*>20 Convention nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j JJ Jov™bre H93 leur turpitude, dénoncent tout, et particuliè¬ rement les patriotes. Je regarde Bernard comme un bon citoyen; il a souffert pour la Républi¬ que, il a souffert pour la Montagne. Je demande l’ordre du jour pour ce qui le regarde, et le renvoi au comité de sûreté générale pour prendre les mesures nécessaires contre Mocbe, Fabre et d’autres, s’il y a lieu. Merlin. La question se réduit ici à des termes bien simples. Bernard a-t-il signé, oui ou non, les arrêtés qui ont été lus? Voilà le seul objet sur lequel il faille se fixer. Si Bernard n’a pas signé, il existe des monstres sur qui la hache nationale doit tomber. Ils sont, sans doute, ceux-là, du nombre de ceux qui avaient pro¬ jeté de dissoudre la Convention nationale. Je demande que Bernard soit cependant tenu de prouver son alibi; et que provisoirement, lui et ceux qui le dénoncent soient mis en état d’arrestation. Montaut. Merlin a mis en avant les princi¬ pes ; mais je vais en appeler qu’il a oublié d’énon¬ cer. La Convention a, depuis longtemps, rendu un décret, par lequel elle dit que tous les fonc¬ tionnaires publics qui ont protesté contre la Convention, seront non seulement suspendus de leurs fonctions, mais encore enfermés comme suspects jusqu’à la paix, parce qu’elle les a regardés comme très dangereux pour la chose publique. Ainsi donc, si les fonctionnaires publics coupables du crime énoncé par la loi, sont privés de leur liberté jusqu’à la paix, je dis que Bernard doit subir la même peine dans le cas où il aurait signé les arrêtés qu’on nous a lus. Il semble dire cependant qu’il n’a pas signé. Eh bien ! je l’interpelle de déclarer catégori¬ quement s’il l’a fait, oui ou non. S’il nie, je demande le renvoi au comité de sûreté générale pour poursuivre les calomniateurs. S’il avoue, ü doit être arrêté. Bernard. J’ai dit que je n’avais pu prêter le serment puisque je n’y étais pas. Je prouverai, par le témoignage de la Société de Château-renard, que j’étais alors à propager les bons principes. _ Montaut. Réponds cat égoriquement : « As -tu signé, oui ou non? La question est fort simple. Bernard. Non. Montaut-Je demande le renvoi au comité de sûreté générale, et l’apport des registres. Merlin. Je demande que l’accusé et les acu-sateurs soient mis provisoirement en arresta¬ tion jusqu’au moment où le fait sera éclairci. Charlier appuie la proposition, et demande en outre que les pièces originales soient appor¬ tées. La proposition de Merlin et celle de Charlier sont adoptées. B. Compte rendu du Mercure universel (1). Un membre du comité des décrets demande à faire un rapport relatif à des suppléants admis (1) Mercure universel [30 brumaire an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 317, col. 1]. comme députés depuis le 31 mai. Il réclame que personne ne puisse sortir de la salle ni des tribunes. {Décrété.) Le rapporteur fait lecture de diverses pièces et délibérations prises par le district de Tarascon, le 27 juin dernier, qui constatent que les membres présents à ces délibérations firent le serment de ne plus reconnaître les décrets de la Convention rendus depuis le 31 mai; d’adopter les vues du tribunal populaire de Marseille, d’adhérer au manifeste publie de cette ville, etc... Signé : Bernard, procureur syndic. Bernard. Cela n’est pas vrai; je n’y étais pas. Le Président. Entends la suite de la lecture des pièces, et tu auras la parole. Après l’achèvement de la lecture des pièces, Bernard s’écrie qu’il a toujours été en butte aux persécutions, parce qu’il est bon Monta¬ gnard. « J’ai, dit-il, été chargé de fers, conduit à Marseille, et incarcéré jusqu’à ce que Carteaux y fût entré, et j’eusse été guillotiné si les patrio¬ tes eussent succombé, ün décret m’appelait à suppléer l’infâme Barbaroux, et, en passant par Lyon, je fus emprisonné. Bans Dubois-Crancé, j’y serais encore. J’atteste que je n’étais pas présent lorsqu’on fit le serment indiqué dans l’extrait des registres de Tarascon; je ne l’ai point signé. C’est un secrétaire qui se nomme Bernard; il y a méprise. Ce sont d’ailleurs des scélérats qui veulent se venger de mon patrio¬ tisme. » Après des débats, l’Assemblée décrète que Bernard et ses dénonciateurs resteront chez eux en arrestation et que les pièces, renvoyées au comité de sûreté générale, y seront examinées. C. Compte rendu des Annales patriotiques et littéraires (1). Un membre fait, au nom du comité de sû¬ reté générale, lecture de plusieurs pièces en¬ voyées à ce comité par les administrateurs du district de Tarascon, département des Bouches-du-Rhône. Ces pièces, qui paraissent signées de Bernard, suppléant de Barbaroux à la Con¬ vention nationale, présentent différents arrêtés pris par l’Administration de ce district, à l’épo¬ que où la ville de Marseille cherchait à attacher à la cause des fédéralistes toutes les contrées du Midi. Ces arrêtés favorisent les entreprises des rebelles, et ce qui ne laisse aucun doute à cet égard, c’est la prestation d’un serment de fidé¬ lité et d’union fait par de prétendus adminis¬ trateurs de Tarascon à la prétendue Commission populaire de Marseille. On n’y reconnaît plus la Convention depuis les journées des 31 mai et 2 juin. Ces différents arrêtés sont revêtus de la signature de Bernard, comme remplaçant le procureur syndic du district de Tarascon. Bernard, présent à la séance, est entendu. Il rappelle tous les services qu’il a rendus à la liberté depuis l’époque de la Révolution. Il nie formellement avoir signé le serment d’union à la ville de Marseille et l’arrêté par lequel l’ad-(1) Annales patriotiques et littéraires [n° 323 du 30 brumaire an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 1496, col. 1]. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, i *} bramairè an il 521 (19 novembre 1793 ministration refuse de reconnaître la Convention depuis les journées des 31 mai et 2 juin dernier; il était alors absent de Taraseon. Il avoue avoir signé quelques arrêtés en qualité de pro¬ cureur syndic; mais ces arrêtés n’avaient que la tranquillité publique pour objet. Il ne tarda pas à s’apercevoir des vues criminelles des admi¬ nistrateurs, et, dès ce moment, il fut obligé de se soustraire par la fuite à leur vengeance. Sa retraite ayant été découverte, il fut saisi, chargé de fers et traîné dans les prisons de Mar¬ seille. Arraché de cette prison par le général Carteaux, il fut de nouveau incarcéré dans la ville de Lyon et délivré par l’armée de la Répu¬ blique. « Ce qui peut, ajoute Bernard, avoir donné heu à cette inculpation, c’est que le secré¬ taire de l’Administration du district de Taraseon porte mon nom; mais pour moi, je n’ai jamais cessé d’être attaché à la Convention, à la Mon¬ tagne. » Poultier parle en faveur de Bernard. Il rend justice à son patriotisme et assure que ses dénonciateurs jouissent d’une très mauvaise réputation, et que l’un d’entre eux est un fort mauvais prêtre. Merlin (de Douai), Montaut, Charlier observent qu’il existe de grands coupables dans cette affaire, et pour que la justification de Bernard soit plus éclatante, ils s’accordent à demander que Bernard et ses dénonciateurs soient mis en état d’arrestation, que les pièces originales soient envoyées au comité de sûreté générale, chargé de vérifier la signature et de faire incessamment un rapport. Ces propositions sont décrétées D. Compte rendu du Journal de la Montagne (1). Monnel, membre du comité des décrets, donne lecture de plusieurs pièces envoyées par le district de Taraseon, contre Marc-Antoine Bernard, suppléant de l’infâme Barbaroux, et admis comme député des Bouches-du-Rhône. Une de ces pièces est une protestation de ne plus reconnaître la Convention nationale, rédi¬ gée par le district, le 27 juin, et signée Bernard. Celui-ci nie le fait et soutient que ce qui a pu servir de prétexte à la calomnie, c’est que le secrétaire du district de Taraseon porte le même nom que lui II offre d’ailleurs de prouver son alibi, et rappelle les sacrifices qu’il a faits, les persécutions qu’il a bravées, les diverses prisons où il a été jeté, pour avoir défendu la représentation nationale et la Montagne. Poultier, nouvellement arrivé d’Avignon, où il était à portée de s’instruire des faits, assure que, dans le pays, Bernard a toujours été eu butte à l’aristocratie, qui l’avait surnommé Marat ; que son patriotisme fortement prononcé lui a suscité nombre d’ennemis, et que les calom¬ nies, dont il a heu de se plaindre en ce moment, sont l’ouvrage d’un prêtre, nommé Moche, qui, chassé d’Avignon pour cause de fédérahsme, s’est mis à accuser à tort et à travers pour recré¬ pir sa réputation aux dépens d’autrui. On interpelle Bernard de répondre par oui ou par non sur la question : s’il a signé l’acte (1) Journal de la Montagne [n° 7 du 30e jour du 2e mois de l’an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 55, col. 1]. portant serment de ne plus reconnaître la Con¬ vention. Il affirme de nouveau que non seulement il ne l’a pas signé, mais qu’il ne l’a pu signer, étant alors absent de Taraseon, et qu’il n’est rien de plus aisé à constater, puisque l’acte, dont il s’agit, se passa en présence de toute la commune. Charlier demande que le dénoncé et les dé¬ nonciateurs soient provisoirement mis en arres¬ tation, et que les originaux des pièces qui ont été lues soient incessamment apportés au comité de sûreté générale, pour reconnaître quels sont ceux qui doivent être hvrés au glaive de la loi. (Adopté.) Bernard sera mis en état d’arrestation chez lui. E. Compte rendu du Journal de Berlet (1). Le comité de sûrete générale a été chargé de prendre des renseignements sur tous les sup¬ pléants qui, depuis le 31 mai, ont remplacé les députés chassés de la Convention. Il présente plusieurs dénonciations graves contre Bernard, de Taraseon, département des Bouches-du-Rhône, qui est venu prendre la place de Barbaroux. Bernard est accusé d’avoir signé des protestations contre le 31 mai et jours suivants, et d’autres arrêtés tendant à provoquer le fédérahsme. Il présente avec beaucoup de chaleur ses motifs de justification. Il se plaint d’abord d’une erreur de nom; il parle d’un alibi; il cite des attestations qui por¬ tent qu’il a chéri la Révolution et défendu la Convention ; il trace le tableau des persécutions qu’il a essuyées de la part des fédéralistes. Les larmes qu’il mêle à son apologie allaient entraîner la Convention, mais Merlin et Mon¬ taut réduisent la question à ces simples termes : « Bernard a-t-il, ou non, signé une protestation contre le 31 mai? » La Convention décrète que Bernard et ses dénonciateurs seront mis en état d’arrestation jusqu’à ce que les faits aient été constatés. Les dénon aticeurs sont Mauge et Fabre, de Taraseon. Ils ont été assez maltraités dans le cours de cette discussion. annexe n° 3 à la séance de la Convention nationale du *# liminaire an 11 (Mardi, 19 Novembre 4 903). Pièces annexes au décret ordonnant l’ar¬ restation de Mi arc-Antoine Bernard, député des Bouches-du-BSkône (9). A. Dénonciation de Qoupilleau (de Montaigu) contre Bernard (3). « Arles, le 17e du mois de brumaire de l’an II de la Répubhque française. « Quoique la Convention, citoyens amis et collègues, ne m’ait envoyé dans ce pays que pour (1) Journal de Perlel [n° 424 du 30 brumaire an II (mercredi 20 novembre 1793), p. 403]. (2) Voy. ci-dessus, même séance, p. 506, le décret ordonnant l’arrestation de Marc-Antoine Bernard. (3) Archives nationales, carton Dm 344, dossier