318 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 septembre i79l.] beau; et le ministre lui a fait, à cet égard, bien des instances. Certes, c’est avec bien de la justice que la confiance publique s’est ainsi reposé*' sur ce général, et jamais on n’a mieux travaillé que lui à la justifier. Mais c’esten combinant ses mesures sur la probabilité des événements et sur la possibilité de l’exécution, qu’il a toujours cru devoir y répondre ; et il m’a paru impossible de ne pas approuver les raisons qui l’ont jusqu’à présent déterminé à se refuser à une trop grande extension de son commandement, dans un temps où la surveillance doit être plus active que jamais, et se porter également sur tous les points; et à se borner, en conséquence, pour la partie qu’on voulait y ajouter, à une tournée d’inspection dans laquelle j’ai été forcé de l’accompagner, et quia terminé ma commission. Ici, Messieurs, que ne pourrait-on pas dire, si l’on ne re ne* tait l’amnistie que vous avez prononcée ! A l’arrivée des offi ii-rs qui commandent actuellement dans cette partie, ou y cherchait les traces d’une division militaire. Les fortifications des places n’avaient point été réparées, les ma-gasns étaient vides; tout était sans défense et sans moyens, et un camp avait été reconnu et tracé contre la France. Vos premiers commissaires envoyés dans le département des Ardennes, vous avaient donné sur tout cela des détails alarmants. Grâce aux efforts multipliés du patriotisme et à l’activité des travaux, les choses ont bien changé depuis 1e r rapport. Des parties de fortifications ont été réparées en maçonnerie ; di s fossés, des palissades couvrent des endroits moins défectueux, et tous les travaux nécessaires se continuent sans relâche. Des approvisionnements de tout genre se sont faits, les garnisons ont été renforcées; enfin, les gardes nationale.- volontaires se rassemblent là, comme ailleurs, et prennent les cantonnements qui leur sont indiqués. Il m’est impossible, Messieurs, de rien dire de positif sur la formation de ces bataillons de volontaires, qui n’était point achevée avant mon départ. Je crois seulement qu’elle n'a pas été partout assez bien préparée, et qu’il est essentiel de lui donner une attention particulière et beaucoup plus active qu’elle ne l’a été jusqu’à présent. Peut-être serait-il même pressant de faire intervenir un règlement sur plusieurs objets qui répandent quelque inquiétude dans ces nouveaux corps, et qui pourraient y produire de mauvais effets, lors-qu’aucune règle de discipline n’a pu encore s’y établir, d’autant plus que la malveillance ne néglige rien pour corrompre ou dégoûter les volontaires. L’armement, l’habillement et l’équipement ne sont point encore complets, et il en résulte un défaut d’égalité et d’uniformité qui ne peut être que nuisible. Des retenues doivent avoir lieu ; mais elles ne seront pas les menu s pour tous, et elles varieront, sans doute, suivant les fournitures plus ou moins considérables qui auront été faites à chaque homme : c’est une raison de plus de s’occuper incessamment d’en régler et la quotité et le mode. Des demandes d’ustensiles, d’ordinaires et oe chambrées ont déjà été faites dans les garnisons et les cantonnements. Ces demandes sont-elb s fondées, et par qui ces fournitures doivent-elles être faites, si elles sont dues ? Enfin on a proposé la question de savoir si les volontaires équipés par l’Etat n’ont pas contracté quelque engagement par la revue du commissaire, et à quelles conditions et dans quelle forme ils pourraient quitter le service auquel ils se sont soumis en se faisant employer sur ses contrôles ; et beaucoup d’autres questions semblables peuvent incessamment se présenter. Quant aux gardes nationales des villes, il en est plusieurs où l’on délirerait une. organisation plus parfaite, et où on l’attend, avec impatience, de la loi. Du reste j’ai applaudi, dans les principales places de la frontière, à la tenue, à l’instruction, au patriotisme de ces gardes nationales ; et j’ai déjà rendu à leur zèle le témoignage qu’il mérite dans une des lettres que j’ai eu l’honneur d’adresser à l’Assemblée nationale. Vous voulûtes, sans doute, leur donner une marque de votre approbation en faisant publier ce témoignage; et l’impression de ma lettre fut décrétée : mais cet encouragement n’a pu encore leur parvenir par les retardements qu’a éprouvés l’exécution de votre décret. A cet égard-là, Messieurs, je vous ob erve que le rapport qui vous fut fait par M. de Biron n’est pas encoie imprimé, ce qui peut avoir des suites très préjudiciabb s à la chose publique, surtout dans un moment où il faut travailler à raniim r la confiance et où les moyens les plus efficaces pour cela sont l’exposition de la vérité. Tel est en général, Messieurs, l’état des frontières que j’ai parcouiues depuis Dunketque jusqu’à Sedan. En suivant, chaque jour, les progrès ue nos préparatifs ue défense, nous nous sommes quelquefois demandé où étaient nos ennemis ; et nous n’avons jamais trouvé au dehors aucun sujet d’inqul tudes sérieuses. Des ttoupes >ont sur la froutière correspondante; mais elles y sont fixées par l’empire des circonstances, et elles suffisent à peine à leuis besoins et au service des garnisons. On ne remarque d’ailleurs, sur cette irontière, rien de ce qui est nécessaire pour une armée en campagne, et l’on n’y a vu jusqu’à présent aucune disposition hostile. Quelques essaims malfaisants bourdonnaient cependant autour de nous ; mais la ridicule exagération de leurs menaces ne faisait qu’attester leur impuissance. Aujourd’hui que l’acceptation et la promulgation de l’acte constitutionnel viennent d’étouffer tous les ressentiments, si la bienfaisance de la nation ne peut ramener ces fugitifs dans son sein, qu’elle adopte enfin l’attitude et le langage qui conviennent à un grand peuple qui a conquis sa liberté; qu’elle se replace au rang qu’elle doit occuper parmi les | uissances ; et bientôt tous ces attroupements seront dissipés. Ils avaient fondé leur coupable espoir contre leur patrie, sur nos troubles et nos divisions; et trop d’ennemis intérieurs travaillaient de toutes parts à les fomenter : mais je me suis convaincu qu’une surveillance ferme et active suffisait pour les contenir. Sans doute, nos successeurs vont s’occuper d’abord de donner aux autorités constitutionnelles toute l’énergie dont elles sont susceptibles. C’est par eux que la Constitution va s’affermir, que l’ordre public sera solidement rétabli, que tout fléchira devant la loi, que le recouvrement des impositions arriérées et des nouvelles contributions assurera la prospérité nationale. Ah 1 si une reconnaissance immortelle est due aux fondateurs de la Constitution, ceux qui la consolideront, qui en assureront ainsi les bienfaits, auront encore assez de gloire et de bénédictions à recueillir. ( Vifs applaudissements.) (L’Assemblée ordonne l’impression de ce rapport.) M. Dillon. Je demanderai si M. le ministre de [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [25 septembre 1191.] la guerre a pris que'que détermination relativement aux semestres. Je pense que, dans l’état actuel de l’armée, il serait hautement impolitique d’accorder des semestres cette année : dans presque tous les régiments, la plupart des officiers sont nouveaux ; il faut qu’ils apprennent leur métier; il faut en outre que la discipline se rétablisse, que les écoles diverses puissent reprendre leur cours et que l’on regagne le temps perdu. M. Duportail, ministre de la guerre. Jé m’em-presseoe répondre à la question qui m’est posée et d’informer l’Assemblée que j’ai pourvu à cet objet : j’ai en effet adressé, il y a environ 10 à 15 jours, une lettre circulaire à tous les régiments pour les prévenir qu’il n’v aurait pas de semestres cette année, du moins jusqu’à nouvel ordre. (Applaudissements.) M. de Uloailles. Je suis loin de m’opposer à la demande de M. Dillon et j’approuve les mesures prises par M. le ministre, elles me paraissent tout à la fois sages et utiles: un grand nombre d’of-liciers ont quitté leur régiment ; il a fallu les remplacer par de nouveaux ; dans quelques corps, il ne reste même plus un seul des officiers qui avaient eu pendant longtemps l’habitude de les commander ; il est donc nécessaire que les nouveaux officiers s’habituent à conduire leurs soldats pour qu’au printemps ils soient en mesure de manœuvrer à leur tête, de même qu’il est indispensable que les soldats s’accoutument à leurs nouveaux chefs. J’observerai toutefois qu’il est des corps qui sont et qui ont toujours été au complet et dont peu d’ofliciers ont quitté leurs postes. Je pense doue qu’il ne faudrait pas que l’Assemblée, par l’annonce qu’il n’y aura pas de semestres, entendît ôter au ministre de la guerre la faculté d’accorder dans ces corps quelques congés particuliers à des ofhciers que des raisons pressantes engageraient à les demander. Voix nombreuses : Gela regarde le ministre. t,Il n’est pas donné suite à la motion.) L’ordre du jour est un rapport des comités de mendicité, des finances, d’ agriculture et de commerce. et des domaines , sur la distribution des 5,760,000 livres restant des 15 millions décrétés en décembre 1790, pour ateliers de secours. M. de La Rochefoucauld-Liancourt, rapporteur. Messieurs, la Li du 19 décembre 1790 a accordé une somme de 15 millions pour l’établissement d’ateliers de secours dans les différents départements du royaume. La même loi a attribué sur ces fonds une première somme égale de 80,000 livres à chacun des départements. Cette distribution monte à 6,640,000 livres. Une seconde distribution, ordonnée par la loi du 16 juin de la présente année, a disposé de 2,600,000 livres. 11 reste encore à distribuer 5,760,000 livres. C’est cette somme que vos comités vous proposent de distribuer aujourd’hui en totalité. Mais, avant de vous présenter le projet de cet emploi, ils croient devoir rappeler les principales dispositions des lois rendues relativement aux fonds de secours, et vous rendre compte de l’exécution de ces mêmes lois. Une loi du 30 juin 1790, dont l’objet était de faire refluer dans les divers départements les mendiants qui infestaient la capitale, versa à cet effet à chacun d’eux une somme de 30,000 livres, destinée à des travaux utiles. Une seconde loi du 19 décembre, rendue sur la connaissance des grands besoins que faisait naître dans les départements la suspension du commerce et de l’industrie, accorda 15 millions pour être employés dans les départements en travaux utiles; 80,000 livres furent données à chacun d’eux. Les 8,360.000 livres restant devaient être distribuées selon la connaissance que donneraient les départements, et de l’emploi des premiers fonds, et des travaux à ouvrir ou à continuer dans leurs territoires. Les directoires devaient envoyer au ministre : 1° Les délibérations motivées en vertu desquelles auraient été entrepris les travaux faits sur les fonds de secours déjà payés ; 2° Le relevé, mois par mois, des dépenses faites sur les fonds de secours, ainsi que des travaux exécutés. Le ministre devait, en conséquence, présenter, le mois d’avril suivant, à l’Assemblée, le compte général de la dépense et des travaux faits sur ces fonds jusqu’à cette époque dans les départe-tements, et il était annoncé que ce compte serait imprimé et rendu public, et ainsi de suite de 3 mois en 3 mois, pendant la législature actuelle et la suivante, jusqu’au compte final de l’emploi des 15 millions. Une instruction, en date du 3 janvier, envoyée par le ministre, au nom du roi, à tous les départements, développa les principes de la loi, et leur fit connaître avec plus de détail la marche qu’ils avaient à suivre, et les obligations auxquelles ils étaient assujettis ; elle leur indiqua particulièrement le genre de travaux auxquels ces fonds pouvaient être employés; les défrichements de certains terrains, les dessèchements, les canaux , le repeuplement des forêts domaniales , les chemins vicinaux et autres ouvrages de ce genre. Au commencement du mois de mars, quelques directoires seulement avaient adressé des délibérations, avec des états indicatifs des ateliers qu’ils avaient établis; une grande partie s’était bornée à accuser la réception de l’instruction ; le reste avait gardé le silence. Une lettre du ministre, en date du 12 mars, tenta de ranimer cette lenteur presque générale, et rappela, de nouveau, aux directoires qui étaient en retard, les dispositions de la loi du 19 décembre, auxquelles elle les pressa de se conformer. Cette lettre ne produisit qu’une partie de l’effet u’on avait droit d’en attendre, et la plupart des épartements sont loin encore, ainsi qu’il est facile de le voir par le tableau que nous avons mis sur le bureau, de s’être conformés aux lois des 13 juin et 11 décembre 1790 et aux instructions envoyées en conséquence au nom du roi. De nouvelles lettres n’eussent pas procuré beaucoup plus de réponses; d’après cette opinion, les comités réunis de mendicité, des finances, d’agri-cv,fure et de commerce, et des domaines, ecea-gèœ. . le ministre à s’occuper sur les renseignements qu’il avait, de la distribution des fonds restants, et ils virent dans le décret à rendre pour celte nouvelle distribution, le seul moyen d’obtenir un compte exact de l’emploi de tous les pre-