SÉANCE DU 26 FRUCTIDOR AN II (12 SEPTEMBRE 1794) -N" 38 113 Aussitôt qu’elle sera terminée, les défenseurs de la patrie, blessés, porteront à chacune des armées le drapeau qui leur aura été confié. Le rapport du comité d’instruction publique et le procès-verbal de cette journée seront imprimés et envoyés à tous les dé-partemens et à toutes les armées. Le comité d’instruction publique est chargé d’ordonner les détails de la fête, et d’en surveiller l’exécution (62). [Rapport fait au nom du comité d’instruction publique, sur la fête de la cinquième sans-culottide par Léonard Bourdon ] (63) Citoyens, Par votre décret du 19 fructidor, vous avez ordonné que le dernier jour de l’année républicaine, cinquième sans-culottide, seroit consacré à une fête nationale dans laquelle les citoyens de chaque commmune se réuniront pour resserrer entre eux les liens de la fraternité et célébrer les victoires de la République. Votre comité d’instruction publique, chargé de vous présenter le plan de cette fête, a cru devoir vous proposer en même temps l’exécution du décret du 24 brumaire, qui accorde les honneurs du Panthéon à Marat, et qui déroge en sa faveur à la loi qui détermine l’époque avant laquelle ces honneurs ne peuvent être décernés; il a pensé que le jour consacré à célébrer les victoires nationales et à resserrer les liens de la fraternité parmi les citoyens, seroit le jour où les mânes de l’Ami du peuple entreraient avec plus de satisfaction dans le temple que vous avez consacré à l’immortalité. Console-toi de ce retard, peuple ami de Marat; le temps qui s’est écoulé depuis le décret, n’a servi qu’à justifier la sagesse qui l’avoit dicté; la mémoire du martyr de la liberté, qui pendant sa vie politique a été en but à tant de haines, à tant de persécutions, qui a essuyé de si violens orages, est restée aussi pure qu’elle l’étoit le jour où une main exécrable le ravit à l’amour des Français. Les complots de ceux qui ne l’aimoient pas, de ceux qui, envieux de sa gloire, sans imiter ses vertus, vou-loient arriver à son immortalité sur les débris de la liberté renversée, ont été découverts : ces ennemis du peuple sont aussi descendus dans la tombe : mais au lieu de recueillir des regrets, leur mémoire est suivie de l’exécration publique. En honorant les mânes de son fidèle ami, le peuple se rappellera les nombreuses victoires que l’énergie de ce grand homme, son amour constant pour les principes sur lesquels (62) P.-V., XLV, 222-223. C 318, pl. 1285, p. 36. Décret n° 10 853 de la main de Léonard Bourdon. Moniteur, XXI, 744; Débats, n° 722, 438-439; J. Mont., n°136 et n° 139; Mess. Soir,. n° 755; M. U., XLIII, 429; Gazette Fr., n° 986; C. Eg., n° 755; Rép., n° 267; Ann. Patr., n° 620; J. Univ., n° 1755; F. de la Républ., n°433; Ann. R. F., n° 284; J. Paris, n° 621. (63) Débats, n° 729, 554-556; J. Mont., n°145; M. U., XLIII, 550-551; J. Perlet, n°720. Orateur P., n° 2. repose la félicité publique, sa haine contre les intrigans et les fripons, le courage avec lequel il a dénoncé et poursuivi tous les aristocrates et les faux patriotes plus dangereux encore, lui ont fait remporter dans l’intérieur; au sentiment de reconoissance qu’il éprouvera pour celui qui a si bien mérité de la patrie, se joindront naturellement ceux qu’il doit ressentir en faveur de nos braves défenseurs, qui déploient la même vigueur contre les ennemis extérieurs de la République : leur énergie a fixé la victoire; nos places, vendues par la trahison, ont été reprises par leur intrépidité; le sol français est libre, et les esclaves des tyrans sont chassés devant eux comme de vils troupeaux. Ainsi seront en même temps célébrées les victoires nationales sur les ennemis du dedans et sur les ennemis du dehors. Fuyez loin de la pompe triomphale qui s’apprête, vous qui cherchez dans la liberté, autre chose que la liberté même; vous qui, pour satisfaire des haines ou des passions particulières, exposez sans cesse les grands intérêts de la patrie, en semant le trouble et la discorde parmi ses plus zélés défenseurs : cette fête est encore la fête de la fraternité. Jetez les yeux sur toute la vie de Marat, vous verrez que, supérieur à l’égoïsme, à l’ambition, aux vils calculs de l’intérêt personnel, il fut l’ami de quiconque servit fidèlement la patrie, et n’eut pour ennemis que ceux qu’il crut ennemis de la liberté. Jetez les yeux sur les généreux soldats de la République; ont-ils jamais tourné leurs armes les mis contre les autres ? Non : fermes à leurs postes, serrant leurs rangs, leurs coups ne se sont jamais dirigés que contre les Autrichiens, les Anglais, et les autres satellites des despotes. Votre comité n’a point perdu de vue que le même décret qui accorde les honneurs immortels à celui qui a servi constamment les intérêts du peuple, à celui qui après avoir vécu dans une honorable médiocrité, est mort dans l’indigence, a prononcé l’exclusion du Panthéon d’un homme qui avoit fait un trafic infâme des grands talens qu’il avoit reçus de la nature, qui avoit flétri, par son immoralité et ses relations honteuses avec une cour perverse, quelques travaux civiques qui avoient illustré les premiers pas de sa carrière politique; les cendres de Mirabeau sortiront du temple de mémoire dans le même instant où celles de Marat y seront reçues. Puisse cet exemple terrible de la justice nationale inspirer une crainte salutaire aux ambitieux, à ces hommes vils, toujours prêts à mettre leur consciense à prix ! puisse-t-il faire sentir aux fonctionnaires publics la nécessité de s’unir étroitement au peuple, et de lui consacrer tous les instans de leur vie ! Cette fête sera simple : la réunion d’un peuple immense la rendra majestueuse : c’est la fête de la fraternité; les citoyens y assisteront sans armes. C’est la fête des victoires de la République; et des drapeaux, témoignages de la reconnois-sance nationale, flotteront dans les airs, entre les mains victorieuses des défenseurs de la pa- 114 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE trie qui ont reçu des blessures honorables. Ces drapeaux portés ensuite au milieu de chacune d’elles, y seront le palladium de la liberté, et serviront de ralliement aux républicains, parmi lesquels ils fixeront à jamais la victoire. C’est la fête de l’Ami du peuple; et les arts nécessaires, qui nourrissent, vêtissent et abritent le peuple, orneront son triomphe. 39 La Convention nationale, sur le rapport de son comité des Décrets, Procès-verbaux et Archives, décrète que la commission de l’envoi des lois fera parvenir de suite à l’administration du district de Segré, département de Maine-et-Loire, la collection complette des lois et décrets rendus par les trois Assemblées nationales (64). 40 Une députation de la société populaire de Béthune [département du Pas-de-Calais] est admise à la barre; elle adresse à la Convention les plaintes les plus vives contre l’audace du modérantisme et de l’aristocratie, qui étouffe la voix des patriotes, corrompt l’esprit public, profane le temple de la liberté par des cris séditieux, arrache l’inscription sainte de Vive la République ou la mort , placée aux portes des amis de la révolution, pour y substituer les empreintes du fanatisme et ces paroles menaçantes : Prends garde à toi , ton règne est passé. Cette société invoque, dans les termes les plus pressans, la justice nationale. Mention honorable, renvoyé aux comités de Sûreté générale, de Salut public et de Législation (65). 41 Le citoyen Alexis Curin, caporal-fourrier au troisième bataillon des Vosges, dont le bras droit a été emporté au siège de Mayence, est admis à la barre, et réclame les secours accordés par la loi aux défenseurs de la patrie que leurs blessures mettent hors d’état de continuer leurs services. (64) P.-V, XLV, 223. C 318, pl. 1285, p. 37. Minute de la main de Monnel. Décret n° 10 854. Rapporteur anonyme selon C* II 20, p. 294. (65) P.-V, XLV, 223-224. M. U., XLIII, 428; J. Paris, n° 621; J. Perlet, n°720. Selon ce dernier la Mention honorable est demandée par Duquesnoy. Renvoyé au comité des Secours publics, pour en faire un prompt rapport (66). 42 La société des défenseurs des droits de l’homme, séante à Angers, [département du Maine-et-Loire] présente deux cavaliers montés, armées et équipés à ses frais, pour combattre les esclaves des tyrans coalisés. Mention honorable, insertion au bulletin (67). [La société des Défenseurs des Droits de l’Homme à la Convention nationale, le 10 fructidor an H] (68) Représentants du peuple françois, En sentinelle permanente pour remplir les glorieux devoirs, attachés au titre que nous portons nous ne croirons jamais avoir assez fait tant que le dernier des ennemis de la liberté et de l’égalité n’aura tombé sous le fer des hommes libres. Les factions sont déjouées; vous avez terrassé les triumvirs, vous êtes à la poursuite de leurs complices et bientôt vous les aurez fait disparoître du sol de la liberté qui s’indigne de leur existence scélérate. De toute part le drapeau tricolore flotte avec triomphe. Sur tous les pointes les hordes an-gloises, prussiennes, piémontaises, autrichiennes et espagnoles, périssent ou sont en déroute. Représentants du peuple françois pour aider à les atteindre jusques dans leurs repaires et à les y exterminer, nous vous présentons en notre nom, en celui de la commune d’Angers, encore en celui des sociétés populaires de Beausite, ci-devant Saint-Georges-sur-Loire et de Bouchemaine, qui y ont contribué deux nouveaux cavaliers tout montés, armés et équippés. Les sentiments qui les animent sont les nôtres, ils nous ont promis (et vous savez ce que vaut la promesse des républicains) ils nous ont promis en s’éloignant de notre sein de ne jamais les démentir. Us portent le plus brûlant amour de la patrie dans leur cœur : ils sont impatients d’être en présence de la tyrannie et de ses vils esclaves pour leur prouver qu’ils ont la détermination bien prononcée de sceller, s’il le faut de leur sang, vos immortels travaux, la liberté... Hatêz vous donc Représentai du peuple françois; secondant leur ardeur bouillante de les incorporer dans vos escadrons invincibles... Il y montreront que ce n’est pas en vain qu’ils se disent les défenseurs (66 ) P.-V, XLV, 224. (67) P.-V., XLV, 224. Bull., 28 fruct. (suppl.) ajoute les communes de Beausite et Bouchemaine. M. U., XLIII, 428; J. Perlet, n° 720; J. Paris, n° 621. (68) C 320, pl. 1319, p. 16. Mention marginale de Louchet.