428 [Assemblée nationale.1 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 juin 1191. M. Maurlet deFIory, secrétaire , fait lecture de la suite du procès-verbal de la séance reprise le 21 juin à six heures du soir. (La rédaction du procès-verbal est adoptée.) La séance est suspendue à 1 1 heures du soir ; elle est reprise à minuit. M. Dauchy, ex-président , prend place au fauteuil. M. Emmery, an nom, des comités militaire et de Constitution. Vos comités militaire de Constitution viennent de s’occuper, et sans perdre de temps, de l’exécution de vos ordres. Ils m'ont chargé de vous donner lecture de 2 projets de décret dont ils sont unauimement convenus. Le premier a pour objet des précautions à prendre pour assurer le retour du roi; le voici : « L’Assemblée nationale, ouï la lecture des lettres et autres pièces à elle adressées par les municipalités de Varennes, de Sainte-Menehould, les directoires du district de Clermont et les administrateurs du département delà Marne, décrète : « Que les mesures les plus puissantes et les plus actives seront prises pour protéger la sûreté de la personne du roi, de l’héritier présomptif de la couronne, et des autres personnes de la famille royale, dont le roi est accompagné et assurer leur retour à Paris. « Ordonne que pour l’exécution de ces dispositions, MM. La Tour-Maubourg, Pétiou et Barnave se rendront à Varennes, et autres lieux ou il serait nécessaire de se transporter, avec le titre et le caractère de commissaires de l’Assemblée nationale. « Leur donne pouvoir de faire agir les gardes nationales et les troupes de ligne, de donner des ordres aux corps administratifs et munici) aux et à tous officiers civils et militaires, et généralement de faire et ordonner tout ce qui sera nécessaire à l’exécution de leur mission. « Leur recommande spécialement de veiller à ce que le respect dû à la dignité royale soit maintenu. « Décrète, en outre, que lesdits commissaires seront accompagnés de M. Dumas, adjudant général de l'armée, chargé de faire exécuter leurs ordres. » (Ce décret est adopté à l’unanimité.) M. Emmery, rapporteur. Le second projet de décret est relatif à M. de B uillé, le voici : « L’ Assamblée nationale décrète que M. Claude-Français-Amour de Bouillé e;-t suspendu de ses foncions militaires. « Ede défend à toutes personnes exerçant des fonctions civiles ou militaires, de reconnaître son commandement et d’obéir à ses ordres. « Elle ordonne aux tribunaux, corps administratifs, municipalités, de le faire arrêter et conduire à Ghâlons, pour êtreensuite statué ce qu’il appartiendra, et aux gardes nationales, troupes de ligne et à tous citoyens, de prêter main-forte pour son arrestation. « Elle autorise ses commissaires, dont l’envoi a été décrété le jour même pour recevoir le serment des troupes, à suspendre, si les circonstances l’exigent, les officiers qui commandent sous les ordres de M. de Bouillé. « Elle ordonne aux tribunaux, corps administratifs, municipalités, gardes nationales, troupes de ligne et à toutes personnes qui en seront requises, d’obéir aux ordres qui pourront leur être donnés par lesdits commissaires, pour l’exécution du présent décret. » M. Fréteau-Saint-Just. Bien des membres, qui sont actuellement dans l’ Assemblée, n’ont pas entendu la lecture des pièces et notamment des ordres signés de M. de Bouillé, moyennant quoi on demande pour ceux-là la permission de ne point prendre parta la délibération. (Murmures.) M. Gaultier-Biauzat. Il suffit de faire lecture des copies qui nous ont été adressées. M. Rewbell. Ceux qui n’étaient pas ici ne doivent pas encore nous faire perdre notre temps. M. Gaultier-Bianzat. J’ai bien entendu la lecture. Je demande cependant que la lecture soit faite pour qu’aucun des membres de l’Assemblée ne puisse juger que d’après sa conviction intime. ( Murmures prolongés. — Aux voix! aux voix !) Un membre : Vous perdez un temps précieux . (Le second décret proposé par M. Emmery est mis aux voix et adopté.) M. Gaultier-Bianzat. Les corps administratifs qui ont manifesté leur patriotisme dans cette circonstance doivent recevoir de l’Assemblée des marques de sa satisfaction, et je proose aussi d’ajouter dans le décret de l’Assem-lée une expression relative aux dragons que les corps administratifs vous ont annoncé avoir manifesté leur patriotisme. Je le crois nécessaire plus que jamais dans la circonstance présente, et je demande que M. le rapporteur des décrets veuille bien nous proposer une rédaction qui contienne toutes ces idées. Je demande que M. le rapporteur ajoute cela à son décret. M. Bouchotte. Je demande que les noms des courriers qui ont apporté la nouvelle soient mis sur le procès-verbal. Il y en a un entre autres, qui a donné des preuves, de son patriotisme puisque c’est lui qui a arrêté déjà M. Bonne-Savardin : c’est M. Vieille, le maître de poste de Châlons. Plusieurs membres : Il a raison. M. d’André. Messieurs, l’Assemblée nationale vient de prendre toutes les mesures nécessaires et possibles pour assurer le retour du roi et de sa famille à Paris. La tranquillité presque miraculeuse qui règne actuellement à Paris, vous assure certainement que la personne du roi et sa famille jouiront de toute la sûreté nécessaire. Cependant l’Assemblée nationale ne doit négliger aucune des précautions convenables et nécessaires pour la sûreté de la personne du roi et de la famille royale. Quoique le maire de Paris et le commandant général doivent, sous un ordre précis de l’Assemblée nationale, prendre toutes les précautions convenables, cependant vous n’ignorez pas combien vos décrets ont influé sur le peuple, et combien un de vos décrets peut influer sur la tranquillité générale de Paris et à la sûreté de la personne du roi; par conséquent, ce décret là est très nécessaire et est au moins utile ; et nous ne devons négliger aucune précaution qui peut assurer la sûreté de la personne du roi et de sa famille. 429 [Assemblés nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] Je demande, Monsieur le Président, que l’Assemblée veuille bien décréter que le département de Paris enjoindra à la municipalité et au commandant de la garde nationale de prendre toutes les mesures nécessaires pour la sûreté de la personne du roi et de sa famille. M. Fréteau-Saint-Jnst. Dans le décret que vous venez de rendre, je demande que l’on ajoute que les commissaires seront spécialement chargés de laisser partout, dans les municipalités où ils passeront, des ordres relatifs à la manière de recevoir le roi et à la sûreté à donner à sa personne. M. Regnaud (de Saint-Jean-d.' Angély). Ça y estl ça y est! M. de Airieu. Je vous propose de faire une addition au décret que propose M. d’André. Certainement, Messieurs, les moyens les plus efficaces d’entretenir toutes les précautions qui peuvent assurer le sort de la personne du roi et de sa famille, c’est la continuation de l’ordre que nous avons vu régner dans Paris ; et je crois qu’il conviendrait que l’Assemblée insérât dans ce décret un mot qui exprimât sa satisfaction de la tranquillité qui a régné dans Paris, et du désir qu’elle a de la voir se continuer. (Applaudissements.) (Les propositions de M. d’André et de Virieu, mises aux voix, sont adoptées.) Un membre demande qu’attendu l’absence de plusieurs secrétaires qui sont occupés dans ce moment-ci ailleurs qu’à l’Assemblée, trois anciens secrétaires, MM. Gastellanet, Rœderer et de Cernon, restent pendant cette nuit, et soient autorisés à signer avec ceux des secrétaires présents, les expéditions dont on pourrait avoir besoin pendant cette nuit. (Cette motion est adoptée.) La séance est suspendue à une heure du matin. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAUHARNAIS. Suite de la séance permanente commencée le mardi 21 juin 1791. La séance est reprise le jeudi 23 juin à 8 heures du matin. M. de Jessé, ex-président , occupe le fauteuil. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély). Il est venu dans la capitale un grand nombre de gens des campagnes, et qui, outre les besoins qu’ils ont de vendre leurs denrées, offrent encore pour leur sortie celui de leur en laisser la possibilité, pour rapporter, demain, les denrées qui sont indispensablement nécessaires pour la subsistance du jour. D’un autre côté, beaucoup de citoyens ont des affaires et veulent tranquilliser leur famille qui sont dans les environs de la capitale. Il est indispensable de leur donner des passeports; je propose à l’Assemblée un décret pour ajouter aux mesures que prendra le département. Et remarquez d’ailleurs que l’objet du décret qui a été rendu hier, était d’empêcher que des courriers ne fussent expédiés en Alsace et vers M. de Bouillé. Cette mesure une fois prise, il n’y a plus de danger ;en conséquence, je vous propose le décret suivant : « L’Assemblée nationale ordonne que le département et la municipalité de Paris prendront les mesures qui leur paraîtront convenables, pour laisser la libre sortie de la ville aux habitants de la campagne et autres citoyens qui sont venus apporter des denrées dans la capitale. Elle s’en remet également à leur prudence, pour faire expédier, s’ils le jugent convenable, des passeports à ceux que des affaires ou autres motifs légitimes appelleront hors de Paris. «. L’Assemblée n’annule pas son décret d’hier; elle remet à la municipalité et au département le soin déjuger les exceptions. » Un membre : Avant de donner des passeports, il est important de savoir si vos 3 commissaires sont partis, parce que c’est pour eux que le décret a été rendu. M. Regnaud (de Saint-Jean d' Angély). J’ai la certitude que MM. les commissaires sont partis à minuit. Je ne les ai pas vu sortir. Mais j’ai vu prendre toutes les mesures qui devaient précéder leur départ. M. Tellier. J’ai vu ce matin des chevaux dans la cour des Feuillants. Il est impossible à aucun individu de mettre cette vérité en doute dans l’Assemblée, attendu l’importance de cette mission, sans qu’on en ait eu connaissance. M. Roucliotte. Monsieur a confondu les commissaires qui étaient précédemment envoyés, et dont le départ, en effet, a été retardé. M. d’André. Je demande que l’on mette dans le décret : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu des difficultés survenues relativement à l’exécution du décret qu’hier au soir, etc... » Il est bon que l’on voie bien que c’est pour expliquer le décret d’hier au soir que nous rendons celui-ci. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély). Voici la nouvelle rédaction que je propose : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu des difficultés qui sont survenues sur l’exécution du décret d’hier, portant défenses de laisser sortir qui que ce soit de Paris, ordonne que le département et la municipalité de Paris prendront les mesures qui leur paraîtront convenables, pour laisser la libre sortie de la ville aux habitants de la campagne et autres citoyens qui sont venus apporter des denrées dans la capitale. Elle s’en remet également à leur prudence pour faire expédier, s’ils le jugent convenable, des passeports à ceux que des affaires ou autres motifs légitimes appelleront hors de Paris, et ce, nonobstant le décret d’hier. » (Ce décret est adopté.) M. le Président. Voici une lettre que j’ai reçue cette nuit, elle est du président du directoire du département de l’Oise. « Monsieur le Président, « Je vous prie de vouloir bien donner avis au