[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 décembre 1789.] 07 la tante auguste d’un monarque citoyen vient de passer les plus heureuses années de sa vie, éprouvât le malheur d’une destruction ? Les richesses des carmélites n’ont jamais tenté la cupidité ; leurs besoins n’importunent pas la bienfaisance : notre fortune est cette pauvreté évangélique qui, en acquittant toutes les charges de la société, trouve encore moyen d’aider les malheureux, de secourir la patrie, et nous rend partout heureuses de nos privations. La liberté la plus entière préside à nos vœux, l’égalité la plus parfaite règne dans nos maison : nous ne connaissons ici ni riches ni nobles , et nous n’y dépendons que de la loi. Gomment un état qui offre sans cesse des secours au besoin, des asiles à la vertu, des soutiens à la faiblesse, serait-il réprouvé par une Assemblée qui a pris sous sa protection l’homme vertueux, les mœurs publiques et le citoyen indigent? Daignez vous informer, Nosseigneurs, de la vie qu’on mène dans toutes les communautés de notre ordre; n’en croyez ni les préventions de la multitude ni les craintes de l’humanité. On aime à publier dans le monde que les monastères n’enferment que des victimes lentement consumées par les regrets; mais nous protestons devant Dieu, que s’il est sur la terre une véritable félicité, nous en jouissons à l’ombre du sanctuaire; et que s’il fallait encore opter entre le siècle et le cloître, il n’est aucune de nous qui ne ratifiât avec plus de joie encore son premier choix. Vous n’avez point oublié, Nosseigneurs, que les contrées du Canada ayant passé de la domination française à celle d’une puissance qui professe une religion différente de la nôtre, leurs nouveaux souverains non-seulement ont respecté, mais protégé tous les ordres qu’ils y ont trouvés établis. Pourrions-nous ne pas attendre de la justice d’une Assemblée protectrice, ce que nos frères et nos sœurs obtinrent de la générosité d’un peuple victorieux! Tandis que vous travaillez avec tant de zèle au bonheur public, voudriez-vous répandre parmi nous une consternation générale ? et après avoir solennellement déclaré que l’homme est libre, nous obligerez-vous à penser que nous ne le sommes plus? Non, vous ne nous arracherez pas de force à ces retraites où nous trouvons la source de toutes les consolations; vous les rouvrirez, et à la piété, qui y apporte une vocation éprouvée, et à l’infortune à qui elles offrent un asile décent : vous vous souviendrez de ces respectables étrangères qui, avec autant de confiance que de consolation, sont venues y chercher un port assuré chez une nation hospitalière, et vous penserez que des citoyennes qui, sous la protection des lois, se sont volontairement engagées dans un état qui fait le bonheur de leur vie, réclament de tous les droits, le plus inviolable, quand elles vous conjurent de les y laisser mourir en paix. C’est au nom de toutes nos sœurs, dont les monastères sont répandus dans les différentes contrées du royaume, que nous avons, Nosseigneurs, l’honneur de mettre à vos pieds cette adresse. Chacune a signé, et aurait voulu le faire de son sang, qu’elle préférerait mille morts à un changement d’état qui ferait son martyre. Les témoignages de leur fidélité sont entre les mains d’uq membre de votre auguste Assemblée, qui vous les produira, lorsque vous l’ordonnerez (1). Nous osons le dire avec elles, et dans le plus grand concert; nous regarderions comme l’oppression la plus injuste et la plus cruelle celle qui troublerait des asiles que nous avons toujours regardés comme sûrs et inviolables. Nous sommes avec un profond respect, Nosseigneurs, Vos très-humbles et très-obéissantes servantes: - Sœur Nathalie de Jésus, prieure des carmélites, rue de Grenelle; Sœur Marie Louise de Gonzague, prieure des carmélites de la rue Saint-Jacques; sœur Dorothée de Jésus, prieure des carmélites de Saint-Denis en France; sœur Thérèse du Saint-Esprit, prieure des carmélites delà rue Chapon. M. le Président fait l’annonce de diverses lettres. M. l’abbé Lebrun , député du bailliage de Rouen, demande la permission de s’absenter jusqu’à ce que sa santé soit rétablie. Cette demande est accordée. M. le marquis Duparc de Badens, député de Carcassonne, demande que l’Assemblée veuille bien accepter sa démission, en cas que sa santé ne se rétablisse pas, et admettre M. le comte de Rochegude, son suppléant. M. de Bouville, député du bailliage de Gaux, demande un congé de quelques jours pour affaires pressantes. Le congé est accordé. Le bourg royal de Fontainebleau, envoie une adresse de dévouement qui est présentée par M. Giot, procureur syndic municipal, spécialement député à cet effet. Cette adresse est' ainsi conçue (2) : Nosseigneurs, si après vous avoir présenté une adresse de la plus entière et la plus respectueuse adhésion à tous vos décrets, les habitants de Fontainebleau font encore retentir leur voix auprès de vous; ce n’est pas que leur dévouement pour le bien de la cause commune, et leur soumission à l’exécution de vos lois, ait souffert dans leur cœur la plus légère altération; non, sans doute, et ils se feront toujours un glorieux devoir de souscrire à ce que vous aurez réglé dans votre sagesse, pour la restauration de l’Etat que vous représentez si dignement. Mais, Nosseigneurs, c’est par une suite de leur extrême confiance dans la justice qui ne cesse de vous diriger, qu’ils osent prendre la respectueuse liberté d’intéresser votre impartiale équité en faveur de leur cause qu’ils ne craignent pas de dire particulière à celle de toutes les communes du royaume. Par le mémoire qu’elle a eu l’honneur de vous présenter le 24 de ce mois, la commune de Fontainebleau vous a offert un aperçu des obstacles multipliés qui s’opposent impérieusement aux efforts du zèle dont elle brûle pour coopérer à la libération des dettes de l’Etat; elle n’a emprunté que le langage de la vérité, en vous disant que, loin de lui être avantageuse, sa situation locale lui était notoirement préju-(1) Ce députa est M. l’éyèque de Clermont, (2) Ce document n’a pas été inséré au Monitew,