302 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE l’Europe, la trahison, l’incendie, le meurtre, tous les malheurs enfin qui ont pu nous environner, et que la puissance du peuple a su déjouer ou vaincre, ont été ton ouvrage; mais l’heure de la vengeance nationale a sonné, les républicains français se sont chargés de ta destruction, et de celle de tous les trônes. C’est là le gage d’alliance qu’ils veulent offrir aux nations délivrées des horreurs de ton existence. Français ! trop longtemps l’Anglais fut épargné; la Convention nationale vient de mettre son traitement à l’ordre du jour : Que les esclaves anglais périssent, dit-elle, et l’Europe sera libre. Enfans de la liberté ! voilà de nouveaux lauriers à cueillir, et c’est à Londres que les plus beaux rameaux vous attendent : c’est là, dans les murs de ce repaire de tyrans maritimes, que le génie de la liberté va vous conduire pour punir avec éclat les crimes nombreux qu’ils ont préparé dans l’ombre. Mais, Citoyens, ne bornons pas à des vœux stériles notre indignation contre un peuple anthropophage, déjà les Départemens ont ouvert des souscriptions pour la construction de plusieurs vaisseaux : tous suivent un si bel exemple : serons-nous seuls insensibles à ces généreux sacrifices, nous, ci-devant Allobroges, rentrés dans le sein de la grande famille dont le despotisme nous avoit séparé, nous, dont la nation anglaise a voulu garantir l’esclavage sous un tyran odieux, auquel un parlement mercenaire vient encore d’aider par des subsides, à nous remettre dans les fers; non, citoyens, votre haine pour l’esclavage, votre amour pour la liberté nous garantissent le succès de la démarche que nous faisons auprès de vous; qu’une souscription générale s’ouvre de même à l’exemple de nos frères des autres Départemens, que chacun s’impose suivant ses facultés : le denier du pauvre aura le même prix que l’or de l’homme riche; qu’un vaisseau portant le nom du Mont-Blanc s’élève sur les chantiers. C’est à vous, sociétés populaires, filles de la liberté, que sont confiés les intérêts de la patrie, c’est à vous à embraser le cœur de vos concitoyens, et c’est dans votre sein que nous déposons nos espérances les plus précieuses. Rendons tous nos municipalités dépositaires de nos offrandes civiques; invitons-les à nommer des receveurs : qu’elles les versent ensuite entre les mains d’un receveur général, nommé par le Département, que bientôt notre don devienne utile à la République, et atteste notre dévouement à la patrie, et notre haine pour la nation anglaise. Séance du treize thermidor, an second de la République française une, indivisible et démocratique. Velat propose la rédaction d’une adresse dont il avoit été chargé par un précédent arrêté; elle est adoptée, la société en arrête l’impression au nombre de 2 000 exemplaires, et l’envoi à la Convention nationale, aux Jacobins de Paris, aux sociétés affiliées et à toutes les communes de ce Département. Arrête en outre, qu’elle sera présentée au Directoire du Département, pour qu’il en facilite par tous les moyens possibles le succès. Signé Rabanis, président; Doppet, Velat, Gargoux et Chabert, secrétaires. 38 L’agent national du district de Commercy, département de la Meuse, annonce à la Convention que le citoyen Denis, ci-devant ministre du culte catholique, a renoncé à la pension de 800 L que la loi du 2 frimaire lui accordoit, comme ayant abdiqué ses fonctions. Insertion au bulletin, renvoyé au comité des Finances (71). 39 L’assemblée générale de la commune de Nyons, département de la Drôme, annonce qu’elle a célébré l’anniversaire du 14 juillet par une fête civique, et qu’elle a remercié, dans ce beau jour, l’auteur de la nature, des succès de nos armées et des résultats heureux des travaux de la Convention nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (72). RÉPUBLIQUE FRANÇAISE LIBERTÉ ÉGALITÉ Adresse de l’ Assemblé Générale de la commune de Nyons, Chef-lieu de district, à la Convention Nationale (73). Représentans, Nous avons célébré l’anniversaire glorieux du quatorze juillet. Qu’il est précieux à des Républicains le souvenir de ce premier réveil des Français ! De cette journée mémorable, où nos tyrans virent tomber le sceptre de fer de leurs mains ensanglantées; où le génie tutélaire de la France désarma les Légions formidables de l’aristocratie, et renversa les antres ténébreux de leurs crimes; où le dévouement généreux des héros de la Bastille fit éclore sur notre horison, les premiers rayons de notre liberté ! Ah ! Sans doute, nous avons solemnisé dans le Temple de l’Etre Suprême, cette époque heureuse de notre Révolution, avec la pompe qui convient à des hommes libres. Eh ! Pourrions-nous oublier le premier de nos triomphes contre le despotisme ? Il est écrit dans le recueil des vastes conceptions de la liberté; il est gravé sur la première page de nos Annales Républicaines, et les doigts du temps ne l’effaceront jamais. Représentans, nous avons aussi remercié l’Auteur de la Nature du succès de nos armes, des résultats heureux de vos sublimes travaux, de vos soins paternels à mesurer les besoins du Peuple, tous les actes de la bienfaisance nationale. Le vieillard soulagé de ses infirmités, la veuve consolée de la perte de son époux, l’enfant (71) P.-V., XLV, 105-106. Bull., 21 fruct. (suppl.). (72) P.-V., XLV, 106. (73) C 319, pl. 1 305, p. 29. Adresse imprimée, 3 pages. SÉANCE DU 20 FRUCTIDOR AN II (6 SEPTEMBRE 1794) - N° 40-43 303 méconnu par l’auteur de ses jours adopté par la Patrie, les parens des défenseurs de la République généreusement dédommagés de la privation de leurs enfans, le pauvre soigné dans ses maladies par des Officiers de santé : tous ces êtres infortunés, secourus maintenant par la sagesse de vos Décrets, ont mêlés les élans de leur reconnoissance à nos chants d’allégresse. Les voûtes du Temple de l’Etemel ont retenti du concert de nos Hymnes Patriotiques. Le fanatisme exilé de nos contrées, n’a point exhalé son souffle impur sur cette Fête Nationale. Depuis longtemps nous avons secoué le joug des antiques préjugés, nos yeux ne sont ouverts qu’aux lumières de la raison publique, et sa voix puissante est la seule que nous écoutons. Représentans, nous sommes cultivateurs; nous aimons la liberté; mais nous savons qu’elle ne peut s’affermir que par la dépendance des Loix, par l’exacte observation de vos Décrets. Aussi un même esprit, un même sentiment nous entraîne tous vers ce but unique, et nous marchons avec assurance dans la route nouvelle, que votre génie nous a tracée pour arriver au bonheur, perfectionnez votre grand ouvrage, et ne l’abandonnez que lorsqu’il sera fini, malheur au traître qui entreprendroit de déranger une seule pierre de l’édifice majestueux que vous élevez à la félicité publique ! Nos bras sont levés pour le frapper, et nos corps seront les boucliers qui pareront les coups, que des mains sacrilèges tenteroient inutilement de vous porter. Fait à Nyons, ce 14 Thermidor, l’an II de la République Française, une et indivisible. Signés, Fauvin, maire; F. Vigne, P. Vigne, C. Girousse, J. Guyon, J. Augier, officiers municipaux; Porte, agent national; Jacomin, P. Chava-gnac, J. Blanc, J. Bonnet, Palayer, Arnoux, A. Teste, J. Porte, L. Girardon, notables; Guilliny, secrétaire-greffier. 40 La société populaire de Perpignan [département des Pyrénées-Orientales] dépose, dans le sein de la Convention nationale, ses craintes relatives à cette classe d’hommes que le royalisme vomit parmi nous, sous le nom de déserteurs. Elle demande que tous les déserteurs étrangers soient employés aux travaux publics, ou qu’un autre moyen quelconque les mettent hors de nuire. Renvoyé au comité de Salut public (74). 41 L’agent national près le district de Neuf-châtel [département de Seine-Inférieure], annonce à la Convention nationale que, le mois dernier, des biens d’émigrés, estimés 57 000 L, ont été vendus 240 813 L; que plus (74) P.-V., XLV, 106. de 30 000 livres de charbon de bois de bour-denne propre à la fabrication de la poudre, ont été versées à la manufacture des poudres, et que 4 600 livres de salpêtre ont été envoyées au préposé de la commission à Rouen. Mention honorable, insertion au bulletin (75). 42 L’agent national de la commune de Quil-lebœuf, département de l’Eure, fait hommage à la Convention du discours civique qu’il prononça le jour de l’anniversaire du 10 août, en présence des autorités constituées et des citoyens. Mention honorable de l’hommage; renvoyé au comité d’instruction publique (76). 43 La société populaire de Salon, département des Bouches-du-Rhône, félicite la Convention nationale d’avoir anéanti la conjuration du triumvirat moderne, et l’invite à rester à son poste jusqu’à ce que toutes les factions soient étouffées, tous les traites punis, et la République affermie sur les débris des trônes des tyrans. Mention honorable, insertion au bulletin (77). [La société populaire régénérée des Jacobins montagnards de Salon à la Convention nationale, s.d.] (78) Citoyens Représentants, L’épuration des autorités constituées de la République ordonnée par la Convention nationale, a été un motif pour les patriotes de Salon de passer de nouveau tous ses membres à un scrutin épuratoire plus rigide, en portant un examen sévère et juste sur tous ceux qui la composoient; elle a rejetté de son sein tous ces hommes lâches, froids ou suspects, qui ne se glissent parmi les vrais républicains que pour se parer des couleurs nationales, sans jamais avoir ressenti l’ardent amour de la patrie, elle n’a conservé que des hommes libres, toujours prêts à immoler leur existance pour les droits sacrés et imprescriptibles de la Liberté et de l’Egalité, pour la conservation de la Représentation nationale. Elle est réduite à ces hommes qui depuis l’aurore de la Révolution se sont montrés les dignes soutiens de la cause du Peuple, les mêmes qui fidèles à leur serment avoient établi dans cette commune un comité central, composé (75) P.-V., XLV, 106. Bull, 21 fruct. (suppl.). (76) P.-V., XLV, 106-107. Bull., 22 fruct. (77) P.-V., XLV, 107. (78) C 320, pl. 1 316, p. 7.