[Assemblée nationale.] ARCHIVAS PARLEMENTAIRES. [2 janvier 1791.] « tion, conformément à l’article 9 du titre II; et « chns le cas de diminution, elle sera faite d’abord « au marc la livre de la cote d'habitation, et en-« suite de celle de facultés mobilières. « Les officiers municipaux, avec le3 commis-« saires adjoints, procéderont, aussitôt que le « mandement du directoire de district leur sera « parvenu, à la confection du projet de rôle, con-« formément aux instructions du directoire de « département qui seront jointes au mandement; « et lorsque ce rôle sera terminé, il sera déposé « pendant huit jours au secrétariat de la munici-« palité, où chaque contribuable pourra en prendre « connaissance et le contredire-Après ce délai, « les officiers municipaux arrêteront definitive-« ment le projet, le signeront, et l’enverront au « directoire de district. « La forme des rôles, le nombre de leurs expé-« ditions, de leur envoi, leur dépôt et la manière « dont ils seront rendus exécuioires, seront ré-« glés par l’instruction de l’Assemblée natio-« nale. » Ces articles prescrivent aux officiers municipaux et aux commissaires adjoints deprocéder, après la quinzaine, à l’examen des déclarations, et de suppléera celles qui n auraient paséié fuites, ou seraient incomplètes, et de former le rôle d’après les principes et sur les bases qui ont été dôveloppées.Puurcetteopération, il faudrad’abord conserver sur le rôle tous ceux qui sont en état de payer les trots journées de travail, et à la lin du rôle ceux qui ne seront pas dans ce cas. Les projets de rôle, dont le tableau sera joint, présentent une grande facilité pour le mécanisme d’exécution. La contribution mobilière devant être formée de cinq taxes, on a placé à la suite du nom du contribuable les colonnes propres à classerchacune d’elles, et nécessaires pour établir les distinctions, les déductions, les augmentations ou diminutions. Les officiers municipaux suivront, pour la confection de leurs rôles, la forme de celui qui est joint à cette instruction ; et après en avoir rempli les colonnes avec soin, ils déposeront ces rôles au secrétariat de la municipalité, où chaque contribuable aura droit pendant huitaine d’en aller prendre communication, et de donner ses observations. Ce ne sera qn’après ce délai, et après avoir délibéré sur les réclamations qui aurontété faites, que les municipalités arrêteront définitivement leur projet pour l’envoyer au directoire de district. Mais ce n’est pas encore le moment de songer à cette dernière formalité; l’Assemblée nationale ne demande aux municipalités et corps administratifs que de préparer la confection des rôles. Bientôt elle décrétera la somme de la contribution mobilière, et en fera la répartition, et alors elle leur demandera de donner la dernière main à leur travail. Ainsi tout ce que l’Assemblée nationale attend du zèle des municipalités, n’est qu’une préparation; mais on ne peut trop se presser de la faire; c’est le moyen le plus sûr de rétablir le crédit public, et de concourir au succès de la Révolution. Art. 6. « Les administrateurs de département « et de district surveilleront et presseront avec « la plus grande activité toutes les opérations “ ci-dessus prescrites aux municipalités. » Cet article prescrit aux administrations de district et de département de surveiller et presser çes opératious préliminaires. 763 Les corps administratifs, établis par la Constitution et le suffrage des citoyens, continueront sans doule de donner des preuves de leur dévouement à la chose publique, eu secondant de tous leurs efforts une opération dont ils doivent reconnaître la nécessité et les avantages. DEUXIÈME ANNEXE a la séance de l’assemblée nationale DU 2 JANVIER 1791. Discours de 11/, de Donnai, évêque de Clermont , relativement au serment exigé par l'Assemblée nationale. Messieurs, nous n’avons cessé de rendre hommage à la puissance civile, de célébrer, avec une religieuse gratitude, l’appui que l’Eglise en a reçu depuis le commencement de la monarchie; nous avons reconnu et nous le reconnaîtrons toujours, que c’est d'elle que nous avons reçu tous les avantages dont nous avons joui dans l’ordre politique; mais nous avons dit, en même temps, et nous répéterons toujours que, dans l’ordre spirituel, nous ne tenons et ne pouvons tpnir nos pouvoirs de cette puissance; que notre juridiction nous vient de Jésus-Christ ; que ce u’est que par l’Eglise qu’elle peut nous être transmise ou retirée. Nous regardons comme un point de la doctrine ca holique, que l’autorité spirituelle doit établir, régler et déterminer ce qui appartient à la hiérarchie, à la juridiction et a la discipline ecclésiastique. Cette doctrine que l’Ecriture ut la tradition nous ant apprise, nous sommes obligés, comme ministres de la religion, de la professer, de la défendre, de l’eneigner et de la transmettre dans toute son intégrité. Nous avons toujours soutenu, comme une vérité consacrée par toutes les lois canoniques, que nos fonctions étaient tellement limitées à la portion du territoire, pour lequel nous avons reçu notre mission; que les étendre au delà, sans l’autorité de l’Eglise, ceserait rendre illégitimes celles qui dépendent de l’ordre, et nulles celles de la juridiction. Quelle anxiété, quel trouble, quelle désolation ne jetterions-nous pasdanslesconsciences, si, entraînés par unecou-pable condescendance, nous venions à étendre, par notre seule autorité, un pouvoir que l’Eglise a circonscrit 1 Le suprême législateur nous a dit que son royaume n’était pas de ce monde. On en a tiré cetteconséquenceque nousavouons et que l’Eglise gallicane s’est toujours empressée de reconnaître, que l’Eglise n’a aucun droit à exercer sur le gouvernement des empires, nulle autorité sur le temporel, mais il en est une autre aussi directe et aussi naturelle, et c’est celle-ci : que la puissance séculière n’a point de législation à exercer dans le royaume spirituel par sa nature. Partout ailleurs, dit le grand Bossuet : « la puissance « royale donne la loi et marche la première en « souveraine. Dans les affaires ecclésiagiiques, « elle ne fait que seconder et servir: famulante , « ut decet, polestate nostra ; ce sont les propres « termes d’un capitulaire, dans les affaires, non « seulement de la foi, mais de la discipline ecclé-« sisastique; à l’Eglise, la décision; au prince, la 764 [Assemblée nationale.] « protection ; la défense, l’exécution des canons « et règles ecclésiastiques (1). » Observez, Messieurs, que ce royaume spirituel étant l’ouvrage du fils de Dieu, il n’a pu sortir de ses mains sans avoir une constitution divine, une constitution indépendante, quant à ses bases fondamentales, de toute puissance humaine, une constitution dont les premiers principes sont inaccessibles à l’altération que les siècles produisent dans les établissements humains. Ce royaume n’a d’autres limites que celles de l’univers; il doit être gouverné par des lois générales, applicables à toutes les régions, à tous les génies, à tous les peuples, et ne serait-ce pas le diviser en autant de parties qu’il y a, dans le monde, d’Etats différents, si chaque gouvernement civil pouvait lui donner une constitution particulière? Non seulement dans la foi, mais dans les principes généraux de la discipline, l’unité est absolument nécessaire; sans elle le royaume ne pourrait subsister. Ce royaume doit avoir un chef, et la foi nous apprend que Jésus-Christ n’a point cessé et ne cessera point de l’être, jusqu’à la consommation des siècles : elle nous apprend qu’en quittaut la terre il a laissé dans la personne de Saint-Pierre et de ses successeurs, un chef visible, comme son représentant et son vicaire ; chef auquel il a attribué cette primauté d’honneur et de juridiction dans toute l’Eglise, que nul catholique ne peut méconnaître. Mais cette primauté ne peut être sans fondions, et la constitution du clergé la réduit à une lettre de communion que doit écrire le nouvel élu à un évêché : pour tout autre objet, le chef de l’Eglise n’a nulle influence. Serait-ce donc à tort que Bossuet se serait écrié : « Qu’elle est grande l’é-« glise romaine soutenant toutes les églises ; por-« tant, dit un ancien pape, le fardeau de tous ceux « qui souffrent; entretenant l’unité, confirmant « la foi, liant et déliant les pécheurs, ouvrant et « fermant le ciel ! qu’elle est grande encore une i. fois, lorsque, pleine de l’autorité de Saint-Pierre, « de tous les apôtres, de tous les conciles, elle « en exécute, avec autant de force que de dis-« créimn, les salutaires décrets! Quel aveugle-« ment, quand des royaumes chrétiens ont cru « s’affranchir se secouant, disaient-ils, le joug de « la cour de Rome, qu’ils appelaient un joug « étranger ! comme si l’Eglise avait cessé d’être « universelle, ou que le lien commun, qui fait « de tant de royaumes un seul royaume de « Jésus-Christ, put devenir étranger à des chré-« liens (2). » Dans les causes portées à cet auguste tribunal, l’autorité ne s’exerce et ne doit pas s’exercer arbitrairement. « Il faut régler l’usage de la puis-« sauce apostolique, par les canons faits par l’es-« prit de Dieu et consacrés par le respect géné-« ral de tout l’univers (3). » Qu’on ne dise donc pas que nous invoquons, i nous adressant au Saint-Siège, la domination d’un souverain étranger : le chef de l’église universelle n’est, à ce titre, étranger nulle part, tandis que, comme souverain temporel, il l’est partout, au delà des limites de ses Etats. S’il nous était permis, Messieurs, ce qu’à Dieu ne plaise, de regarder, comme vos principes, ceux que nous avons eutendu avancer dans cette tribune, combien n’aurions-nous pas à gé-(1) Polit, sacrée , liv. VIÏ, prop. 1. (2) Serm. sur l’unité de l’Eglise. (3) Declar. cleri gallicani, art. 3. (2 janvier 1791.] mir sur le sort de la religion ! Vous avez déclaré que tous les pouvoirs venaient de la nation : de là l’on a conclu que ceux des fonctionnaires publics de l’Eglise avaient la même source. S’il eu était ainsi, nous n’aurions donc plus qu’une religion humaine, qu’une religion de circonstances, qu’une religion de politique. Non, Messieurs, nous ne nous persuaderons jamais que les représentants de la nation paissent adopter de pareilles idées, et introduire dans le sanctuaire une suprématie civile que l’Église a proscrite et condamnée dans tous les temps. Pour venir au serment, qui est le véritable objet qui m’a conduit à cette tribune, je dois vous répéter, Messieurs, ce que j’ai eu l’honneur de vous dire dans une autre circonstance : qu’il est des points sur lesquels la religion ne permet pas de laisser d’équivoque. Nous n’oublierons jamais qu’un de nos premiers devoirs est de nous montrer citoyens, et donner l’exemple de la soumission à l’autorité civile; mais si les hommes nous prescrivent des choses opposées aux principes de notre religion, nous devons leur dire avec fermeté, qu'il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. Les formes canoniques, pour les objets susceptibles de changement, dans l’ordre de la discipline ecclésiastique sont incontestablement nécessaires. Cependant notre constitution les méconnaît ou les oublie; sans l’intervention de l’autorité spirituelle, elle règle les droits respectifs du pape, des métropolitains, des évêques et des curés, dans l’exercice de leurs fonctions; elle déplace les pouvoirs; elle donne, ôte, étend ou restreint la juridiction; elle détermine les conditions et qualités requises dans ceux qui doivent devenir les pasteurs des âmes ; elle lixe et restreint la profession de foi qu’ils doivent faire ; elle ordonne une forme d’élection inconnue à tons les siècles ; elle change l’ordre établi pour la mission divine. Il faut vous le dire, Messieurs, telle est la maxime de tous les âges : Que l’Eglise ne peut être constituée sans l’Eglise. Une sage condescendance la portera sans doute toujours à concourir, dans tout ce qui ne sera pas opposé aux principes essentiels, ou au bien spirituel des fidèles, à ce qui pourra remplir le vœu de la puissance civile; mais il faut attendre la décision et l’intervention de son autorité. Voilà les grands principes que nous avons exposés; iis sont gravés dans nos consciences; ce sont ceux des pasteurs du royaume. Enchaînés par le devoir, nous serons forcés de nous dévouer à la sévérité de vos décrets, plutôt que de trahir ces principes. Ils ne nous permettront jamais, Messieurs, de nous regarder comme déchargés de notre mission, tant que la voix de l’Eglise ne se sera pas fait entendre. Ceux qui s’ingéreraient, à nos places, dans nos fonctions, seraient sans juridiction et sans pouvoirs; ils tromperaient la religion des peuples, et nous, nous n’aurions que des larmes à verser sur le sort des fidèles, auxquels nous avons voué toute notre affection: mais nous pourrions au moins vous répondre que nous avons tout sacrifié, excepté notre conscience et notre amour pour eux. Permettez qu’en finissant je vous fasse observer que, dans vos vues, la constitution que vous avez décrétée pour le clergé ne doit être qu’une constitution civile; que c’est le titre que vous lui avez donné; que ses auteurs ont plusieurs fois répété, dans cette tribune, que vous ne prétendiez pas prononcer sur des objets spirituels. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 janvier 1791.] Si donc vous croyez qu’il n’y a, dans cette Constitution, rien de spirituel et qui dépende essentiellement de l’Eglise, toutes les réserves et exceptions que nous pensons devoir réitérer, doivent vous être indifférentes ; s’il y a, au contraire, des objets réellement spirituels, nous sommes dans vos principes en prononçant ces exceptions; vous devez les approuver et voir la pleine exécution de vos lois dans le serment de notre soumission à tout ce qui est dans l’ordre politique, ainsi que de notre zèle à le maintenir. Vous avez dit, Messieurs, et vous l’avez solennellement prononcé, que l’Assemblée nationale n’a et ne peut avoir aucun pouvoir à exercer sur les consciences. Eli! quel pouvoir plus terrible que celui qui placerait les ministres de la religion, pasteurs et citoyens, dans l’alternative 765 de violer la loi de Dieu, ou celle de l’Empire? Votre justice est avertie ; notre conscience va nous dicter le seul serment qu'il nous soit possible de faire : Je jure de veiller , avec soin , sur les fidèles dont la conduite m’a été ou me sera confiée par l’Eglise , d'être fidèle à la nation , a la loi et au roi, et de maintenir, de tout mon pouvoir, en tout ce qui est de l'ordre politique , la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi; exceptant formellement les objets qui dépendent essentiellement de l'autorité spirituelle. François, évêque de Clermont. Nota. Interrompu dès les premières phrases, M. l’évêque de Clermont avait, en descendant de la tribune, remis son discours sur le bureau. FIN DU TOME XXI.