lAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 janvier 1791.] 146 teDce sur les élections populaires; ce serait lui attribuer une juridiction absolument étrangère aux fonctions qui lui sont données par la Constitution. Eu conséquence, je demande la question préalable sur l’amendement du préopinant. M. Goupil de Préfeln. Mais le tribunal de district connaît des sentences des juges de paix; c’est ce tribunal qui le reçoit. M. d’André. J'en conviens; mais parce que le juge de district connaît des sentences des municipalités, eu conclurez-vous qu’il doit connaître des élections des municipalités ? Le juge de district reçoit le juge de paix, comme le roi reçoit celui de district; mais le roi n’a pas le droit de prononcer sur la validité des élections. Je conclus à renvoyer l’amendement au comité de Constitution. M. Christin propose l’amendement suivant : «. Dans les cantons dont la population totale sera au-dessous de huit mille âmes, en y comprenant celle des villes ou bourgs qui s’y trouvent, il ne sera établi qu’un seul juge de paix. » M. Gaultîer-Biauzat. Je demande le renvoi de tous les amendements au comité de Constitution. (Ce renvoi est ordonné.) L’Assemblée adopte ensuite le projet du comité dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité de Constitution, décrète qu’il ne sera établi qu’un juge de paix dans le canton de Limay. » M. Chabroud, au nom du comité des rapports. Messieurs, vous avez chargé les administrations des départements de district et les municipalités, chacun suivant l’ordre de leurs fonctions, de veiller à l’exécution de vos décrets sur la constitution civile du clergé et la conservation des biens nationaux. Le clergé de Dax avait montré des dispositions à la désobéissance; les administrateurs prirent des mesures pour que les décrets fussent exécutés. Il y eut une proclamation qui fut suivie d’une espèce de déclaration protestative du clergé de Dax, qui continuait de s’assembler comme à l’ordinaire dans l’église et y célébrait les anciens offices. Pour faire cesser l’inexécution des décrets, le directoire du département prit le parti de faire apposer les scellés sur les portes du chœur de l’église; il chargea de cette mission le directoire de district, qui la remplit le 21 décembre. Cette apposition n’eut pas un long effet, car 24 heures après les scellés n’existaient plus. Le sacristain, constitué gardien dans cette opération, se rendit au directoire de district qui, ne voulant rien prendre sur lui, dépêcha un courrier au directoire de département pour l’informer des faits. Celui-ci, par une délibération du 23 décembre, chargea le procureur syndic du district de porter plainte au tribunal du district de Dax. La plainte faite, elle est déposée au greffe du tribunal. Sur la plainte, il y a une ordonnance qui porte : « Sera montrée au commissaire du roi; » et c’est ici, Messieurs, la difficulté qui a amené l’affaire devant vous. La plainte est portée en effet au commissaire du roi provisoire ; car c'est un gradué qui en fait les fonctions provisoirement. Il fait au-dessous une longue dissertation dans laquelle il s’efforce de prouver que les deux directoires n’ont point eu le droit de faire faire l’apposition des scellés, qui est une fonction judiciaire hors de la compétence des corps administratifs. En conséquence, le commissaire du roi requiert qu’il n’y a lieu, quant à présent, à la plainte, jusqu’à ce qu’il ait été prononcé par le roi sur l’incompétence de la sentence administrative du département des Landes. Les juges du tribunal rendent une ordonnance parfaitement conforme à la réquisition. De là naît l’inexécution de vos décrets. Quoique la contravention, la désobéissance aux lois soit visible dans l’enlèvement des scellés; quoiqu’il y ait un véritable délit, tout cela demeure impuni. C’est à cette occasion que le département des Landes vous a fait parvenir une adresse que vous avez renvoyée à l’examen du comité des rapports. Il nous a paru, d’après vos décrets qui sont formels, que la surveillance sur la constitution civile du clergé et la conservation des biens nationaux appartenant aux corps administratifs, ils ont du prendre toutes les mesures qu’ils ont cru nécessaires ; que l’apposition des scel lés étant une suite de la désobéissance du clergé de Dax, le fait de l’enlèvement est un véritable délit. Voici le projet de décret que vous présente votre comité : « L’Assemblée nationale, après avoir ouï le compte qui lui a été rendu, de la part de son comité des rapports, do ce qui s’est passé à Dax à l’occasion des scellés apposés sur les portes du chœur de l’église de cette ville, approuvant la conduite des directoires du département des Landes et du district de Dax, décrète : « 1° Que la réquisition du commissaire provisoire du roi auprès du tribunal de Dax, et l’ordonnance des juges du même tribunal, au bas de la plainte du procureur syndic du district, du 25 décembre dernier, relativement à l’enlèvement desdits scellés, sont et demeurent comme non avenus; 2° Que le roi sera prié de faire donner des ordres pour que lesdits scellés soient apposés de nouveau; qu’il soit enjoint, tant à son commissaire provisoire qu’aux juges du tribunal de Dax, de se conformer à l’avenir aux dispositions de la loi, et que la plainte du 25 décembre soit renvoyée par devant l’un des sept tribunaux désignés, pour connaître des appels de celui de Dax, afin qu’il y soit informé des faits dont il s’agit, et procédé selon la loi, jusqu’à jugement définitif inclusivement. » Je ferai d’ailleurs observer à l’Assemblée que si la cour de cassation existait, ce serait à elle à connaître des compétences et des conflits de juridiction. M. ttasqniat de ülagriet. Malgré la plainte du procureur-syndic devant le tribunal, pour constater le délit et faire informer contre les auteurs, fauteurs et complices, on voit le commissaire du roi, d’accord avec le tribunal, soutenir le ci-devant chapitre de Dax et chercher à faire triompher l’aristocratie. Sans doute, il est bon d’observer ici que cette espèce d’insurrection doit sa première source à l’orgueil de la municipalité de Dax, qui eut l’impudeur de se formaliser de ce que faisait le directoire de district. Je demande, par amendement, que le gradué faisant les fonctions de commissaire du roi et le juges soient mandés à la barre. 1 Assemblée nationale.) ARCHIVAS PARLEMENTAIRES (12 janvier 1791.] 147 M. Chabroud, rapporteur. Votre comité n’a point vu, après un examen approfondi, rien qui autorise la mesure sévère de mander à la barre. Je demande donc la question préalable sur l’amendement proposé. M. Basquiat de Mugriet retire son amendement. (Le projet de décret du comité est adopté.) M. Barrère (ci-devan t de VIeuzac), au nom du comité des domaines. Messieurs, en prononçant, le 6 août dernier, l’abolition du droit d’aubaine et de détraction, vous avez donné un grand exemple de fraternité à toutes les nations, et vous avez commencé à effacer de leur code un droit odieux et barbare que la raison et la philosophie avaient proscrit depuis longtemps. Mais la disposition trop vague du décret que vous avez rendu peut en diminuer les bienfaits. Le fisc, toujours ingénieux à reproduire ses prétentions, menace d’élevcr deux questions importantes, mais bien simples, sur lesquelles vous devez prononcer aujourd’hui pour dissiper tous les doutes. La première consiste à savoir si le droit d’aubaine, aboli en général par votre décret du 6 août, est aboli dans vos possessions dans les deux Indes. Sans doute il n’est aucun de vous qui pense que les législateurs de l’Empire français puissent en isoler quelques parties, et les priver ainsi des bienfaits de la législation. Quand un droit qui avait été attaché à la souveraineté nationale est aboli ,il l’est pour toutes les possessionsfrançaises : car, comment le fisc engloutirait-il les successions des étrangers morts dans les colonies, tandis qu’il les laisserait intactes en Europe ? Oui, les étrangers qui abordent nos ports dans les deux hémisphères doivent trouver partout une loi aussi hospitalière, partout le même caractère de liberté. Cependant des vaisseaux ont été saisis dans nos colonies à des habitants de l’Amérique septentrionale; et vous sentez déjà combien il est important de poursuivre, dans son dernier refuge, ce droit d’aubaine qui n’a pas encore cédé tout entier à la justice de l’Assemblée nationale. Il importe à la gloire du législateur que les dernières racines de cet usage Visigoth soient extirpées de tous nos domaines. Il importe à la bonne intelligence qui doit régner entre deux peuples libres que cette opération soit prompte. Vous concevez sans peine l’effet que doit produire sur la nation américaine la répétition de cette cruelle confiscation qu’encourt, à la mort de son capitaine, un vaisseau qui est la propriété de plusieurs familles des Etats-Unis. Des hommes libres, qui u’ont jamais connu cet infâme usage, inventé en Europe, ne doivent point le trouver chez leurs semblables, leurs amis, leurs frères en liberté. Prenez garde ! demander la suppression, ou plutôt déclarer que vous l’avez étendue aux colonies comme au continent, c’est ne rien demander qui augmente les privilèges ou les avantages commerciaux des Américains. Par les lois françaises, les vaisseaux de cette nation sont librement admis dans certains ports de nos îles; c’est en leur faveur seulement que le droit d’aubaine doit être aboli. Quant à ces vaisseaux qui se livrent dans les mêmes îles à un commerce interlope et frauduleux, nous n’avons rien à demander pour eux ; et pour avoir le droit de les confisquer, on n’a pas besoin d’attendre la mort de celui qui les commande. Le comité a pensé, sur cette première question, que vous devez déclarer que votre décret s’étend aux possessions françaises dans les deux Indes. La seconde question consiste à savoir si, en abolissant le droit d’aubaine, vous avez entendu que les étrangers fussent capables de succéder à leurs parents français décédés en France ou dans les possessions françaises, sans être assujettis à y demeurer pour y exercer leurs droits héréditaires. Pour décider cette question, il faut savoir que tous les traités par lesquels la France a fait des conventions concernant le droit d’aubaine se divisent en deux classes. La première classe est de ceux portant abolition du droit d’aubaine, avec concession de la faculté de recueillir toutes successions testamentaires ou ab intestat , comme les régnicoles. Tel est le traité passé, signé par la France, à Aix-la-Chapelle. La seconde classe renferme les traités contenant l’abolition réciproque du droit d’aubaine, avec concession de la faculté de tester en autres concessions qui n’équivalent pas à ce qui est porté par les traités de la première classe, en ce qu’il n’en résulte pas que l’étranger ait droit de recueillir la succession de son parent français, seul ou concurremment avec d’autres parents français. Tels sont les traités de la France avec la Bavière, la Pologne, Francfort, etc., etc. Ainsi, la simple abolition du droit d’aubaine, prononcée par votre décret du 6 août, est insuffisante et incomplète, si vous ne déclarez le droit qu’a l’étranger de succéder à son parent français décédé en France. Vous devez effacer le vice de pérégrinité dont le fisc pourrait encore abuser contre vos intentions connues. Vous devez accorder le même bienfait à tous les peuples. Voici les principes du fisc : Les étrangers sont incapablesde succéder et de recevoir par testament. Les étrangers sont incapables de transmettre leurs successions, soit né intestat , soit par testament. La seule exception est en faveur de leurs enfants et descendants régnicoles, c’est-à-dire, non seulement établis dans le royaume, mais encore naturels ou naturalisés. Et ce qui est encore plus barbare, c’esl que les pères et mères ne succèdent pas, dans les mêmes cas, à leurs enfants, la réciprocité n’ayant pas lieu à leur égard. C’est à vous qu’il appartient de faire cesser cette différence odieuse?que nos lois établissaient entre le droit strictement appelé droit d’aubaine et le vice de pérégrinité ou capacité de succéder. C’est à vous de faire cesser cette distinction de droits plus ou moins favorables à diverses nations. Sans doute, vous n’avez pas voulu faire seulement pour les autres nations une simple remise du droit fiscal, qui donnait au roi la succession de l’étranger. Vos froids diplomatistes allaient bien plus loin, lorsqu’ils accordaient à quelques peuples voisins, non seulement la capacité de transmettre leurs successions, mais encore la capacité de succéder et de recevoir par testament sans aucune restriction. Il y a plus, les anciens tribunaux de France adjugeaient les successions à des étrangers. On connaît tous les efforts que fit en 1781, devant un de ces tribunaux (les requêtes du palais), un de nos collègues (M. Martineau), plaidant pour MM. Pellerin, Français, pour faire exclure de la succession de M. Lemmens M. Maximilien Lem-