113 novembre 1790.] 4Ô4 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. par le directoire du district de Saint-Quentin au conseil d’administration, le conseil d’administration du département de l’Aisne a pris l’arrêté suivant : « L’administration du département de l’Aisne, considérant que l’arrêt du 14 septembre dernier a pour objet d’éluder le décret de l’Assemblée et d’envahir une partie des sommes provenant de quatre prébendes vacantes du chapitre de Saint-Quentin, mises en séquestre, arrête : 1° qu'elle approuve et confirme les délibérations du directoire de Saint-Quentin ; 2° que les faits mentionnés au rapport seront par elle dénoncés à l’Assemblée nationale ; 3° que les rapports et les ' pièces seront envoyés à M.Camus.dont ledéparte-ment connaît le zèle et le patriotisme; que ce • député sera prié de mettre sous les yeux de l’Assemblée nationale les faits ci-dessus, et de lui proposer de décréter que la somme de 23,000 livres, formant le tiers de la soumission de la contribution patriotique du chapitre de Saiat-Quentin, sera payée par le séquestre aux collecteurs du district de Saint-Quentin. » M. Guignard, qui a signé l’arrêt du conseil, a écrit au président de l’Assemblée nationale pour en justifier les dispositions. Il prétend que l’arrêt n’a pas été rendu de propre mouvement, mais sur l’opposition d’un créancier du chapitre de Saint-Quentin, dont le’conseil autorisait les poursuites contre le séquestre. D’après cet exposé, le comité vous propose le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale décrète : « 1° Que l’arrêt du conseil du 14 septembre dernier sera regardé comme non avenu; « 2° Qu’elle approuve la conduite du département de l’Aisne et du directoire du district de Saint-Quentin ; « 3° Qu’elle l’autorise à faire exécuter la disposition de son arrêté concernant la contribution patriotique du chapitre de Saint-Quentin sur le séquestre des prébendes vacantes. -> M. Martineau. L’usage que le comité veut faire des sommes séquestrées provenant de la vacance des prébendes du chapitre de Saint-Quentin n’est pas plus légitime que celui que l’arrêt du conseil avait autorisé. Les sommes séquestrées sont la propriété de la nation; elles ne doivent donc servir ni au payement des créanciers des chanoines, comme le porte l’arrêt, ni à celui de leur contribution patriotique, comme vous le propose votre comité. Je conclus à ce que les sommes séquestrées soient remises dans la caisse de l’extraordinaire. M. Goupil. Je demande que M. Guignard soit mandé à la barre pour rendre compte des motifs qui ont dicté l’arrêt du conseil du 14 septembre dernier. M. Muguet. Je ne pense pas qu’il faille mander à la barre des gens flétris par l’opinion publique. M. de Clermont-Tonnerre. Je demande que M. Muguet soit rappelé à l’ordre. M. Muguet. Les plus zélés défenseurs des ministres ont dit, dans cette Assemblée, qu’ils les mésestimaient. M. de Clermont-Tonnerre. Que l’on veuille se rappeler que nous ne sommes pas solidaires les uns pour les autres ; c’est dans une faction où tous sont du même avis. Ce qu’a dit M. de Caza-lès, lorsqu’il a été question de déclarer au roi que les ministres avaient perdu la confiance publique, n’était pas mon avis ; je suis ici, là, partout où je crois la raison. M. Muguet. Les ministres ont méconnu vos décrets; si vous ne les forcez pas à les respecter, il est inutile de les rendre. Je demande que cette nouvelle infraction soit dénoncée au roi. M. Goupil. Le sieur Guignard, secrétaire d’Etat, a contrevenu à la loi. Quoique le décret n’ait reçu la sanction que dix mois après que vous l’avez porté, par la faute du sieur Champion, garde des sceaux, il a néanmoins été sanctionné avant l’arrêt du conseil. Les ministres répondent de l’inexécution des lois. En conséquence, je demande de nouveau que le sieur Guignard soit mandé à la barre pour y rendre compte de sa conduite. M. de Clermont-Tonnerre. J’appuie la motion qui vous est faite, parce que l’accusation appelle l’accusation ; mais je m’élève énergiquement contre ceux qui se croient le droit, selon leurs caprices, de dicter des arrêts et d’être les organes de l’opinion publique. (La motion de M. Goupil est repoussée par la question préalable.) La motion de M. Martineau est décrétée en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir ouï le rapport de son comité ecclésiastique sur un arrêt du conseil, dit du propre mouvement , rendu en faveur du sieur Vulpian, le 14 septembre dernier, décrète que ledit arrêt, comme contraire aux décrets de l’Assemblée nationale, sera et demeurera comme non avenu. L’Assemblée nationale approuve la conduite du directoire du district de Saint-Quentin et celle du directoire du département de l’Aisne, dont l’arrêté est conforme aux principes consacrés par les décrets de l’Assemblée nationale, sanctionnés par le roi : approuve aussi la conduite des dépositaires séquestres des revenus des prébendes vacantes dudit chapitre, pour la résistance qu’ils ont opposée aux significations et sommations à eux faites en vertu de l’arrêt du conseil 14 septembre dernier. Et à l’égard de toutes les sommes qui sont déposées entre les mains desdits séquestres, et qui procèdent desdites prébendes vacantes dans le chapitre de Saint-Quentin, elles seront versées par eux directement dans la caisse de l’extraordinaire. » M. le Président. L’ordre du jour appelle l’ouverture de la discussion sur l'impôt du tabac (1). M. l’abbé Charrier. Vous avez supprimé la gabelle; il a fallu la conviction des maux qu’elle a produits pour vous déterminer, malgré nos besoins extrêmes, à renoncer au bénéfice annuel d’une somme de 30 millions. Mais vous résoudrez-vous à renoncer d’un trait de plume à la recette de plus de 30 millions que donne à l’Etat l’impôt sur le tabac, susceptible même d’augmentation? La vente exclusive du tabac est un impôt indirect; il vous en faut de cette nature ; vous n’a-(1) Voy . le rapport de M. Rœderer, séance du 13 septembre 1790, Archives parlementaires, tome XVIII, page 729.