100 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ™rel793 11 démi-récoltes, il végétera, sa terre se dénaturera, et il ne pourra payer; ses meubles seront vendus et il subira le même sort du premier. L’exemple n’est pas rare de voir trois fermiers se succéder au même lieu dans l’espace de 9 ans. Que résulte-t-il de ces abus? Perte particulière pour les fai¬ sant valoir, perte générale pour la société, car le germe du commerce rural étant altéré dans son principe, toutes les autres branches de com¬ merce qui y sont liées doivent absolument en souffrir. « Le vrai moyen d’encourager l’agriculture est de supprimer les fermiers généraux ; presque tous les propriétaires prisent leurs fermiers, sa¬ vent attendre qu’ils puissent les payer et rare¬ ment leur font des frais; c’est alors que les fer¬ miers redoublent de courage et d’activité, ils bé¬ nissent leurs bienfaiteurs et ils les payent. « Un exemple frappant de ce que l’on vient de dire se fait sentir dans un sous-seing surpris à la citoyenne Montecler, demeurant à Paris, rue Cherehe-Midi, faubourg Saint-Germain, section du Luxembourg, par le citoyen Fleury, régis¬ seur du fermier général de fa terre de Bonnétable, sous-seing que cette citoyenne voudrait bien voir résilier, parce qu’elle sait aimer ses fermiers et parce qu’elle voit leur ruine s’avancer à grands pas. « Par cet écrit, la citoyenne promet donner à bail général 45 corps d’héritages, qui contien¬ nent un immense espace de terrain dans les communes de Tuffé, Beillé, Saint-Hilaire, le Lierru, Prevelles et autres paroisses, toutes du canton de Tuffé, district de la Ferté -Bernard, département de la Sarthe; ces 45 objets, occupés par autant de familles, leur sont affermés de¬ puis environ vingt ans par un fermier général (le bail duquel ainsi que de ceux de ses sous-fermiers finissent à la Toussaint 1794). Et l’on sait à quel point celui-ci a porté ses fermages. « Aujourd’hui, le citoyen Fleury, qui n’a qu’une promesse de bail, et qui feint d’ignorer les considérations que l’on doit avoir pour le vrai cultivateur, vient néanmoins d’affermer verba¬ lement différents objets, en exigeant des pots de vin énormes, en doublant le prix des fermages, auxquels le fermier général son prédécesseur les avait portés, et en expulsant des pères de fa¬ mille qui, depuis 20, 30, 60 jusqu’à 130 années, les faisaient valoir. « Il résultera de ces maux, si la Convention n’y apporte remède, que ces 45 malheureux pères de famille, dont l’existence est précieuse à l’État, vont, dans un aussi court délai, se trouver sans asile, et sans terres pour subsister. « Il en résultera, comme on l’a déjà dit, que les étrangers qui les remplaceront, ne connais¬ sant pas le sol de leurs nouvelles terres, le dé¬ rangeront, s’y ruineront et prépareront la ruine de leurs successeurs. « Les fermiers de la citoyenne Montecler, désirant profiter du moment que le bail n’est pas encore passé, réclament donc avec justice la sollicitude des citoyens représentants, com¬ posant les comités d’agriculture et de com¬ merce, pour autoriser la citoyenne à résilier la promesse qu’elle a donnée au citoyen Fleury. Le bonheur de la société semble exiger impérieu¬ sement la défaite entière des fermiers généraux; des clameurs, des plaintes se font entendre de toutes parts, les propriétaires eux -mêmes, indi¬ gnés de la conduite que ces vautours tiennent à l’égard du pauvre laboureur, veulent mettre un terme aux maux qu’ils causent indirectement. « Que n’est-il permis aux fermiers de la ci¬ toyenne Montecler de réclamer leur maîtresse; quel bonheur pour eux si elle pouvait quitter Paris pour venir passer quelques jours à Tuffé, ses bontés et son cœur sont assez connus, pour être assurés qu’elle ferait les plus grands sacri¬ fices pour réussir à résilier le sous-seing qui lui a été surpris par Fleury, et leur assurer une existence aisée en renouvelant leurs baux. « Citoyens représentants, pesez dans votre sagesse ce que l’on vient de vous exposer, vous avez fait des heureux, faites maintenant le bonheur de la société en brisant les entraves données à la culture des terres; que la réclama¬ tion des fermiers de Tuffé et des autres com¬ munes ci-dessus dénommées ne soit pas vaine, leur sort est entre vos mains; en vous ils s’at¬ tendent de trouver des protecteurs, des pères; seront-ils trompés? Non. » (Suivent 41 signatures.) VIII. PÉTITION DE LA SOCIÉTÉ POPULAIRE DE PRO¬ VINS POUR DEMANDER QUE LES FONCTION¬ NAIRES PUBLICS DÉPOURVUS DES RESSOURCES NÉCESSAIRES A L’EXISTENCE, SOIENT SALARIÉS dans toute la République (1). Suit le texte de cette 'pétition d’après un docu¬ ment des Archives nationales (2). « Représentants du peuple, « C’est toujours avec une nouvelle confiance que la Société populaire de Provins porte de¬ vant vous la cause sacrée de l’humanité et de la justice. Ces deux vertus sacrées qui sont la base fondamentale de toute société qui veut être heureuse, de toute république qui veut consoli¬ der sa robuste existence, ont encore besoin de l’appui des lois. Nous en demandons une qui, déjà plus d’une fois, a été proposée dans le sein de la Convention nationale et des autres Assem¬ blées qui l’ont précédée, en faveur des officiers municipaux et autres fonctionnaires publies non salariés. Cette loi, venant au secours des vrais sans-culottes, patriotes purs, que le choix libre et réfléchi du peuple aurait élevés à la plus belle, à la plus importante magistrature, écarterait enfin pour toujours cette caste de riches cons¬ tamment égoïstes, constamment en contradic¬ tion plus ou moins notoire avec les sublimes principes de l’égalité. « Il est temps que l’heureuse bascule de l’ordre actuel place' l’orgueilleux, l’incorrigible oppres¬ seur, sinon au-dessous, du moins derrière le citoyen probe, jusqu’alors opprimé. (1) La pétition de la Société populaire de Pro¬ vins n’est pas mentionnée au r procès-verbal de la séance du 10 brumaire an II; mais en marge de l’original qui se trouve aux Archives nationales , on lit : « Renvoyé aux comités de législation et des finances le 10 du 2e mois, 2e année de la Répu¬ blique. » En outre, on trouve un extrait de cette pétition dans le Bulletin de la Convention du 10e jour de la lre décade du 2e mois de l’an II (jeudi 31 oc¬ tobre 1793). (2) Archives nationales, carton G 277, dossier Pro¬ vins. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 3? t0breri793 11 101 « Nous sentons qu’en accordant un salaire à tous les fonctionnaires publics, cette innovation entraînera des frais presque incalculables, et pour y parvenir nous ne nous permettrons pas de déterminer sur quelles dépenses superflues ou exagérées on pourrait les trouver. Nous nous bornerons seulement à demander que tous les fonctionnaires publics généralement recon¬ nus pour être dépourvus de ressources néces¬ saires à leur existence, soient salariés dans toute la République. « Cette loi bienfaisante nous paraît aussi es¬ sentiellement juste que conforme aux vrais prin¬ cipes : nous attendons encore de votre sagesse et de vos lumières l’instruction publique et l’épurement des mœurs, nous marcherons et nous marchons toujours sur vos pas pour anéantir les aristocrates et tous les ennemis de la République. « Les membres composant la Société populaire de Provins, « Coppin, président; Lambert, secrétaire. « Provins, le 28e jour du 1er mois de l’an II de la République, une et indivisible. » IX. PÉTITION DU CITOYEN GONORD LE JEUNE POUR DEMANDER QUE DÉSORMAIS L’AMIDON SOIT FABRIQUÉ AVEC DES MARRONS D’ÏNDE (1). Suit le texte de cette pétition d'après un docu¬ ment des Archives nationales (2). Pétition présentée par le citoyen Oonord le 31 oc¬ tobre, 3e décade , lequel est caserné à Courbevoie, 3 e compagnie, section des Gardes-françaises, aux représentants du peuple. « Citoyens, « Je m’empresse de venir en votre sein aux fins de vous donner connaissance d’une décou¬ verte des plus importantes. « Jusqu’à ce jour l’on a vu sacrifier, dans la fabrication des amidons, une immense consom¬ mation de farine provenant de nos grains, qui nous ont toujours été de la plus grande utilité, et qui nous le deviennent en ce moment encore plus que jamais. « Nous avons à combattre des despotes, double abondance de vivres ne peut nous nuire, et tout homme doit coopérer autant qu’il lui est possible à cette augmentation, soit par son travail ou son industrie à consolider cette liberté qui nous est à tous si chère. « Eh bien, l’humanité ne souffrira plus de voir employer si inutilement les blés, orges, etc., à la fabrication des amidons/ amidons dont l’emploi cependant ne peut être interdit, vu que bien des (1) La pétition'du citoyen Gonord n’est pas men¬ tionnée au procès-verbal de la séance du 10 bru¬ maire an II; mais en marge de l’original qui existe aux Archives nationales, on lit : « Renvoyé aux co¬ mités de commerce et d’agriculture, le 1er décadi de brumaire, l’an II de la République. Basire, secrétaire. » En outre, on trouve un extrait de cette pétition dans le compte rendu de la séance du 10 bru¬ maire an II publié par le Journal du Soir (n° 928, p. 3, col. 2). (2) Archives nationales, carton F** 1473*/. états ne peuvent s’exercer sans y avoir recours, comme pour la fabrication des draps, comme aussi pour celle des toiles, les siamoises, les fabricants d’indiennes, blanchisseuses, cartiers, cordonniers et d’autres dont le détail serait trop long; lé luxe même ne souffrira pas de cette réforme. « Je viens donc, à l’appui, proposer ce qui suit pour remplacer les amidons d’aujourd’hui, ce sont des marrons d’Inde qui ont été regardés comme un fruit inutile tandis qu’on peut en tirer un grand profit et en même temps un grand secours, par la réforme de l’amidon dont on a fait jusqu’à ce jour usage. Il est donc urgent d’après la preuve incontestable de l’amidon tiré des marrons d’Inde, laquelle fait colle poudre, que l’on décrète qu’il ne sera plus fabriqué d’amidons avec les grains qui nous servent de nourriture, et qu’enfin l’on n’emploiera d’autres ingrédients que des marrons, à moins qu’une nouvelle découverte de cette nature ne vienne à se promulguer. « Je demande en outre afin que l’on ne puisse pas, soit accaparer, ou mettre lesdits marrons à un prix exorbitant, que les personnes qui en seraient possesseurs aient à ne les céder qu’à un prix qui sera par moi fixé proportionnellement à celui dont j’établirai ledit amidon. Je demande, aussi, comme seul auteur de cette découverte qu’on veuille bien m’accorder le droit d’être seul acquéreur desdits marrons, ou aux personnes chargées de mes pouvoirs, et que les préroga¬ tives par moi demandées me soient accordées comme récompense à mon utile découverte. « Gonord, le jeune. » Présenté à la Convention nationale le der¬ nier du 1er mois de l’an II de la République française et vulgairement le 31 octobre 1793, X. Le citoyen Le Fournier, ancien maire de TaVERNY, FAIT HOMMAGE A LA CONVENTION D’UNE ADRESSE AUX CITOYENS DES CAM¬ PAGNES (1). Suit le texte de la lettre par laquelle le citoyen Le Fournier fait hommage à la Convention de cette adresse (2). « Ce décadi du mois de brumaire de l’an II de la République française une et indivisible. « Citoyens représentants, « Votre sollicitude paternelle gémit de voir encore le fanatisme et la superstition désolef (1) La lettre et l’adresse du citoyen Le Fournier ne sont pas mentionnées au procès-verbal de la séance du 10 brumaire an II; mais il y est fait allu¬ sion dans le compte rendu de cette séance, publié par les Annales patriotiques et littéraires. En outre, l’original qui se trouve aux Archives nationales porte en marge : « Renvoyé au comité d’instruction pu¬ blique, séance du décadi de la lre décade du mois de brumaire üe l’an II de la République une et indi¬ visible. Basire, secrétaire. » (2) Archives nationales, carton F17 1008% dos¬ sier 1550.