domaines et il consent qu’il y reste à perpétuité pour notre utilité et pour celle ue nos successeurs. Après ces réflexions, ces développements et ces détails, il reste à vous soumettre le projet de décret : PROJET Dü DÉCRET (1). L’Assemblée nationale considérant : 1* que le domaine public a formé, pendant plusieurs siècles, la principale et presque Tunique source de (L Les articles 6, 7,8, 9, 10, 12, 16, 17 et 18 ont fait l’objet de decrets spéciaux anterieurs au 8 novembre 1790. Ils ont été intercalés dans ce projet de décret d’ensemble, dans l’ordre où ils doivent être classés. 323 [AmmbW® national*».} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {8 novembre 1790.} la richesse nationale, et qu’il a longtemps suffi aux dépenses ordinaires du gouvernement; que livré, dès le principe, à des déprédations abusives et à une administration vicieuse, ce domaine précieux, sur lequel reposait alors la prospérité de l’Etat, se serait bientôt anéanti, si ses pertes continuelles n’avaient été réparées de différentes manières, et surtout pour la réunion des biens particuliers des princes qui ont successivement occupé le trône; 2° Que le domaine public, dans son intégrité et avec ses divers accroissements, appartient à la nation ; que cette propriété est la plus parfaite qu’on puisse concevoir, puisqu’il n’existe aucune autorité supérieure qui puisse la modifier ou la restreindre; que la faculté d’aliéner, attribut essentiel du droit de propriété, réside également dans la nation, et que si, dans des circonstances particulières, elle a voulu en suspendre, pour un temps, l’exercice, comme cette loi suspensive n’a pu avoir que la volonté générale pour base, elle est, de plein droit, abolie, dès que la nation, légalement représentée, manifeste une volonté contraire; 3- Que le produit du domaine est aujourd’hui trop au-dessous des besoins de l’Etat pour remplir sa destination primitive; que la maxime de l’aliénabilité, devenue sans motifs, serait encore préjudiciable à l’intérêt public, puisque des possessions foncières, livrées à une administration générale, sont frappées d’une sorte de stérilité, tandis que, dans la main de propriétaires actifs et vigilants, elles se fertilisent, multiplient les subsistances, animent la circulation, fournissent des aliments à l’industrie et enrichissent l’Etat; 4° Que toute concession, toute distraction du domaine public est essentiellement nulle ou révocable, si elle est faite sans le concours de la nation; qu’elle conserve, sur les biens ainsi distraits, la même autorité et les mêmes droits que sur ceux qui sont restés dans ses mains; que ce rincipe, qu’aucun laps de temps ne peut affai-lir, dont aucune formalité ne peut éluder l’effet, s’étend à tous les objets détachés du domaine national, sans aucune exception; Considérant enfin que ce principe, exécuté d’une manière trop rigoureuse, pourrait avoir de grands inconvénients dans l’ordre civil, et causer une infinité de maux partiels, qui influent toujours plus ou moins sur la somme du bien général; qu’il est de la dignité d’une grande nation et du devoir de ses représentants d’en tempérer la rigueur et d’établir des règles fixes, propres à concilier l’intérêt national avec celui de chaque citoyen, a décrété et décrète ce qui suit : § I. — De la nature du domaine national et de ses premières divisions. Art. l«r. Le domaine national, proprement dit, s’entend de toutes les propriétés foncières et de tous les droits réels ou mixtes, q i appartiennent à la nation, soit qu’elle en ait la possession et la jouissance actuelles, soit qu’elle ait seulement le droit d’y rentrer par voie de rachat, droit de réversion ou autrement. Art. 2. Les chemins publics, les rues et places des villes, les fleuves et rivières navigables (1), les rivages, lais et relais de la mer (2), les ports, les (1) Ordonnance de 1669, tit. de la police des rivières, art. 4. Edit d’avril 1668. (1) Ordonnance de la marine, du mois d’août 1681. Edit de février 1110. havres, les rades, etc., et en général toutes les portions du territoire national qui ne sont pas susceptibles d’une propriété privée, sont considérées comme des dépendances du domaine public. Art. 3. Tous les biens et effets, meubles ou immeubles, demeurés vacants et sans maître, et ceux des personnes qui décèdent sans héritiers ni parents connus en aucune ligne, ou dont les successions sont abandonnées, appartiennent à la nation. Art. 4. Le conjoint survivant pourra néanmoins succéder à défaut de parents, même dans les lieux où la loi territoriale a une disposition contraire. Art. 5. Les mors et fortifications des villes entretenues par l'Etat, et utiles à sa défense, font partie des domaines nationaux. 11 en est de même des anciens murs, fossés et remparts de celles qui ne sont point places fortes; mais les villes et communautés, qui en ont la jouissance actuelle y seront maintenues, si elles sont fondées en titres, ou si leur possession remonte à plus de dix ans. Art. 6. Décrété le 9 mai 1790. Les biens particuliers du prince qui parvient au trône, et ceux qu’il acquiert pendant son règne, à quelque titre que ce soit, sont de plein droit, et à l’instant même, unis au domaine de la nation, et l’effet de cette union est perpéluel et irrévocable. Art. 7. Décrété le 9 mai 1790. Les acquisitions faites par le roi à titre singulier, et non en vertu des droits de la couronne, sont et demeurent, pendant son règne, à su libre disposition, et ledit temps passé, elles se réunissent de plein droit et à l’instant même, au domaine public. § II. — Comment et à quelles conditions les domaines nationaux peuvent être aliénés . _ Art. 8. Décrété le 9 mai 1790. Les domaines nationaux et les droits qui en dépendent sont et demeurent inaliénables, sans le consentement ou le concours de la nation; mais ils peuvent être vendus et aliénés à titre perpétuel etincommu-table, en vertu d’un décret formel du Corps législatif, sanciionné par le roi, en observant les formalités prescrites pour la validité de ces sortes d’aliénations. Art. 9. Décrété le 13 août 1790. Les droits utiles et honorifiques, ci-devant appelés régaliens, et notamment ceux qui participent de la nature de l’impôt, comme droits d’aides et autres y joints, contrôle, insinuation, centième denier, droits de nomination et de casualité des offices, amendes, confiscations, greffes, sceaux et tous autres droits semblables, ne sont point communicables ni cessibles, et toutes concessions de ce genre, à quelque titre qu’elles aient été faites, sont nulles, en tous cas révoquées par le présent décret. Art. 10 -Décrété le 13 août 1790. Les droits utiles mentionnés en l’article précédent seront, à l’instant de la publication du présent décret, réunis aux finances nationales, et dès lors ils seront administrés, régis et perçus selon leur nature, par les commis, agents ou préposés des compagnies établies par l’administration actuelle dans la même forme et à la charge de la même comptabilité que ceux dont la régie et administration leur est actuellement confiée. Art. 11. Les sommes que le roi pourrait avoir payées pour rentrer dans les droits ainsi concédés , seront rendues et versées au Trésor public, [8 novembre 1790.] 324 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, et les obligations qu’il aurait contractées aux mêmes tins, seront annulées, comme ayant été lesdits payements faits et lesdites obligations consenties sans cause. Art. 12. Décrété le 6 août 1790. Les grandes masses de bois et forêts dont la contenance excède 100 arpents, demeurent exceptées de la vente et aliénation des biens nationaux permises ou ordonnées par le présent décret et autres décrets antérieurs. Art. 13. Aucun laps de temps, aucunes fins de non-recevoir ou exceptions, si ce n’est celles résultant de l’autorité de la chose jugée (1), ne peuvent couvrir l’irrégularité connue et bien prouvée des aliénations faites sans le consentement de la nation. Art. 14. L’Assemblée nationale exempte de toute recherche et confirme, en tant que besoin : 1° les contrats d’échanges faits et consommés sans fraude, fiction ni lésion, avant la convocation de la présente cession; 2° les ventes et aliénations pures et simples, sans clause de rachat, même les inféodations, dons et concessions à titre gratuit, sans clause de réversion, pourvu que la date de ces aliénations, à titre onéreux ou gratuit, soit inférieure à l’ordonnance de février 1566. Art. 15. Tout domaine dont l’aliénation aura été révoquée ou annulée, en vertu d’un décret spécial du Corps législatif, pourra , s’il est ainsi ordonné, être sur-le-champ mis en vente, avec les formalités prescrites pour l’aliénation des biens nationaux, à la charge par l’acquéreur d’indemniser le premier engagiste et de verser le surplus du prix à la caisse de l’extraordinaire. § III. — Des apanages. Art. 16. Décrété le 13 août 1790.11 ne sera concédé, à l’avenir, aucuns apanages réels. Les fils puînés de France seront élevés et entretenus aux dépens de la liste civile, jusqu’à ce qu’ils se marient ou qu’ils aient atteint l’âge de vingt-cinq ans accomplis; alors, il leur sera assigné, sur le Trésor national, des rentes apanagères, dont la quotité sera déterminée, à chaque époque, par la législature en activité. A ajourner. Après le décès des apanagistes, les rentes apanagères seront payées à ï’aînê, chef de la branche masculine, issue du premier concessionnaire, quittes de toutes charges ou hypothèques autres que le douaire viager dû aux veuves de leurs prédécesseurs, auquel la dite rente pourra être affectée jusqu’à la concurrence de la moitié d’icelle, et ainsi de suite d’aîné en aîné, jusqu’au cas prévu par l’article suivant. Art. 17. Décrété le 13 août 1790. A l’extinction de la postérité masculine du premier concessionnaire, la rente apanagère sera éteinte au profit du Trésor national, sans autre affectation que de la moitié d’icelle audit douaire viager, tant qu’il aura cours, suivant la disposition de l’article précédent. Art. 18. Décrété le 13 août 1790. Les fils puînés de France et leurs enfants et descendants ne pourront, en aucun cas, rien prétendre ni réclamer, à titre héréditaire, dans les biens meubles ou immeubles relaissés par le roi, la reine et l’héritier présomptif de la couronne. (1) Arrêts eu grande direction, des 19 février 1731 et 6 mars 1747. § IV. — - Des échanges. Art. 19. Tous contrats d’échanges des biens domaniaux non encore consommés (1), et ceux qui ne l’ont été que depuis la convocation de l’Assemblée nationale, seront ou pourront être annulés et révoqués toutes fois et quantes par un décret formel des représentants de la nation (2). Art. 20. Les échanges ne seront censés consommés qu’autant que toutes les formalités prescrites par les lois et règlements auront été observées et accomplies en entier ; qu’il aura été procédé aux évaluations ordonnées par l’édit d’octobre 1711; et que l’échangiste aura obtenu et fait enregistrer dans les cours les lettres de ratification nécessaires pour donner à l’acte son dernier complément. Art. 21. Tous contrats d’échange pourront être révoqués et annulés, malgré l'observation exacte des formes prescrites, s’il s’y trouve fraude, fiction ou simulation, ou si le domaine a souffert une lésion considérable, eu égard au temps de l’aliénation. Art. 22. L’échangiste évincé sera, au même instant, remis en possession réelle et actuelle de l’objet par lui cédé en contre échange, sauf les indemnités respectives qui pourraient être dues, et s’il a été payé des retours ou soultes, de part ou d’autre, ils seront rendus à la même époque, ou compensés, s’il y a lieu, et si les soultes n’ont pas été payées, il sera fait raison des intérêts pour le temps de la jouissance. Art. 23. Les échangistes qui auront rempli toutes les conditions prescrites, et qui, par le résultat des évaluations, se sont trouvés débiteurs d’une soulle dont ils ont dû payer les intérêts jusqu’à ce qu’ils eussent fourni des biens et domaines fonciers de la même nature, qualité et valeur, seront admis à payer les dites soultes ou retours, ensemble les intérêts d’icelles, en deniers ou assignats, sans aucune retenue ni distraction d’imposition, et l’administrateur général des domaines sera autorisé à donner toute quittance bonne et valable, et sera tenu de verser, dans la caisse de l’extraordinaire, le montant des dites soultes ou retours, avec l’intérêt, du jour qu’ils sont dus ; et à cet effet les chambres des comptes seront tenues de fournir tous les renseignements nécessaires. § V. — Des engagements , des dons et concessions à titre gratuit ou rémunératoire , et baux à rente ou à cens. Art. 24. Tous contrats d’engagement des biens et droits domaniaux postérieurs à l’ordonnance de 1566 sont sujets à rachat perpétuel ; ceux d’une date antérieure n’y seront assujettis qu’autant qu’ils en contiendront la clause expresse. Art. 25. Les ventes et aliénations des domaines et droits nationaux postérieures à l’ordonnance de 1566 seront réputées simples engagements, et comme telles, perpétuellement sujettes à rachat, quoique la stipulation en ait été omise au contrat, ou même qu’il contînt une disposition contraire. (t) Edit de 1667. (2) La nation, dont le domaine a été aliéné sans son concours, doit être assimilée à un pupille dout le tuteur a vendu le patrimoine. Ce mineur dépouillé, parvenu à sa majorité, a le choix de faire annuler la vente, ou de la laisser subsister. La nation, réintégrée dans ses droits, jouit du même avantage. [Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. j8 novembre 1790. Art. 26. Aucuns engagistes ne pourront être dépossédés des biens acquis sous faculté de rachat, par eux ou leurs auteurs, sans avoir préalablement reçu ou été mis en demeure de recevoir leur finance principale avec les accessoires. Art. 27. En procédant à la liquidation de la finance due aux engagistes, en cas de rachat, les sommes dont il aura été fait remise ou compensation lors du contrat d’engagement à titre de don, gratification, acquits patents ou autrement, seront rejetées : on ne pourra faire entrer en liquidation que les deniers comptants réellement versés en espèces au Trésor public, en quelque temps ou pour quelques causes que les quittances soient conçues ; et la preuve du contraire pourra être faite par extraits tirés des registres du Trésor royal, états de menus et comptants, et autres papiers de même genre, registres et comptes des chambres des comptes et tous autres actes. Art. 28. Les dons, concessions et transports de biens et droits domaniaux faits avec clause de retour à la couronne, à quelque époque qu’ils puissent remonter, et tous ceux d’une date postérieure à l’ordonnance de 1566, quand même la clause de retour y serait omise, sont et demeurent révocables à perpétuité, même avant l’expiration du terme auquel la réversion à lacouronne aurait été fixée par la concession. Art. 29. Les baux emphi théotiques et à longues années, et les baux à une ou plusieurs vies, sont réputés aliénations, et à ce titre essentiellement révocables avant leur expiration. Art. 30. Tous acquéreurs ou détenteurs des domaines nationaux les rendront, lors de la cessation de leur jouissance, en aussi bon état qu’ils étaient lors de la concession, et ils seront tenus des dégradations et malversations commises par eux et par leurs auteurs. Art. 31. Les aliénations faites jusqu’à ce jour par contrat d’inféodation, baux à cens ou à rentes des terres vaines et vagues, landes, bruyères, palus, marais, terrains en friches, et en général de tous les objets de peu de valeur appelés petits domaines (1), autres que ceuxsiluésdans les forêts ou à cent perches d’icelles, sont confirmées et rendues perpétuelles par le présent décret, pourvu qu’elles aient été faites sans dol ni fraude, et dans les formes prescrites par les règlements en usage au jour de leur date. VI. — Dispositions générales. Art. 32. Les bois de haute futaie faisant partie du sol auquel iis sont inhérents, aucun concessionnaire ou détenteur, quel que soit son titre, ne peut y toucher ni en disposer (2), non plus que des taillis recrûs sur les futaies coupées ou dégradées. Art. 33. Il en est de même des pieds-corniers, arbres de lisière, baliveaux anciens et modernes des bois taillis, dont d’ailleurs it est défendu d’avancer, retarder ni intervertir les coupes. Art. 34. Il est expressément enjoint par le présent décret à tous concessionnaires et détenteurs des biens domaniaux, à quelque titre qu’ils en jouissent, de se présenter en personne ou par procureur spécial, au directoire du département (1) Ordonnance du mois de février 1S66, dite des petits domaines. (2) Ordonnance de 1566, de 1579, etc. m de la situation du chef-lieu de ces domaines, dans deux mois, à compter du jour de la publication du présent décret, et d’exhiber les titres xle leur acquisition, les procès-verbaux qui ont dû précéder l’entréeen jouissance, les quittances de finance, si aucunes ont été payées, les baux qui auront été consentis, et en général tous les actes, titres et renseignements qui pourront en constater la consistance, la valeur et le produit, et faire connaître le montant des charges dont ils sont grevés, et de laisser des copies certifiées, de ceux de ces titres qui seront jugés utiles; et faute par eux d’y satisfaire dans le délai prescrit, ils seront réputés possesseurs de mauvaise foi, et condamnés à la restitution des fruits, du jour qu’ils seront en demeure. Art. 35. Geux desdits concessionnaires ou détenteurs qui seront trouvés coupables d’usurpation, même partielle, de fausse déclaration, réticence frauduleuse, ou recèlement affecté, ou de quelque vice essentiel d’administration, seront et demeureront déchus de plein droit de l’effet de leur titre, et seront condamnés, outre la restitution des fruits, à des dommages-intérêts proportionnés à la faute ou au délit. Art. 36. Les engagistes et concessionnaires à vie, ou pour un temps déterminé des biens et droits domaniaux, leurs héritiers et avants-cause, se renfermeront exactement dans les bornes de leurs titres, sans pouvoir se maintenir dans la jouissance desdits biens, après l’expiration du terme prescrit, sous peine d’être condamnés au payement du double des fruits perçus depuis leur indue jouissance. Art. 37. La prescription aura lieu pour l’avenir en matière, domaniale, et tous les détenteurs d’une portion quelconque des domaines nationaux, qui justifieront en avoir joui par eux-mêmes ou par leurs auteurs publiquement et sans trouble pendant cent ans continuels, à partir dulj our de la publi cation du présent décret, seront à l’abri de to u te recherche. Art. 38. Les dispositions comprises au présent décret ne seront exécutées, à l’égard des provinces réunies à la France postérieurement à l’ordonnance de 1566, qu’en ce qui concerne les aliénations faites depuis la date de leurs réunions respectives; les aliénations précédentes devant être réglées suivant les lois lors en vigueur dans les-dites provinces. Art. 39. L’Assemblée nationale a abrogé et abroge, en tant que besoin, toute loi ou règlement contraire aux dispositions du présent décret. M. le Président. La discussion est ouverte sur les articles du projet de décret. Les articles 1, 2, 3 et 4 ne souffrent aucune objection et sont décrétés en ces termes : « L’Assemblée nationale considérant : 1° que le domaine public a formé pendant plusieurs siècles la principale et presque l’unique source de la richesse nationale et qu’il a longtemps suffi aux dépenses ordinaires du gouvernement; que livré, dès le principe , à des déprédations abusives et à une administration vicieuse, ce domaine précieux, sur lequel reposait alors la prospérité de l’État, se serait bientôt anéanti, si ses pertes continuelles n’avaient été réparées de différentes manières, et surtout par la réunion des biens particuliers des princes qui ont successivement occupé le trône ; « 2° Que le domaine public, dans son intégrité et avec ses divers accroissements, appartient à la