430 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 123 juin 1791.] Corps législatif que, d’après l’article 8 de la loi du 27 mars dernier, je viens t leur exi-tence précaire qu’à des circnnstanees pas.-agères et mome tarées; déjà ils sont désignés comme portant avec eux le germe de leur pr scription. Mais en vain l’on se set ait infatigablement livré à toutes ces suppressions, à toutes ces réformes, si l’on n’y mettait le sceau pur l’organisation euiière et* complète du régime des tin an ces. Cette organisation a été commencée et préparée par la suppression des aides, des gabelles, des traités dans l’intérieur, et de tous ces impôts indirects qui pesaient si cruellement et si inégalement sur les peuples. Déjà elle a été préparée par la suppression des fermes, des régies, des recettes, des administrations générales, par la fixation des impôts, par la création de la caisse de l’extraordinaire, et surtout par la séparation entière et totale des dettes et dépenses antérieures à 1790 d’avec celle de 1791. il s’agit donc aujourd’hui de compléter cet'.e organisation, et de porter cette entreprise au point de perfection dont elle est susceptible, du moins daus le moment actuel. Le crédit réel d’une nation repose sur deux bases inséparables, ses richesses effectives et la bonne administration de ses finances. Le crédit factice se mesure sur la confiance, et cette confiance le plus souvent est un bien d’opinion aussi fragile qu’elle, il en partage l’inconstance et les vicissitudes; mais le vrai crédit est établi sur ia conviction intime que l’Eiat a des revenus fixes et certains, toujours au niveau de ses besoins ; que ces mêmes revenus sont perçus avec exactitude, qu’ils ne sont jamais égarés dans les canaux qui doivent les conduire au Trésor public, et de là les reporter à leurs différentes destinations, on maintient et l’on perpétue ce crédit par la fidélité et la bonne foi, par une sage administration connue et rendue publique. On l’a dit et répété constamment, il ne doit y avoir ni mystères ni secrets daus cette administration ; tous les contribuables et les créanciers de l’Etat doivent être mis à portée de juger par eux-mêmes de l’ensemble, de l’exactitude, de la fidélité et du mérite de toutes les opérations. La plupart des ministres ont connu les abus de l’aucien régime des finances, et la nécessité d’y apporter des remèdes : quelques-uns l’ont tenté; mais des obstacles de tous genres s’opposaient au succès de leurs entreprises. Le ministre des finances avait à la! ter contre ceux de tous les autres départements ; ceux-ci, en s’isolant, ne cherchaient qu’à épuiser le Trésor public, sans s’embarrasser comment ses pertes pouvaient être réparées. Les abus de toutes natures se soutenaient par leurs propres excès et par leur nombre; ceux qui en profitaient, étaient intéressés à les perpétuer et s’opposaient à toutes réformes. L’administration s’était rendue nécessaire le (1) Ce document n’est pas inséré au Moniteur. 431 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (23 juin 1791.] crédit imposant des compagnies de finance�, par les avances qu’elle en avait reçues; il ta luit, en les supprimant, puurvoir à leur remboursera nt, et cet etl'ort n’étuit pas au pouvoir ü’un mini-tre. La réforme des abus ne pouvait devenir efficace qu’uuiaiit qu’elle serait entière et complète; une telle entrepris ne pouvait être conçue et exécutée que pur une Asst mblée nationam. La nature même ne celte administration semblait s’opposer à tous b s plans de reforme : rien de i fus act f que la circulation et le mouvement continu 1 du Trésor public, il reçoit et verse chaque jour par millions, on ne peut ni suspendre ni interrompre sa marche, son inertie caus erait les pl s gr -mis maux; cependant, pour opérer une réiorme iotale et pour appliquer fa main de l’ouvrier, il faut du ternes, du calme et du repus. Tous ces obstacles, quelque grands qu’ils puissent ê re, n’ont p mit effrayé TA-semblee nationale; elle a tout prévu, elfe a pourvu à tout, et le même instant qui verra détruire sera celui qui verra renaître. Nous laisserons à l'histoire le détail des chan-genien s continuels et successifs que le Trésor public a pu subir, pour ne nous attacher qu’aux dernières réformes qui y ont éfé laites et qui fixent s n état actuel, auquel un nouvel ordre va succéder. Il fuLut d’abord faire cesser les inconvénients sans nombre qui résulta ent de la multitude des cai-ses. Elis étaient indépendantes du Trésor public : les ministres de chaque departement en avaient la pleine et enuère administration ; il leur suffisait, pour couvrir ou pallier leurs injustices ou leurs fausses démarches, de faire approuver par le roi (sous des prétextes [dus ou moins apparents) l’état des dépenses projetées pour l’année dans leurs departements; souvent le Tiésor public était dans l’épuisement, tandis que ces caisses regorgeaient u’un superflu qui, bientôt, était dissipé par le caprice ou la prodigalité. Souvent aussi ils craignaient peu d’anticiper sur les dépenses convenues, et par là, ils forçaient le ministre des finances à recourir à des ressources subites et ruineuses qu’il n’avait pu ni prévoir ni calculer. Un autre abus, non moins dangereux dans ses conséquences, tst que les revenus n’étaient pas tous versés au Trésor public; une grande partie (dans la seule vue d’obtenir un crédit passager) était spécieusement affectée à diverses dépenses; tous les payeurs ou caissiers profitaient des retards, des suspensions dans les payements, des diminutions éventuelles dans les dépenses; de là, les obstacles, les pointillages de formes, les difficultés de tout genre que les créanciers éprouvaient dans l’acquittement de leurs créances. Eu 1772 on commença à réunir à Paris les caisses dispersées dans les provinces, et immédiatement soumises à l’administration des finances; mais celles des différents départements subsistaient encore. Ce n’est qu’en 1788 que le roi, par son édit de mars, supprime les offices de gardes du trésor royal , ceux de trésoriers de la guerre, de la marine, de la maison du roi et de la reine , des bâtiments et des dépenses diverses des ponts et chaussées, celui de contrôleur des quittances de sa maison, et qu’à cette même époque il créa un seul et unique Trésor public, composé de 5 administrateurs et de 5 départements, chargés chacun de fonctions distiuctes et séparées. Ces 5 administrateurs devaient fournir chacun 1 cautionnement de 1,200,000 livres dont les intérêts étaient réglés au 5 0/0 sans rete me; leurs traitements individuels étaient d<* 50,000 par an ; quant aux appointements des commis, frais de bureaux, de correspondance, ils devaient être passés en dépenses dans les états présentés tous les a is au conseil du roi par le co itrôleur général, pour y être définitivement an étés. L’administrateur de la ca sse générale devait P'ésenter, dans le mois d’avril de chaque année, l’état au vrai de tou es les dépenses par lui faites dans l’année précé lente, eus aie en rendre compte à la Cba libre, ainsi que les antres administrateurs (b s 5 né uiriemcnts. Le 1er juin ee ladite année 1788,1e roi lit 2 règlement' particuliers : 1’ n pour l'administration des fonds du département de la guerre; l’autre pour la comptabilité et les dépenses de la marine. Les vues de réforme contenues dans ces édits et règlements étaimt saaes en elles-mêmes, et dirigées vers le but, mais insuffisantes pour l’atteindre; il était réservé aux représen ants de la nation de comp éier la réforme, eux seuls pou-vai ni la tenter et l’exécuter avec succès. L’Assemblée national.' a d’abord supprimé les offices du receveurs généraux, de trésoriers généraux, de receveurs particuliers des impositions; mais pour les remplacer, elle a, par son décret du 27 décembre 1790, ordonné l’établissement d’un bureau de correspondance formé de 4 sections, entre lesquelles seraient divisés les 83 départements; chacune des sections devait être composée d’un directeur, de deux chefs et d’un nombre suffisant de commis pour assurer le recouvrera mi. des impositions : mats tout cela n’embrassait que des parties détachées ; il fallait un ensemble, une organisation entière et complète du trésor national; l’As -emblée ea a posé les bas s par ses décrets des 10 et 18 mars 1791, dont il convient de retracer les principales dispositions. Pour mettre la manutention du Trésor public à l’abri du soupçon même, l’A'Sembiée nationale, par le décret du 10, a déclaré « que l’administration du Trésor public n’appartiendrait à aucun département du ministère ». Elle a ordonné que cette administration serait confiée à un comité de trésorerie, composé de 6 commissaires nommés par le roi, dont chacun serait chargé de diriger particulièrement le travail dans les parties suivantes : 1° La recette journalière; 2° La dép nse du culte, de la liste civile, des affaires étrangères, des ponts et chaussées et des dépenses diverses ; 3° Les payements de la dette publique, des intérêts et des pensions; 4° Les dépenses de la guerre; 5° Les dépenses de la marine et des colonies; 6° La comptabilité. En exécution de ce même décret doivent être établies deux caisses principales : l’une pour la recette journalière, qui ne doit jamais faire aucun payement de détail ; l’autre, sous le nom de caisse générale, ne doit recevoir qu’en masse de la première, et ne verser également qu’en masse dans les 4 caisses de distribution gui seront éta~ blies en sous-ordre (1). Il doit être formé un bureau central decomp-(1) On a pensé qu’elles pouvaient être réduites à 2, et elles le sont effectivement, comme on le verra dans le plan. 432 [Assemblée nationale.] tabilité sous la direction particulière d’un des 6 commissaires, et 1 bureau central de correspondance sous l’autorité et la surveillance du comité entier de trésorerie. Par ce même décret, l’Assemblée nationale se réserve de statuer sur te nombre des commis - mires , trésoriers , caissiers et commis , sur l’organisation des bureaux et sur le traitement qui leur sera accordé. D’après cette réserve, l’Assemblée nationale, par son décret du 18 mars, a fixé à 6 le nombre des commissaires; ils ont été chargés de procéder à un inventaire général du Trésor public. Cet inventaire a dû être divisé en deux parues. t La première doit contenir par titres sommaires toutes les pièces enliassées , les cartons de correspondance, les pièces d'archives , les registres de décisions, et toutes les pièces appartenant à la direction générale du Trésor public. La seconde, qui ne doit être arrêtée que la veille de l’entrée des commissaires en exercice, doit contenir en détail toutes les valeurs en portefeuilles, échues ou non échues, bonnes ou caduques, de quelque nature qu’elles puissent être; et les deniers comptants qui existeront dans les caisses . Les opérations de cet inventaire ont dû être faites en présence des 3 commissaires nommés par l'Assemblée (1), ainsi que le plan de l’organisation intérieure et secondaire dudit comité; il a été chargé de proposer l’établissement de ces caisses, l’état de ses bureaux, le nombre et le traitement de ses commis, les objets de sa correspondance et de ses rapports avec les receveurs de district, et l'usage de l'autorité qu'il doit exercer sur eux, pour , sur le tout et sur le rapport du comité des finances, être statué ce qu'il appartiendrait. L’Assemblée nationale, par le décret qui statuera sur le tout, doit fixer le jour où lesdits commissaires entreront en exercice. Il s’agit de savoir si le comité de trésorerie et les commissaires de l’Assemblée ont rempli ses vues et exécuté ce qui était prescrit par les décrets; tel est l’objet delà première partie du rapport : viendra ensuite le plan d’organisation intérieure, projeté par les commissaires du roi et approuvé par le comité des finances. Les commissaires de l’Assemblée, présents à toutes les séances des commissaires du roi, peuvent aisément rendre compte de leur zèle, de leur travail et des motifs qui ont déterminé l’ordre et la nature de chaque opération. SUR L’INVENTAIRE. PREMIÈRE PARTIE. Après qu’il eût été arrêté qu’il convenait de commencer par l’inventaire, il parut dans l’ordre de voir quelles seraient les mesures les plus promptes, les plus expéditives pour parvenir à une confection exacte, d’après les articles 5 et 6 du décret du 10 mars, en se conformant, pour le temps et le mode, aux vues de l’Assemblée nationale. L’on ne pouvait prendre de détermination à cet égard, sans connaître tous les bureaux, sans avoir des idées exactes de leurs fonctions, et de la manière dont elles étaient remplies et exé-(1) Ces commissaires sont MM. Merlin, La Metherie et Vernier. [23 juin 1791.J cutées. Il fut donc arrêté que, pour se procurer une connaissance plus immédiate et plus précise de la direction générale du Trésor public, de l’établissement des bureaux, de leurs fonctions, de Itur manutention particulière, de la nature des pièces et de tous les objets, on se transporterait dans ces différents bureaux à l’effet de se procurer tous les renseignements nécessaires, en commençant par ceux qui embrassent la recette, et qui sont destinés à faire parvenir les fonds au Trésor public, pour passer ensuite à ceux qui concernent la dépense jusqu’à la comptabilité inclusivement. Cette première visite ayant été faite avec le plus grand soin, vos commissaires ne dissimuleront pas qu’ils furent étonnés de l’ensemble de cette vaste administration ; mais en se rapprochant des détails, en les analysant, leur étonnement diminua par degré; ce qui leur avait paru compliqué devint plus simple ; ce qu’ils avaient d’abord jugé superflu, cessa, à peu de chose près, de leur paraître tel. Cesbureaux étaient au nombre de 24, sous-divisés la plupart en différentes sections, et composés d’un plus ou moins grand nombre de commis. Les commissaires, après avoir pris des notions exactes des fonctions de chaque bureau, des pièces qui y étaient relatives, de celles qui devaient être comprises dans la première ou dans la seconde partie de l’inventaire , chargèrent les chefs de ces différents bureaux de dresser chacun un état de tous les objets qui étaient sous leur manutention, pour ensuite lesdits états être par lesdits commissaires examinés, comparés et vérifiés avec les pièces. Cette mesure parut indispensable pour mettre tout à la fois plus de méthode, d’ordre et de célérité dans la confection de l’inventaire. Lesdits états ayant été fournis tels qu’ils avaient été demandés, les commissaires respectifs crurent avoir une connaissance assez étendue de l’ensemble et de la nature des objets que devait embrasser ledit inventaire pour déterminer : 1° Quel développement il convenait de donner à la description de chacun des bureaux et de ses pièces : 2° Dans quel ordre devaient être placés la nomenclature et l’inventaire de tous ces divers bureaux. Après une discussion approfondie, les commissaires se sont arrêtés principalement aux considérations suivantes. Sur la première question, il fut observé : 1° que les liasses, les cartons, les boites, les registres, les pièces et tous les objets existants dans les bureaux du Trésor public s’y trouvaient dans une si énorme quantité que s’il fallait inventorier distinctement chacun d’eux, plusieurs années suffiraient à peine à cet immense travail ; 2° Que la confection d’un pareil inventaire causerait un tel dérangement, occuperait un si grand nombre de personnes, tant dans les bureaux de la direction générale que dans les autres bureaux du Trésor public, que le cours du service en serait interrompu et troublé d’une manière très préjudiciable à l’intérêt général ; 3° Que l’examen par eux fait les avait mis à portée de se convaincre, que tous les papiers susceptibles d’être inventoriés pouvaient se réduire à 3 classes différentes , savoir : La première composée des registres et cartons qui constatent la suite et les détails de l’administration ancienne du Trésor public : ces pièces, ayant fait partie d’opérations terminées, ne sont ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 433 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] conservées que comme renseignements et mémoires, pour servir, soit à de nouvelles recherches, soit à l’histoire de l’ancienne administration ; ainsi, quant à cette première classe de papiers, il devait suffire d’en constater l’existence, la nature, l’ancienneté et la distribution. La deuxième classe se compose des pièces de comptabilité déposées au Tréspr public pour servir aux vérifications qui doivent précéder les comptes à rendre, et qui sont à vrai dire au seul risque des comptables. La troisième classe est celle des titres appartenant à des particuliers : ces titres ayant été remis de confiance aux bureaux, ils peuvent y rester sur la seule foi du dépôt. Ils estimèrent donc que l’inventaire des papiers de ces deux dernières classes remplirait suffisamment l’objet du décret s’il constatait avec clarté l’existence des registres, l’espèce de titres qu’ils renferment, la quantité des cartons, et la nature des pièces qui y sont enliassées, ainsi que les années auxquelles elles se rapportent. 4° Ils ont pensé qu'un inventaire complet et détaillé eût été d’autant plus inutile qu’il n’y en a jamais eu, et que les dépositaires n’ont jamais fait aucune charge, les titres ayant toujours été remis de confiante dans les différentes mutations qui se sont si rapidement succédé; et pour tout dire enfin, l’inventaire même dont il s’agit ici, n’ayant pas été précédé du scellé, dispensait de toutes formes strictes et rigoureuses. Mais quanta lanature et aux fonctions de chaque bureau, ils n’ont pas cru pouvoir se dispenser d’en donner des notions exactes dans ce même inventaire, pour mieux faire connaître les liaisons établies entre les personnes et les choses, entre les papiers conservés et les fonctions actives; mais qu’il nous soit permis d’ajouter que, quand cette description et cette nomenclature des bureaux n’aurait dû servir que de monument historique, et de moyens de comparaison pour l’avenir entre l’ancienne et la nouvelle organisation, ce seul motif eût été suffisant pour ne pas l’omettre. Nous regrettons sincèrement que les bornes de ce rapport ne nous permettent pas de transcrire ici l’objet du travail et la manutention de ces anciens bureaux, dont plusieurs seront conservés avec quelques rectifications. Telles sont les bornes dans lesquelles les commissaires ont estimé devoir circonscrire cette première partie d’inventaire; ils se sont cru d’autant mieux fondés à préférer cette méthode, que les titres véritablement importants, ceux dont il peut résulter une valeur active pour le Trésor public, seront, par leur nature, portés dans la seconde partie de l’inventaire pour y être particulièrement décrits et constatés. Sur la seconde question, les commissaires ont considéré que l’ordre naturel à suivre dans la description et la nomenclature des divers bureaux était indiqué par la nature même des choses, par la marche des opérations du Trésor public ; que dans ce sens il était convenable de commencer par inventorier les bureaux d’administration générale, ceux qui ont rapport tant à la recette qu’à la dépense; de décrire ensuite les bureaux de recettes et recouvrements, pour passer progressivement, et pour ainsi dire, de procédés en procédés, au dernier terme de l’emploi des fonds publics, au payement de toutes les dépenses, et à la comptabilité ; c’est d’après toutes cesconsidérations que les commissaires ont arrêté que l’inventaire serait fait par titres sommaires seulement, aux lre Série. T. XXVII. termes du décret, et en conséquence tous lesdits bureaux ont été classés dans leur ordre naturel, et ont ensuite été inventoriés successivement dans ce même ordre. Dès lors, par décret du 29 avril 1791, il a été ordonné « que les commissaires de la trésorerie, en faisant procéder à l’inventaire du Trésor public, feraient dresser un inventaire à part des effets qui y étaient rentrés par diverses voies pour être annulés, et être ensuite procédé à la vérification et au brûlement desdits effets par les commissaires de la caisse de l’extraordinaire, aux termes du décret du 24 décembre dernier. » En exécution de ce décret, ce troisième inventaire a été fait dans un chapitre séparé. Nous n’entreprendrons point de rappeler ce qui est consigné dans ce volumineux inventaire; les minutes ont été déposées aux archives nationales, on peut y recourir. Nous nous abstiendrons même, comme nous l’avons annoncé, de retracer les fonctions de ces différents bureaux; ce détail nous porterait trop loin (1). Au premier aspect, et pour les gens qui dédaignent de réfléchir, rien ne paraît plus simple que la manutention du Trésor public, elle n’offre d’abord que l’idée de recette et de dépense; mais l’on se forme bientôt une opinion plus juste, si l’on en vient à approfondir l’ensemble et les détails. Des canaux imperceptibles et innombrables forment les recettes qui abreuvent le Trésor public : ces recettes grossies dans leur cours, s’accroissent insensiblement, et suivent une marche graduelle jusqu’à ce qu’elles soient enfin versées dans le réservoir commun. A peine y sont-elles arrivées, qu’il faut les distribuer et les répandre par des milliers de fractions, en s’assurant qu’elles parviennent sûremen à leur destination. Mais ce ne sont là que les ressorts secondaires de cette grande machine; ce qui . constitue une vraie administration, c’est l’art de maintenir toutes les perceptions dans leur intégrité, d’empêcher qu’elles ne soient jamais détournées de leur cours, de les faire arriver à temps; de donner au commerce toutes les facilités possibles, pour une plus prompte circulation; d’alimenter le numéraire effectif dans une juste proportion, de mettre le Trésor publie à l’abri de ces besoins imprévus qui forcent infailliblement à recourir à des ressources subites et ruineuses ; c’est de maintenir le niveau entre les recettes et les dépenses, de telle sorte que le Trésor public puisse toujours remplir ses engagements avec une scrupuleuse exactitude. De plus grandes vues, de plus grands objets caractérisent encore une vraie administration en finances; il faut maintenir !e.s charges de toutes les monnaies, maintenir l’équilibre des nôtres avec celles de tous les autres gouvernements ; il faut être en état de connaître tous les calculs, toutes les chances et toutes les probabilités sur la vie humaine. Il faut être assez habile et assez pénétrant pour découvrir au loin (1) L’Assemblée, par son décret du 5 juillet 1790, avait ordonné au comité des finances de faire imprimer le détail de la composition des bureaux dos divers départements, telle qu’elle était alors, telle qu’elle était en 1788, et telle qu’elle s’était trouvée à deux époques antérieures, distantes au moins de dix années l’une de l’autre. On n’imagine pas où aurait porté une sembla-! ble entreprise. 28 484 [Assemblée nalionale.l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (23 juin 1791.] les effets, plus ou moins salutaires ou nuisibles, que peuvent ou doivent produire les grandes opérations de finance. Il faut être assez instruit, pour apprécier avec certitude le mérite de tous les plans proposés par une foule de novateurs toujours trop jaloux de leurs productions. En un mol, il faut être en état de juger des subsides qui conviennent le mieux à une grande nation, eu égard à son commerce, aux mœurs de ses habitants et aux différentes productions de son sol ; du mode le plus convenable pour en recouvrer le payement ; des moyens les plu3 propres à prévenir les fraudes, et à simplifier les perceptions. Mais on sent assez que ces profondes spéculations ne sont pas du ressort d’un administrateur unique ; ce n’est déjà que par un travail extraordinaire, qu’il peut se mettre au niveau des devoirs qui lui sont imposés, et qui exigent une surveillance active et continuelle, pour donner l’impulsion et le mouvement à toutes les parties. On a dit avec raison que le Trésor public était dans le corps politique ce que le sang et les veines sont dans le corps humain ; le plus petit vaisseau intercepté, dans la plus faible de ses ramifications, produit un mal réel; s’il est plus considérable, le corps languit et périt insensiblement ; mais à l’instant où la circulation cesse, le corps tombe et s’anéantit. La seule différence, peut-être, est que la chute de l’un, calme et paisible, n’est que le néant opposé à l’être, et rentre dans le cours naturel des choses, tandis que celle de l’autre ne se fait qu’avec éclat, détruit 1 ordre social jusque dans ses fondements, produit au loin les effets les plus terribles, et enfante des maux d’autant plus inséparables que l’Etat demeure alors sans confiance et les citoyens sans ressources. Les choses considérées sous cet aspect, on veut que 3 divisions principales partagent les bureaux qui doivent composer l’organisation du Trésor public. Les uns appartiennent également à la recette et à la dépense, et constituent vraiment l’administration en prenant ce terme dans son acception rigoureuse. Les autres appartiennent à la recette, les troisièmes à la dépense. C’est cette division que les commissaires du roi ont adoptée, et qui paraît en effet la plus lumineuse, la plus naturelle et la plus convenable. Avant de donner quelques idées générales des différents bureaux, il convient défaire une observation commune à tous, en particulier, et qui préviendra les fausses interprétations et les faux jugements. Il n’est que trop ordinaire de confondre le vice des choses avec les personnes qui les administrent. L’organisation du Trésor public pourrait être viciée dans toutes ses parties sans que l’on puisse, en aucune manière, inculper les administrateurs en chef et leurs coopérateurs, leurs fonctions étant bornées à gouverner, à régir, à exécuter le mieux possible , suivant l’ordre établi. Le défaut de réformes qui était au-dessus de leur pouvoir ne pourrait sans injustice leur être imputé. D’après cette explication, qui écartera toute équivoque, nous allons parler des différentes divisions ou sections du Trésor public. PREMIÈRE DIVISION OU PREMIÈRE CLASSE. Bureaux vraiment dits d’administration, appartenant à la recette et à la dépense. Ils se réduisent à ceux qui suivent : Fonctions personnelles de M. l’ordonnateur général du Trésor public. Fonctions personnelles du premier commis du Trésor public. Bureau des renvois. Bureau d’agence. Bureau de liquidation. Ancien bureau central de vérification de toutes les opérations du Trésor public en recette et en dépense. Nouveau bureau central établi pour la réunion de tous les bordereaux de recette et de dépense, et pour la tenue des livres en parties doubles. Fonctions personnelles de M. l’ordonnateur général du Trésor public. 1° Ses fonctions étaient immenses; pour s’en faire une juste idée, il faut recourir à l’inventaire où elles sont détaillées. On ne peut les avoir remplies avec plus de zèle et d’exactitude que ne l’a fait le directeur actuel; il est entré en exercice dans des moments critiques, pénibles et difficiles; à son entrée dans l’administration, il n’a trouvé au Trésor public que 400,000 livres en numéraire effectif, tandis qu’il fallait alors payer près de 10 millions par mois en espèces. L’Assemblée, qui cherchait avec raison à s’éclairer, demandait sans cesse des états de situation du Trésor public ; la manière dont il était organisé ne permettait pas de satisfaire à toutes ses demandes; pour remplir son vœu, cet administrateur créa un bureau de comptabilité qui, dans la situation des choses, ne pouvait encore donner le moyen de satisfaire complètement à ce que l’Assemblée exigeait ; en un mot, il a fait tout ce qui dépendait de lui ; il a pourvu à tout, il a animé et vivifié toutes les parties de ce grand corps. Il ne pouvait être gouverné par une âme plus pure, plus active et plus intelligente, tout ce qui lui était subordonné imitait son exemple et se rendait digne de le seconder; mais, déjà nous l’avons observé, cela ue détruisait point les vices qui étaient dans la nature même des choses, et qui n’avaient point échappé à cet administrateur. En effet, quoique cette administration ait été successivement réformée et perfectionnée, il restait encore beaucoup de choses à faire ; aussi disait-il lui-même : Suspendez et arrêtez pour quelque temps le cours rapide du Trésor public, et l’on fera toutes les réformes qu’il exige. Ce sont ces réformes que l’Assemblée a projetées en prenant toutes les précautions nécessaires pour ne point interrompre le cours et l’activité des recettes et des payements. L’Assemblée, constamment occupée de la réforme des abus, avait déjà ordonné par un décret du 28 novembre 1789, qu'une section du comité des finances serait chargée de la recherche de tous les abus intervenus dans cette partie de V administration pour lui en rendre compte. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] Par autre décret du 21 juillet 1790, l’Assemblée, guidée par les mêmes motifs, avait ordonné que le premier ministre des finances ferait remettre un mémoire contenant ses vues sur la meilleure organisation du Trésor public. De tous les abus, le plus grand était de n’avoir qu’un seul et unique administrateur ; car quelque zèle, quelque activité, quelque intejligence qu’on puisse lui supposer, il n’en était pas moins imprudent d’asseoir sur une seule tête le principal pivot de l’Etat ; l’expérience d’un seul homme est totalement perdue pour celui qui lui succède. Plus cet administrateur unique a de talents et de capacité, plus il est dangereux de ne pouvoir le remplacer convenablement; mais en le supposant autrement, quel danger n’y avait-il pas dans ces changements, dans ces vicissitudes continuelles? l’homme borné ne voit ni les inconvénients ni les dangers, il entreprend avec une aveugle confiance; l’homme de génie dédaigne de marcher sur des traces frayées, il veut être novateur, et souvent il sacrifie à sa gloire plutôt qu’aux intérêts qui lui sont confiés. Un ordonnateur unique pouvait prévariquer impunément ; il était à lui-même son seul confident ; il était maître de rendre impossible les comptes, les vérifications et les preuves de son délit ; il pouvait abuser en se livrant à toutes les espèces d’iniquités, en donnant de l’extension aux emprunts, en recevant comme effectifs des titres imaginaires, en remettant en circulation des effets qui devaient être supprimés, en revendant beaucoup au-dessous de leur valeur ceux qui avaient été reçus pour comptant, en faisant payer ce qui n’était pas dû, en substituant des personnes insolvables à de bons débiteurs, en agiotant sur les fonds du Trésor public, en s’associant secrètement au commerce d’actions dont il pouvait faire hausser ou baisser la valeur au gré de sa cupidité, soit enfin de mille et mille autres manières, car les détails porteraient ici trop loin. La réunion de 6 commissaires écarte ces inconvénients; il se forme du concours et du nombre une masse de lumière qui s’accroît avec le temps, et ne s’éteint jamais : si, par la suite naturelle des choses, l’un ou plusieurs administrateurs laissent leurs places vacantes, ceux qui restent n’en suivent pas moins les plans adoptés ; on n’est plus exposé à ces changements, à ces innovations qui ne produisant que le désordre, et mettent toujours en danger la chose publique. L’abus est presque impossible, ou du moins ne peut être moralement supposé dans une semblable réunion, surtout lorsque le choix du chef de la nation a été confirmé, comme il l’est ici, par la voix publique, quan I il faut pactiser pour le crime, on craint de faire échouer ses projets en les dévoilant. Ce comité existe en Angleterre, mais il dépend du principal ministre, tandis qu’ici il est indépendant de tout autre ministère, ce qui prévient encore un autre abus non moins dangereux. En effet, un ministre des finances en butte à tous les déprédateurs publics, devenait le jouet de l’intrigue, des complots, des calomnies ; plus il était honnête, plus il était exposé. L’indépendance et la fixité d’un comité permanent nous mettent à l’abri de ce danger. Enfin cette réunion dans le mode sous lequel elle est conçue, offre une surveillance plus étendue, en conservant tous les avantages de l’unité : 435 il était donc utile de substituer 6 administrateurs à un ordonnateur unique. Ce bureau de trésorerie était d’autant plus convenable, que déjà il avait été proposé, au nom du roi, par M. Necker; mais, comme aux termes de la proposition les commissaires devaient être pris dans le sein de l'Assemblée, elle déclara, par son décret du 26 mars 1790, que, fidèle à ceux des 7 novembre et 26 janvier, qui défendaient à ses membres d’obtenir aucune place, pension et traitement du roi, même en donnant leur démission, le président serait chargé de se retirer auprès du roi pour lui exprimer ses regrets de ne pouvoir se rendre aux désirs de sa majesté. Par le décret du 10 mars, l’administration du Trésor publie n'appartenant plus à aucun département, on n’aura point à présenter à la signature du roi les ordonnances arbitraires des différents ministres ; ce comité de trésorerie ne pourra refuser leur demande quand elle3 seront resserrées dans les bornes prescrites, sans pouvoir rien accorder lorsqu'elles excéderont : par là on préviendra des abus qui se reproduisaient chaque jour avec autant d’audace que d’impunité. Toutes les dépenses seront désormais fixées et déterminées ; du moins elles ne pourront être faites qu’en vertu de nouveaux décrets, ou d’ordonnances rendues sur des objets de simple administration ; on n’aura point à redouter la surprise faite à la vente de nos bois par ces ordonnances au porteur, par ces acquits de comptant qui devaient être payés à vue par le garde du Trésor, dont on ne voulait pas même qu'il fût fait mention ni donné quittance. On n’aura point à redouter un abus encore plus criant, celui de voir des ministres assez pervers, assez audacieux pour usurper cette forme d’ordonnance, et disposer en maîtres du Trésor de la nation. L’administrateur unique ne pouvait porter partout l’œil de la surveillance, il lui fallait un aide principal, cet aide se trouvait dans le premier commis du Trésor public. Fonctions personnelles du premier commis du Trésor public. Rien n’est plus exact que ce qui est retracé dan s l’inventaire ; on y peut recourir : nous observerons seulement que ce premier commis n’a suffi, depuis 32 mois, à ses différentes occupations, qu’en ajoutant à chaque jour, le travail d’une partie de la nuit; il a obtenu la récompense de son zèle, de ses lumières et de son honnêteté, par sa nomination à l’une des places de commissaires de la trésorerie, et il s’en est rendu encore plus digne par les sacrifices qu’il a faits. Les fonctions dont il était chargé seront réunies à celles des commissaires de la trésorerie ; quoique chacun des membres en particulier soit tenu de diriger une partie désignée du travail, ils s’entr’aideront mutuellement, et surveilleront l’administration totale. Us doivent s’assembler au moins trois fois par semaine. Le comité ne sera censé complet que par la présence de 4 membres : tous ensemble sont tenus de signer l'état général et les états particuliers de payements, ainsi que le compte général des recettes et des dépenses ; ils ne doivent jamais recevoir ni écrire aucune lettre que collectivement : par là on évitera les erreurs où un seul pouvait aisément tomber, et l’on sera à l’abri du danger de toute soustraction. La multiplicité des objets , l’immensité de correspondance n’auraient présenté que cahos 436 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]23 juin 1791.] et confusion, s’il n’y avait eu un ordre établi : cet ordre existait par le bureau des renvois. Bureau des renvois. Les personnes attachées à ce bureau étaient chargées de renvoyer et distribuer à tous les autres ce qui les concernait : mais pour occuper tout leur temps, on y avait réuni l’enregistrement de toutes les décisions données par le roi, et ensuite les dépenses du culte. La nécessité de ce bureau annonce assez qu’il doit en exister un de même nature pour l’admi-nistratioD de la trésorerie nationale; mais en le dépouillant de tout ce qui lui est étranger, et qui n’y avait été attaché qu’accidentellement. Bureau d'agence. C’est ici une des fonctions les plus importantes, entre celles qui sont accessoires à la manutention du Trésor public, au recouvrement des créances et à la défense dns intérêts de l’Etat. C’est M. Turpin qui remplit les fonctions d’agent, en exécution d’un décret du 21 juillet 1790 ; mais il n’a pas encore entre les mains ni les tables, ni les titres du contrôleur des rentes, ni les papiers qui sont au pouvoir du sieur Lombart, procureur : tous deux doivent être payés, mais sur les deniers qui sont entre les mains des séquestrés. L’étendue et les limites des fonctions de cet agent ne sont point encore fixées ; elles seront à peu près analogues à celles des ci-devant contrôleurs des rentes et des bons d’Etat. Par décret du 20 octobre 1790, il a été ordonné que le comité de liquidation présenterait incessamment à l’Assemblée un projet de loi sur les poursuites à faire contre les débiteurs du Trésor public, et sur la forme de ces poursuites, à l’effet de faire rentrer le plus promptement possible dans le Trésor national les sommes qui lui sont dues ; ce décret est nécessaire et indispensable, mais il n’a point encore été proposé. On doit consulter avant tout la déclaration du 4 mai 1766, et l’arrêt de règlement du 2 juin 1767. Un autre décret du 14 novembre 1790, rendu sur le rapport du comité des finances, règle les privilèges et préférences accordés à la nation sur les biens des receveurs de districts ; mais il ne va pas au delà : les recouvrements sont en retard sur la plupart des objets, même sur ceux dont les poursuites sont ordonnées par décret, tel que celui du 14 février sur le domaine de Fénestrange. L’Assemblée, par son décret du 27 avril 1791, après avoir réglé où devaient être portées toutes les affaires qui étaient pendantes au conseil des parties, des finances, des dépêches, à la grande direction, à des commissaires particuliers, et généralement toutes celles qui n’étaient pas de la compétence du tribunal de cassation, excepte par l’article 10, « les affaires dans lesquelles la nation plaidait directement contre des particuliers, comme créanciers ou débiteurs, et veut que toutes affaires -de cette nature, actuellement pendantes aux diverses sections du conseil, ou à la ci-devant cour des aides de Paris, soient portées à l’un des 6 tribunaux de Paris, soit pour les juger, à la charge de l’appel, s’il n’est point encore intervenu de jugement, soit pour choisir un des 7- tribunaux d’arrondissement s’il y avait eu un premier jugement, lequel tribunal prononcerait alors en dernier ressort ». Par l’article 11, on excepte des dispositions ci-dessus les objets soumis par les décrets à l’examen du commissaire liquidateur, et à la décision de l’Assemblée nationale. Comme les 6 tribunaux de Paris ne sont désignés que pour les affaires qui étaient pendantes au conseil, il en résulte que toutes les autres doivent être portées par l’agent du Trésor public par-devant les tribunaux ordinaires : ce qui exigera un examen très sérieux de la part de l’Assemblée. Observons encore que les pouvoirs de cet agent n’étant pas déterminés, et que le décret demandé au. comité de liquidation n’étant pas rendu, l’Assemblée, par son procès-verbal du 2 juin, le chargea de signifier une main levée, qui, ci-devant, eût été de la compétence du procureur général de la Chambre des comptes. C’est avec raison que l’agent du Trésor public a observé que si l’on n’admettait aucun tribunal pour les affaires de la nation, soit en demandant, soit en défendant, sa correspondance et ses bureaux exigeraient des frais immenses. En effet, il pourrait avoir des affaires dans les 537 districts, tant en première instance qu’en cause d’appel. Indépendamment des frais de bureaux et de poursuites, les affaires dirigées au loin pourraient être mal instruites, ou languir considérablement : il conviendrait donc d’avoir un seul et même tribunal, pour les affaires où la nation doit agir comme créancière ou comme débitrice. L’exception à la règle générale ne blesserait personne, puisqu’elle serait pour l’intérêt de tous, et les débiteurs de l’Etat, qui sont pour la plupart des percepteurs de revenus publics, n’auraient à imputer qu’à eux-mêmes l’obligation où ils seraient de se défendre hors de leur ressort. Si l’Assemblée, trop inflexible sur ses principes, ne voulait point former d’exception pour les affaires de première instance ; du moins conviendrait-il d’en admettre une pour le tribunal d’appellation, afin de rectifier les instructions vicieuses et négligées faites devant les premiers juges. Bureau de liquidation. Trois membres remplissaient les fonctions de ce bureau. Par une proclamation du 17 décembre dernier, deux commissaires furent nommés par le roi, pour rayer en exécution des décrets les parties de rentes appartenant au clergé et aux maisons religieuses. On suivait dans ce bureau les anciennes liquidations faites en vertu de l’édit de 1764 ; tous les créanciers devaient faire liquider leurs créances dans un délai fixé, à peine de déchéance. Plusieurs lois ont prorogé ce délai jusqu’en 1775 ; en sorte que ce qui est antérieur, ne doit plus être soumis à l’examen. Ce bureau était encore chargé de dresser des arrêts de formes sur différents objets, entre autres sur des rectifications d’erreurs dans les contrats de rentes, titres nouvels et autres actes. Les nouveaux commissaires doivent être chargés de préparer ces rectifications ; on avait réuni à ce bureau un nouveau travail, concernant les radiations des rentes appartenant au clergé et aux maisons religieuses. Les préposés sont chargés de constater celles qui doivent être payées [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] par les divers districts : cette partie s’exécute encore aujourd’hui. Il est un autre objet de radiation, dont ce bureau n’a point été chargé ; c’est celui qui devait être fait en vertu du décret du 18 décembre 1790, qui veut « que tous Français, fonctionnaires publics, ou recevant des pensions ou traitements quelconques de l’Etat, qui ne seraient pas présents et résidents dans le royaume, qui n’auraient pas prêté le serment civique dans le délai d’un mois, après la publication dudit décret ..... demeurent par ce seul fait déchus de leurs grades, emplois, et privés de leurs pensions, appointements ou traitements. » Un décret du 1er mars enjoint au comité des finances de donner l’état de ces ra liations, mais par le rapport que le comité en a fait à l’Assemblée, l’exécution a été reconnue impossible, vu que le défaut de précautions vis-à-vis ceux qui s' éloignent ou qui s'absentent , ne permet pas de dire s’ils ne font qu’un voyage momentané, avec ou sans esprit de retour : ce qui démontre de plus en plus la nécessité d’une loi positive contre l’émigration. Tout ce que l’on a pu faire pour l’intérêt du Trésor public, a été de refuser le payement à ceux qui ne représentaient pas des pièces suffisantes, pour prouver qu’ils s’étaient conformés au décret. Ancien bureau central pour la vérification et contrôlé de toutes les opérations du Trésor public en recettes et en dépenses. C’est ici le centre auquel devait aboutir toute la comptabilité des caisses du Trésor public, où l’on expédiait les quittances comptables; cependant l’ancienne forme établie en ce bureau n’ayant pas permis à M. le directeur général d’y puiser tous les éclaircissements dont il avait journellement besoin pour répondre aux demandes de l’Assemblée nationale, il se vit obligé de monter un nouveau bureau de comptabilité en parties doubles. Dans ce bureau, on préuaraitles comptes qui devaient être présentés à la Chambre des comptes, où s’opérait la comptabilité définitive; mais il faut observer que, pour ces comptes définitifs, il fallait attendre le complément des recettes et dépenses de l’année entière, ce qui les rendait interminables; et pour comble d’abus on exigeait dans ce tribunal des détails infinis : les sommes devaient être énoncées en toutes lettres, toutes les pièces de dépenses devaient être détaillées; il en résultait des volumes d'écriture d’autant plus inutiles qu’ils n’ajoutaient rien à la sûreté des parties intéressées, et l’on terminait par des opérations plus inutiles encore, qui étaient de faire des copies de tous ces comptes, ce qui enfantait d’innombrables volumes. Enfin, et pour tout dire, la Chambre des comptes n’avait pas le droit de contester aucune des ordonnances de payement ou de dépenses; toutes ses opérations se bornaient à une vérification de chiffres, à une critique matérielle des pièces justificatives. Il est vraiment étonnant que de tels abus aient subsisté si longtemps. Nouveau bureau central établi pour la réunion de tous les bordereaux de recettes et dépenses , et pour la tenue des livres en parties doubles. Ce bureau, créé pour suppléer à ce qui manquait aux précédents, ne remplissait cependant 437 pas encore avec assez d’étendue ce qu’on en devait attendre ; la comptabilité en parties doubles était peu familière dans cette ancienne administration, mais on y a suppléé par la nouvelle organisation. SECONDE DIVISION ou SECONDE CLASSE. Bureaux qui appartiennent à la recette. Ce vaste et important bureau a été établi, par décret du 27 décembre 1790, pour suppléer aux fonctions des receveurs généraux supprimés ; M. le directeur général fut autorisé d’établir sous sa direction et surveillance un bureau de correspondance générale avec les receveurs de district, formé de 4 sections, entre lesquelles seraient partagés les 83 départements, avec un directeur et 2 chefs de bureau de chaque section, et autant de commis qu’il serait nécessaire , les comptes de chaque receveur de district doivent y être tenus en parties doubles pour s’assurer de la recette effective , et des sommes à disposer à terme fixe pour les besoins du Trésor public. Dans ce bureau doivent être fournies les res-criptions à vue données pour la facilité du commerce et de la circulation moyennant de l’argent comptant et celles tirées sur les mêmes receveurs pour les dépenses à faire sur les lieux. Tout cela a été exécuté; un bureau central réunit les 4 sections avec la correspondance, et se trouve de plus chargé de vérifier les états au vrai des ci-devant receveurs généraux des finances et des anciens receveurs de la ville de Paris. Dans chacune des 4 sections, sous la surveillance d’un directeur et de 2 chefs, on suit les recouvrements et la comptabilité avec les receveurs de districts. Ce bureau central et les 4 sections subsisteront dans la nouvelle organisation, mais avec une beaucoup plus grante étendue de travail, vu la réunion de tous les départements et de toutes les recettes; et comme il était sous la direction et surveillance du directeur général, il sera sous la surveillance de tous les commissaires réunis de la trésorerie. En comptabilité, toutes les recettes comme les dépenses doivent être contrôlées; ainsi chaque section a son contrôle, ses comptes ouverts, et un bureau général, où seront formés les comptes en parties doubles pour les recettes. Bureau du grand comptant et caisse générale. Les recettes exigent des caisses particulières qui versent chaque jour dans les caisses générales. Ces caisses générales étaient au nombre de 2, l’une connue sous le nom de bureau du grand comptant, quoique dans le vrai on n’y reçoive aucune espèce; l’autre sous le nom de caisse générale. Il faut savoir que toutes les opérations du Trésor public, soit en receites, soit en dépenses, sont doubles, quoique pour le même objet. Par exemple, le premier commis ou caissier du grand comptant, pour assurer le payement à faire, l’enregistre sur une main courante, donne au payeur le relevé de cet enregistrement; celui-ci le porte au caissier, qui reçoit le comptant, 438 lAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ]23 juin 1791.] donne son récépissé au bas du bordereau, et ce bordereau est reporté au bureau de comptabilité, où il est échangé contre un récépissé ou quittance comptable, qui est ensuite remis au caissier du grand comptant, qui le signe : en sorte que les livres du grand comptant, ceux de la caisse générale, ceux du bureau de comptabilité doivent être dans un parfait rapport, ce qui opère un triple contrôle ou une triple vérification. Il existe d’autres bureaux qui alimentent les recettes du Trésor public, tels que ceux des loteries et des monnaies. Bureau de surveillance pour la loterie de France. Cette surveillance est plus étendue qu’on ne pourrait d’abord le croire, à raison des fraudes sans uombre qui se commettent dans cette partie, et qu’il est si difficile de prévenir et de réprimer. Cette surveillance s’étend encore sur les secours assignés par le gouvernement sur les loteries. Ce bureau se trouvant chargé tout à la fois d’une partie d’administration et d’une partie de comptabilité, il appartiendra, sous ce premier rapport, au ministre des contributions, et sous le second à la trésorerie, et sera rejeté aux dépenses diverses; mais sans rien préjuger on peut croire que, dans des temps plus heureux, on se fera un devoir de supprimer cet établissement immoral, qui ne se perpétue que par des raisons politiques, et jusqu’à ce que l’on soit parvenu à écarter toutes les loteries étrangères. Bureau des monnaies. L’office de trésorier général des monnaies n’a point été supprimé, mais le domaine en est devenu propriétaire à titre de déshérence par la mort de M. Deschamps, dernier titulaire. Ce bureau est chargé de la comptabilité des directeurs des monnaies de tout le royaume, en exécution de l’édit de 1788, comme aussi de faire rentrer les bénéfices qui résultent de la fabrication, bénéfices qui sont devenus à peu près nuis, et qui sont plus qu’absorbés par le surachat. À la mort de M. Deschamps, on nomma, par arrêt du conseil du 14 décembre 1788, un préposé pour suivre les exercices entamés ; et par lettres patentes du 12 mai 1789, ce même préposé fut autorisé à exercer les mêmes fonctions en son nom ; il paye les gages des officiers des monnaies, et généralement tout ce qui est relatif à ce département. La plupart des directeurs des monnaies sont -en débet de sommes très considérables : ils se tiennent pour l’ordinaire si près du remède qui leur est accordé, que souvent les essais faits par les officiers des monnaies leur sont défavorables : alors ils sont forcés en recette et condamnés à des amendes très considérables, dont il a été jusqu’ici très dif ficile de faire le recouvrement ; souvent ils ont obtenu des remises, et par-là le public se trouvait en perte réelle sans aucune indemnité pour la nation. Le commis qui a remplacé M. Deschamps rend compte au Trésor public par des états au vrai, et préparait ceux qui devaient être présentés à la Chambre des comptes. Comme le bureau n’était pas occupé, il a été chargé, par M. Dufresne, de l’examen des comptes des anciens gardes du Trésor royal. Telles étaient les recettes du Trésor public, qui deviendront aujourd’hui beaucoup plus étendues par les différentes réunions qui ont été opérées. — Il reste à parler de la troisième division de l’inventaire, celle qui concerne les dépenses. TROISIÈME DIVISION ou TROISIÈME CLASSE. Bureaux qui appartiennent à la dépense. Avant de faire les dépenses et d’acquitter ce qui est dû, il faut que les fonds soient aperçus, que l’on sache en vertu de quels titres une somme est payée; c’est ce qui avait donné lieu à des bureaux de distributions de fonds, d’expéditions d’ordonnances de payement, de dépôt et délivrance de ces mêmes ordonnances. Bureau pour la confection de toutes les distributions de fonds et d’expéditions d’ordonnances. Toutes les demandes en réclamations de payement qui n’appartenaient pas à des départements fixes, étaient renvoyées, pour l’examen à ce bureau, ce qui exigeait de la part du chef un travail assidu, une grande intelligence et une probité sévère ; M. Burté, qui le dirigeait depuis longtemps, réunissait toutes ces qualités. Ci-devant toutes les dépenses publiques se faisaient en vertu d’ordonnam es signées par le roi ; les pensions mêmes étaient payées sur des ordonnances qui s’expédiaient dans un bureau particulier. Ce bureau était encore chargé de former les états de distribution des fonds que le Trésor public était dans le cas de faire passer dans les pays d’Etats. Autrefois la comptabilité du Trésor public faisait partie de ce bureau. Dans la nouvelle organisation, presque tous les payements seront faits en exécution des décrets, et sur des actes de distributions ordonnancés par chaque ministre dans sa partie; dans quelques cas seulement, les ministres signeront des ordres sur leur responsabilité, pour des objets qui ne sont que l’exécution des décrets où les dépenses n’auraient pas été fixées et déterminées ; les commissaires de la trésorerie ne seront ordonnateurs que dans un seul cas prévu; le bureau des ordonnances deviendra inutile dans la trésorerie nationale. Les ministres auront des commis de confiance pour leur rendre compte des objets qui exigeront des ordonnances de leur part. Bureau pour le dépôt et la délivrance des ordonnances. Quoique les ordonnances de payement étaient expédiées et signées, on ne les remettait pas d’abord aux parties; elles étaient renvoyées au bureau du dépôt, où l’on préparait un projet de distribution pour les payements à faire dans la semaine ou la quinzaine; l’état était arrêté par le directeur général; un double restait au bureau, l’autre était envoyé à la caisse. C’est dans ce même bureau que s’expédiaient les états de distributions pour les gages du conseil. 439 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] Aujourd’hui ce bureau deviendra inutile comme celui des ordonnances. Bureau pour les demandes des pensions. Ce bureau était chargé de l’examen des demandes à l’effet d’obtenir des pensions ; lorsque le bon du roi était accordé, on faisait la minute ou ampliation de brevet, sur lequel on prenait la signature d’un secrétaire d’Etat. Le décret du 3 août, titre I, art. 22, 23, 24, 25, a réglé dans quelles formes les pensions et gratifications seraient accordées pour l’avenir, on doit s’y conformer; quant au payement, il doit être fait provisoirement à la trésorerie nationale, ce qui exigera un bureau. Département de la guerre. Ce département comporte des détails immenses : il est divisé en 4 sections : 1° l’extraordinaire des guerres ; 2° l’artillerie et génie ; 3° l’ordinaire des guerres, y compris les troupes delà maison du roi; 4° la maréchaussée avec ses accessoires. Il a son payeur principal, sa caisse auxiliaire, ses lettres de change, sa comptabilité ; il correspond avec 32 trésoriers principaux et 30 trésoriers particuliers dans les différents départements : touscesobjets nécessitent une tenue de différents livres et registres pour chacun d’eux. Il a encore deux comptabilités particulières, l’une pour les Hollandais réfugiés, l’autre pour ie port de Cherbourg. Département de la marine. Ce département est aussi divisé en 4 sections ou services: 1° la marine; 2° les colonies d’Amérique ; 3° les iles de France et de Bourbon ; 4° les Indes. Il a son payeur principal, sa caisse auxiliaire, sa comptabilité; il correspond avec les trésoriers particuliers dans les ports et dans les colonies : il est régi comme celui de la guerre avec cette différence néanmoins que les livres y sont tenus en parties doubles et dans la plus grande perfection. Département des dépenses diverses. Il embrasse toutes les dépenses du Trésor public, à l’exception de celles de la guerre et de la marine ; pour se faire une idée de l’immensité des fonctions dont il est chargé, il faut considérer qu’il exécute 55 espèces de différents payements indépendamment des suspens, ainsi que de la recette et dépense fictive pour les reconstitutions. Les payements sont faits sur des états de distributions ou sur des mandats; à deux exceptions près chaque payement exige des vérifications. Ce département a ses états au vrai, sa comptabilité, qui réunit tous les comptes en dépenses, autres que ceux de la guerre et de la marine. Le chef de ce département doit (à l’imitation de celui qui le régit actuellement) se dévouer sans réserve à la chose publique. Bureau de liquidation de l’ancienne compagnie des Indes. Les bureaux établis pour cette liquidation coûtaient, avant le décret du 14 août 1790, 79,700 livres; plus, 43,700 livres peur frais de bureau, y compris 9,000 livres pour loyer de l’hôtel. Depuis le décret qui les supprime et qui n’a pu être complètement exécuté, la dépense a été réduite à 38,700 livres, et les frais de bureaux à 12,300 livres. A ces économies, on pourra ajouter celle de 9,000 livres prix du loyer de l’hôtel, et 9,900 livres que coûte la caisse, et qu’il est urgent de réunir partie aux payeurs des rentes, partie à la caisse des dépenses diverses. D’après le décret du 14 août 1790, l'ordonnateur du Trésor public avait été chargé de présenter un mode pour accélérer cette liquidation ; MM. les commissaires de la trésorerie devraient le remplacer dans cette fonction, mais ils ont pensé qu’il était plus convenable de renvoyer cet objet à l’ordonnateur général de la liquidation, et ils le proposeront à l’Assemblée. Bureau d’échange d’assignats contre des espèces. Ce bureau fut non seulement utile, mais nécessaire, lorsqu’il a été formé ; le chef qui l’a dirigé a fait preuve de zèle, de sagacité et d’économie ; mais comme ce bureau n’était établi qu’en faveur des ouvriers et manufacturiers de la capitale, si le département de Paris juge à propos de le conserver pour échanger les gros assignats contre de petits, et ceux de 100 sous contre la monnaie, ce sera à lui à en faire les frais; le Trésor public doit en être déchargé. Telle était l’organisation du Trésor national, tels étaient les bureaux dont les fonctions sont retracées avec le plus grand détail dans la première partie de l’inventaire ; il s’agit actuellement de la seconde. SECOND INVENTAIRE OU SECONDE PARTIE, Arrêté le 30 juin 1791. Aux termes de l’article 6 du décret du 18 mars 1791, ce second inventaire n’a dû être arrêié que la veille de l’entrée des commissaires en exercice ; il doit contenir en détail toutes les valeurs en portefeuille, échues ou non échues, bonnes ou caduques , de quelque nature qu’elles puissent être, et les deniers comptants qui existent dans les caisses. L’entrée des commissaires en exercice n’a eu lieu que le lor juillet, et cette partie de l’inventaire n’a été arrêtée que la veille, 30 juin, à 10 heures du soir. Pour remplir les vues du décret, et répandre plus de lumière sur des objets très multipliés et qui se reproduisent sous différentes faces, il devenait indispensable de diviser cette seconde partie en plusieurs sections; c’est ce qui a été fait par les commissaires. Section Irc. Objets à recouvrer , bons ou caducs. Ces objets s’élèvent à 80,675,230 1. 10 s. 5 d. Ces créances paraîtraient devoir nous offrir quelques ressources, mais la plupart sont douteuses ou insolvables, quelques-unes ont périclité par le laps de temps ; d’autres sont devenues caduques, ou par des virements de partie, ou 440 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 123 juin 1791.) par le changement adroitement ménagé des débiteurs solvables contre d’autres qui ne le sont point. Les actions des eaux de Paris sont com-prisesdans cette section pour 8,345,139 1. 5 s. 9 d ; mais quelques réductions que puisse souffrir le montant ou la valeur de ces créances, le recouvrement ne doit pas en être négligé, il ne s’agit que de trouver la manière de le faire avec le plus de célérité et aux moindres frais possibles. Total de cette section 80,675,230 1. 10 s. 5 d. Section II. Objets à régler et à remplacer. Section Y. Autres instances dans lesquelles la nation procède comme créancière , et qui étaient à la poursuite de M. Basly , ci-devant contrôleur des restes. Ces instances ne présentent presque toutes que des discussions de biens prolongées, qui exigeraient beaucoup d’activité et de surveillance pour les faire terminer, et qui, malgré tous les soins qu’on pourrait y donner, n’offrent pas de ressources, ni bien prochaines, ni bien assurées. On ne peut considérer ces objets comme formant des créances effectives pour le Trésor public : ce sont des sommes payées en avance sur des créance? non réglées et non encore liquidées, ou des payements réellement effectués sur des sommes réglées et fixées, mais auxquels payements il manque des ordonnances de dépenses pour être mis en règle de comptabilité ; ou ce sont enfin des objets qui ne présentent qu’un espoir très éloigné et très incertain de recouvrement. On y trouve le résultat du compte des grains jusqu’au 30 juin 1781, lequel est en pure perte pour le Trésor public, sauf la rentrée de quelques objets qui peuvent être dus, et que M. de Montaran est chargé de recouvrer. Ces objets à régler et à remplacer montent à 109,643,101 1. 16 s. 6 d. qui méritent à peine d’être tirés hors ligne.. 109,643,101 1. 16s. 6 d. Section III. Effets existants à la trésorerie non compris dans la balance du Trésor public; et qui s'y trouvent en quelque sorte par forme de dépôt. On trouve, sous cette section, des actions des eaux de Paris, des actions du Montcenis, des billets des boulangers de Paris pour des sommes à eux prêtées en octobre, novembre, décembre 1789 et janvier 1790 ; ces billets ont été remis à la trésorerie nationale par M. de Ville-neuve, trésorier de la ville de Paris; on juge aisément de leur peu de valeur. Section IV. Instances dans lesquelles la nation procède comme créancière, et qui sont entre les mains du sieur Turpin , agent du Trésor public. Section VI. Instances dans lesquelles la nation procède comme débitrice. Les sommes que l’on répète à la nation ne sont pas considérables; mais elles n’en exigent pas moins de peines et d’attention de la part de ceux qui sont préposés à défendre en son nom. Section VII. Situation de la caisse générale du Trésor public au 30 juin 1791, veille de Ventrée des commissaires en exercice. C’est ici la partie la plus réelle, comme la plus liquide de l’inventaire; c'est celle arrêtée le 30 juin, veille de l’entrée des commissaires en exercice. Suivant l’état fourni par le directeur général à l’Assemblée nationale, ces fonds de la caisse devaient être de 27,526,170 livres, ci ........................... 27,526,170 liv. Savoir : 1° Effets en porte feuilles. . . 2° En or ................... 3° En argent avec la monnaie ......................... 4° En assignats ............ 5° En acquits et objets non réglés ....................... 491,218 liv. 3,396,849 7,371,884 14,062,350 2,203,869 Somme égale .............. 27,526,170 liv. Cependant les commissaires, lors de la vérification faite le 30 juin en présence des commissaires de l’Assemblée, n’ont accepté les fonds réels que pour ................. . .. 25 , 322, 301 Ces instances sont en très grand nombre, mais on y retrouve une partie des objets portés dans la seconde section et parmi ceux qui sont à recouvrer : on y voit encore les actions des eaux, l’administration de l’ancien enclos des Quinze-Vingts et autres : on y retrouve aussi beaucoup de créances douteuses et un grand nombre de caduques. Le calcul des sommes pourrait opérer de doubles emplois, ainsi l’on croit devoir s’en abstenir; il suffit que les instances et les créances soient désignées dans l’inventaire pour mettre ceux qui surveilleront dans le cas de les faire décider et d’en opérer les recouvrements. La différence est de ........ 2,203,869 liv. Cette différence vient de ce que les commissaires n’ont pas cru devoir comprendre quelques effets, bons à la vérité , mais sans échéance certaine, et divers acquits de dépenses non encore ordonnancés; enfin un vide ou déficit de 54,834 livres (1). Ces erreurs sont inévitables dans les grandes caisses, les commissaires ont mis le tout à la charge de l’ancien administrateur; mais le recouvrement de ces 2,203,869 livres sera fait (1) Pour des erreurs de caisse, savoir dans la caisse générale 47,500 livres, dans la caisse des dépenses diverses 5,902 livres, dans celle de la guerre 1,434 livres. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] très prochainement en totalité, sauf Les erreurs de caisse; il a même été vérifié que déjà il était rentré pour plus de 1,300�000 livres desdits effets; l’ancien adminis rateur fera le versement du surplus : ainsi la masse totale se trouvera bien effectivement de 27,526,170, sauf à déduire les erreurs de caisses ; et l’inventaire sera exact sous tous les rapports. Inventaire détaché des effets à brûler. Get inventaire doit comprendre, aux termes du décret du 29 avril, les effets rentrés au Trésor public par diverses voies pour être annulés. Suivant ce même décret il doit être procédé à la vérification et au brûlement desdits effets parles commissaires de la caisse de l’extraordinaire d’après le décret du 24 novembre dernier. Tous les effets qui doivent être annulés, et ensuite brûlés, ont été rapportés dans cet inventaire avec indication de leur origine et de leur valeur, tels que ceux venant des emprunts, loterie, actions de l’ancienne caisse d’escompte, billets des colonies et autres. Comme le brûlement à l’égard de la plus grande partie de ces effets doit être suspendu pendant quelque temps, à raison de certaines contestations, ou de vérifications ultérieures, on a distingué ceux qui pouvaient être brûlés dès à présent de ceux dont le brûlement doit être différé jusqu’après les vérifications à faire et qui se continuent. Les premiers montent à ............... 29,613,955 1. 15 s. 8 d. Les seconds à ..... 130,256,553 » 9 Total .......... 159,870,508 1. 16 s. 5 d. Il reste maintenant à donner quelques idées en grand du plan d’organisation, déjà provisoirement décrété, de fa formation des bureaux, des traitements et appointements qui restent à décréter. PLAN D’ORGANISATION DE LA TRÉSORERIE NATIONALE. Bureaux , traitements et appointements. Dans le plan proposé par les commissaires de la trésorerie, et adopté par le comité des finances (1) après un mûr examen et des discussions réitérées, tout a été ramené, en exécution des décrets, à un centre d’unité, à une caisse générale; c’est dans ce centre que viennent se réunir tous les revenus de l’Etat, c’est de ce centre qu’ils sont versés en masse dans les caisses particulières, qui les distribuent dans toutes les parties auxquelles ils sont desiinés, et où le besoin les appelle. Il faut donc une caisse générale, une caisse des recettes journalières, des caisses particulières, et à côté de chacune de ces caisses des contrôleurs qui en garantissent la fidélité et l’exactitude. Les différents bureaux qui composent l’organisation de la trésorerie nationale peuvent se réduire à trois grandes divisions, partagées chacune en plusieurs sections. (1) Voir ce plan, ci-après, aux Annexes de la séance, page 455. 441 La première concerne également et les recettes et les dépenses, telle que la direction principale qui doit éclairer toutes les parties et diriger tous les mouvements, telles que le secrétariat, la correspondance, les rescriptions, les reconstitutions, la caisse générale et la comptabilité centrale. Observons que, dans tous les temps, il a existé un bureau de rescriptions au Trésor public, et il devient d’autant plus nécessaire de le maintenir et de l’étendre, qu’il donne seul aujourd’hui toutes les rescriptions qui s’expédiaient ci-devant aux fermes, aux régies, aux administrations générales; il faut donc un signataire de rescriptions et un contrôleur de toutes ces opérations. Les reconstitutions et amortissements, si évidemment utiles, ont été déc; étés ; il faut donc des commis et des préposés pour les exécuter. La seconde des grandes divisions comprend les recettes de toutes espèces : elle est composée d’un bureau général et de 4 sections particulières, qui divisent et partagent entre elles les 83 départements, et sont chargées de suivre la correspondance journalière avec les receveurs de districts, ainsi que de vérifh r leurs comptes. La troisième est dirigée aux dépenses; mais, comme elles sont très multipliées, elles comportent un grand détail. Il en existe quatre classes principales : 1° Les dépenses du culte, de la liste civile, des affaires étrangères, des ponts et chaussées et des dépenses diverses; celles-ci embrassent tout ce qui n’est pas compris dans les trois autres classes ci-après ; 2° Le payement des intérêts de la dette publique et des pensions ; 3° Les dépenses de la guerre, qui comprennent l’extraordinaire des guerres, l’artillerie et le génie, la gendarmerie nationale, le visa des lettres de change, la correspondance avec les trésoriers généraux et particuliers des provinces; 4° Les dépenses de la marine, qui embrassent celles des ports, des colonies de l’Amérique, de de Bourbon et celles de l’Inde. Les recettes et les dépenses ne peuvent être exécutées sans que les bordereaux et les titres aient été préalablement vérifiés, ce qui nécessite des contrôleurs et vérificateurs particuliers; elles ne peuvent être exécutées sans des registres et des journaux à ce destinés, ce qui exige des teneurs de livres en mains courantes, en parties doubles, et des commis expéditionnaires. En dernier résultat tout vient aboutir à une comptabilité centrale qui réunit les recettes et les dépenses, et qui, par une tenue de grands livres en partie doubles, dans la même forme que ceux du commerce ou de la banque, offre chaque jour la situation du Trésor public, non seulement pour les différentes espèces de recettes et de dépenses, mais encore vis-à-vis chaque comptable ou partie prenante, comme si l’on n’avait affaire qu’à un seul et unique particulier, en sorte qu’il ne restera rien à désirer sur ce point. On peut et l’on doit même applaudir à l’ensemble du plan, les vues en sont sages et bien combinées ; peut-être pourrait-on dire qu’il pêche par un excès de prudence et de circonspection, que les commissaires, dans la crainte de tomber en défaut et de ne pouvoir soutenir la marche uniforme et régulière des différentes parties de ce grand tout, paraissent en avoir surchargé quelques-unes; cette question a été longtemps agitée : mais le comité des finances (malgré 442 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin n9i. toute la sévérité qu’il a apportée d’ailleurs, a été forcé, dans ce doute, de céder sur ce point aux motifs qui ont déterminé les commissaires, jusqu’à ce que l’expérience ait fait connaître avec certitude s’il était possible ou non d’opérer encore quelques retranchements, et les commissaires se sont montrés disposés à seconder ses vues d’économie dès qu’ils auront pu s’assurer de la possibilité de l'exécution. Le plan dont il s’agit nous offre du moins cet avantage, qu’il peut être restreint et modifié dans les différentes parties sans nuire à l’ensemble et sans déranger les grandes bases sur lesquelles il repose; ainsi nos successeurs seront dans le cas de porter sur cet objet l’œil le plus attentif. Quoique le Trésor public ait subi successivement nombre de retranchements et de réductions; quoique le comité, malgré tous ses efforts, n’ait pu atteindre le point d’économie désiré, il est cependant vrai qu’il en existera une réelle, indépendamment des augmentations considérables dans ce travail pour les objets renvoyés et attachés à la trésorerie. Les dépenses des bureaux dans leur état actuel montent à 1,416,181 livres. Pour évaluer exactement une dépense relativement à la naüon, il ne suffit pas de dire : le Trésor public coûtait tant, il ne coûte plus que tant, pour en conclure que l’économie est de toute la différence qui se trouve entre les deux calculs, parce qu’il arrive souvent que pour un plus grand ordre on détache quelques fonctions d’un département pour les rejeter dans un autre; alors ce n’est plus une économie réelle pour la nation , mais seulement pour le département duquel les dépenses sont retranchées. Par exemple : Les bureaux de formation des éfats au vrai et des comptes du Trésor public sont renvoyés à la comptabilité définitive. Gela est bon quant à l’ordre, mais on ne peut pas dire que ce soit une économie réelle. 11 en est de môme des fonctions restantes, pour ce qui dépend de l’ancienne Compagnie des Indes, et qui sont renvoyées au ministre de l’intérieur et au commissaire général de la liquidation. Il en est de même encore pour le bureau de surveillance de la loterie royale, renvoyé au ministre des contributions publiques. Il en est de même enfin de l’ancien bureau de liquidation, formé en suite de l’édit de 1764, et dont les fonctions sont renvoyées au commissaire général liquidateur. Dans tous ces cas si le nouveau département en est chargé sans augmentation de dépense, c’est une économie réelle; mais si la dépense doit être augmentée en proportion, alors ce n’est plus qu’un changement ou transport de dépense. Pour donner un exemple en sens contraire, on est fondé à dire que la suppression du bureau des échanges, renvoyée au département de Paris, est une économie réelle pour la nation. On peut assurer que dans le nouveau plan toutes compensations faites, toutes considérations prises de ce qui pourra résulter des renvois et changements, les dépenses réunies ne s’élèveront pas à 1,150,000 livres; ainsi l’économie'réelle sera au moins de 266,181 livres ; c’en est plus qu’on ne pouvait espérer pour le moment, vu les réformes et les réductions que le Trésor public avait déjà subies. Nous laisserons à nos successeurs à vérifier, d’après l’expérience, les retranchements qu’il sera encore possible de faire par la suite. Plusieurs questions restent à décider relativement à la trésorerie nationale; quelque jaloux que l’on soit d’abréger, il faut du moins les présenter. Questions qui restent à décider en décrétant les bureaux , traitements et dépenses. Les commissaires de la trésorerie seront-ils amovibles ou non à volonté? Cette question a été ajournée; d’une part les commissaires sont à la nomination du roi, et les vues de l’Assemblée sont de maintenir dans toute son étendue le pouvoir exécutif; d'autre part l’administration du Trésor public ne doit appartenir à aucun département du ministère; elle est sous la surveillance du Corps législatif. Une destitution arbitraire blesserait cette indépendance, et contrarierait les grandes vues qui ont fait substituer un comité de trésorerie à un ordonnateur unique. Pour éviter ces deux écueils, également dangereux, le comité a pensé qu'il suffirait de décréter qu’ils ne pourraient être destitués sans que les causes de leur destitution n’aient été vérifiées par le Corps législatif. A quelle somme le traitement des commissaires sera-t-il fixé? Cette question avait donné lieu à des débats dans le comité; les uns, étayés par des comparaisons, le portaient à 25,000 livres pour chacun, d’autres à 20,000 livres et c’était le plus grand nombre; quelques-uns le réduisaient ;à 15,000 livres : on leur a fait part de cette division d’opinions, mais on doit à leur délicatesse et à leur désintéressement cet hommage mérité qu’ils se sont hâtés d’adopter l’opinion la plus rigoureuse, en sorte que les 6 commissaires ne coûteront pas plus que l’administrateur unique et son premier commis. Adoptera-t-on un maximum pour les différents emplois de caissiers, de payeurs, de premiers commis, directeurs, chefs de bureaux, comme on l’a fait pour la caisse de l’extraordinaire, et la direction générale de la liquidation ? Le comité a pensé que ce mode ne pouvait absolument convenir à la trésorerie nationale; cette administration ne peut être comparée à aucune autre; toutes les parties sont si dissemblables, que souvent celui qui a vieilli dans un emploi, devient en quelque sorte étranger à tous ceux auxquels il ne correspond pas directement. Les fonctions relatives à la trésorerie exigent des talents si différents, un travail si disproportionné, qu’il ne peut pas plus y avoir d’uniformité dans les traitements que dans les fonctions mêmes. Dans les premières places, il ne suffit pas des lumières et du zèle, il faut de plus une probité éprouvée, une confiance acquise et méritée; l’erreur ou la méprise dans le choix de quelques sujets pourrait occasionner, en très peu de temps, des pertes beaucoup plus considérables qu’une chétive économie n’en pourrait réparer dans plusieurs années. Indépendamment du travail assidu et réfléchi qu’exigent les premiers emplois, la plupart exposent à une responsabilité qui peut à chaque instant compromettre l’honneur et la fortune de ceux qui y sont atiachés; il faut donc un dédommagement : il faut aussi que ces emplois soient recherchés de préférence, qu’ils offrent le choix des sujets, qu’ils s’élèvent au-dessus de la 443 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 179I.J concurrence avec les maisons de commerce et de banque. On ne sera donc point étonné que le traitement du caissier général comptable soit porté à 24,000 livres. Il y aurait plus lieu de l'être, de le voir réduit à cette somme d’après les comparaisons sur lesquelles on aurait pu s’étayer, vu surtout son cautionnement et sa responsabilité. Par les mêmes raisons celui du caissier des recettes journalières, lixé à 18,000 livres, paraîtra très modique. Après eux viennent le contrôleur général des caisses, les quatre payeurs principaux dont les traitements sont portés à 12,000 livres, le caissier de distribution pour les quatre sections de la dépense à qui l’on accorde 10,000 livres, les directeurs qui sont à 8,000 livres, les chefs de bureau à 3,600 livres, les autres à 2,400, 1,800, 1,600, 1,500 livres, de manière que les traitements sont gradués en raison des talents, des travaux que chaque place exige, et des dangers auxquels elle expose. Accordera-t-on ou non une somme annuelle à distribuer eu gratifications pour les grades inférieurs? On n’a pas hésité sur l’affirmative, les gratifications seront toujours un stimulant aussi puissant pour l’honneur que pour l’intérêt; elles produisent des effets plus réels que les appointements; c’est une justice rendue au zèle extraordinaire des coopérateurs en sous ordre; elles les font jouir par anticipation des places éminentes auxquelles elles semblent les appeler par degré. Le comité 1 s avait fixées à 24,000 livres, les commissaires de la trésorerie insistent pour les porter à 30,000 livres; ils se promettent le plus grand succès de cette distribution, qui ne concerne que les sous-ordres. Abonnera-t-on toutes les dépenses variables, frais de papiers, impressions, fournitures de registres et des bureaux, bois, lumières, transport d’espèces ou d’assignats? Il est hors de doute qu’il convient à la nation d’abonner toutes les dépenses de cette nature; mais les commissaires ont observé qu’ils ne pouvaient ni proposer, ni accepter un abonnement, à défaut de connaissances suffisantes : ils ont demandé qu’il fût différé jusqu’à la fin de 1792, en promettant de diminuer le plus qu’il sera possible les dépenses de ce genre, et de proposer, après ce délai, le plan qui leur paraîtra le plus économique, et le moins susceptible d’inconvénients; on a cru devoir céder à des propositions aussi raisonnables. Chaque section de la dépense de la trésorerie doit rendre des comptes : ces comptes sont formés par des états au vrai. Il existait des bureaux pour les rédiger; ces bureaux doivent être provisoirement conservés, jusqu’à ce que les anciens comptes soient apurés, ou du moins jusqu’au nouveau mode de comptabilité qui en préparera sans doute le remplacement. Supprimera-t-on, ou non, les trésoriers généraux et particuliers de la guerre, en renvoyant aux receveurs de district les payements et les autres fonctions qui les concernent? Sans entrer dans la discussion des avantages ou des inconvénients qui pourraient résulter de cette suppression, on doit s’en tenir à dire que ce n’est point le moment de i’opérer; l’expérience a fait connaître que les receveurs de district n’étaient déjà que trop surchargés; ils n’ont point encore les connaissances de détail nécessaires à cette partie; ils sont trop influencés par les corps administratifs. 11 serait dangereux dans ce moment de leur confier des payements qui doivent être faits avec autant d’intelligence que d’exactitude. D’ailleurs, il y avait peut-être peu d’économie à espérer, parce qu’en augmentant leur travail, il faudrait nécessairement augmenter leurs taxations; il a donc paru plus prudent et plus convenable de réserver de statuer sur le nombre, les fonctions et traitements de ces trésoriers, d’après les plans et mémoires qui seraient incessamment présentés parles commissaires de la trésorerie. Dans les bureaux de la trésorerie sont deux employés, à qui l’ancienneté de services donne droit à une pension de retraite, supérieure aux appointements qui leur sont attribués ; ces personnes désireraient se rendre encore utiles à la chose publique : mais en conservant ce dont ils jouissent, il a paru juste de leur donner en sus de leurs traitements, l’excédeot nécessaire pour compléter leurs retraites et pensions; l’Etat profitera, du moins, des appointements que l’on payerait à ceux qui les remplaceraient. Les commissaires de la trésorerie ne peuvent ordonner aucun payement; cependant, il pourrait survenir des travaux extraordinaires sur des objets imprévus, qui nécessiteraient quelques dépenses, ou une augmentation dans celles déjà fixées : on a pensé que pour donner quelque latitude à leur administration, il convenait de les autoriser, sous leur responsabilité , à faire des dépenses jusqu’à la concurrence de 50,000 livres, à charge d’en remettre au Corps législatif uu état dûment certifié, et appuyé de pièces probantes, pour, en suite du rapport qui en serait fait, être statué ce qu’il appartiendrait. Conformément aux décrets, les places de la tré sorerie, comme toutes les autres, doivent être accordées aux anciens fonctionnaires publics; mais on a cru devoir excepter de la règle, celles qui concernent le bureau de comptabilité en parties doubles, parce qu’elles exigent des connaissances particulières, et que peu de personnes sont versées dans cette partie; ce qui est une raison décisive pour ne pas restreindre et limiter le choix. Ces questions résolues, l’organisation des bureaux et traitements aura peu de contradictions à essuyer. Dès que l’admini-tration de la trésorerie nationale sera en pleine activité, et dirigée u’après les grandes vues qui l’ont créée, on aura tout à s’en promettre. Le citoyen français, né sensible et généreux, acquittera avec plaisir un tribut vraiment civique, qui ne sera exigé qu’en raison des besoins réels, qui sera réparti dans une juste proportion, dont le poids s’affaiblira chaque jour, qui sera versé fidèlement dans le trésor national, qui parviendra sûrement à sa destination, et dont les comptes rendus publics ne laisseront aucun retour aux soupçons et à la défiance. On n’aura point à redouter ces ordres absolus et arbitraires qui, lancés dans les ténèbres, bouleverseraient dans un instant de caprice tout le système des finances : on n’aura point à redouter ces jeux de caisses, ces payements simulés, cet agiotage perfide, qui réalise des chimères, et dénature les réalités pour absorber par des voies iniques la fortune publique et celles des particuliers. On n’aura point à redouter les déprédations de tout genre qui avaient tellement précipité la ruine de l’Etat que tout était aliéné, que les intérêts excédaient les charges ordinaires, et qu’il ne restait de ressources à la nation que dans le courage et la générosité de ses représentants. Rassurés sur tous ces dangers, nous verrons 414 [Assemblée nationale. 1 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 123 juin 1791.J alors la confiance et le crédit renaître, la prospérité de l’Etat s’élever au degré où elle doit na-turelîement atteindre, les superbes et les méchants trompés dans leur attente, réduits à la honte et au désespoir. (L’Assemblée décrète l’impression de ce rapport, ordonne que l’un des exemplaires en sera joint aux minutes de l’inventaire du Trésor public, et que le tout sera déposé aux archives nationales.) M. du Châtelet. Monsieur le Président, je vous prie de me lire la formule du serment qui a été prêté hier. M. le Président lit la formule du serment. M. du Châtelet. Je le jure!.. Il me semble que ce serment doit être prêté par les bons citoyens qui doivent concourir à la défense de la patrie. Un membre à gauche : Mais tous n’ont pas des armes. M. le Président. J’ai l’honneur de vous annoncer le serment qui vient de me parvenir de la part de M. Charles de Hesse, maréchal de camp. J’observe que M. de Hesse est un prince étranger, frère du prince d’Allemagne. ( Applaudissements .) M. «Paillant. Messieurs, j’arrive de Sens, où j’étais allé en conséquence du congé que l’Assemblée nationale m’a accordé. Le directoire du département m’a engagé, vu l’urgence des circonstances, de rentrer à mon poste : je me suis empressé de remplir ce devoir. J’ai mis la plus grande diligence pour accélérer mon retour. Je crois devoir instruire l’Assemblée que j’ai trouvé le plus grand ordre dans le service de la garde nationale; pas un village, pas le moindre hameau, n’était sans défense, et chaque sentinelle, en uniforme, ou en habit ordinaire gris, ou en blouse même, ne m’a laissé passer sans exiger l’examen de mon passeport. ( Applaudissements .) M. Vernier. Je rappelle à l’Assemblée qu’elle pourra prendre en considération la motion qui lui a été faite par l’un de ses membres, de statuer sur les signaux qui seraient bien essentiels dans les circonstances critiques, pour annoncer d’un bout de la France à l’autre, en un très court espace de temps, les divers événements qui pourraient survenir. M. le Président. Messieurs, dans ce moment, on demande des ordres pour la procession ; je vais suspendre la séance, et comme nous ne pouvons pas la lever, M. Rabaud, ex-président, va prendre ma place, et quelques membres vont rester dans l’Assemblée. (M. le Président nomme les membres qui doivent rester dans la salle, et sort avec une grande partie de l’Assemblée pour se rendre à la procession de Saint-Germain-l’Auxerrois.) M. Rabaud -Saint-Etienne, ex-président , prend place au fauteuil. (La séance est suspendue à neuf heures ; elle est reprise à dix heures par l’arrivée d’une députation du directoire du département de Paris.) La députation du directoire du département de Paris est introduite à la barre. M. de Ea Rochefoucauld, au nom de la députation. Messieurs, la prudence vous a dicté hier les précautions nécessaires au moment où vous avez reçu des nouvelles de Varennes, pour empêcher que personne ne puisse sortir de la capitale jusqu’à ce que les ordres de l’Assemblée puissent partir. Ce matin, plusieurs heures après que les ordres ont été donnés, que les courriers et les commissaires de l’Assemblée nationale ont été partis, elle a jugé à propos de suspendre sa séance; mais les administrateurs du département nous ont chargés d’observer à l’Assemblée que l’exécution littérale du décret qu’elle a rendu ce matin entraîne de très grandes difficultés, car il faut délivrer des passeports à tous ceux qui vont demain à Poissy et aux pourvoyeurs de Paris. L’expédition dè passeports aussi multipliés produit un engorgement qui pourrait nuire à l’approvisionnement de la capitale. Le conseil du département nous a chargés de venir exposer à l’Assemblée ces inconvénients et de prendre ses ordres, et en même temps lui annoncer que le bon ordre et la tranquillité régnent dans la capitale, et que si la liberté française avait besoin d’un nouveau symptôme, certainement ce qui s’est passé dans le jour doit nous assurer qu’elle doit être absolument établie. Nous venons demander les ordres de l’Assemblée pour prendre à l’instant des mesures. M. Dauchy. Messieurs, l’objet de votre décret a été d'empêcher qu’aucune personne puisse arriver vers la frontière assez à temps pour que, notamment M. de Bouillé et les personnes suspectes puissent être averties des mesures que vous aviez décrétées. Mais il est dix heures, et les commissaires que vous avez envoyés à Varennes sont partis ce matin à 2 heures; il est probable qu’ils sont déjà actuellement à 25 ou 30 lieues d’ici, et je ne crois pas qu’il y ait possibilité, pour les personnes qui partiraient en ce moment, de les joindre. Je propose donc à l’Assemblée de dire que les barrières sont libres, et que tous les citoyens peuvent entrer et sortir de Paris comme à l’ordinaire; mais que, cependant, il est défendu à la poste de donner des chevaux avant 1 heure de l’après-midi. M. Eecouteulx de Canteleu. Paris, par ses rapports particuliers, est comme le centre commun, et j’ose dire comme le centre comrnun de l’Europe : ce n’est point une ville qu’on puisse fermer longtemps sans éprouver les plus grands dangers, et sans mettre des entraves à la circulation générale et aux rapports les plus intéressants de la finance : j’appuie donc la motion de M. Dauchy. M. Delavigne. Le décret de ce matin paraissait laisser à la disposition du directoire du département et de la municipalité à agir sur ce, d’après les circonstances. Ces messieurs ne se regardent pas comme suffisamment autorisés à lever la défense générale ; il ne s’agit que de la lever. M. Prieur. Il me semble qu’il y aurait une chose très simple à faire, ce serait de décréter que l’Assemblée nationale autorise le département à casser la défense, qui était faite de sortir des barrières, aussitôt qu’il le trouvera convenable pour la tranquillité publique.