40 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 juin 1790.] de l’Oise résidera alternativement dans les villes de Beaùvais et Compïègne. 5° Enfin, d’une proclamation sur le décret du 28, portant que la démolition de la citadelle de Marseille sera arrêtée sur-le-champ. M. Moreau (de Tours) sollicite l’attention de l’Assemblée nationale sur une rivalité survenue et excitée entre l’ancienne milice bourgeoise d’Amboise et les gardes nationales de la même ville ; il propose et fait adopter le décret dont la teneur suit: « L’Assemblée nationale décrète que l’ancienne milice bourgeoise d’Amboise ne sera admise à aucun service qu’autant que ses membres s’incorporeront aux gardes nationales, où ne pourront être admis que les citoyens actifs et les fils de citoyens actifs; ordonne que les drapeaux de l’ancienne milice bourgeoise seront déposés dans l’église paroissiale d’Amboise. » M. le baron d’Harambnre propose à l’Assemblée de s’occuper à l’instant de différents désordres qui ont eu lieu dans plusieurs corps de troupes de l’armée, notamment dans les régiments de Lorraine et de la reine. Cette affaire est renvoyée au comité militaire. M. Legrand, député du Berry , demande la permission d’instruire l’Assemblée d’un refus de la maréchaussée de la Châtre de prêter main-forte dans une occasion pressante. Cette affaire est renvoyée au comité des rapports. M. Defermon, rapporteur du comité de police, propose un projet de décret concernant les boucheries de Paris, concerté avec le comité d’agriculture et de commerce. M. Fréteau propose d’ajouter à ce décret: sauf aux parties à se pourvoir devant les juges à qui il artiendra. a question préalable est demandée et prononcée sur cet amendement. î Le décret est ensuite rendu en ces termes : « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité de commerce et d’agriculture, de la contestation relative aux étaux des boucheries de Paris, « A décrété que la nouvelle municipalité de Paris, aussitôt qu’elle sera formée, fera l’examen des anciens règlements relatifs aux étaux des boucheries, pour, sur le résultat de cet examen, être ensuite statué; « Déclare, sur le surplus, n’y avoir lieu à délibérer. » M. le Président fait lecture d’une lettre de M. le curé de Saint-Germain-l’Auxerrois : il prévient l'Assemblée nationale que le roi et la famille royale se rendront à 9 heures pour entendre la rand’messe et aller à la procession ; l’Assemblée écide qu’elle s’y rendra à 8 heures trois quarts. On fait lecture d’une lettre de M. le maire et de M. le commandant général de la garde nationale : ils demandent les ordres de l’Assemblée sur la manière dont elle veut composer sa garde pour la procession du jour de la Fête-Dieu. M. de M oailles. Etant au milieu de nos concitoyens, nous n’avons besoin d’aucune garde; quant à la police, c’est à M. le maire à prendre les mesures qu’il croira convenables. M. le vicomte Desfosse*, député duVerman-dois, menacé de la perte d’un œil, demande un congé d’un mois qui lui est accordé. La séance est levée à 10 heures du soir. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BRIOIS DE BEAUMETZ. Séance du mercredi 2 juin 1790, au matin (1). M. Devillas, député de Saint-Flour, entretient l’Assemblée d’une délibération et d’une adresse de la commune de la ville de Murat, en Auvergne, sur lesquelles il est instant de statuer; cette localité demande que la libre circulation des grains soit assurée et qu’il lui soit permis de contracter un emprunt pour achats de blés afin que son marché, qui est le seul où les habitants des montagnes puissent acheter des grains, soit constamment approvisionné. Il propose un projet de décret qui est adopté ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale décrète que son président se retirera, dans le jour, par devers le roi, pour supplier Sa Majesté dé faire donner ses ordres aux municipalités et aux gardes nationales du département du Gantai, de protéger, par tous les moyens qui leur sont confiés, la libre circulation des grains ; et, au surplus, que la municipalité de la ville de Murat est autorisée à faire un emprunt de la somme de vingt-quatre mille livres, pour l’employer à l’achat des grains nécessaires à la consommation de cette ville, à la charge du remboursement, six mois après, du produit de la revente desdits grains .• M. le baron de Cernon, au nom du comité de Constitution , demande à faire un rapport sur les réclamations des villes de Soissons et de Laon qui réclament toutes les deux le privilège d'être chef-lieu du département. L’Assemblée ajourne cette affaire à une séance extraordinaire qui, à cet effet, est indiquée pour ce soir. M. Chabroud, l'un des secrétaires, donne lecture d’une adresse de la ville et canton de Ma-rennes. L’esprit de patriotisme qui respire dans cet écrit est applaudi. M. Lemcreier demande qu’il soit fait une mention honorable de cette adresse au procès-verbal. Cette proposition est adoptée. M. Target, au nom des comités de Constitution et des recherches réunis , demande à faire un rapport sur les troubles des départements du Cher, de la Nièvre, de V Allier et de la Corrèze. L’Assemblée décide qu’il sera entendu. M. Target. Messieurs, dans les anciennes provinces du Bourbonnais, du Nivernais, du Berry et du Limousin, les assemblées primaires et électorales ont donné lieu à de très grands troubles. Plusieurs municipalités ont été forcées de publier (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 41 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 juin 1790.] la loi martiale : les suites de cette rigueur nécessaire sont très affligeantes , puisque quatre hommes ont été tués et plus de quarante dangereusement blessés ..... Des brigands se sont répandus dans les campagnes, et ils investissent dans ce moment la ville de Decize ..... Le comité des recherches est instruit que de grands excès ont été aussi commis dans le Limousin : des paysans excités ont demandé que les grains fussent fixés à un prix très inférieur à leur valeur réelle : ils ont eux-mêmes diminué ce prix, et ont menacé de mort ceux qui ne vendraient pas le seigle et les autres grains conformément à leur détermination. Le projet de rentrer dans les biens vacants adjugés aux seigneurs depuis 120 ans est un des articles de leur règlement. On doit des éloges à la conduite du régiment de Royal-Navarre, qui a rendu les services les plus importants pour le rétablissement de la paix. Tous les excès ne résultent pas d’une insurrection subite ; mais les peuples sont excités par des manœuvres perfides. Dans les mois de mars et d’avril, on a publié dans les campagnes de faux décrets de l’Assemblée nationale, dans lesquels on donne l’ordre de ne payer le pain qu’un sou la livre... On a vu des paysans éplorés' se porter dans les églises, en disant qu’ils venaient remercier Dieu de n’avoir pas commis les meurtres qui leur avaient été commandés. On a trouvé dans la poche d’un paysan tué, lors de la publication de la loi martiale, 66 liv. et un billet de 7 louis. Tels sont les maux qui ont affligé les départements du Cher, de l’Ailier, de la Nièvre et de la Corrèze. Ces excès vous ont été dénoncés plusieurs fois, et en dernier lieu les députés de la commune de Tulle vous ont présenté un mémoire ( Voy . cette pièce annexée à la séance de ce jour) qui ne laisse subsister aucun doute sur l’étendue du mal qui afflige leur province. Le comité de Constitution et le comité des recherches réunis m’ont chargé de proposer à l’Assemblée des dispositions propres à remédier à de pareils désordres. (M. Target donne lecture d’un projet de décret). M. Grégoire. Le décret est très propre à prévenir des troubles ; je demande qu’il soit envoyé dans tout le royaume. M. Bouche. Je fais une motion qui me paraît urgente : c’est que les curés qui se refuseront à publier les décrets de l’Assemblée nationale seront privés de tous honoraires attachés à leurs bénéfices, et que cette même peine sera étendue aux évêques, prêtres, religieux, ex-religieux et moines fanatiques ou séditieux qui formeront des complots contre la Constitution. M. Prieur. La mesure proposée par M. Bouche est trop violente pour que vous puissiez l’adopter, mais j’ai un autre amendement qui serait de nature à atteindre le but que nous nous proposons tous et que je formule ainsi : « Les dé-« crets seront publiés par les curés sur la réqui-« sition des officiers municipaux, qui, en cas de « refus, en dresseront procès-verbal et le procu-« reur de la commune en fera la dénonciation « aux juges qui en doivent connaître. » M. lioys. Les dispositions qui vous sont proposées sont impraticables , car dans le Périgord plusieurs curés ont été arrachés de leur chaire pour avoir voulu publier vos décrets. M. Bourdon, curé d'Evaux. Je demande qu’il y ait un terme à la peine de la privation des droits de citoyen actif contre les curés qui n’auraient pas publié les décrets et que ces droits leur soient rendus lorsqu’ils déclareront à la municipalité qu’ils se repentent. M. l’abbé Saurine. Rien ne peut excuser un curé du refus de publier les décrets acceptés et sanctionnés par le roi. En conséquence, un curé qui est tombé dans cette faute ne doit en être relevé qu’après que la municipalité l’a jugé digne d’user des droits de citoyen actif. M. le Président fait lecture de tous les amendements. On demande la question préalable, qui est prononcée. Lp projet de décret du comité est relu et adopté dans la teneur suivante : « L’Assemblée nationale, informée et profondément affligée des excès qui ont été commis par des troupes de brigands et de voleurs dans les départements du Cher, de la Nièvre et de l’Ailier, et qui se sont étendus jusque dans celui de la Corrèze ; excès qui, en attaquant la tranquillité publique, les propriétés et les possessions, la sûreté et la clôture des maisons et des héritages, la liberté si nécessaire de la vente et circulation des grains et subsistances, répandent par-toutla terreur, menacen t même la vie des citoyens, et amèneraient promptement, s’ils n’étaient réprimés, la calamité de la famine ; excès, enfin, qui, par la contagion de l’exemple, par des insinuations perfides, par la publication de faux décrets de l’Assemblée nationale, ont entraîné quelques-uns des bons et honnêtes habitants de campagne dans des violences contraires à leurs principes connus, et capables de les priver pour longtemps du bonheur que l'Assemblée nationale travaille sans cesse à leur procurer ; « Considérant qu’il n’y a que deux moyens d’empêcher les désordres : l’un en éclairant continuellement les bons citoyens et les honnêtes gens, que les ennemis de la Constitution et du bien public essayent continuellement de tromper; l’autre, en opposant aux brigands, d’un côté, des forces capables de les contenir, d’un autre côté, une justice prompte et sévère qui punisse les chefs, auteurs et instigateurs de troubles, et effraye les méchants qui pourraient être tentés de les imiter : Ouï le rapport à elle fait, au nom de son comité de Constitution et de son comité des recherches, décrète ce qui suit : « Art. 1er. Tous ceux qui excitent le peuple des villes ou des campagnes à des voies de fait et violences contre les propriétés, possessions et clôtures des héritages, la vie et la sûreté des citoyens, la perception des impôts, la liberté de vente et de circulation des denrées et subsistances, sont déclarés ennemis de la Constitution, des travaux de l'Assemblée nationale, de la nation et du roi ; il est enjoint à tous les honnêtes gens d’en faire la dénonciation aux municipalités, aux administrations de département, et à lAs-semblée nationale. « Art. 2. Tous ceux qui excitent le peuple à entreprendre sur le pouvoir législatif des représentants delà nation, en proposant des règlements quelconques sur le prix des denrées, la police champêtre, l’évaluation des dommages, le prix et la durée des baux, et les droits sacrés de la propriété, et autres matières, sont également déclarés ennemis de la Constitution, et il est