558 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE rite, la baïonnette, guidée par le génie de la liberté; il faut que nos armées s’accoutument à présenter au monde ce spectacle que l’histoire nous offre seulement à Pharsale et à Marathon. Eternisons les belles actions pour les rendre fréquentes. Mon projet est d’élever une colonne dans la plaine de Boussu où l’événement s’est passé, et d’y graver ces mots : « Ici l’infanterie française a trois fois dans la même journée chargé la cavalerie ennemie; trois fois elle l’a mise en déroute. » J’appuie le renvoi au Comité de salut public. BOURDON (de l’Oise) : Je demande que vous décrétiez le principe, et que vous renvoiez ensuite aux Comités de salut public et d’instruction publique pour vous faire un rapport dont le but sera de transmettre à la postérité la belle action de l’armée des Ardennes. Cette proposition est adoptée en ces termes, au milieu des applaudissements (1) . « La Convention nationale déclare que l’armée des Ardennes a bien mérité de la patrie en chargeant trois fois à la baïonnette la cavalerie ennemie, et renvoie aux Comités d’instruction et de salut public pour éterniser la mémoire de cette action héroïque » (2) . 39 Le rapport du Comité des marchés sur les administrateurs de l’habillement et équipement des armées est ajourné à demain (3). La séance est levée à trois heures (4). Signé, Robert LINDET, président MONNOT, RUELLE, C. POTTIER, POCHOLLE, N. HAUSS-MANN et DORNIER, secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 40 Goupilleau donne connaissance à la Convention du trait suivant : «Dans l’affaire 28, l’armée du Nord, la 72e demi-brigade fut attaquée par onze bataillons ennemis et une nombreuse cavalerie. Un officier eut la lâcheté de crier : Sauve qui peut ! Un caporal sort du rang, lui arrache ses épaulettes (1) Mon., XX, 367. (2) P.V., XXXVI, 288. Minute de la main de Bourdon (de l’Oise) (C 301, pl. 1069, p. 16). Décret n° 8998. (3) P.V., XXXVI, 288. (4) P.V., XXXVI, 288. et l’arrête. Pas un volontaire ne quitta le rang et la retraite se fit dans le meilleur ordre. Cet officier a été fusillé à la tête du camp, aux cris de vive la République. » (1) . (Vifs applaudissements.) La Convention ordonne l’insertion de ce récit au bulletin et charge les représentants près l’armée du Nord de lui faire connaître le nom de ce brave caporal, qui jusqu’ici est resté ignoré (2). 41 GOUPILLEAU fait lecture de la lettre suivante, du chef du 1er bataillon du 36e régiment, datée de Piémont, le 3 floréal. « Il m’a été impossible, citoyen représentant, de satisfaire plus tôt à l’ordre que tu m’as donné de te rendre compte des circonstances qui ont précédé le don de 530 livres 10 sous que le bataillon a fait en faveur de deux familles dont les chaumières ont été brûlées; les motifs qui m’en ont empêché sont fondés sur ce que j’ai resté hier avec la troupe une bonne partie de la journée sous les armes. « Dans la nuit du 28 ventôse le feu prit au grenier d’une maison de la droite du village du côté de l’ennemi; il ne se manifesta d’abord que comme une étincelle, mais en moins d’une minute toute la commune fut menacée d’un embrasement total, à cause d’un vent très-fort qui dirigeait les flammes sur le centre du village. Les mesures les plus promptes furent prises pour en arrêter les progrès; une partie du cantonnement se rendit de suite à son poste de bataille, et le reste travailla avec cette activité qui n’est familière qu’à ceux qui défendent la cause d’un grand peuple. « Quelques heures suffirent pour rassurer sur l’effet de l’incendie, et quelques mesures que j’aie pu prendre, de concert avec le Comité de surveillance, je n’ai pu en découvrir l’origine; il est vraisemblablement qu’il n’est que la suite d’une imprudence. «Les officiers, sous-officiers et volontaires du bataillon n’ont pu voir sans attendrissement la détresse de ces deux familles; chacun d’eux s’est empressé de les soulager suivant ses moyens; une somme de 530 livres 10 sous a été le résultat de nos offrandes. Elle a été remise aux membres du Comité de surveillance pour la distribuer à ces deux familles. Je t’avais parlé de ce don en conversation; je ne pensais pas que tu exigeasses le compte par écrit; puisque tu l’as voulu, je souscris à tes ordres, et je t’instruis que tous les officiers m’ont chargé hier de prévenir le quartier-maître qu’ils ne prendraient, pendant douze jours, que la moitié de la viande qui leur revient, et ils sont prêts à (1) Mon., XX, 366; Bin, 13 flor.; J. Fr., n° 586; J. Paris, n° 488; J. Lois, n° 582; J. Mont., n° 171; J. Matin, n° 680; Ann. patr., n° 487; J. Sablier, n° 1294; J. Perlet, n° '588; Débats, nos 590, p. 166 et 623, p 258. (2) Rép., n° 134; M.U., XXXIX, 218; Feuille Rép., n° 304. 558 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE rite, la baïonnette, guidée par le génie de la liberté; il faut que nos armées s’accoutument à présenter au monde ce spectacle que l’histoire nous offre seulement à Pharsale et à Marathon. Eternisons les belles actions pour les rendre fréquentes. Mon projet est d’élever une colonne dans la plaine de Boussu où l’événement s’est passé, et d’y graver ces mots : « Ici l’infanterie française a trois fois dans la même journée chargé la cavalerie ennemie; trois fois elle l’a mise en déroute. » J’appuie le renvoi au Comité de salut public. BOURDON (de l’Oise) : Je demande que vous décrétiez le principe, et que vous renvoiez ensuite aux Comités de salut public et d’instruction publique pour vous faire un rapport dont le but sera de transmettre à la postérité la belle action de l’armée des Ardennes. Cette proposition est adoptée en ces termes, au milieu des applaudissements (1) . « La Convention nationale déclare que l’armée des Ardennes a bien mérité de la patrie en chargeant trois fois à la baïonnette la cavalerie ennemie, et renvoie aux Comités d’instruction et de salut public pour éterniser la mémoire de cette action héroïque » (2) . 39 Le rapport du Comité des marchés sur les administrateurs de l’habillement et équipement des armées est ajourné à demain (3). La séance est levée à trois heures (4). Signé, Robert LINDET, président MONNOT, RUELLE, C. POTTIER, POCHOLLE, N. HAUSS-MANN et DORNIER, secrétaires. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 40 Goupilleau donne connaissance à la Convention du trait suivant : «Dans l’affaire 28, l’armée du Nord, la 72e demi-brigade fut attaquée par onze bataillons ennemis et une nombreuse cavalerie. Un officier eut la lâcheté de crier : Sauve qui peut ! Un caporal sort du rang, lui arrache ses épaulettes (1) Mon., XX, 367. (2) P.V., XXXVI, 288. Minute de la main de Bourdon (de l’Oise) (C 301, pl. 1069, p. 16). Décret n° 8998. (3) P.V., XXXVI, 288. (4) P.V., XXXVI, 288. et l’arrête. Pas un volontaire ne quitta le rang et la retraite se fit dans le meilleur ordre. Cet officier a été fusillé à la tête du camp, aux cris de vive la République. » (1) . (Vifs applaudissements.) La Convention ordonne l’insertion de ce récit au bulletin et charge les représentants près l’armée du Nord de lui faire connaître le nom de ce brave caporal, qui jusqu’ici est resté ignoré (2). 41 GOUPILLEAU fait lecture de la lettre suivante, du chef du 1er bataillon du 36e régiment, datée de Piémont, le 3 floréal. « Il m’a été impossible, citoyen représentant, de satisfaire plus tôt à l’ordre que tu m’as donné de te rendre compte des circonstances qui ont précédé le don de 530 livres 10 sous que le bataillon a fait en faveur de deux familles dont les chaumières ont été brûlées; les motifs qui m’en ont empêché sont fondés sur ce que j’ai resté hier avec la troupe une bonne partie de la journée sous les armes. « Dans la nuit du 28 ventôse le feu prit au grenier d’une maison de la droite du village du côté de l’ennemi; il ne se manifesta d’abord que comme une étincelle, mais en moins d’une minute toute la commune fut menacée d’un embrasement total, à cause d’un vent très-fort qui dirigeait les flammes sur le centre du village. Les mesures les plus promptes furent prises pour en arrêter les progrès; une partie du cantonnement se rendit de suite à son poste de bataille, et le reste travailla avec cette activité qui n’est familière qu’à ceux qui défendent la cause d’un grand peuple. « Quelques heures suffirent pour rassurer sur l’effet de l’incendie, et quelques mesures que j’aie pu prendre, de concert avec le Comité de surveillance, je n’ai pu en découvrir l’origine; il est vraisemblablement qu’il n’est que la suite d’une imprudence. «Les officiers, sous-officiers et volontaires du bataillon n’ont pu voir sans attendrissement la détresse de ces deux familles; chacun d’eux s’est empressé de les soulager suivant ses moyens; une somme de 530 livres 10 sous a été le résultat de nos offrandes. Elle a été remise aux membres du Comité de surveillance pour la distribuer à ces deux familles. Je t’avais parlé de ce don en conversation; je ne pensais pas que tu exigeasses le compte par écrit; puisque tu l’as voulu, je souscris à tes ordres, et je t’instruis que tous les officiers m’ont chargé hier de prévenir le quartier-maître qu’ils ne prendraient, pendant douze jours, que la moitié de la viande qui leur revient, et ils sont prêts à (1) Mon., XX, 366; Bin, 13 flor.; J. Fr., n° 586; J. Paris, n° 488; J. Lois, n° 582; J. Mont., n° 171; J. Matin, n° 680; Ann. patr., n° 487; J. Sablier, n° 1294; J. Perlet, n° '588; Débats, nos 590, p. 166 et 623, p 258. (2) Rép., n° 134; M.U., XXXIX, 218; Feuille Rép., n° 304.