[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1791.] 401 les avilit; elles sont, pour ainsi dire, d’un métal pins pur, et leur médiocrité renferme un prix inestimable, celui d’ôire bien acquises, de n’être dues ni à la faveur ni à l’intrigue, mais d’être accordées par la loi qu’on ne séduit point, et qui ne donne à personne la part d’un autre. Voici le projet de décret que votre comité vous propose : TITRE Ier. Distribution des récompenses nationales. « L’Assemblée, ouï le rapport de son comité d’agriculture et de commerce, décrète ce qui suit : « Art. 1er. Sur le fonds de 2 millions, destiné, par le décret du 3 août 1790, à être annuellement employé en dons, gratifications et encouragements pour les découvertes utiles, il sera distribué, selon le mode ci-après déterminé, des gratifications et secours aux artistes, qui, par leurs travaux, leurs recherches et leurs découvertes, auront mérité d'avoir part aux récompenses nationales. « Art. 2. Lesdites récompenses seront accordées d’après les instructions envoyées sur les différents artistes parles directoires de leurs départements, ensuite des attestations des districts et des certificats de leurs municipalités. « Il suffira cependant à ces artistes d’un certificat des corps administratifs de leur domicile actuel, lorsque t es corps se trouveront suffisamment instruits pour le leur délivrer. « Art. 3. Les travaux pour lesquels il pourra être accordé des récompenses nationales seront divisés en deux classes principales : ceux qui ont pu exiger des sacrifices, de quelque genre que ce soit, et ceux qui, par leur nature, n’en exigent point. « Dans les récompenses affectées àchacunde s classes, il sera établi trois degrés sous les noms de minimum , medium et maximum , applicables en proportion du mérite des objets, d’après l’avis motivé d’un bureau de consultation pour les arts, qui sera établi à cet effet à Paris, et dont la composition sera déterminée dans le titre II du présent décret. « Le medium sera d’un quart, et le maximum d’une moitié en sus du minimum. « Dans la première classe, le minimum sera de 4,000 livres, le medium de 5,000 livres, et le maximum de 6,000 livres. « Dans la seconde classe, le minimum sera de 2,000 livres, le medium de 2,500 livres, et le maximum de 3,000 livres. « Ceux des artistes qui auront passé l’âge de 60 ans obtiendront, en sus de la récompense qui leur aura été fixée, une somme égale au minimum de leur classe. « Art. 4. Indépendamment de ces deux classes, il pourra être accordé des gratifications particulières aux artistes indigents, dont les talents auront été reconnus par des approbations de corps savants, et dont l’honorable pauvreté sera certifiée par les corps administratifs. « Le minimum de ces gratifications sera de 2,000 livres. * Le medium de 250 livres. « Le maximum de 300 livres. « Ceux de ces artistes récompensés qui auront passé l’âge de 60 ans obtiendront, conformément 4" Série. T. XXX, à l’article 113, une somme égale au minimum de leur classe. « Art. 5. Autorise néanmoins, l’Assemblée nationale, le ministre de l’intérieur à lui proposer des demandes relatives aux découvertes d’une importance majeure faites dans le royaume, ou importées des pays étrangers, lesquelles découvertes, étant dues à des travaux pénibles ou à d> s voyages longs et périlleux, pourraient mériter un supplément aux récompenses de la lre classe. « Art. 6. Partie des mêmes fonds pourra aussi être employée, sur la demande des directoires de départements, soit à la publication d’ouvrages qui auraient été jugés utiles aux progrès des arts, soit en expériences, essais et constructions de modèles, ou même de machines, dont les avantages et la possibilité seraient vérifiés par le bureau de con-ultaiion, mais dont les frais excéderaient les facultés de leurs auteurs. « Art. 7. Il sera publié tous les ans, par la voie de l’impression, un état nominatif des artistes, qui, dans le cours de l’année, auront obtenu des récompenses nationales, avec le compte général des sommes employées à ces récompenses, ainsi qu’aux publications d’ouvrages, et aux frais d’expériences et de constructions, ordonnées par le ministre de l’intérieur, d’après les avis du bureau de consultation. « Art. 8. Les pensions assurées par un brevet signé du roi, aux artistes qui, à ce prix, ont ci-devant cédé à l’Etat leurs inventions, découvertes ou importations, légalement constatées, seront regardées comme faisant partie de la dette publique, et, en conséquence, renvoyées à la liquidation. « Art. 9. Les artistes avec lesquels l’administration du commerce a ci-devant contracté des engagements conditionnels, et qui justifieront avoir satisfait aux conditions stipulées, seront aussi regardés comme créanciers de l’Etat, pour les sommes qui ne leur auraient point encore été payées, et en cette qualité renvoyés à la liquidation. « Art. 10. Les artistes dont les machines, importées de l’étranger, ou nouvellemnnt construites d’après la demande de l'administration du commerce, auraient été détruites lors des troubles populaires survenus en quelques parties du royaume, seront indemnisés de leurs pertes, sur une attestation des corps administratifs desdits lieux, à laquelle devra êire jointe une évaluation faite par des hommes à ce connaissants : ces attestations tiendront lieu de titres, et seront, comme tels, reçues à la liquidation. TITRE IL Composition et fonctions du bureau de consultation pour les arts et métiers. « Art. 1er. Conformément à l’article 3 du titre Ier, il sera établi à Paris, sous la surveillance et l’autorité du ministre de l’intérieur, un bureau de consultation pour les arts et métiers , à l’effet de lui douner des avis motivés sur tous les mémoires et demandes d'indemnités, encouragements, gratifications et secours de la nation, pour des recherches et des travaux utiles eu tout genre. « Art. 2. Les membres de ce bureau seront choisis dans les compagnies occupées, par leur institution, d’objets relatifs aux sciences exac-26 402 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1791.' tes, aux arts et à l’industrie; dans les corps civils ou militaires assujettis à l’étude des mathématiques ; et dans les associations libres d’artistes et de citoyens instruits en différents genres, pourvu que lesdites associations aient rempli auprès du greffe municipal les formalités prescrites par la loi du 5 juillet dernier. « Chacun de ces corps, compagnies et associations élira, par la voie du scrutin individuel, trois membres et deux suppléants pour le bureau de consultation; et la moitié de ceux qui auront été élus sera renouvelée, tous les deux ans, par de semblables élections. « Art. 3. Aussitôt après la publication du présent décret, le département de Paris adressera au ministre de l’intérieur un état des divers corps, compagnies et associations, qui, conformément au précédent article, devront concourir à former le bureau de consultation. « Art. 4. Lesdits corps, compagnies et associations se rassembleront dans la huitaine même de l’invitation du ministre, pour procéder à leurs élections respectives ; et dans la huitaine suivante, les sujets élus se réuniront dans le lieu qui leur sera désigné par le ministre pour y recevoir ses instructions et pour s’organiser, relativement aux fonctions qui leur sont attribuées par l’article 1er du présent décret. « Art. 5. Le bureau de consultation commencera par classer, conformément à l’article 3 du titre 1er, les mémoires adressés par les directoires de départements en faveur des artistes qui prétendront à des récompenses nationales ; et, après cette première division, il assignera, suivant le mérite individuel de l'objet, le minimum,, le medium ou le maximum des récompenses affectées à chacune des trois classes. « Art. 6. Le bureau de consultation s’occupera aussi de l’examen de tous les mémoires adressés par les directoires de départements sur les divers projets pour lesquels les auteurs solliciteraient des secours ; et il donnera des avis, tant sur le mérite des objets que sur la quotité des sommes qu’il conviendrait d’employer aux essais proposés. « Il donnera de même des avis motivés sur les demandes pour l’impression et la publication d’ouvrages relatifs aux arts et à l’industrie. « Art. 7. Ce bureau donnera aussi des avis sur les demandes des artistes qui auraient pu faire, avec l’ancienne aduiini-tration de commerce, des traités ou des engagements conditionnels, et qui, ne les ayant remplis qu’en partie, paraîtraient néanmoins susceptibles d’indemnité. « Art. 8. Enfin, le bureau de consultaiion donnera son avis raisonné sur l’utilité et le prix des inventions, découvertes et importations, pour la publication desquelles les auteurs désireraient traiter avec le gouvernement. « Art. 9. Les fonctions des membres de ce bureau seront absolument gratuites ; mais le ministre de l’intérieur demeure autorisé à y employer le nombre de commis nécessaires dont il présentera incessamment l’état à Y Assemblée nationale. » (L’Assemblée ordonne l’impression du rapport de M. Boufflers et passe à la discussion du projet de décret du comité.) Un membre représente que l’Assemblée a non seulement les artistes à récompenser, mais encore à en indemniser un grand nombre sur les pertes de leurs machines, qui ont été brisées dahs les diverses insurrections dont le rapporteur a parlé ; qu’il faut fixer, en conséquence, une partie des 2 millions décrétés par l’Assemblée pour récompenser les artistes, a ces sortes d’indemnités. M. Malouet représente que les arls de pur agrément doivent être aussi récompensés par la nation; qu’ils ont leur utilité dans un grand royaume comme la France, et que, par conséquent, on doit ménager des fonds pour les récompenser. M. de Boufflers, rapporteur , répond que le projet de décret du comité n’exclut pas les artistes de pur agrément, ni les indemnités à accorder aux artistes dont les machines auraient été brisées dans les insurrections, d’après les instructions des directoires de département et de district; mais que, ne parlant que des arts utiles, dont le comité a cru devoir s’occuper en premier ordre, il ne propose que les récompenses qui les concernent. Un membre propose de fixer pour les artistes visés dans le projet de décret une somme de 300,000 livres. Un membre propose de fixer seulement 200,000 livres, somme qu’il considère comme suffisante pour récompenser et encourager les arts utiles. Plusieurs membres demandent la priorité pour la motion de 300,000 livres. (Cette priorité est accordée.) L’Assemblée est ensuite consultée sur la motion ainsi rédigée : « L’Assemblée nationale décrète que, des 2 millions décrétés pour récompenser les artistes, il en sera distrait 300,000 livres pour être employées pour récompenser et pensionner les artistes utiles. » (Cette motion est décrétée). L’Assemblée passe ensuite à la délibération des articles du projet de décret. Les articles du titre Ier sont mis aux voix avec plusieurs modifications dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’agriculture et de commerce , décrète ce qui suit: TITRE Ier. Distribution des récompenses nationales. Art. 1er. « Sur le fonds de 2 millions, destiné par décret du 3 août 1790, à être annuellement employé en dons, gratifications et encouragements, il sera distribué une somme de 300,000 livres, selon le mode ci-après déterminé, en gratifications et secours aux artistes qui, par leurs découvertes, leurs travaux et leurs recherches dans les arts utiles, auront mérité d’avoir part aux récompenses nationales. » {Adopté.) Art. 2. « Lesdites récompenses seront accordées d’après les instructions envoyées au sujet des différents artistes par le directoire du département de leur domicile ordinaire, ensuite de l’attestation de leur district et du certificat de leur municipalité. « Il suffira cependant à ces artistes d’un certificat des corps administratifs de leur domicile