433 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* |14 août 1791.] espérances, par ses droits, stipulera davantage les intérêts exclusifs du pouvoir exécutif ; je ne prétends pas encore juger la question. (Murmures.) Je dis seulement que les motifs des décrets constitutionnels n’ont rien de commun avec les motifs donnés par les préopinants : que la crainte de rétablir, par là, la noblesse, est une idée absurde, puisqu’il n’y a rien, au contraire, de plus efficace pour la détruire, rendre tous les citoyens parfaitement égaux à l’exception d’une seule famille. Je dis ensuite que, lorsqu’on voulait enlever cette question avec des phrases injurieuses et calomnieuses pour ceux qui soutiennent l’opinion contraire, on induisait l’Assemblée nationale volontairement en erreur, et qu’il fallait examiner cette question sous des rapports politiques, tirés de l’intérêt des citoyens, et que, de plusieurs manières, elle présentait des difficultés essentielles. Puisque l’on m’y force, et que l’on oppose d’absurdes calomnies à des raisons tranquilles et importantes, l’on me force à dire qu’il est d’un grand danger pour la liberté que des membres de la dynastie royale, mêlés aux élections populaires, aux corps nationaux, y deviennent le noyau d’une faction, le point de ralliement de plusieurs intrigants. M. Mirabeau pensait que les membres de la dynastie ne devaient pas jouir des droits de citoyens; si, en ce moment, il fallait décider sur le oui ou sur le non, je n’hésiterais pas à être du même avis. Cependant, Messieurs, il est important que l’on présente à l’Assemblée un corps d’objections vu sous toutes les faces, et des articles mûrement rédigés. Je conclus donc pour le renvoi aux comités. ( Appaudissements .) A l’extrême gauche : La question préalable. M. le Président. On m’a fait cette observation, que la discussion ne porte plus sur le mot prince. M. Rewbell. C’est sur ce mot qu’on demande la question préalable et on doit juger cette question préalable, pour qu’il ne reparaisse pas sous de nouvelles couleurs; la deuxième question est de savoir si un membre de la famille royale peut être en même temps citoyen actif. Il n’y a rien de plus simple qu’un prince de la famille royale use de son droit de citoyen ; il est aussi étranger au pouvoir exécutif que qui que ce soit. (Murmures.) Vous avez décrété que les membres de la famille du roi seraient dans la classe des citoyens; par conséquent, dès qu’il n’exerce ni les fonctions du pouvoir exécutif, ni celles de premier où deuxième suppléant, il est dans la classe des citoyens, cela est évident. (Applaudissements.) M. Charles de Lametli. Ce que j’ai à dire est bien simple; c’est que ce n’est pas la question de la qualification de prince ou toute autre qualification qui doit être agitée dans l’Assemblée nationale; c’est celle, très importante, de savoir s’il n’est pas contraire à tous les principes et extrêmement dangereux pour la liberté publique qu’un particulier qui, par sa naissance, peut être appelé à être roi, puisse être membre des Assemblées législatives. Voilà la question, Messieurs; et je m’étonne bien que dans cette Assemblée on ne veuille pas permettre le renvoi au comité d’une question aussi importante, quand je l’ai entendue recevoir et discuter plusieurs fois dans des assemblées délibérantes... lre Série. T. XXIX. Un membre : Populaires. M. Charles deLameth... où l’on s’occupait de l’intérêt public ; et je l’ai vue accueillir à l’unanimité par les mêmes personnes qui ne veulent pas permettre aujourd’hui qu’elle soit renvoyée au comité de Constitution. Un membre : Je vous prie de répondre ce que vous avez répondu à M. Mirabeau lorsqu’il traita cette question. M. Camus. J’insiste pour que, sur la proposition de donner la qualité de prince aux personnes de la famille royale, on mette la questioa préalable et qu’on renvoie l’autre proposition aux comités. Plusieurs membres : Le renvoi du tout. M. Alexandre de Eameth. Tout le monde est d’accord que le titre de prince ne doit être conféré à personne. On peut donc mettre d’abord cette proposition aux voix. M. le Président. La question préalable est demandée sur la première partie de la motion de M. Goupil, tendant à donner le titre de prince aux membres de la famille royale. Je consulte l’Assemblée. (L’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu de délibérer sur cette première motion.) M. le Président. Sur la proposition touchant les droits politiques des membres de la famille royale on demande le renvoi aux comités. Je consulte l’Assemblée. M. Prienr. Je demande la question préalable sur le renvoi. M. le Président. La délibération est commencée. M. Prieur. Je demande à établir contre vous, Monsieur le Président, que la délibération n’était pas commencée. M. Bouchotte. Je demande la parole pour établir le contraire. Plusieurs membres : Consultez l’Assemblée, Monsieur le Président. M. Rabaud-Saint-Etienne. Ce despotisme est insupportable. M. le Président. On demande la question préalable sur le renvoi aux comités; je la mets aux voix. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu de délibérer sur le renvoi aux comités qui est ensuite mis aux voix et prononcé.) M. Thouret, rapporteur. Voici, Messieurs, l’article 5 : Art. 5. « Il sera fait une loi pour régler l’éducation du roi mineur, et celle de l’héritier présomptif mineur. » (Adopté.) Art. 6. « Il ne sera accordé aux membres de la famille royale aucun apanage réel. 28 434 [Assemblée n�tionalp.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 août 1791.] « Les /ils puînés du roi recevront à l’âge de 25 ans accomplis, ou lors de leur mariage, une rente apanagère, laquelle sera fixée par Je Corps législatif, et finira à l’extinction de leur postérité masculine. » {Adopté.) M. Thouret, rapporteur. Nous passons. Messieurs, à la 4* section. Section IV. Des ministres. Art. I**. « Ap roi seul appartient le choix et la révocation des ministres. » M. de Saint-Martin. Je demande si le comité a pris en considération une motion qui lui fut faite hier par M. Guillaume, d’ajouter à cet article l’article décrété le 6 avril 1701“, qui porte îjiiè le Corps législatif pourra déclarer au roi que ses ministres ont perdu la confiance de la nation. M. Thouret, rapporteur. Il nous a paru que c’était une disposition qui ne méritait pas d’être dans l’acte Constitutionnel; car, aux termes du décret, le roi peut garder les ministres malgré la déclaration du Corps législatif; or, nous ne croyons pas digne de la Constitution d’y mettre de ces sortes de dispositions qui n’aboutissent à aucune exécution. M, de Sainÿ-Martfn. Je retire mû motion. (L’ûfticle est mis aux voix et adopté.) Art. 2. « Aucun ordre du roi ne peut être exécuté s’il n’est signé par lui et contre-signe par le ministre ou l’ordonnateur. » (Adopté.) Art. 3. « Les ministres seront responsables de tous les délits commis contre la sûreté nationale et la Constitution ; « De tout attentat à la propriété et à la liberté individuelle; « De toute dissipation des deniers destinés aux dépenses des départements. » (Adopté.) Art. 4. « En aucun cas, l'ordre du roi, verbal ou par écrit, ne peut soustraire qn ipinistre à la responsabilité. » (Adopté.) M. Thouret, rapporteur. L’article 5 est ainsi conçu : « Les ministres sont tenus de présenter, chaque année, au Corps législatif, à l’ouverture de la session, l’aperçu des dépenses de leur département, de rendre compte de l’emploi des sommes qui y étaient destinées, et d’indiquer les abus qui auraient pu s’introduire dans les différentes parties du gouvernement. » Il y a lieu d’y faire une légère modification ; au lieu de : « l’aperçu des dépenses de leur département, » nous proposons de dire : « l’aperçu des dépenses à faire dans leur département. » (Assentiment.) En conséquence, voici la rédaction de l’article : Art. 5. h « Les ministres seront tenu? de présenter chaque année au Corps législatif, à l’ouverture de la session, l’aperçu des dépenses à faire dans leur département ; de rendre compte de l’emploi des sommes qui y étaient destinées, et d’indiquer les abus qui auraient pu s’introduire dans les différentes parties du gouvernement. » (Adopté.) Art. 6. « Aucun ministre en place ni hors de place, ne peut être poursuivi en matière criminelle pour fait de son administration, sans un décret dû Cjorps législatif. » (Adopté.) . M. Thouret, rapporteur. Nous passons, Messieurs, au chapitre III. Chapitre III. De l’exercice du pouvoir législatif. Section Ire. Pouvoirs et fonctions de l'Assemblée nationale législative. « Art. 1er. La Constitution délègue exclusivement au Corps législatif les pouvoirs et fonctions ci-après : “ 1° De proposer et décréter les lois : le roi peut seulement inviter le Corps législatif à prendre un objet en considération ; « 2° De fixer les dépenses publiques; « 3° D’établir les contributions publiques, d’en déterminer la nature, la quotité et le mode de perception; « 4° D’en faire la répartition entre les départements du royaume, d’en surveiller l’emploi et de s’en faire rendre compte ; « 5° De décréter la création ou la suppression des offices publics ; « 6° De déterminer le titre, l’empreinte et la dénomination des monnaies ; « 7° De permettre ou de défendre l’introduction des troupes étrangères sur le territoire français, et des forces navales étrangères dans les ports du royaume; « 8° De statuer annuellement, après la proposition du roi, sur le nombre d’hommes et de vaisseaux dont les armées de terre et de mer seront composées ; sur la solde et le nombre d’individus de chaque grade ; sur les règles d’admission et d’avancement, les formes de l'enrôlement et du dégagement, la formation des équipages de mer; sur l’admission des troupes ou des forces navales étrangères au service de France ; et sur je traitement des troupes en cas dé licenciement; « 9° De statuer sur l’administration, et d’ordonner l’aliénation des domaines nationaux ; « 10° De poursuivre devant la haute cour nationale la responsabilité des ministres et des agents principaux du pouvoir exécutif ; « D’accuser et de poursuivre, devant la même cour, ceux qui seront prévenus d’altentat et de complot contre la sûreté générale de l’Etat ou contre la Constitution; « 11° D’établir lès règles d’après lesquelles les marques d’honneur ou décorations purement personnelles seront accordées à ceux qui ont rendu des services à l’Etat; * 12° Le Corps législatif a seul le droit de décerner les honneurs posthumes à la mémoire des grands hommes. »