360 [Convention nr tionale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I Î/Smbro il Compte bendu du Journal de la Montagne (1). Le comité des secours publics expose que les sommes mises à la disposition du ministre de l’intérieur pour le soulagement des patriotes de Liège, de la Belgique, de Jemmapes sont épuisées et que ces victimes de la tyrannie sont dans le besoin. En conséquence il propose et la Convention adopte le projet suivant. ( Suit le texte du décret que nous insérons ci-dessus d'après le procès-verbal, mais avec le chiffre de 1,500.000 livres au lieu de 150,000 li¬ vres.) Un membre du comité de Salut public [Bil-laud-Varenne, rapporteur (2), fait un rapport sur la nouvelle rédaction arrêtée par ce comité relativement au projet de décret concernant le mode de gouvernement provisoire et révolution¬ naire, qu’il avait déjà présenté; une partie du projet est adoptée avec plusieurs amendements et sauf rédaction (3). Compte bendu du Moniteur universel (4). Billaud-Varenne. Je viens soumettre à la Convention nationale le mode de gouverne¬ ment provisoire révolutionnaire qu’elle avait renvoyé à son comité de Salut public, pour y insérer les amendements qui ont été faits dans une précédente séance (5). Le comité a apporté dans ce travail toute l’importance qu’il méritait ; je viens aujourd’hui vous proposer en son nom de nouveaux articles qui donnent à ce gouver¬ nement provisoire plus de précision et d’unité. Ces articles sont devenus très essentiels par les faits qui en ont fait naître l’idée. Il faut d’abord vous prévenir que le zèle des représentants du peuple, envoyés dans les dépar¬ tements, les a portés à créer des institutions qui, par leur défaut de combinaison pourraient devenir funestes à la liberté. L’une de ces ins¬ titutions est celle des commissions centrales, dont l’esprit est naturellement fédéraliste. Une autre a encore de plus grands inconvé¬ nients; c’est la formation des armées révolu¬ tionnaires : sans doute les représentants du peuple, fatigués par les circonstances et les besoins du moment, n’ont vu que l’intérêt du peuple dans l’adoption de ces mesures; ils n’ont pas senti que la vraie force d’un représentant du peuple est dans son caractère, et surtout dans l’opinion publique dont il doit s’investir. Celui (1) Journal de la Montagne [n° 17 du 10e jour du 3« mois de l’an II (samedi 30 novembre 1793), p. 134, col. 2]. (2) D’après les divers journaux de l’époque. (3 Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 236. (4) Moniteur universel [n° 70 du 10 frimaire an II (samedi 30 novembre 1793), p. 284, col. 1]. D’autre part, voyez ci-après, annexe n° 1, p. 363, le compte rendu de la même discussion d’après plusieurs jour¬ naux. (5) Voy. Archives parlementaires, lre série, t. LXXIX, séance du 28 brumaire an II (18 no¬ vembre 1793), le rapport de Billaud-Varenne. qui n’est pas pénétré de cette vérité est indigne de la représentation nationale. Il est encore une chose à laquelle on a à remé¬ dier. L’action des lois est souvent paralysée par des agents secondaires, qui ne sont point responsables. Le comité a cru devoir les enve¬ lopper dans la responsabilité. Par ce moyen, l’exécution des lois est assurée et n’éprouvera plus aucune entrave. Enfin, après l’adoption du gouvernement provisoire, que le comité vous propose, et dont les observations que je viens de vous faire ont dû vous faire sentir la nécessité, le comité vous présentera le code révolutionnaire enfoui dans une foule de décrets qui se contrarient. Ce code révolutionnaire sera l’arme du peuple contre les malveillants; c’est avec lui qu’il consolidera sa liberté; car, après l’avoir conquise, il ne lui reste plus qu’à envoyer à l’échafaud les cons¬ pirateurs qui tenteraient de l’abattre. Yoici le projet de décret que votre comité m’a chargé de vous présenter. (Applaudisse¬ ments.) Billaud-Varenne en fait lecture. Plusieurs articles sont décrétés. D'autre part, le Moniteur du 12 frimaire re¬ produit avec quelques développements la discus¬ sion à laquelle donna lieu, dans la séance du 9 frimaire, le projet de décret présenté par Bil¬ laud-Varenne sur le mode de gouvernement provisoire et révolutionnaire de la Bépublique. Voici cette discussion que nous empruntons textuellement au Moniteur (1). N. -B. La Convention ne s’étant pas encore occupée de la suite des articles sur le mode du gouvernement révolutionnaire, nous attendons pour donner ce décret qu’il soit terminé, et que la rédaction èn ait été définitivement adoptée. Cependant nous ne croyons pas devoir différer plus longtemps de rendre compte de la discussion qui a eu lieu dans la séance du 9 sur plusieurs articles de ce projet. En voici les principaux détails : Merlin. (2). Je demande que le comité de Salut public s’appelle comité de gouverne¬ ment. Billaud-Varenne. Je m’oppose à cette dé¬ nomination. Le centre du gouvernement est dans la Convention et je déclare que le jour où la Convention reporterait cette autorité en d’autres mains quelconques, elle décréterait l’éversion de la liberté. Barère. La Convention gouverne seule, et doit seule gouverner; le comité de Salut public n’est pas le seul instrument dont elle se serve; elle se sert aussi pour leurs fonctions respectives du comité de sûreté générale et du conseil exécutif. Nous sommes l’avant-poste de la Convention; nous sommes le bras qu’elle fait agir, mais nous ne sommes pas le gouvernement. Nous dénommer comité de gouvernement, (1) Moniteur universel [n° 72 du 12 frimaire an II (lundi 2 décembre 1793), p. 291, col. 3]. (2) Il s’agit de Merlin (de Thionville). [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j vembre 1793 361 c’est donc nous donner un nom qui ne nous con¬ vient pas; c’est attacher au comité une défa¬ veur qui pourrait nuire à la confiance dont il est ipvesti, et dont il a besoin; c’est enfin chan¬ ger ses éléments, et nous reporter, nous, in¬ dividus qui le composons, hors de la Conven¬ tion, pour nous ranger dans la classe des agents exécutifs. Je m’oppose donc à la motion et je demande qu’elle ne reparaisse plus. La proposition est rejetée. Thuriot. J’ appuie l’article du projet qui étend la responsabilité des ministres à leurs subordonnés; mais je dois mettre sous les yeux de l’Assemblée quelques réflexions. Dan¬ ton a conçu des doutes sur l’extension de la loi de la responsabilité aux agents secondaires, aux commis de bureaux. Il pense que c’est dé¬ truire entièrement la responsabilité ministé¬ rielle. C’est pourquoi je vais donner plus de développements à mon idée, afin qu’elle soit saisie dans la rédaction, suivant son véritable sens. Je dis donc qu’il peut arriver des circons¬ tances, où les manœuvres coupables des em¬ ployés aient empêché l’exécution d’une loi. Le ministre est cité comme responsable. Il se justifie, et prouve que le délit ne part point de lui. Dans ce cas, il doit sans doute être acquitté; mais si la responsabilité ne s’étend pas jus¬ qu’aux employés, il en résulte une impunité préjudiciable à la chose publique. Ainsi, j’ai demandé, et je demande la responsabilité des ministres, à moins qu’ils n’établissent jusqu’à l’évidence, que le délit part de leurs agents, et que dans cette supposition, la peine de la responsabilité frappe ces agents. Danton. J’avais fait à Thuriot quelques observations particulières, qu’il est bon, peut-être, que je répète à la Convention. Dans les cas particuliers, où les commis se rendent cou¬ pables, sans doute ils doivent être punis, mais cela ne rentre pas dans la théorie générale de la responsabilité, et il n’y a pas besoin d’une loi nouvelle à cet égard : les lois criminelles exis¬ tent. Quant à la responsabilité, il n’y en a plus, si le ministre n’est pas seul responsable. En vain se justifierait -il, en prouvant qu’un délit quelconque n’est pas de son fait; s’il ne l’a pas dénoncé, il le partage; quant à l’ineptie ou à l’inertie, il est électeur dans sa partie; c’est à lui à s’informer des talents, du carac¬ tère, de la probité de ceux qu’il emploie, et il en répond. J’ai été ministre aussi; tous les soirs, je connaissais le produit net du travail de mes bureaux, je m’en faisais rendre compte par les chefs. L’inspection quotidienne de ses bureaux, voilà le premier devoir d’un ministre; pour le travail matériel, c’est un mal qu’il s’en charge; au reste, s’ils sont surchargés, qu’ils le disent, on leur donnera des aides. Encore une fois, le ministre doit déférer aux tribunaux les coupables, chasser les inhabiles, les inactifs; et dans l’un et l’autre cas, s’il ne le fait pas, il est responsable. Je demande que ma propo¬ sition soit renvoyée au comité pour qu’il l’exa-mine. j , . Billaud-Varenne. Dans le cas où le ministre a fait tout ce qui dépendait de lui, et que pour¬ tant ses ordres restent sans exécution, il faut bien savoir qui punir de cette inexécution. Il y a plus d’un mois que de grandes mesures ont été prescrites pour la Vendée : le ministre n’a rien négligé de tout ce qui dépendait de lui, et pourtant ces mesures sont encore sans exécution. Il est temps de savoir quels sont ces hommes qui se tiennent derrière le rideau : si vous négligez de les rechercher, de les frapper : vous n’aurez jamais de gouvernement. Bourdon (de l'Oise). Il faut exercer la res¬ ponsabilité contre le ministre; c’est ainsi qu’on le forcera de balayer ses bureaux de ces calom¬ niateurs à gages, qui vont dénonçant sans cesse aux Cordeliers, dans les clubs et dans tous les lieux où ils ne devraient pas être. Ils font plus, ils envoient des hommes dans les armées pour y répéter leurs absurdes calomnies. Si vous voulez exercer la responsabilité sur tout le monde, vous n’atteindrez personne. Mais en frappant le chef, de cascade en cascade, vous arriverez à tous les coupables. On observe avec raison qu’un ministre, chaque soir, doit se faire rendre compte du travail de ses bureaux ; mais c’est ce que Bouchotte ne pourrait faire, parce qu’à ces heures ses commis seraient aux Cordeliers ou ailleurs, à demander la tête de quelques députés, qui auraient dénoncé quelques créatures des bureaux de la guerre. Barère. Le comité a partagé les ‘intentions du préopinant ; mais il n’est point d’accord sur les moyens d’arriver au même but. On répète que nous divisons la responsabilité; au con¬ traire, loin de la diviser, nous la doublons, nous la quadruplons, nous la centuplons; parce que toutes les têtes sont responsables, il ne s’en¬ suit pas que la responsabilité soit illusoire j. le ministre est responsable des fautes qu’il aura commises, l’adjoint de celles qui lui sont propres; pourquoi les chefs de bureaux et les autres commis successivement ne le seraient -ils pas pour ce qui les concerne? S’ils ne le sont pas, ils diront : la loi ne m’atteint pas, et les ennemis de la chose publique, les malveillants s’adresseront à eux; ils les emploieront comme instruments pour contrarier les opérations. Le ministre actuel de la guerre est fortement dans le chemin de la révolution; il est pas¬ sionné pour la liberté : j’aime à lui rendre cette justice; il est assidu au comité de Salut public pour concerter les mesures nécessaires, et il en poursuit l’exécution avec activité; mais si les ordres qu’il reçoit du comité de Salut public, qui sont transmis par lui à l’adjoint, et passent de celui-ci aux chefs et aux autres employés, demeurent inexécutés par la faute de ces der¬ niers, à votre avis, sur qui doit frapper la res¬ ponsabilité? Si ce mot effarouche, appliqué à des agents secondaires, qu’on établisse contre eux des lois pénales, j’y consens; le résultat sera toujours le même; mais enfin que les vrais coupables soient punis. Je pourrais vous citer beaucoup d’exemples où vous verriez que l’inexécution de nos me¬ sures ne doit être imputée qu’aux agents en sous-ordre. Billaud-Varenne vous en a rap¬ porté plusieurs; je me contenterai d’un seul. Nous prenons des mesures pour qu’un bataillon désobéissant soit conduit dans une citadelle. Notre résolution demeure dans le secret pour tous les citoyens; mais des agents en sous -ordre, dont il faut qu’elle soit connue par nécessité, la divulguent et en compromettent le succès. Certes, si l’un de nous était l’auteur de ce délit, il aurait mérité et devrait s’attendre aux peines les plus rigoureuses. Quoi ! lorsque no\is nous 362 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j L�mbre" r?93 sommes dépouiBés d’une inviolabilité dont l’égalité s’offensait, cette inviolabilité devien¬ drait-elle le privilège de ceux qui trament dans l’ obscurité? Je le répète, il faut que le coupable soit puni, quel que soit le poste qu’il remplisse ; et si vous n’étend� point la responsabilité aux agents secondaires infidèles, décrétez contre eux des lois pénales dont vous paissiez obtenir le même effet. Danton. Nous sommes d’accord en ce sens, que les agents coupables doivent payer leur crime de leur tête. Mais le ministre doit être leur premier dénonciateur; et s’il néglige de le faire, il en est responsable. Je demande que vous combiniez une rédaction qui énonce bien cette pensée sous les deux rapports. Bourdon (de l'Oise ). Dans le cas où le mi¬ nistre , prouvera que sa responsabilité a été engagée par quelque agent de ses bureaux, je demande que cet agent soit puni de la même peine dont le ministre l’aurait été. N. -B. Dans un des articles suivants, la Con¬ vention a supprimé les procureurs généraux syndics des départements ; les présidents seront chargés de la correspondance, et seront réélus tous les quinze jours. Signé : Romme, président; Roger-Ducos, Philippe aux, Frécine, Merlin (de Thion-vîfle), Richard, Reverchon, secrétaires. La séance est levée à 4 heures et demie (1). PIECES ET DOCUMENTS NON MENTIONNÉS AU PROCES-VERBAL, MAIS QUI SE RAP¬ PORTENT OU QUI PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SÉANCE DU 9 FRIMAIRE AN n (VENDREDI 29 NOVEMBRE 1793). I. brumaire relative aux droits des enfants nés hors le mariage. « Adrien no a eu un enfant naturel nommé Jean. Adrienne est morte, sa succession a été recueillie par quatre frères et sœurs. Ceux-ci ont consenti qu’on prélevât, sur la succession de leur sœur 30,000 livres en faveur de son en¬ fant naturel à condition (porte ce consentement) que si l’enfant mourait sans postérité et sans avoir disposé, cette somme leur retournerait. « Les 30,000 livres ont été touchées par le tuteur de l’enfant, ce fait est prouvé par des actes authentiques. Cet enfant est mort, il y a environ huit mois, sans postérité et sans avoir disposé. « Ceux qui ont donné les 30,000 livres les réclament. L’article 9 de la loi relative aux en* fants nés hors le mariage, porte « qu’il y aura suceessibilité réciproque entre eux et leurs parents collatéraux à défaut d’héritiers directs, mais à compter de ce jour. « Suivant cette loi, les parents qui ont doté l’enfant ne pourraient pas recueillir la somme qu’ils ont donnée au moyen de ce qu’il est mort avant la loi, et que le droit de suceessibilité n’est établi qu’à partir du jour de la loi. « Cependant ils ont donné avec la condition de recueillir, dans le cas où l’enfant décéderait sans postérité ou sans avoir disposé, ils ont apposé cette condition à leur consentement.� « D’après cela, il serait parfaitement juste qu’ils reçoivent ce qu’ils ont donné; ils n’ont pas d’autre adversaire que le domaine, qui ne réclame pas, et, en pareil cas, jamais la justice nationale n’a balancé à donner la préférence aux citoyens qui réclament. « Sans déroger à l’article 9 de la loi qui porte : « qu’à compter de ce jour il y aura suc-cessibilité réciproque entre les enfants nés hors le mariage et leurs parents collatéraux à défaut d’héritiers directs », la Convention pourrait, par un amendement bien juste, dire : à moins que les collatéraux ne prouvent par des actes authentiques que les enfants naturels ont été dotés par eux, et qu’ils ont imposé la con¬ dition de retour en cas de mort de l’enfant, sans avoir disposé ou sans postérité, auquel cas, ils succéderont. PÉTITION DU ÇITOYON PRÉVOST CONCERNANT LA LOI DU 12 BRUMAIRE RELATIVE AUX DROITS DES ENFANTS NÉS HORS LE MARIAGE (2). « Prévost, commandant la gendarmerie des Hommes du 14 juillet 1789. » Suit le texte de cette pétition d’après un docu¬ ment des Archives nationales (3). II. Pétition du citoyen Prévost, commandant la gen¬ darmerie des hommes du 14 juillet 1789 aux représentants du peuple, sur la loi du 12 de Lettre du ministre de l’intérieur Paré pour demander des explications sur le MODE D’APPLICATION DE LA LOI RELATIVE AU BRULEMENT DES TITRES CONSTITUTIFS ET RECOGNITIFS DES DROITS FÉODAUX (1). (1) Procès-verbaux de la Convention, l. 26, p. 236. (2) La pétition du citoyen Prévost n’est pas men¬ tionnée au procès-verbal de la séance du 9 frimaire an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives nationalesy on lit l’annotation suivante : « Renvoyé au comité de législation, le 9 frimaire anll. Roger-Ducos, secrétaire » (3) Archives nationales, carton Dih 249. (1) La lettre du ministre de l’intérieur n’est pats mentionnée au procès-verbal de la séance du 9 fri¬ maire an II; mais en marge de la minute qui existB aux Archives nationales, on lit l’annotation suivante î « Renvoyé au comité de législation, le 9 frimaire an II de la République. »