3a0 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 janvier 1790.} M. Cochelet, député de Charleville , présente à l’Assemblée le procès-verbal de l’élection des officiers municipaux de cette ville ; il renouvelle au nom de ses habitants, les actes d’adhésion déjà formés par elle pour les décrets de l’Assemblée, et fait part de la disposition où elle est d'envoyer une contribution patriotique. M. Populus, député de Bourg, offre, au nom de cette ville, un don patriotique de deux cent vingt-six marcs cinq onces, tant de boucles d’argent que d’autres pièces d’argenterie; il annonce que les sages décrets de l’Assemblée nationale, qui détruisent une foule d’abus qui étaient soutenus par la violence et le despotisme, inspirent à tous les habitants l’enthousiasme de la liberté et les sentiments de la plus vive reconnaissance, et que les peuples de cette partie de la France jurent obéissance etfidélité, dévouement au Roi et à l’Assemblée nationale et sont prêts à sacrifier leurs vies et leurs biens. L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention de ce don patriotique et de l’adresse d’adhésion à ses décrets dans son proces-verbal. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion pour la division des départements du royaume. M. Gossin, rapporteur du comité de constitution , présente un projet de décret tendant à diviser le département de Lorraine en neuf districts. M. Maillot demande que la ville de Toul, à raison de sa population et de ses contributions, concourre avec les villes de Nancy et de Lunéville pour recevoir l’Assemblée du département de la Lorraine. La question préalable est demandée et adoptée sur cet amendement. M. Gérard demande que provisoirement la ville de Vie soit chef-lieu de district, sauf, lors de la première assemblée d’administration du dé-artement de Lorraine à examiner si Château-alinsest susceptible, sans inconvénient, d’obtenir l’un des deux établissements, et en ce cas, lui être donné ou le tribunal de district, ou celui de judi-cature, au choix néanmoins de la ville de Vie. L’orateur invoque en faveur de Vie une population plus considérable, un siège royal établi et des édifices propres à recevoir tous les établissements. M. Schmits fait valoir les droits de Château-Salins, dont la position est plus centrale et qui, à tous égards, a beaucoup plus d’avenir que Vie ; il se contente néanmoins de réclamer en faveur de Château-Salins, le partage des établissements à créer par la constitution. Après ces allégations contradictoires, l’Assemblée prononce le décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution: « 1° Que le département de Lorraine est divisé en neuf districts, dont les chefs-lieux sont Nancy, Lunéville, Blamont, Sarrebourg, Bieuze,Vic,Pont-à-Mousson, Toul et Vizelise; « 2° Que Nancy est le chef-lieu de ce département ; que cependant, par provision, conformément à l’arrêté pris par les députés de la province, les séances du département alterneront entre Nancy et Lunéville, à commencer par Nancy; « 3° Que l’Assemblée provisoire du district sera établie à Vie; sauf à la première assemblée du département à déterminer en définitif sur cet objet, de manière néanmoins que Vie ne réunisse pas les deux établissements du district, et sauf son option. » M. Gossin propose ensuite un projet de décret concernant le département de l’Auxerrois et sa division en sept districts. M. Menu de Oiomorceau réclame vivement un huitième district en faveur de Villeneuve-le-Roi. Dans le cas où ce huitième district ne serait pas créé, il demande que Villeneuve-le-Roi soit préféré à Saint-Florentin. M. Martineau. Je ne demande pas un plus grand nombre de districts, je me contente de sept, mais je demande que le septième soit indéterminé entre Saint-Florentin et Villeneuve-le-Roi ; je désire que les électeurs décident, à Rassemblée du département, laquelle de ces deux villes doit être le chef-lieu du département. M. Dupont (de Nemours ), membre du comité de constitution. J’ai vu s’élever une foule de prétentions au sujet des districts. Un grand nombre de petites villes ont demandé des districts ; les demandes ont été très vives ; elles ont quelquefois entraîné le comité au delà de ses projets. 11 est temps de faire connaître les inconvénients qui peuvent résulter de la multiplication des districts; il est essentiel de leur faire connaître que le plus grand mal qui puisse leur arriver, est d’obtenir ce qu’elles désirent. Les avantages que donne un très petit nombre de districts sont très sensibles: les frais d’administration se trouvent moins considérables ; ceux de justice diminuent dans la même proportion. Les juges et les administrateurs peuvent être choisis sur un plus grand nombre d’hommes; il y a donc plus de lumières à espérer; ces juges et ces administrateurs, une fois nommés, acquièrent plus d’expérience, deviennent plus instruits; la justice est mieux rendue et l’administration mieux conduite. Je regarde comme un malheur les petits districts. Ceux qui n’ont que trente-six lieues carrées renferment, suivant la population commune de France, environ trente-six mille âmes. Sur les trente-six mille âmes, les femmes en emportent une moitié, les vieillards et les enfants en prennent un quart : il ne reste donc qu’un quart de citoyens à employer aux fonctions publiques, ce qui fait neuf mille âmes. De ce nombre, il faut retrancher les artisans qui ont besoin de leur travail pour vivre, les personnes que le défaut de fortune a laissées dans l’ignorance, et les domestiques. Les assemblées en districts, les municipalités et les différents tribunaux qui y sont renfermés occupent environ deux cent soixante-dix personnes, sans compter les avocats et les procureurs. Il faut un pareil nombre de personnes pour renouveler les élections. Ainsi, il y a cinq cent quarante personnes destinées à toutes les fonctions publiques, ce qui fait une personne sur dix-sept. Voilà des considérations qu’il ne faut pas perdre de vue; difficulté de trouver des sujets, frais excessifs de districts et d’administration. Que l’on pèse bien toutes ces considérations, et l’on verra qu’en multipliant les districts, on fait un funeste présent au peuple. On ne peut opposer qu’un seul moyen contre tous ces avantages ; c’est l’économie des frais de voyage; mais ce moyen est bien faible; on sera [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 janvier 1790.) rarement dans le cas de voyager] les marchés, le commerce attirent les habitants des campagnes dans les villes. Il suffit qu’un seul habitant d’un village se rende au chef-lieu du district, pour qu’il y porte toutes les requêtes de ses voisins. Il sera très rare qu’on soit forcé d’aller au chef-lieu uniquement pour les affaires publiques; et les charges excessives qu’occasionneront les frais de l’administration et de la justice seront senties tous les jours. Que l’on ajoute à ces raisons le malheur d’avoir des juges qui n’auront ni assez d’expérience, ni assez de lumières, et l’on ne sera disposé à ne donner à chaque département qu’un petit nombre de districts. M. le Président met aux voix la création d’un huitième district. Elle est rejetée. Le décret suivant est ensuite rendu : « L’Assemblée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution : « 1° Que le département de l’Auxerrois en Bourgogne, dont Auxerre est le chef-lieu, est divisé en sept districts, dont les chefs-lieux sont Auxerre, Sens, Joignv, Saint-Fargeau, Avalon, Tonnerre et Saint-Florentin; « 2° Que l’assemblée des électeurs de département décidera dans laquelle des deux villes, de Villeneuve-le-Roi ou de Saint-Florentin, l’un des sept districts sera plus convenablement placé; « 3° Que les limites arrêtées entre les départements de l’Auxerrois, de Meaux, de Melun subsisteront; à l’effet de quoi Villeneuve-la-Guyard, et les paroisses environnantes réclamées par les députés de Melun, resteront unies au département d’Auxerre ; sauf, en faveur des villes de ce département, s’il y a lieu, le partage des établissements qui seront fixés par la constitution. » M. Gassin propose de diviser le département de Versailles en neuf districts. Il peint avec sentiment les motifs de bienfaisance qui avaient fait souhaiter au Roi d'avoir un district et un tribunal de justice à Rambouillet, pour réunir sous une même administration toutes ses possessions danscette partie; mais observait que, sur un rapport fait à Sa Majesté, Elle -Avait cru apercevoir à sa demande une sorte de contrariété avec le bien général, Elle s’était, par une délicatesse touchante, désistée de son vœu; le comité a conclu, avec le Roi, que Rambouillet aurait un siège de justice, mais qu’il ne serait pas chef-lieu de district, et que la ville de Dourdan jouirait de cet avantage. ( Cette déclaration est reçue avec en - thousiasme .) M. le bqrou de Menou. Je demande qu’il soit fait un district particulier pour Rambouillet, composé de territoires pris sur tous les districts environnants. Cette proposition est accueillie avec transport. M. de Roislandry dit qu’il est beaucoup plus simple que le district de Dourdan soit transporté à Ramnouillet et il en fait la motion, M. l’abbé Millet dit que l’Assemblée est pénétrée de trop de respect pour les sentiments de vertu qui ont dicté les démarches du Roi pour ne pas les sanctionner par son vote. Il demande la priorité pour le projet du comité. M. Lebrun propose de remercier le Roi des sacrifices qu’il fait au bonheur du peuple et demande la question préalable sur les amendements de M. le baron de Menou et de M. de Roislandry-La question préalable est adoptée-M. le Président prononce ensuite le décret suivant: « L’Assemhlée nationale décrète, d’après l’avis du comité de constitution : « 1° Que le département de Versailles, dont Versailles est le chef-lieu, est divisé en neuf districts ; « 2° Que les chefs-lieux de ces districts sont provisoirement Versailles, Saint-Germain, Pontoise, Dourdan, Montfort, Etampes, Gorbeil, Gonesse, et que Rambouillet sera le siège de la juridiction du district de Dourdan ; « 3° Que les neuf maisons enfermées dans la ville de Pontoise, et dépendantes de la municipalité de la paroisse de Saint-Quen, séparées de la ville parla rivière d’Oise, appartiendront désormais à Pontoise ; « 4° Que la paroisse de Fugier appartiendra au district de Mantes ; « 5° Que les paroisses de ; Marly et du Port-Marly, le parc et la forêt de Marly, feront partie du district de Versailles, ainsi que les paroisses de Bailly et de Noisy, qui seront comprises dans ce même district. M. Le Coutewlx deCanteleu demande à interrompre l’ordre du jour et ayant obtenu cette autorisation, il dit: « Je n’ai pas cru devoir hier être présent à la discussion qui s’est continuée sur une question qui me concernait si particulièrement ; maisaussi-tôt que j’ai eu sous les yeux votre décret, j’ai dû saisir les principes, et ne pas rechercher s’il peut avoir ou non un effet rétroactif sur ma nomination. Je me suis empressé, Messieurs, de vous donner un témoignage de la déférence qu’en ma qualité de membre de cette Assemblée, je dois donner, non-seulement à l’expression littérale de ses décrets, mais à leur esprit, et même à votre intention connue, « J’ai donné ce matin, Messieurs, ma démission de la commission de trésorier-général de l’Extraordinaire, et je vous prie de croire que si j’ai mis quelque prix à cette place, c’est par le seul sentiment que j’avais d’être utile à ma patrie dans une institution qui présente à la nation les moyens d’un nouveau crédit, et la possibilité de créer successivement les ressources les plus intéressantes. » M. Haurissart. Je n’ai pu donner ma démission d’une place qui n’existait pas; mais je renonce aussi à l’intérêt qui m’avait été accordé dans l’entreprise des vivres et fourrages de l’armée, quoique cet intérêt ne tienne en aucune manière aux termes du décret de l’Assemblée. Je n’ai consulté en cette occasion que l’esprit du décret et l’intention de l’Assemblée nationale, que je me ferai toujours un devoir de prévenir, (On applaudit.) M. le marquis d’Ambly. Le dépouillement j généreux des préopinants est une raison puis-i santé qui doit nous conduire à les engager de | reprendre les places qu’ils viennent de quitter. | M. le vicomte de Mirabeau dit que la place \ de fournisseur des vivres a été fort à charge à | l’Etat, jusqu’à présent. Il importe qu’elle soit 1 confiée à des mains pures et on ne pourrait trouver dans un autre plus de probité que chez M. Naurissart.