502 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE représentant, à te dire que jamais je n’ai ressenti ainsi que tous mes parens autant de joie. S. et F. ». [on applaudit]. Signé, Antoine Tancogne Mention honorable, insertion au bulletin (l). 32 Une députation de la section de Chalier apporte à la barre trois enfans mâles, nés la nuit dernière, de la citoyenne Deniau, dont le mari, voiturier mis en réquisition, est parti pour l’armée du Nord. La députation, dans une adresse vivement applaudie, fait part des sentimens républicains qui animent les père et mère vertueux et peu fortunés de ces nouveaux nés, dont la famille étoit déjà composée de trois filles (2). L’orateur (3) Citoyens législateurs, l’Eternel a fixé la victoire sous nos drapeaux; il a répandu l’abondance sur le sol de la liberté, et donné aux femmes des hommes libres la fécondité la plus étonnante. Nous venons vous offrir trois enfants mâles, robustes et bien portants, dont est accouchée l’avant-dernière nuit, sur la section Challier, la citoyenne Deniau, femme d’un voiturier mis en réquisition et parti pour l’armée du Nord. Ils portent les noms des trois martyrs de la liberté, Lepelletier, Marat et Challier. Ils en auront les vertus, et vengeront un jour sur les derniers rois, s’il en existe encore, la mort de leurs patrons. Leur père, loin de craindre la fécondité de sa femme, comme les riches égoïstes ou contre-révolutionnaires, lui disait, avant son départ, après avoir embrassé ses trois filles, dont l’aînée, âgée de 5 ans, est devant vous : « je donnerais jusqu’à ma dernière chemise pour avoir, comme un de mes amis, six républicains ». La mère disait à la sage-femme, qui, après avoir reçu son troisième garçon, l’invitait à prendre courage : « Je ne souffre pas, puisque mon mari va être content, et que je donne des défenseurs à la patrie ; je voudrais qu’il y en eût six : tâtez mon ventre, il y en a encore ». C’est ainsi que les sans-culottes savent mettre à profit les leçons de vertu que vous ne cessez de leur donner. Nous vous demandons pour cette famille respectable des secours que l’heureuse fécondité de la mère lui rend nécessaires. (Applaudissements) (4). « Sur la proposition d’un membre (5), la Convention nationale accorde à la citoyenne Deniau la somme de 600 liv., à titre de secours, qui lui sera payée par la trésorerie nationale, à la présentation du présent décret; (1) P.V., XLII, 175. Bin, 7 therm.; Débats, n°673; Rép., n° 218; J. Fr., n°669; M.U., XLII, 120; J. Sablier, n° 1459; Audit, nat., n°670; Mess. Soir, n° 706 (Dans les gazettes, le nom est orthographié Ancogne ou Lancogne). (2) P.V., XLII, 176. (3) Boche, selon J. Sablier, n° 1459. 4 Mon., XXI, 316. (ô) Bréard, selon J. Sablier. Décrète l’insertion au bulletin de l’adresse, et admet les pétitionnaires aux honneurs de la séance (l). 33 Un membre [PIETTE] fait un rapport au nom des comités des domaines et d’aliénation réunis : PIETTE, au nom du comité d’aliénation et domaines réunis : Citoyens, on vend des biens nationaux dans le moment où une partie des fruits qu’ils produisent est récoltée, dans le moment où une autre portion de ces fruits est encore pendante par les racines. Or il s’agit de savoir à qui appartiennent ces fruits, ou les fermages à échoir qui les représentent. Telle est, citoyens, la question importante sur laquelle je viens vous prier de prononcer. Je dis importante, parce qu’il est une énorme quantité d’acquéreurs qui se trouvent dans le cas proposé; ils ont touché la totalité de la redevance des biens qu’ils ont acquis, persuadés que cette redevance leur appartenait, et ils croient encore qu’il est souverainement juste de la leur conserver. Cette question a été examinée sur la pétition d’un citoyen, le seul peut-être qui n’ait pas reçu les fermages de l’objet de son acquisition, et qui les réclame aujourd’hui auprès de la Convention nationale. Le 23 août 1791, le citoyen Lambert s’est rendu adjudicataire au district de Vouziers, département des Ardennes, d’un domaine faisant partie des biens de la fabrique de Sainte-Vaubourg. Le citoyen Lambert ayant prétendu que la redevance de l’année dans laquelle il avait acquis ce domaine lui appartenait, il s’est élevé à ce sujet, entre lui et la fabrique de Sainte-Vaubourg, au tribunal d’Attigny, une discussion sur laquelle intervint, le 12 septembre 1792, un jugement qui fait dépendre la décision de la contestation du fait de savoir si, à l’époque de la vente, il y avait encore des fruits pendants par racines sur les terres de la ferme ? Le citoyen Lambert a interjeté appel de ce jugement; et le tribunal du district de Reims, saisi de cet appel, a ordonné, le 2 vendémiaire, l’exécution du jugement du tribunal d’Attigny. C’est dans ces circonstances que le citoyen Lambert se pourvoit à la Convention nationale. Il soutient, et le fait n’est pas douteux, qu’au 23 août 1791, les fruits crûs sur les terres de son acquisition n’étaient pas tous recueillis; et comme les lois des 30 mars et 10 juillet de la même année donnent à l’adjudicataire les fruits pendants par racines au moment de son adjudication, ou la totalité des fermages qui les représentent; comme, d’un autre côté, la loi du 10 juillet, après avoir distingué (l) P.V., XLII, 176. Minute de la main de Bréard. Décret n° 10 077. Bm, 6 therm. (lersupplt); Débats, n° 673; J. Fr., n°669; J. Paris, n°572; C. univ., n°936; C. Eg„ n° 706; Rép., n°218; J. Mont., n°90; M.U., XLII, 121; Audit, nat., n° 670; Ann. patr., n° DLXXI; J. Lois, n° 665; Mess. Soir, n° 705; F.S.P., n°386; J. Perlet, n°671; J. S. Culottes, n° 526. 502 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE représentant, à te dire que jamais je n’ai ressenti ainsi que tous mes parens autant de joie. S. et F. ». [on applaudit]. Signé, Antoine Tancogne Mention honorable, insertion au bulletin (l). 32 Une députation de la section de Chalier apporte à la barre trois enfans mâles, nés la nuit dernière, de la citoyenne Deniau, dont le mari, voiturier mis en réquisition, est parti pour l’armée du Nord. La députation, dans une adresse vivement applaudie, fait part des sentimens républicains qui animent les père et mère vertueux et peu fortunés de ces nouveaux nés, dont la famille étoit déjà composée de trois filles (2). L’orateur (3) Citoyens législateurs, l’Eternel a fixé la victoire sous nos drapeaux; il a répandu l’abondance sur le sol de la liberté, et donné aux femmes des hommes libres la fécondité la plus étonnante. Nous venons vous offrir trois enfants mâles, robustes et bien portants, dont est accouchée l’avant-dernière nuit, sur la section Challier, la citoyenne Deniau, femme d’un voiturier mis en réquisition et parti pour l’armée du Nord. Ils portent les noms des trois martyrs de la liberté, Lepelletier, Marat et Challier. Ils en auront les vertus, et vengeront un jour sur les derniers rois, s’il en existe encore, la mort de leurs patrons. Leur père, loin de craindre la fécondité de sa femme, comme les riches égoïstes ou contre-révolutionnaires, lui disait, avant son départ, après avoir embrassé ses trois filles, dont l’aînée, âgée de 5 ans, est devant vous : « je donnerais jusqu’à ma dernière chemise pour avoir, comme un de mes amis, six républicains ». La mère disait à la sage-femme, qui, après avoir reçu son troisième garçon, l’invitait à prendre courage : « Je ne souffre pas, puisque mon mari va être content, et que je donne des défenseurs à la patrie ; je voudrais qu’il y en eût six : tâtez mon ventre, il y en a encore ». C’est ainsi que les sans-culottes savent mettre à profit les leçons de vertu que vous ne cessez de leur donner. Nous vous demandons pour cette famille respectable des secours que l’heureuse fécondité de la mère lui rend nécessaires. (Applaudissements) (4). « Sur la proposition d’un membre (5), la Convention nationale accorde à la citoyenne Deniau la somme de 600 liv., à titre de secours, qui lui sera payée par la trésorerie nationale, à la présentation du présent décret; (1) P.V., XLII, 175. Bin, 7 therm.; Débats, n°673; Rép., n° 218; J. Fr., n°669; M.U., XLII, 120; J. Sablier, n° 1459; Audit, nat., n°670; Mess. Soir, n° 706 (Dans les gazettes, le nom est orthographié Ancogne ou Lancogne). (2) P.V., XLII, 176. (3) Boche, selon J. Sablier, n° 1459. 4 Mon., XXI, 316. (ô) Bréard, selon J. Sablier. Décrète l’insertion au bulletin de l’adresse, et admet les pétitionnaires aux honneurs de la séance (l). 33 Un membre [PIETTE] fait un rapport au nom des comités des domaines et d’aliénation réunis : PIETTE, au nom du comité d’aliénation et domaines réunis : Citoyens, on vend des biens nationaux dans le moment où une partie des fruits qu’ils produisent est récoltée, dans le moment où une autre portion de ces fruits est encore pendante par les racines. Or il s’agit de savoir à qui appartiennent ces fruits, ou les fermages à échoir qui les représentent. Telle est, citoyens, la question importante sur laquelle je viens vous prier de prononcer. Je dis importante, parce qu’il est une énorme quantité d’acquéreurs qui se trouvent dans le cas proposé; ils ont touché la totalité de la redevance des biens qu’ils ont acquis, persuadés que cette redevance leur appartenait, et ils croient encore qu’il est souverainement juste de la leur conserver. Cette question a été examinée sur la pétition d’un citoyen, le seul peut-être qui n’ait pas reçu les fermages de l’objet de son acquisition, et qui les réclame aujourd’hui auprès de la Convention nationale. Le 23 août 1791, le citoyen Lambert s’est rendu adjudicataire au district de Vouziers, département des Ardennes, d’un domaine faisant partie des biens de la fabrique de Sainte-Vaubourg. Le citoyen Lambert ayant prétendu que la redevance de l’année dans laquelle il avait acquis ce domaine lui appartenait, il s’est élevé à ce sujet, entre lui et la fabrique de Sainte-Vaubourg, au tribunal d’Attigny, une discussion sur laquelle intervint, le 12 septembre 1792, un jugement qui fait dépendre la décision de la contestation du fait de savoir si, à l’époque de la vente, il y avait encore des fruits pendants par racines sur les terres de la ferme ? Le citoyen Lambert a interjeté appel de ce jugement; et le tribunal du district de Reims, saisi de cet appel, a ordonné, le 2 vendémiaire, l’exécution du jugement du tribunal d’Attigny. C’est dans ces circonstances que le citoyen Lambert se pourvoit à la Convention nationale. Il soutient, et le fait n’est pas douteux, qu’au 23 août 1791, les fruits crûs sur les terres de son acquisition n’étaient pas tous recueillis; et comme les lois des 30 mars et 10 juillet de la même année donnent à l’adjudicataire les fruits pendants par racines au moment de son adjudication, ou la totalité des fermages qui les représentent; comme, d’un autre côté, la loi du 10 juillet, après avoir distingué (l) P.V., XLII, 176. Minute de la main de Bréard. Décret n° 10 077. Bm, 6 therm. (lersupplt); Débats, n° 673; J. Fr., n°669; J. Paris, n°572; C. univ., n°936; C. Eg„ n° 706; Rép., n°218; J. Mont., n°90; M.U., XLII, 121; Audit, nat., n° 670; Ann. patr., n° DLXXI; J. Lois, n° 665; Mess. Soir, n° 705; F.S.P., n°386; J. Perlet, n°671; J. S. Culottes, n° 526.