[Assemblée nationale.) à faire battre la générale. Le régiment se mit en bataille devant le quartier où il resta jusqu’à ce que l’erreur fut reconnue. Le jeudi 17, l’amnistie fut publiée, et le drapeau blanc arboré à la maison de ville. A deux heures de l’après-midi, l'on battit encore la générale, sur la nouvelle de l’arrivée de trois mille hommes de troupes nationales. A trois heures, le régiment fut requis par MM. de la municipalité pour marcher, avec quatre pièces de canon, sur la route de Remoulin, afin de reconnaître ces troupes et l’objet de leur marche. A peu de distance des faubourgs, il apprit par le retour d’un détachement de la garde nationale qu’un même intérêt avait fait précéder le régiment, que l’intention de ces troupes annoncées était de se réunir à ceux qui coopéraient au rétablissement du calme, et qu’averties de la proclamation de la paix, elles s’étaient déterminées à retourner sur leurs pas. De ce moment, le régiment rentra dans ses casernes. Tels sontles faits qui doivent mettre auplusgrand jour sa conduite pendant la durée des désordres de la ville de Nîmes. S’il a à gémir de n’avoir pu prévenir leurs funestes effets, au moins croit-il pouvoir se féliciter de les avoir modérés. Kï Au milieu des troubles déplorables, auxquels le régiment ne prenait aucune part, son influence a dû en être plus efficace. Les réquisitions de la municipalité ont précédé et guidé seules toutes ses démarches : il en fournit les preuves authentiques. Sa conduite est donc à la fois conforme aux lois de l’Etat et de l’honneur, et conséquemment exempte de reproches. Le corps instruit, par l’expérience commune à tous les hommes, que l’opinion publique est souvent égarée par l’imposture ou l’ignorance, et jaloux d’obtenir dans cette circonstance celle qu’il mérite, croit devoir aller au devant de ce qui pourrait y porter atteinte injustement. Exact observateur de la loi dans l’exécution de ses devoirs, il a cru qu’il ne devait point se charger de faire connaître au public tous les faits qui lui sont étrangers; aujourd’hui le pouvoir militaire a des limites qu’on ne peut franchir sans s’exposer à de grands inconvénients; et c’est ce que le régiment se fera toujours scrupule d’éviter. N. B. Les régiments de l’armée, les municipalités dû royaume, et toutes personnes particulières auxquelles parviendront des exemplaires du présent, sont priés de les communiquer au public. Et ont signé MM. les officiers du régiment de Guyenne. Montgaillard, colonel. Le chevalier de Bonne Lesdiguières. Thierriat de Miller elle, major. De La-motte. Dumesny. La Garlière. Canredon. Le chevalier de Virvent. Le chevalier de Lenferna. Dauzy. Dubreuil. De Larïvoire. Mauny, Dumas. Savignac. Champeron. Chaucesse. De la Besneraye. De Costa. Le chevalier de Pouliac. Le chevalier de Lamil-lianchère. Salignac-Fénelon. Lesdiguières. Le chevalier de Clervaux. Fontenay. Le chevalier de Fontenay. Janet. Deplas. De Virvent. Rouaix. De Brossard. De Perrault. Galembert. De Carvoisin. Fontbelle. Le chevalier Tassin. Giraud d'Agay. Pontanier. Lafargue. Virvent de Sauvegarde. Va-rennes . Châtelain. Jalabert. Lachaise. Le chevalier de Lesdiguières. Duperon. Gueroult. Belissen. Capponel. Farincour. Goyer de Villers. En rendant hommage à la vérité, nous nous empressons de signer le présent mémoire. Lespin, major-commandant. 687 NOUS, commissaires de l’assemblée administrative du département du Gard, et chefs de la garde nationale de la ville de Nîmes, rendons hommage au patriotisme que le régiment de Guyenne a fait éclater pendant les malheureuses journées des 13, 14, 15, 16 et 17 de ce mois, à la généreuse impatience qu’il a témoignée de secourir les patriotes, et à son zèle qui a toujours été dirigé ou retenu par les réquisitions de la municipalité. Donné à Nîmes, le 21 juin 1790. Vincens Devillas; Mazer ; Chabaud de Latour ; Vigier-Sarrasin ; Sauvaire; Lecointe, commissaires. Le chevalier Aubry , commandant général des gardes nationales rassemblées à Nîmes. D'Azemar , major général de la cavalerie. Mirande , lieutenant-colonel. Saint-Pons , major. i' Nous, officiers municipaux de la ville de Nîmes, instruits par nous-mêmes et par autrui, de la vérité des faits ci-dessus détaillés, nous nous empressons de les attester, d’y ajouter que Messieurs du régiment de Guyenne, dont les sentiments patriotiques sont évidemment connus, se sont conduits avec beaucoup de prudence sur nos réquisitions, et que le régiment a fait le service avec grande exactitude. A Nîmes, ce 21 juin 1790. » Ferrand de Missol ; du Roure; Pontier , officier municipal. M. Delley d’Agier, secrétaire, donne lecture d’une lettre du maire d’Uzès et d’une délibération de sa municipalité. Sur la nouvelle des malheurs arrivés à Nîmes, il s’est formé à Uzès, d’après la teneur de la lettre, une société aussi sainte que patriotique, un comité de paix qui est composé mi-partie de catholiques, mi-partie de protestants. M. de Béthlzy, évêque d’Uzès, demande que les personnes mandées à la barre par le décret du 17 juin soient dispensées de ce voyage. M. l’abbé Royer, curé de Chavanne. M. l’évêque d’Uzès remplit les devoirs d’un bon pasteur en sollicitant une grâce. Je ne doute pas d’ailleurs, qu’il ne fasse un mandement pour repousser les doctrines qui prévalaient à Nîmes et à Uzès. Plusieurs membres demandent l’ordre du jour et l’Assemblée décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer. Une députation du bataillon des jeunes patriotes du Cul-de-Sac-Saint-Pierre est admise à la barre. M. Foin, l’aîné, son commandant, prononce le discours suivant dont l’impression est décrétée : « Messieurs, grâce à la sagesse des lois constitutionnelles, chef-d’œuvre admirable de la prudence et des lumières des pères de la nouvelle régénération, il n’est pas de plaisirs plus doux, de délices plus ineffables, que de se consacrer et de se former, pour ainsi dire dès le berceau, au service et à la défense de la patrie. Grâces immortelles à la providence divine qui a permis la plus heureuse des révolutions qui change tout à coup et recrée d’une manière merveilleuse la face entière de l’Empire ; nous n’avons pour im-probateurs de nos jeunes évolutions patriotiques, que quelques êtres avilis et dégradés, ennemis de la Constitution, et qui, ne rendant pas même à Dieu l’honneur qui lui est dû, sont plus éloi-ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 juillet 1790.) 688 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 juillet 1790.] gnés encore de se vouer au service de la patrie. Déjà je vois flotter dans toutes les provinces l’étendard sacré de la liberté ; il est arboré par tous les âges, par tous les états ; il ombrage nos berceaux. Toutes les villes sont en armes ; notre enfance, même au sein de la capitale, est forte des vertus belliqueuses de notre général magna-gnime et du courage invinciblede nos pères ; toute la nation enfin est prête à consommer le grand pacte fédératif sur l’autel de la patrie ; ses nombreux habitants ne feront plus qu'une immense famille, dont nous aurons le bonheur d’être les enfants ; et la France désormais sera aussi heureuse par la prudence et l’équité de ses lois, qu’imposante par la majesté de sa puissance redoutable à toutes les nations. En vain dirait-on que nos tendres années sont encore bien précoces; tout est viril chez de jeunes patriotes brûlant d’ardeur pour le salut et la gloire de la patrie; toujours forts et invincibles quand il s’agit de lui procurer la victoire et d’assurer son bonheur, même au prix de leur sang. Le patriotisme est le devoir de tous les âges, de tous les états ; il sera la vertu de tous les temps. L’enfant même, à peine conçu dans le sein maternel, y respire autant par la force des douces ardeurs patriotiques que par l’effet des liens sacrés qui serrent les nœuds conjugaux. Par vos soins, ô nos pères ! ô pères de la patrie 1 nous serons libres enfin, nous serons heureux; il ne nous reste plus de désirs à' satisfaire ; vous avez surabondamment pourvu à nos besoins. Nous n’avons plus qu’un vœu à former ; il est dicté par la reconnaissance : c’est de célébrer l’auguste pacte fédératif, et vous jurer, sur l’autel de la liberté, d’être jusqu’à la mort les plus zélés défenseurs de la Lonstitution. 0 France! ô ma chère Patrie ! si tes ennemis étaient assez hardis pour oser attaquer encore ce grand édifice, ce rempart constitutionnel qui a coûté à nos pères tant de sueurs et de veilles, qu’ils tremblent, les scélérats ! Le ciel dans sa justice armerait les enfants pour venger leurs pères : les sentiments, l’intrépidité, la valeur, chez les Français, ne sont , point enchaînés au cercle que parcourt le char despostique des années. » M. de Mordant, membre du département de l’Eure, présente une adresse de l'assemblée électorale de l'Eure. L’Assemblée en ordonne l’impression. Elle est ainsi conçue : Messieurs, l’assemblée électorale du département de l’Eure, après avoir rempli le vœu de ses commettants pour le choix des membres de ce département, s’empresse de s’acquitter du plus important de ses devoirs, celui de vous exprimer la reconnaissance dont tous lescœurs son t pénétrés par tant de bienfaits que vous versez si rapidement sur une nation que vous régénérez par la sagesse de vos lois. Chaque étincelle de votre génie fait disparaître en un instant des siècles de calamités et d’humiliations ; à votre voix, la liberté, ce bien plus cher que la vie, a ranimé cette belle contrée si longtemps avilie, si longtemps gémissante sous les fers du despotisme ; chaque habitant de cet Empire a repris un nouvel être , chacun s’est élevé à la dignité d’homme; chacun a recouvré ses droits primitifs, éternels, imprescriptibles! ils étaient écrits au fond de vos cœurs. Avec quels transports d’admiration, Messieurs, devons-nous contempler le superbe édifice de notre Constitution, que vous élevez avec tant de courage! L’égalité naturelle, sans laquelle il n’est plus de citoyens, en fait la base inébranlable; à la place de ces distinctions imaginaires, qui ne donnaient que la barbare jouissance du spectacle de l’avilissement du plus grand nombre, on cherchera, à votre exemple, la véritable gloire, celle d’être honoré de l’estime de ses concitoyens; cette estime si précieuse, vous l’avez obtenue, Messieurs, par l’exercice de toutes les vertus patriotiques, de ces vertus sublimes qui, dans les pays libres, ont produit dans tous les temps ces faits mémorables, doot le récit nous charme et nous enlève, et qui, s’il est possible, nous console de la lecture déchirante de l’histoire de ces immenses régions, foulées par le despotisme ; elle n’est que le déplorable registre des crimes des tyrans et des malheurs des peuples. « Quelle plume, Messieurs, tracera l’époque célèbre dont vous honorez nos annales ! c’est à cette époque que commence l’âge d’or de la France ; vos travaux héroïques vous obtiendront de nos derniers neveux un hommage bien mérité. « Mais nous, heureux témoins de la Révolution, nous, à qui vous avez fait franchir l’intervalle immense de l’esclavage à la liberté, nous manquons de termes pour vous peindre les sentiments dont vous avez pénétré nos âmes : consommez, Messieurs, votre glorieux ouvrage ; nous le maintiendrons, nous le défendrons de tout notre pouvoir; les premiers mots que nous apprendrons à nos enfants, seront des actions de grâce à nos courageux et immortels représentants. » Signé : Hue, président ; Duroi, secrétaire ; Nicolas-Lucien-Armand Gochart, électeur ; François LüVERLU, administrateur du district; G. Boquin, administrateur du département de l'Eure; A. F. L. de Mordant, électeur ; députés par le département de l’Eure et district d'Evreux. Trois officiers du régiment Royal-Gomtois, condamnés en 1773 par un conseil de guerre tenu à Lille, demandeque le comité militaire, déjà muni des pièces relatives à leur affaire, veuille bien s’en occuper. Voici leur adresse (1) ; « Messieurs, « Vous voyez devant vous les officiers du régiment Royal-Gomtois, condamnés en 1773 par un conseil de guerre tenu à Lille. Déjà vous nous avez fait l’honneur de nous admettre à la barre de cette auguste Assemblée et de recevoir l’hommage de notre mémoire juttilicatif ; vous avez même daigné nous répondre que vous prendriez notre demande en considération. Depuis ce moment nous nous sommes reposés sur votre équité bienveillante ; mais, au son de la trompette nationale, nos vœux et nos regrets se sont réveillés. « Ils accourent de tous les côtés ces soldats citoyens, ces braves vétérans parmi lesquels, sans nos malheurs, plusieurs d’entre nous auraient l’avantage Inappréciable de paraître. Ils vont jurer à l’autel de la patrie cette sainte fédération, ce pacte solennel qui doit unir tous les français et consolider pour toujours l’édifice admirable de notre Constitution : et nous, nous ne suivrions nos anciens camarades que de cœur et d’esprit 1 Ah! s’il était possible du moins, Mes? sieurs, que nous ayons la consolation de voir à leurs yeux éclater notre innocence ; que les dé-(1) Nous empruntons ce document au journal Le Point - du-Jour, tome XI, page 383.