137 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. *[ brumaire an il Les cloches, le fer, le cuivre et le plomb ont été offerts à la patrie. Deux bataillons, composés de la plus belle jeu¬ nesse, ont été organisés, habillés, équipés ‘ et armés; ils ont juré d’exterminer les tyrans ;îils tiendront parole. Les meubles des émigrés sont vendus : la pre¬ mière adjudication des immeubles s’est faite aux cris redoublés de : Vive la République! Sarrazin Maraize a payé l’honneur d’acheter la première dépouille d’un émigré; le prix de l’estimatif était de 182,000 livres, celui de la vente s’est élevé à 300,500 livres. « Nous ne vous invitons pas, ajoutent les admi¬ nistrateurs, à rester à votre poste; vous n’êtes pas capables de l’abandonner avant que les tyrans coalisés vous aient demandé la paix. » Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre des administrateurs du district de Melun (2). lies administrateurs du district de Melun, aux représentants du peuple. « Melun, le 19e jour de brumaire, l’an II de la [République, une et indivisible. « Citoyens, « Nous ne vous interrompons point par nos adresses; nous agissons. « Notre état de recensement est présenté au département, et le ministre de l’intérieur le recevra au premier jour. Pache, et le comité des subsistances ont constamment applaudi aux mesures que nous avons prises pour approvi¬ sionner Paris. « Le district de Melun a fait déposer à la monnaie 1,687 marcs en or, vermeil et argen¬ terie des églises et des émigrés. Le dernier envoi est en route, il est de 1,024 marcs. « Les cloches, le cuivre, le fer, le plomb ont été offerts à la patrie plutôt que requis au nom de la loi. « Deux bataillons, composés de la plus belle jeunesse, ont été organisés, habillés, équipés, armés; ils ont juré d’exterminer les tyrans : ils tiendront parole. « Les meubles des émigrés sont vendus. Deux fermes le sont également. La première ad¬ judication s’est faite aux cris redoublés de Vive la République! A l’extinction dû dernier feu, les spectateurs ont entonné ce couplet qui convenait si bien à la circonstance : Trembles tyrans et vous perfides, etc. « Jamais adjudication n’a été plus chaude; Sarrasin Maraize, premier adjudicataire, a payé l’honneur d’acheter la première dépouille d’un émigré. Le prix de l’estimation était de 182,000 livres, celui de la vente s’est élevé à 300,500 livres. « Nous ne vous invitons pas à rester à votre (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 195. (2) Archives nationales, carton G 279, dossier 753; Bulletin de la Convention du 3e jour de la 3e décade du 2* mois de l’an II (mercredi 13 novembre 1793). poste, vous n’êtes pas capables de l’abandonner avant que les tyrans vous aient demandé la paix. « Vive la République ! » (Suivent 9 signatures.) Le citoyen Sonnet, curé de Monfaucon, dis¬ trict de Chollet, prononce à la barre un discours brûlant de patriotisme, qu’il termine par le dépôt de ses patentes sacerdotales. ' La Convention écoute avec intérêt le récit des angoisses de ce bon citoyen sous les poignards des brigands, et des mouvements inutiles qu’il se donna pour étouffer leur rébellion dès sa nais¬ sance : elle décrète la mention honorable de sa profession de foi civique et l’insertion au « Bul¬ letin » (1). Suit le discours prononcé à la barre par le citoyen Sonnet (2) : Citoyens législateurs, C’est avec la franchise d’un vrai républicain, c’est avec cette sécurité d’âme qui m’a toujours guidé dans toutes mes actions que je me pré¬ sente devant vous, je viens aujourd’hui obéir à la voix de ma conscience. Je suis prêtre, curé de la ville de Montfaucon, district de Cholet, département de Maine-et-Loire; je puis, citoyens représentants du peuple, vanter en ce moment sans orgueil mon zèle et mon ardent patriotisme; j’étais dans le foyer de la contre-révolution, pas un seul instant, jour et nuit, où ma vie ne fût en péril ; entouré de plus de dix mille fanatiques, je devais mille fois périr. Je criais de toutes mes forces aux autorités que tout était perdu, que la rage des fanatiques était à son comble, que ces malheu¬ reuses contrées allaient devenir le théâtre du sang et du carnage, on se moquait de moi, on me-répondait que j’avais l’imagination exaltée, et, tout à coup, l’abîme s’est ouvert. Dans ces pays affreux les prêtres constitutionnels ont été, les uns égorgés, les autres mutilés, d’autres enfin n’ont trouvé leur salut que dans la fuite. Yoilà, citoyens législateurs, la mission de ces hommes -prêtres qui ont toujours prêché la sou¬ mission à vos lois et qui se sont portés avec courage dans ces contrées épouvantables, voilà la mienne. Que les ennemis de la chose publique, que les aristocrates, que les fanatiques ne triomphent point de notre retraite, nous ne les avons encore battus que par paroles, mais s’il le faut, je suis prêt à verser tout mon sang pour écraser les ennemis du peuple. Yoici ma profession de foi : Je déclare solennellement que j’adore la liberté, l’égahté, je crois que la religion d’un homme honnête, d’un bon républicain, repose essentiellement dans le culte de la vertu, dans la soumission aux lois de son gouvernement, dans l’amour de ses semblables; je crois que la véritable sagesse se trouve dans la pratique de la morale sacrée de la déclaration des droits de l’homme : ne fais pas à autrui ce que tu ne (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 196. (2) Archives nationales, carton G 280, dossier 770.