[Conveulian nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { J dè�mbre «93 123 la guerre, par différents particuliers de leur dis¬ trict; et celle de l’argenterie d’église, qu’ils ont envoyée à la Monnaie de la Rochelle. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1), La Société républicaine de Rochefort adresse à la Convention nationale les détails d’une fête civique qui a été célébrée le 30 brumaire, sous les yeux des représentants du peuple Laignelot et Lequinio, par la Société des Amis de la Cons¬ titution, les autorités constituées et les citoyens de cette commune; où les attributs du despo¬ tisme, de la féodalité et de la superstition ont été détruits, au milieu des épanchements de la fra¬ ternité, des élans du patriotisme, et des cris ré¬ pétés de : Vive la philosophie , la Convention, la Montagne ! Mention honorable, insertion au «Bulletin » (2). Suivent, les détails relatifs à la fHe civique célébrée à Rochefort le 30 brumaire (3). La Société républicaine de Rochefort, à la Convention nationale. « Rochefort, 1er frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « Citoyens représentants, « Chaque jour la commune de Rochefort et celles des environs donnent des preuves de leur amour pour la philosophie et la raison. Hier, jour de décade, a encore été un de ceux qui doivent compter parmi les beaux jours qui illus¬ treront à jamais cette commune. A midi, les autorités constituées, la Société des Amis de la Constitution se sont rendues à la municipalité; là, s’est formé l’ordre de la marche. La musique de la marine en tête, jouant les airs chéris, la Société populaire, les membres du district, la municipalité, les membres du comité de sur¬ veillance et ceux du tribunal criminel révolu¬ tionnaire, précédés des officiers civils de la marine, sont allés chercher les représentants du peuple Laignelot et Lequinio. Le cortège impo¬ sant, mais né ressemblant aucunement à ceux des fêtes de l’ancien régime où le peuplé qui les payait /chèrement y était totalement étranger. Cette fête était à lui et par lui, puisqu’elle avait pour objet de porter le dernier coup à l’aristo¬ cratie et au fanatisme. Aussi, a-t-elle eu le suc¬ cès le plus grand. Le ciel, d’accord avec nos vœux, était pur. Nous sommes arrivés sur la place de la Liberté aux cris répétés de : Vive la République ! Vive la montague ! Vive la philo¬ sophie! Un bûcher, au milieu duquel s’élevait un grand madrier, garni de livres mensongers, de portraits de rois et de princes, de titres féo¬ daux, d’images de la Vierge, de chapelets, de crucifix et de toutes les folies imaginables qu’on ne pourrait pas croire si elles n’avaient été sous nos yeux, ont été lacérés et réduits en cendres ainsi qu’un drapeau, découvert on ne (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, d. 27’ (2) Ibid. (3) Archives nationales, carton C 289, dossier 888. sait comment. Mais le plus étonnant, c’est une bulle d’un pape (couronnant ce dernier monu¬ ment du fanatisme) qui avait accordé à un individu le droit d’entrer dans le ciel et de con¬ férer ce droit à 20 personnes à son choix, pourvu qu’à l’article de la mort ils fissent, ainsi que lui, un acte de contrition. Le maire, à un signal donné par Lequinio, mit le feu à ce sacré bû¬ cher; des milliers de livres furent la proie des flammes et, pour la première fois, l’Etre su¬ prême reçut enfin un holocauste digne de lui. Tous les citoyens s’empressèrent de nourrir ce feu devenu sacré par l’importance de son.objet, puisqu’enfin il purifiait une commune d’un grand fléau : le fanatisme. « Lequinio proclama, sur la place de la Liberté, les nouveaux membres de la municipalité, ainsi que les notables; le peuple témoigna par ses acclamations combien il approuvait ce choix ; sa confiance et son amour pour Lequinio et Laignelot ne peuvent plus augmenter, car ils sont dès preuves parlantes qu’il est vraisem¬ blablement un terme à l’amour et à la recon¬ naissance. Un acte philosophique, qui ne pouvait appar¬ tenir qu’à la Révolution, a prouvé jusqu’où peut aller l’esprit humain lorsqu’il suit la ligne droite de la raison. Le citoyen Anse, ministre de l’exé¬ cution des lois, a demandé de changer son nom en celui de vengeur du peuple; Laignelot lui dit qu’il l’ autorisait à porter ee nom comme ayant été le premier à vaincre un préjugé hon¬ teux. Alors il lui donna le baiser fraternel, les membres des autorités constituées imitèrent cet exemple, et Anse porte aujourd’hui le nom res¬ pectable de Vengeur du peuple. Tous les soldats tous les citoyens et citoyennes s’empressèrent de lui donner le baiser de la fraternité. « On se transporta ensuite au temple de la Vérité. Citoyens .représentants, quelle gloire pour la commune de Rochefort ! Ce temple ne présente plus aucun vestige de la superstition; partout des principes du plus pur républica¬ nisme ont succédé à des ex-voto, à des portraits de fripons ou d’imbéciles béatifiés; toutes les dégoûtantes farces, toutes les jongleries des ministres imposteurs du ci-devant culte catho¬ lique, tous ces objets sont à plus de mille anS de l’ esprit des Rochefortais. Nous sommes tous,- citoyens représentants, dignes de votre estime et de votre confiance, nos missionnaires choisis par vos collègues opèrent de grands change¬ ments et la Charente-Inférieure est bientôt digne d’être regardée comme le premier département de la République où le grands principes sont, non seulement connus, mais même pratiqués par tous les habitants. « Un jeune citoyen fit un discours qui confirma le peuple que jusqu’à notre sublime Révolution il avait toujours été dans l’erreur, et le peuple aujourd’hui est si fort à la hauteur des circons¬ tances qu’il paraît même n’avoir pas besoin d’être prêché; c’est le plus sublime éloge qu’on puisse faire de ses lumières. « Une scène intéressante attendait tout le cortège et tous les habitants dans le jardin public. Un banquet civique, mais sans somp¬ tuosité, rappelait ces plaisirs purs dont jouirent sans doute les premiers hommes dans l’âge d’or; des tables où ceux qui n’avaient, rien apporté buvaient, mangeaient comme ceux qui en avaient fait les frais; la fraternité, l’amitié, la concorde, la décence régnèrent dans cette première' fête réellement civique; les danses, les 124 chants, les ris prouvèrent aux représentants Laignelot et Lequinio que le peuple est bien digne de leur amour; aussi les Rochefortais ne sont point ingrats de celui qu’ils lui témoignent. Partout ces vrais amis, ces philosophes chéris, allaient, venaient et ils eurent l’inestimable avantage de jouir à l’avance du bonheur réservé aux pères de la patrie. Lorsqu’un jour ils ren¬ te treront chez eux, ils se diront : « 27 millions « d’hommes libres sont heureux, et nous avons « coopéré à ce grand œuvre régénérateur, non « seulement de la France, mais qui doit un jour « faire le bonheur de l’humanité entière. » « Le soir, après la séance du club, il y a eu un bal où tous les citoyens ont eneore renouvelé d’une manière franche, loyale et républicaine tous les sentiments d’amour et de fraternité dont ils sont pénétrés, la joie vive brillait sur toutes les physionomies et l’amour de la République était dans tous les cœurs. « Citoyens représentants, aucun sentiment d’amour-propre n’excite les Rochefortais en vous faisant passer le récit de cet événement, sans être insouciants à recevoir votre approba¬ tion, nous avons montré dans toutes nos actions, quoique nous ayons les premiers entre¬ pris et réussi à détruire le fanatisme, un carac¬ tère de simplicité bien digne de vous prouver que nous n’agissions pas pour prétendre à la plus grande célébrité, mais pour remplir nos devoirs et acquitter nos serments. Cependant des communes qui ont imité notre exemple paraissent aujourd’hui vouloir s’en prévaloir. Nous revendiquons, avec cette même simplicité, mais pour la fidélité de l’histoire, la gloire d’avoir les premiers culbuté, renversé, détruit et anéanti chez nous le fanatisme, avec le même courage que nous apporterons pour porter le fer et le feu chez nos barbares voisins lorsque vous aurez fait droit à notre pétition tendant à ce but. « V ielh, vice-président; B. Grabeuil, se¬ crétaire; Gandriau, secrétaire; Glissié, secrétaire. » Le conseil général de la commune d’Hargi¬ court, département de l’Aisne, envoie les procès-verbaux qui constatent la régénération de cette commune, où tous les objets de superstition ont disparu pour faire place aux attributs de l’éga¬ lité et de la liberté. Il invite la Convention à res¬ ter à son poste jusqu’à ce que la République n’ait plus d’ennemis à exterminer. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du conseil général de la commune d’Hargicourt (2). Le conseil général permanent de la commune d’Hargicourt, canton du Gatelet, district de Saint-Quentin, département de l’Aisne, à la Convention nationale. « Citoyens représentants du peuple, « Le conseil de la commune d’Hargicourt, vient de recevoir un nouvel hommage rendu à la raison et à la philosophie. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 27. (2) Archives nationales, carton C 287, dossier 864. 2 nivôse an K £2 décembre 1793 « Le citoyen Jean-Pierre Duflot, ci-devant curé de cette commune, lui a remis ses lettres de prêtrise et a abdiqué ses fonctions curiales entre ses mains. 11 ne veut plus faire croire à ses concitoyens, ce que peut-être il ne croyait pas lui-même, mais il avait reçu le métier de prêtre, il fallait bien en remplir les fonctions, selon le secret de l’Église; oui, il a fait comme beaucoup d’autres, prêché le fanatisme et pro¬ pagé l’ignorance, selon les principes du métier. « Contre l’attente des prêtrtes, le divin flam¬ beau de la raison est venu éclairer de ses rayons les habitants patriotes des campagnes, notre citoyen Duflot, voyant que son métier n’était plus bon à rien, a pris la résolution d’y renoncer afin d’ôter des épaules de ses concitoyens le pesant fardeau dont il les avait accablés. « En conséquence, législateurs philosophes, le conseil vous envoie ses lettres autrefois préten¬ dues sacrées. « Daignez, Montagne infatigable, en faire un saint autodafé, ce sacrifice sera agréable à la Divinité et un nouveau gage que la paix régnera toujours dans cette commune, puisque la dis¬ corde n’aura plus d’aliment et tous les individus dont elle est composée vivront en frères et amis dans le temple de la raison et de la vérité. « Le conseil te crie de toutes ses forces : ■ Reste à ton poste jusqu’à ce que le dernier ennemi de la République française, une et indi visible, soit exterminé, voilà un des vœux les plus ardents du conseil; il déclare en outre, qu’il adhère aux mesures de salut public que tu as prises : Ah ! les prêtres sont passés, les autres ennemis de la République passeront de même, et la souverameté du peuple ne passera jamais. « Hargicourt, le 9 frimaire, 2e année républi¬ caine. » , (Suivent 8 signatures.) Le conseil général permanent de la commune d’Hargicourt, canton du Gatelet, district de Saint-Quentin, département de l’Aisne, à la Convention nationale. « Citoyens représentants du peuple, « Le conseil général permanent vous annonce avec plaisir qu’il a, au nom de la loi et de la raison, fait disparaître de la ci-devant maison du culte catholique tous les objets de la supersti¬ tion et du fanatisme, les fétiches en argenterie sont sur la route de la Monnaie de Paris, les autres hochets en cuivre, toutes les cloches et croix, sont sur celle de la fonderie pour être convertis en tonnerres de guerre pour pulvériser les satellites des despotes; plus d’autel, tout est renversé, désormais, les hommes ne se pros¬ terneront plus devant l’ouvrage de leurs mains; le conseil peut vous assurer, sages législateurs, que cette maison du culte est absolument net¬ toyée de tous les objets qui, trop longtemps, ont fait notre honte, vous trouverez ci -joint les procès-verbaux qui constatent cette bonne œuvre. « Les protestants, jalousant les catholiques sur le renversement de tout ce qui avait trait à la superstition, ont vu avec plaisir abattre les anges servant de girouettes au-dessus de leur temple; n’ayant point de fétiches dans ce local, ils ont donné les hochets de leur culte, ils con¬ sistent en deux coupes en étain. Eh bien, elles seront converties en balles pour détruire les [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES.