174 [Convention nationale.] « J’ai pris un arrêté (1) pour faire lever toutes les campagnes dans lesquelles tous ces coquins se disséminent et commettent toutes sortes de brigandages; je l’ai envoyé par courriers extraor¬ dinaires, il produit un excellent effet. On les chasse comme des bêtes fauves, et le nombre de ceux qu’on tue équivaut à ceux que l’on fait prisonniers. « Dans le second avantage que nous avons eu vers Craon, nous leur avons pris le reste de leurs canons; et si nous avons une fois écharpé leur cavalerie, ce qui ne tardera pas, le reste tombera bientôt sous les coups de la vengeance nationale. « Bourbotte m’a fait demander 2,000 paires de souliers, j’ai fait mettre sur-le-champ en réquisition tous ceux delà ville, et j’espère les lui fournir aujourd’hui. Je vais en faire autant dans les autres dis¬ tricts; car je présume que nos braves volon¬ taires du Nord auront les mêmes besoins. « Salut et fraternité, « Signé : Garnier (de Saintes ). » IV. Adresse par laquelle la Société populaire RÉGÉNÉRÉE ET JACOBITE D’EMBRUN REND COMPTE DES MESURES QU’ELLE A PRISES POUR COMBATTRE LE FANATISME ET LES DES¬ POTES COALISÉS (2). Suit le texte de cette adresse, d’après un docu¬ ment des Archives nationales (3). La Société populaire régénérée et jacobite d’Embrun, à la Convention nationale. « Dignes représentants d’un peuple libre, « Ce n’est pas assez pour les Jacobins sans-culottes d’Embrun d’avoir loué les mémorables journées des 31 mai et jours suivants, de vous avoir invités à rester à un poste où votre pré¬ sence est absolument nécessaire pour le salut de la République; ils ont dû encore, à l’exemple de tous les républicains de la France, seconder vos immortels travaux par tout ce qui était en leur pouvoir. « Nous vous dirons donc, législateurs, que notre terre n’est plus souillée par aucun ci-de¬ vant privilégié, et que l’ex-noble des départe¬ ments voisins qui a voulu se réfugier parmi nous a été expulsé aussitôt que reconnu. Les prêtres et leurs costumes ont disparu, et nous rendons à son premier maître l’or, l’argent, le cuivre et les ornements de nos ci-devant églises. (1) Nous n’avons pu retrouver cet arrêté. Aulard : Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 529. (2) L’adresse de la Société populaire régénérée et jacobite d’Embrun n’est pas mentionnée au pro¬ cès-verbal de la séance du 2 nivôse an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives, on lit : « Insertion au Bulletin, le 2 nivôse an II (dimanche 22 décembre 1793, Bourdon (de l’Oise), secré¬ taire. » On trouve d’ailleurs un extrait de cette adresse dans le 2e Supplément du Bulletin de la séance du 3 nivôse (lundi 23 décembre 1793). (3) Archives nationales, carton G 287, . dossier 864. 2 nivôse an 11 22 décembre 1793 « La Société populaire de la commune d’Em¬ brun, qui compte à peine 3,000 âmes dans son enceinte, a monté, armé et équipé un jeune Cava¬ lier jacobin, pour aller combattre les despotes coalisés, ayant de reste à la disposition de la nation 410 livres que sa sœur, la Société popu¬ laire de Mont-Lyon, lui avait envoyées pour l’aider dans cette dépense. « Le Montagnard Beauchamp, représentant du peuple, que nous nous félicitons de possé¬ der dans le département, vous fera parvenir des bijoux en or et en argent, une somme de 649 livres en numéraire et de plus 3,030 livres en assignats que la Société d’Embrun a formée pour servir aux frais d’une descente en Angle¬ terre. Tous les jours un registre se remplit des noms de ceux qui viennent apporter des che¬ mises, des bas et des souliers pour nos braves défenseurs. Et des fonds considérables sont faits, au moyen desquels on a secouru et on sécourra provisoirement les orphelins, les veuves, les mères et les femmes qui pourraient souffrir pour avoir leurs parents aux frontières; et la Société envoie, toutes les décades, des apôtres de la liberté instruire les campagnes du vrai culte de la raison, lequel s’élèvera bientôt dans toute la République sur les débris du fanatisme. « Soyez sûrs, représentants, que les âpres frimas qui nous entourent ne peuvent nous empêcher de marcher aussi bien l’hiver que l’été au pas de charge dans le droit sentier de la Révolution, et que nous soutiendrons toujours ce pas afin de nous rendre dignes d’arriver bien¬ tôt à la cime de cette vénérable Montagne d’où est partie la foudre qui a écrasé les cou¬ pables et les révoltés. « Embrun, décadi 20 frimaire an II de la République française, une et indivisible et le 1er de la mort du tyran. « Fantin, président; Chevalier-Reinoard; Savine. » Discours prononcé par le président de la Société populaire d’Embrun, sur la place de la Liberté et à la tribune des Jacobins, le jour de la fête nationale du décadi 20 frimaire, Van II de la République française, une et indivisible. Frères et amis, La philosophie cherchait depuis longtemps à soulever l’épais rideau qui cachait le bonheur des peuples; la Convention nationale l’a déchiré d’une main hardie, et, foulant sous ses pas de géant les antiques préjugés qu’une longue suite d’erreurs avait entassés sur nos têtes', elle nous a conduits aux grandes destinées que nous pré¬ para la nature. La superstition et le fanatisme, écrasés sous leAdébris sanglants d’un trône impie, ont fait places à la saine raison; le Français libre a reconnu que ces fêtes religieuses ridiculeuse-mentSamoncelées dans ses vieilles légendes, ne furent imaginées que pour assurer l’esclavage de ses pères, en entravant l’agriculture, le commerce et les arts. Cette longue litanie a disparu du nouveau calendrier, tous nos jours appartiennent à la patrie, et si l’almanach des sans-culottes présente encore quelques jours de repos, ils sont marqués par des fêtes nationales destinées à alimenter et perpétuer les progrès de notre régénération civique. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { | 5�ôseb“ ?-« 175 Tels sont les jours du décadi, tels seront les saus-culottides. Célébrons-les par des vœux ardents pour le succès de nos armes, pour le maintien de la Constitution, pour l’anéantisse¬ ment de tous les genres de tyrannie, et Vive la République, la Montagne, et les s ans-culottes ! Fantin, président. « Pendant la fête du décadi, un mancïie de croix d’argent converti en pique était porté par Robert, ex-religieux, comme un des quatre piquiers en bonnet rouge et qui accompagnaient l’Acte constitutionnel porté par le doyen d’âge. « Un grand feu de joie ayant été dressé sur la place de la Liberté, une farandole y a apporté et placé en tête un grand tableau du ci-devant saint François de Sales qui obligea la sœur Chan¬ tal, sa maîtresse, à marcher sur le ventre de ses enfants, pour venir le trouver. « De là, la farandole fut au presbytère épis¬ copal et, après avoir chanté des hymnes à la Liberté, arracha les crosses, mitres, tiares, croix et palliums dorés et les apporta en musique au feu de joie. « Le soir, grand bal au séminaire pendant lequel les citoyens non dansants et surtout les enfants s’amusèrent à brûler quatre douzaines de portraits d’évêques, cardinaux, jésuites, un grand christ et une vierge de bois doré, sans que les huit contredanses qui s’exécutaient devant cet autodafé fussent en rien dérangées, commençant et finissant toujours par l’accolade fraternelle de chaque citoyen à sa citoyenne. « En un mot, il n’a manqué à la fête qu’un peintre pour remplacer les tableaux du fana¬ tisme par les portraits des martyrs de la liberté. « Par le comité de rédaction. « Harmodius Reinoakd. » la Convention a décrété décadi dernier une Commission particulière, chargée d’examiner quels sont, parmi les détenus, ceux dont l’élar¬ gissement pourra être justement ordonné. Sans doute cette Commission éolairera, soit les délits, soit l’innocence de ces citoyens. Je demande, par mesure additionnelle, que le comité de sûreté générale (car vous avez sage¬ ment décidé que les membres de cette Commis¬ sion resteraient inconnus) fasse, tous les» jours de décade, un rapport par lequel il fera connaître le nom et la demeure des citoyens que la Com¬ mission aura fait mettre en liberté, et que ce rapport soit inséré au Bulletin. Ce moyen conso¬ lera les familles dans lesquelles il y a des incar¬ cérés, et fera taire les réclamations. Laloy. Je m’étonne que le préopinant, qui connaît la justice autant que la sévérité du comité de sûreté générale, se dissimule assez ses travaux pour faire une pareille proposition; Dès que le comité reconnaît l’innocence d’un détenu, il quitte tout pour faire effectuer-son élargisse¬ ment. Je demande l’ordre du jour. La Convention passe à l’ordre du jour. VI. Le général Dagobert se plaint de la mau¬ vaise QUALITÉ DES CANONS (1). Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets (2). Le général Dagobert se plaint à la Convention de la mauvaise qualité de quelques canons qui lui ont été envoyés. Plusieurs ont crevé après un V. Raffron demande que le comité de sûreté GÉNÉRALE FASSE, TOUS LES JOURS DE DÉCADE, UN RAPPORT PAR LEQUEL IL FERA CONNAITRE LE NOM ET LA DEMEURE DES CITOTENS QUE la Commission (1), chargée d’examiner LES DOSSIERS DES PERSONNES SUSPECTES, AURA FAIT METTRE EN LIBERTÉ (2). Compte rendu du Moniteur universel (3). Raffron-Je demande la parole pour une mo¬ tion d’ordre. Sur la proposition de Robespierre, (1) Voy. ci-dessus, séance du 30 frimaire an II, p. 36 ie décret ordonnant la création de cette com¬ mission. (2) La motion de Raffron n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 2 nivôse; mais il y est fait allusion dans le compte rendu de cette séance publié par le Moniteur et le Journal des Débats el des Décrets. (3) Moniteur universel [n° 93 du 3 nivôse an II (lundi 23 décembre 1793), p. 375, col. I]. D'autre part, le Journal des Débals el des Décrets (nivôse an II, n° 460, p. 17) rend compte de la motion de Raffron dans les termes suivants : « Raffron. La Convention nationale a rendu, décadi dernier, un décret salutaire relativement à la pétition qu’on lui fit au sujet des incarcérés en qua¬ lité de suspects. Ce décret produira certainement ce que nous devons à la sûreté publique et à la tranquillité des familles de ceux que la mesure des arrestations a enveloppés, quoiqu’ils ne le méri¬ tassent pas. La Commission que vous avez nommée éclaircira les faits et rendra la justice sévère qui vous anime. « Je demanderais, par article additionnel, que le comité de sûreté générale vous rendît compte, chaque décade, des travaux des commissaires que vous avez institués; qu’elle exposât chaque décadi la liste des noms, qualités et demeures des citoyens élargis, celles des individus dont la réclusion est fondée, enfin celle des prévenus renvoyés à l’accu¬ sateur public. Un membre demande l'ordre du jour fondé sur la loi. Laurent Lecointre appuie la motion de Raffron. Un membre. Laurent Lecointre a été membre du comité de sûreté générale, comme moi. Il sait combien les membres de ce comité sont justes, assi¬ dus et sévères. Il sait aussi que, lorsque après l’exa¬ men des faits, le comité prononce l’élargissement d’un citoyen, il quitte aussitôt tout pour lui faire parvenir l’acte qui le met en liberté. Ces considé¬ rations me déterminent à réclamer l’ordre du jour. La Convention adopte cette proposition. (1) La lettre du général Dagobert n’est pas men-tonnée au procès-verbal de la séance du 2 nivôse; mais il y est fait allusion dans les comptes rendus de cette séance publiés par le Journal des Débats et des Décrets et par le Journal de Perlet. (2) Journal des Débats el des Décrets (nivôse an II, n° 460, p. 17). D’autre part, le Journal de Perlet [n° 457 du 3 nivôse an II (lundi 23 décembre 1793),