SÉANCE DU 11 FRUCTIDOR AN II (28 AOÛT 1794) - N06 27-28 41 la Patrie dépend de l’exécution du gouvernement révolutionnaire, et que tous les bons citoyens doivent constamment se rallier autour de la représentation nationale, nous a députés vers vous à l’effet de vous faire part de l’improbation unanime qu’elle a donnée à un projet d’adresse qui lui a été communiqué par des commissaires de la section du Muséum. Cette adresse, le discours qui l’avait provoqué et l’arrêté qui nous ont été communiqués, ne tendent à rien moins qu’à amener parmi nous l’anarchie et le renversement du gouvernement révolutionnaire qui effraie et doit anéantir les conspirateurs de toute espèce. Mais ce n’était pas assez pour nous, citoyens représentans, de nous être levés spontanément contre ces projets liberticides : il falloit encore les dénoncer à l’opinion publique, l’opinion publique, cette maîtresse du monde, et qui fera constamment la force de la Convention nationale. Déjà nous les avons déposés au comité de Sûreté générale; et il suffit que vous en soyez solennellement prévenus, pour prouver à la France, à l’Europe entière, que constamment les Républicains vous seront unis, et que de cette union résultera, n’en doutons pas, l’anéantissement des ennemis de notre liberté : Vive la République une et indivisible ! Vive la Convention nationale ! (59) Réponse du président. Toujours digne du héros dont elle a pris le nom, votre section a découvert la trame impie qu’ourdissoit dans l’ombre de l’iniquité l’aristocratie délirante, à laquelle Robespierre a légué son manteau patriotique. Hommes de sang, qui voulez livrer la République aux divisions et à la guerre civile, parce que vous n’avez pu la livrer aux bourreaux, vos projets sont connus, la Patrie est encore une fois hors de danger! (On applaudit). Citoyens, vous avez vu passer successivement sur la scène politique ces usurpateurs de vos droits et de la popularité : les hommes trop confîans sauront aujourd’hui que leur ami n’est pas toujours qui les flatte, mais qui défend les droits du Peuple. S’ils craignent encore de s’égarer, c’est ici, au sein de la Convention nationale qu’il faut venir consulter l’opinion; ils y trouveront le plus parfait accord pour le bien, le désir ardent de donner la paix et le bonheur à la Patrie, après avoir puni les rois. Il appartenoit à la section de Mutius-Scae-vola, à cette section qui fut toujours la première à environner la représentation nationale, de déjouer ces projets qui tendoient à nous faire perdre en un jour le fruit de six années de peines, de travaux et de sang. Pour punir un roi perfide, on vouloit consulter le peuple que l’on croit diviser; les vengeurs de Robespierre veulent la même chose : la Convention nationale qui a puni ce traître, a le bras étendu sur ses complices; vous la secondez puissamment, citoyens : jouissez de la seule (59) Bull., 11 fruct. (suppl.); C 320, pl. 1313, p. 21, pièce signée de GUILLEMIN et GUINIER (secrétaires); Débats, n° 707, 267; Moniteur, XXI, 611. récompense digne de votre ambition, du plaisir d’avoir fait une bonne action; entrez dans cette enceinte, où l’estime et la fraternité sont impatientes de vous accueillir. (Nouveaux applaudissements .) (60). 27 La société populaire de Montargis [Loiret] se plaint de ce qu’on lance sur les habitans de cette commune tous les traits de la calomnie, et renouvelle, au nom de tout le district, le serment de vivre libre ou mourir. Renvoyé au citoyen Brival, représentant du peuple dans le département du Loiret (61). 28 Une députation de la section de la Montagne [Paris] est admise à la barre. Elle annonce que cette section, par un mouvement unanime, à passé à l’ordre du jour sur la pétition de la section du Muséum, et remet sur le bureau l’extrait du procès-verbal de la séance du 10 fructidor. Elle dépose en outre une somme de 18 285 L 19 s. 6 d. dont cette section fait hommage à la patrie pour la construction et l’armement d’un vaisseau. Mention honorable et insertion au bulletin du don et de la déclaration (62). [Procès-verbal de l’assemblée générale de la section de la Montagne, 30 thermidor an II\ (63) Un membre observe que la section doit présenter à la Convention nationale l’offrande de sa collecte pour le vaisseau. L’assemblée arrête la nomination de quatre commissaires, et nomme de suite les C. Darman, Lordey, Lacoste et Lapierre, à l’effet de rédiger et présenter à la Convention nationale une adresse, de laquelle sera préalablement fait lecture à l’assemblée générale, et dans laquelle sera portée l’offrande des citoyens de la section, Pour la construction et l’armement d’un vaisseau. Certifié Darman (secrétaire). [Adresse de la section de la Montagne] (64) Citoyens Représentans, La section de la Montagne, avec ses sœurs les sections de Paris, a jetté ce coup d’œil, que lance le courage, sur tous ses ennemis. Dans (60) Bull., 11 fruct. (suppl.); Moniteur, XXI, 611; Débats, n° 707, 267. (61) P.V., XLIV, 190. (62) P. V., XLIV, 190. (63) C 318, pl. 1292, p. 15. (64) C 318, pl. 1292, p. 15; Bull., 11 fruct. (suppl.); M.U., XLIII, 189-190; J. Fr., n° 703. 42 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE leur infâme coalition, elle a distingué, avec mépris, cette horde de brigands insulaires, nos voisins, indignes du nom de nation, qui jusqu’alors pour rivaliser la nôtre, prétendirent à l’honneur de la Liberté, en la défigurant sous les arrêts de la tyrannie; qui s’arrogèrent une puissance sur les mers, en y exerçant leurs pyrateries; enfin qui voulurent être plus grands, plus forts et plus sages que les français, par désespoir de ce que les français le sont plus qu’eux. A leur aspect, citoyens Représentans, la section de la Montagne, une dans ses principes, une dans ses mouvemens, s’est sentie électrisée par le feu brûlant des génies naïfs de la Liberté et de l’Egalité. Les voila, s’est-elle dit, les voila ces génies tutélaires, qui doivent régénérer un grand sol, favorisé par la nature, mais souillé jusqu’ici par les attentats des despotes ! Périssent à jamais les monstres anthropophages, qui dévorent l’homme, en détruisant l’homme dans l’homme ! Périssent ces tigres, avides de sang, qui pour s’assurer leurs proyes cherchent, par la terreur, par le meurtre, par le feu, par le poison, à peupler l’univers de leurs esclaves ! Pour les extirper, citoyens Représentans, la section n’a qu’une âme, qu’un trésor appartenant à tous. C’est dans ces sentimens qu’infati-gablement occupée d’une part à l’extraction du salpêtre qui doit lancer les boulets et les bombes, dont déjà elle a fourni trente deux milliers, et à l’espoir d’aller au de-là du but projetté; d’autre part elle nous charge de déposer, en ce moment, sur le bureau de la Convention, la somme de 18 285 L 19 s. 6 d. venant d’une collecte faite dans son sein. La section fait hommage à la Patrie de cette somme, en la destinant à la construction et à l’armement d’un vaisseau, à qui il paraissait qu’on voulait donner le nom de Commune de Paris. Quelque nom qu’il porte, ce vaisseau, le désir ardent de la section est que, sagement dirigé pour commander aux vagues, il devienne, dans ses expéditions, la terreur du dernier des Anglais qui n’abaisserait pas sa tête altière, sous le joug des lois, que notre Révolution devra bientôt dicter sur mer et sur terre. Mort aux traîtres anglais ! Vive la République ! Nous profitons de l’occasion de parler, citoyens Représentans, pour exciter votre sollicitude, sur un autre objet particulier, qui concerne notre section. Le nommé Pierre Debaux, fils d’un jardinier, orphelin, âgé de 12 ans, est frère de deux défenseurs, qui vivaient du produit de leurs journées, et qui partant dans la lere réquisition, il y a un an, le recommandèrent à notre section. A l’instant, des sans-culottes, touchés de la situation de cet enfant malheureux et abandonné, offrirent d’en avoir soin. Ils ont pourvu en effet à sa subsistance jusqu’à ce jour. Mais aujourd’hui qu’il grandit, qu’il ne s’agit plus d’un simple entretien, qu’il est tems de pourvoir à lui donner quelque éducation, la section avait arrêté de le placer aux Elèves de la Patrie, nommés élèves français, en attendant qu’il soit propre à prendre un état. Il s’est élevé quelques difficultés sur ce projet. La section demande à la Convention nationale, de les lever toutes, en décrétant, par mouvement d’humanité, que ledit Debaux sera reçu aux élèves français. [Procès-verbal du 10 fructidor an II\ Le projet d’adresse cydessus lu à l’assemblée générale de la section de la Montagne, a été adopté, et il a été arrêté qu’il serait présenté à la Convention par les commissaires déjà nommés. Certifié Darman (secrétaire). [Assemblée générale de la section de la Montagne, 10 fructidor an II\ (65) Une députation de la section du Muséum est admise, après discussion sur son admission. Ses commissaires lisent la pétition tendante à provoquer la nomination des magistrats du peuple en ce moment. Sur le champ l’assemblée, d’un mouvement unanime, passe à l’ordre du jour, motivé sur ce qu’une telle mesure exhorbitante ne peut avoir lieu que dans les assemblées primaires, et que la section de la Montagne a pensé qu’il était impossible que la majorité des citoyens de la section du Muséum aient consenti cette pétition, contraire au principe décrété par la Convention nationale sur le gouvernement révolutionnaire, le seul qui puisse sauver l’Etat et qui soit approuvé par le peuple français tout entier, dont la section du Muséum ne fait qu’une très faible partie. En conséquence, l’assemblée a nommé à l’instant quatre commissaires, savoir, Hion, Lapierre, Jobert et Bonbon, pour aller fraterniser avec la section du Muséum et l’inviter à vouloir bien examiner de nouveau cette pétition et peser les conséquences funestes qui pourraient résulter de son adhésion. Les commissaires sont en effet partis au même moment pour cette mision. L’assemblée a arrêté qu’extrait du présent procès-verbal serait porté à la Convention nationale. Certifié Darman (secrétaire). [Etat des recettes provenant de la collecte faite par les capitaines et sergents majors de la section de la Montagne, en thermidor et. fructidor an II] (66) (65) C 318, pl. 1292, p. 16. Mention au Bull., 11 fruct. (suppl.). (66) C 318, pl. 1292, p. 17.