[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1791.] 583 ger les sentiments d’incivisme dont ces officiers ont osé faire parade devant les représentants de la commune. La société de Saint-Fargeau exprime les vœux les plus ardents pour le prompt retour du roi. « Dans toutes les occasions, vous avez, dit-elle, donné les témoignages les plus éclatants de votre attachement au monarque : continuez-lui, malgré lui-même, les preuves de notre amour; conser-vez-lui un trône digne de vous et de lui, en lui facilitant toutes les voies d’un retour désiré. » Adresses des assemblées primaires du canton de Contres, district de Saint-Aignan ; de la ville de Saint-Dié-sur-Loire, de la ville de Moulins, des cantons de Genlis, district de Dijon; de Salbris, district de Bomorantin ; de Pont-Levoi, de la ville et canton de Vierzon ; du canton de Montoire, district de Vendôme, de Bracieux, d' Or bais, district de Château-Thierry , d'Is-sur-Til, département des Côtes-du-Nord , de Saint-Amand, de Montreuil, département du Pas-de-Calais, de Beaugency, département du Loiret, et de la ville d'Auxerre. Toutes ces assemblées, pour confondre les discours calomnieux des ennemis de la Constitution, qui prétendent que l’Assemblée nationale a outrepassé ses pouvoirs, adhèrent, de la manière la plus formelle, à tous ses décrets acceptés ou sanctionnés par le roi, et notamment à ceux qui interdisent à la prochaine législature la faculté de changer ou réformer aucun article de la Constitution. Les citoyens actifs des cantons de Vierzon , de Montreuil, de Beaugency et d'Auxerre annoncent que la nouvelle de l’évasion du roi n’a servi qu’à enflammer leur patriotisme, qu’à les pénétrer de plus en plus de sentiments de reconnaissance et de dévouement pour l’Assemblée nationale; ils ont juré de sacrifier leurs intérêts les plus chers pour le maintien de la Constitution, de vivre libres ou de mourir. « Si, pour un moment, disent les citoyens actifs d’Auxerre, la France n’a plus de roi, elle a des législateurs sages, une Constitution qui ne peut manquer d’opérer la prospérité de cet Empire. Ralliés autour de la loi, nous lui resterons inébranlablement attachés, et nos législateurs peuvent compter sur le zèle le plus ardent et le courage le plus intrépide, pour contribuer au maintien de la Constitution. » M. Salicetti. Vous vous rappelez, Messieurs, le rapport qui a été fait, il y a quelques jours, sur les affaires de la Corse : les mesures que vous avez prises seront heureusement inutiles. Les lettres que nous venons de recevoir, en date du 17 juin, annoncent que les troubles suscités dans la ville de Bastia les 2 et 3 de ce mois sont apaisés, et que l’ordre et le calme sont rétablis dans l’île. Le peuple a reconnu son erreur; les factieux et les fanatiques qui l’avaient égaré sous le masque de la religion se sont enfuis, sans qu’il ait été besoin d’employer le secours de 10,000 gardes nationaux que le département avait rassemblés pour marcher contre cette ville et qui étaieut prêts à défendre la Constitution et l’ordre public. La citadelle a été de nouveau confiée à la troupe de ligne, et les choses sont comme elles étaient auparavant. Le conseil général du département s’est réuni, le 14, à Corte, où il prend toutes les mesures pour le maintien de la tranquillité et l’exécution des lois. L’ordre du jour est un rapport des comités des colonies, de la marine , de Constitution , d’agriculture et de commerce relativement aux affaires de Saint-Domingue. M. Payen, rapporteur. Messieurs, en déclarant nuis et attentatoires à l’autorité nationale le3 actes de la ci-devant assemblée coloniale de Saint-Marc, vous vous êtes réservé de prononcer sur les personnes. Ce n'est donc point par des actes justement condamnés que vos comités ont cherché à connaître les véritables intentions des membres de cette Assemblée; c’est dans les circonstances variées, dans les craintes multipliées et dans les événements rapides et irréparables des grandes révolutions. La colonie de Saint-Domingue apprenait avec admiration que sur les débris du despotisme, la France élevait l’édifice de sa liberté. Le premier de vos décrets sur les droits de l’homme et du citoyen, quoique fondé sur les principes immuables de la raison et de la justice, porta la terreur dans toutes les colonies. Cette terreur se propagea d’autant plus que le mode de leur organisation et de leur existence semblait recevoir des atteintes destructives par chacun de vos décrets constitutionnels qui dérivaient du premier; les craintes des colonies furent bientôt connues : vous vous empressâtes de les rassurer. Vous décrétâtes, le 8 mars 1790, que vous n’aviez pas enteudu comprendre les colonies dans notre Constitution. L’Europe vous admira, l’Amérique reconnut ses frères, et les colonies crurent prendre naissance une seconde fois. 11 était difficile que de grandes agitations fussent suivies d’un calme profond, il devenait au contraire facile, non seulement aux ennemis de l’Etat, mais encore à ceux qui ne consultent que la pureté de leurs cœurs, ne désirent que l'établissement des principes moraux de l’égalité, de faire renaître et multiplier des craintes et des alarmes par des décrets d’autant plus dangereux que leur séduction est fondée sur les bases d’un système philosophique. Eh! Messieurs, comment la crainte et l’effroi n’auraient-ils pas atteint les membres des assemblées coloniales ? Ils avaient sous les yeux des écrits destructeurs de toute organisation coloniale sortis du sein même de cette Assemblée et de la plume de celui qui, associé à vos travaux, a mérité, par ses grands talents, que la nation entière déférât à ses mânes les honneurs réservés aux grands hommes. Après avoir fait connaître, Messieurs, les motifs de crainte des colonies, vous découvrirez aisément ceux qui ont dicté l’acte inconstitutionnel du 28 mai, de l’assemblée coloniale de Saint-Domingue. Ces membres ont été égarés par la crainte d’une application rigoureuse de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dans un pays dont l’existence est inconciliable avec l’article 1er de cette déclaration. Vous reconnaîtrez que tous les articles de cet acte, qui semblent établir l’indépendance envers le Corf)S législatif et la nation, ne partaient que du désir naturel de sa propre conservation, sans laquelle évidemment il ne pourrait exister d’amour entre la colonie et la mère-patrie ; ainsi l’intérêt de la métropole a dû s’unir à celui de la colonie et diriger les membres de l’assemblée coloniale jusque dans leurs erreurs. Les actes de cette assemblée étaient vicieux et nuis ; ils présentaient, dans leurs conséquences, un plan de scission, et vous les avez proscrits ; mais ce qui prouve évidemment que�cette as- ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juin 1791.] §84 (Assemblée nationale.] semblée reconnaissait la souveraineté de la nation, et voulait s'y soumettre, c'est le parti qu’elle a pris de se transporter en France, parti qui éloigne toute idée de rébellion, et qui ne permet pas de supposer que la colonie voulait se rendre iu dépendante ; c’est l'empressement avec lequel la plupart de ses membres se sont rendus aux nombreuses séances de votre comité des colonies, pour y discuter en commun tous les objets relatifs à la constitution des colonies, à leur régime intérieur, à leurs relations extérieures politiques et commerciales avec la mère-patrie pour laquelle ils ont manifesté chaque jour leur aitacbement. Ces sentiments, Messieurs, sont manifestés dans tous les écrits des membres de la ci-devant assemblée coloniale, et surtout dans la pétition qu'ils vous ont présentée le 18 avril dernier. Après avoir reconnu, Messieurs, les craintes qui agitaient les colonies, et particulièrement celle de Saint-Domingue, vos comités ont pensé qu’elles avaient été les causes principales des erreurs de la ci-devant assemblée coloniale; que l’éloignement des lieux, et l’ignorance des formes, avaient également contribué à ces erreurs ; mais qu’après la démarche de l’assemblée coloniale, qui, dans une plénitude de contiance, s’est rendue auprès de vous pour y déposer ses actes, et après toutes ses assurances de fidélité et de soumission, il ne pouvait resier aucun doute sur la pureté de ses intentions. Vous avez aussi ordonné, Messieurs, à vos comités, d’examiner l’adresse des membres de la ci-devant assemblée coloniale, tendant à ce que, prenant en considération la position où ils se trouvent, il leur soit accordé à titre d’indemnité ou de prêt une somme suffisante à leurs besoins pressants ; vos comités ont fait cet examen et ont pensé qu’il était juste d’accorder à chacun de ses membres, ainsi qu’à ceux du comité provincial de l’ouest de la colonie de Saint-Domingue, retenus près de nous par le même décret, la somme de 6,000 livres sur les fonds du département de la marine. Vos comités ont aussi pensé que M. de La Galis-sonnière, commandant le vaisseau le Léopard , ayant donné par écrit l’ordre de ramener ce vaiss au en France, et le commandant de ce vaisseau passant au sieur Santo-Domingo, celui-ci avait dû mettre cet ordre à exécution ; d’où il résultait que cet officier, ainsi que ceux qui lui étaient subordonnés, se sont admirablement acquittés dts devoirs attachés à leurs fonctions, et qu’en conséquence les dispositions de vos décrets des 20 septembre et 12 octobre derniers, à l’égard du sieur Santo-Domingo, des officiers et autres sous ses ordres composant l’équipage, du vaisseau le Léopard , devaient être levées. Les 4 comités réunis proposent à l’Assemblée nationale le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités des colonies, de marine, de Constitution, et d’agriculture et de commerce, « Considérant que, en prononçant, le 1er juin dernier, la nullité des décrets à la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, elle s’est réservé de prononcer sur les personnes, « Considérant que les erreurs qui ont dicté les actes de cette assemblée, ont été produites surtout par l’éloignement et par les alarmes répandues dans les colonies sur les dispositions de l’Assemblée nationale; et prenant en considération les adresses des 18 avril et 21 mai derniers; « Déclare qu’elle est convaincue de la pureté des intentions des membres de la ci-devant assemblée de Saint-Domingue, ainsi que de celle des membres de la ci-devant assemblée provinciale de l’Ouest ; qu’il n’y a pas lieu à inculpation contre M. Santo-Domingo; « Décrète qu’elle lève les dispositions de ses décrets des 27 septembre et 12 octobre 1790, par lesquels les membres de la ci-devant assemblée générale de Saint-Domingue, et ceux de rassemblée provinciale de l’Ouest ont été mandés et retenus à la suite de l’Assemblée, ainsi que les dispositions par lesquelles le roi a été prié de renvoyer les officiers et matelots de l’équipage du vaisseau le Léopard , dans leurs quartiers respectifs ; <> Décrète qu’il sera fait à chacun des membres de la ci-devant assemblée générale, actuellement en France, une avance de 6,000 livres sur le département de la marine; « Décrète en outre qu’il sera donné passage sur les vaisseaux qui transporteront les commissaires civils, à ceux des membres de la ci-devant assemblée générale qui le désireront. » M. Martineau. Il me semble que l’Assemblée nationale peut bien déclarer qu’ii n’y a pas lieu à accusation contre M. Santo-Domingo et ccmtre les membres de l’assemblée coloniale; mais je ne crois pas que l’on puisse dire dans un décret : Nous sommes convaincus de la pureté des intentions de ses membres. Je demande qu’on retranche cette partie du décret, et même tout le préambule. M. Garat aîné. Un principe certain en fait d’intentions, c’est qu’il faut tenir pour bonnes celles qu’on ne peut prouver mauvaises. Quelque funestes dans leurs suites, quelque inconstitutionnels qu’aient été les décrets de la ci-devant assemblée de Saint-Marc, ils ont été précédés et accompagnés de circonstances qui prouvent évidemment que des opinions erronées pins que coupables les ont dictés. Les membres qui la composent sont venus se jeter dans le sein de l’Assemblée nationale; toutes les fois qu’ils vous ont parlé par votre bouche, vous n’avez entendu que des témoignages de respect et de fidélité. Cet organe qui vous a parlé en qualité de leur défenseur, cet organe qui n’a jamais su prononcer la vérité, ils l’ont désavoué depuis. Ces députés sont réélus pour la quatrième fois par leurs commettants; des témoignages honorables de votre part seront propres à resserrer les liens des colonies avec la métropole. Ou vous propose de donner à ces députés une avance pour leur voyage; ils vous offrent pour garantie un traitement de 30 livres par jour qui leur est dû depuis un an, et la colonie est créancière sur les fonds de la marine d’une somme de 5 millions. M. de Gouy d’Arsy. Vous devez sans doute des indemnités ou du moins des avances à des hommes que vous avez éloignés pendant un an de leurs foyers et de leurs manufactures. Je ne viens pas pour parler sur le fond de la question ; nous désirons tous la paix. Vous savez qu’un grand nombre des membres de l’assemblée générale sont désignés pour la quatrième fois, par les suffrages de leurs concitoyens, pour former l’assemblée représentative des colonies. J’observe donc que dans le choix des sentiments, vous devez considérer ceux qui ont été exprimés les derniers, et qui sont le plus analogues au désir