[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 273 employés à exprimer des vœux sur la Constitu¬ tion qui, depuis longtemps, étaient prononcés dans nos cœurs. Acceptation unanime, adhésion entière à tous vos décrets, voilà le résultat de nos délibérations et notre profession de foi; punition sévère de tous les traîtres, des cons¬ pirateurs et des fédéralistes, voilà l’objet de nos désirs; maintenir l’unité et l’indivisibilité de la République, la liberté et l’égalité, voilà nos ser¬ ments. « Citoyens représentants, notre langage est simple parce que nous ne connaissons pas les talents oratoires, mais en éprouvant tous les bienfaits de vos lois salutaires, nous sentons qu’elles nous pénètrent d’admiration et de reconnaissance; nous sentons aussi que si vous restez à votre poste pendant tout le temps de nos dangers, la patrie est sauvée et tous les crimes seront punis, même ceux des tyrans extérieurs. Aussi désirons -nous, avec autant d’ardeur que les aristocrates le craignent, de vous voir continuer, par vos travaux, à fixer les destinées de la France et à déployer cette énergie et cette fermeté qui étonnent l’univers et font trembler les despotes sur leurs trônes chancelants. « Citoyens représentants, nos jeunes gens en réquisition sont à l’armée; ils ont été rem¬ placés dans nos foyers par leurs pères et leurs frères prisonniers que nos braves armées ont délivrés et rendus à leurs familles; mais nous avons non seulement à pleurer la fin malheu¬ reuse de ceux qui ont été cruellement massa¬ crés dans leur captivité par les brigands, mais encore ceux qui échappent tous les jours à nos tendres soins fraternels, victimes du poison lent qui a été mêlé dans les subsistances dont on les a nourris pendant leur détention; de tels mal¬ heurs, citoyens, ne sauraient trouver de conso¬ lation que dans le souvenir qu’ils sont morts pour la patrie et dans la certitude que nous serons vengés des horreurs et des forfaits des scélérats que nous combattons. « Citoyens représentants, les traits d’hé¬ roïsme de nos frères sont des actes de vertu, très communs parmi les Français; nos prison¬ niers, en nous racontant ceux dont ils ont été les témoins nous font éprouver les plus douces émotions. Et, en effet, quel est l’homme qui ne serait pas attendri en entendant, par exemple, le récit de la mort du citoyen Neraudeau, père de six enfants, commandant en second de notre bataillon, massacré dans sa prison à coups de sabre pour avoir manifesté hautement des prin¬ cipes anti-royalistes et qui expira en criant : Vive la République! Les patriotes finiront par écraser les aristocrates. Oui, citoyens, ils seront écrasés, ce moment de la défaite de tous nos ennemis ne peut pas être éloigné lorsque l’éner¬ gie des vertus républicaines passe dans tous les cœurs, lorsque dans la Vendée on voit déjà ces principes se propager avec la plus grande force, et que ce feu divin électrise entièrement toutes les âmes; n’a-t-on pas vu, il y a deux jours, le citoyen Vazon, officier municipal de Chiché, canton voisin, souscrire la proscription de son frère, coupable envers son pays, et répondre, avec cette fermeté que le seul amour de la patrie peut inspirer, à ceux qui croyaient qu’il pourrait hésiter à la signer : « La nature me pres¬ crit sans doute des devoirs envers mes proches, mais avant tout, j’ai à remplir ceux que ma patrie m’impose, et je saurai lui obéir dans cette lr® SÉRIE, T. LXXX. occasion; si j’ai eu déjà le courage de signer la mort de mon père, je sens que ce même cou¬ rage ne m’abandonne pas dans cette nouvelle épreuve ». Effectivement, le brave Vazon, dont le père venait de subir la mort pour avoir pris place dans un comité de brigands, saisit une plume et signa le mandat d’arrêt contre son frère, et ce moment fut celui d’une scène des plus attendrissantes entre lui et les assistants, car, en l’embrassant tour à tour, ils le baignaient de leurs larmes ; c’était un tribut de la nature dû à ses vertus. « C’est cependant là, citoyens, un véritable sans-culotte, un fabricant d’étoffes, un de ces hommes si méprisés dans l’ancien régime par nos ci-devant, qui est susceptible d’une telle sévé¬ rité et d’une action aussi honorable : elle doit faire trembler de crainte et d’effroi tous les traîtres et tous ces lâches conspirateurs qui, à l’aide des torches du fanatisme, ont commis les plus grands crimes dans la Vendée. Que tous nos efforts se tournent contre ces armes exé¬ crables des tyrans sacerdotaux; que chacun se hâte de détruire tout ce qui a servi autrefois à ces fripons pour tromper les hommes et les dépouiller de leurs biens; c’est le moyen de triompher de leurs manœuvres insignes; leur charlatanisme superstitieux avait vraisem¬ blablement fait donner dans l’ancien temps à la commune de notre chef-lieu une dénomi¬ nation qui ne coûtait pas plus alors qu’à mé¬ tamorphoser en un saint un morceau de bois ou une pierre taillés sous les traits d’une figure sou¬ vent moins qu’humaine ; il est temps que cette bizarre dénomination disparaisse, elle ne peut plus subsister pour notre canton, parce qu’elle contraste trop avec les principes qui nous régé¬ nèrent; d’ailleurs, quelque bienheureux que saint Loup soit dans le ciel, toute sa puis¬ sance ne saurait nous faire oublier que, sous ce nom, il a existé des fiefs, des corvées, des banalités et tous les fléaux qui affligeaient l’humanité. Aussi nous vous demandons, par toutes ces considérations, citoyens représen¬ tants, de décréter que, désormais, le canton de Saint-Loup et la commune de ce nom, district de Parthenay, département des Deux-Sèvres, porteront celui de la commune et canton de Voltaire; ce n’est pas parce que cet ami des hommes tire son origine de Saint-Loup, mais parce qu’il fut vertueux, et l’un des premiers apôtres de la liberté. « Les président et secrétaire de l’assemblée des citoyens du canton de Saint -Loup, réunis en assemblée primaire, autorisés à signer la pré¬ sente par le procès-verbal de ce jour portant acceptation de la Constitution. « Tounet aîné, président ; Comon, secrétaire. » Les administrateurs et procureur syndic du district de Gannat invitent la Convention natio¬ nale à rester à son poste. Ils annoncent qu’ils ont achevé la vente des biens nationaux de ce district, qui ont produit plus de 3 millions; que la vente des biens des émigrés d’une plus grande valeur encore touchait à sa fin, mais que, tout à coup, le concours des acquéreurs a cessé entiè¬ rement par l’effet des taxes faites par les comités de surveillance de district. Les administrateurs présentent plusieurs moyens pour ramener les 18 IConveatkii nalieuale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [ K�mbre 1793 trouve toujours occupés à surveiller les eaue-m acquéreurs, et attirer dans les caisses nationales le numéraire à face. Renvoyé aux comités de sûreté générale et d’aliénation (1). Compte rendu du Moniteur universel (2). Les administrateurs du district de Gannat annoncent qu’ils ont achevé la vente des bien.» nationaux de cet arrondissement, qui ont pro¬ duit plus de 30 millions ; que la vente des biens des émigrés, d'une plus grande valeur encore* touchait à sa fin ; mais que tout à coup le con¬ cours des acquéreurs a cessé entièrement par Pèffet des taxes révolutionnaires faites par les comités de surveillance du district. Les admi¬ nistrateurs présentent différents moyens pour ramener les acquéreurs. On observe que déjà iî a été proposé d’inter¬ dire toute taxe qui ne serait pas faite en vertu d’un décret de la Convention. Renvoyé aux comités de sûreté générale et d’aliénation. Les citoyens de la commune de Mouchés, dis¬ trict de Mirande, font passer à la Convention nationale le procès-verbal de la séance qu’ilsont tenue relativement au partage de leurs biens communaux, dans laquelle ils ont arrêté que les-dits biens seraient affermés, et que le produit serait versé dams la caisse nationale, pour les frais de la guerre tant qu’elle durera-Ils annon¬ cent qu’ils ont fait brûler tous les titres de la féodalité, et qu’ils ont célébré une fête frater¬ nelle, qu’ils désirent renouveler tous les ans le 30 juin. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (3). Suit la lettre d'envoi de ces documents (4). Au citoyen Président de la Convention nationale. « Mouchés, le 14 octobre 1793, l’an II de la République française, une et indivi¬ sible. « Citoyen Président, « Je suis chargé par mes concitoyens de Mouchés de te transmettre l’expression pure et naturelle de leurs sentiments. « Jour et nuit peinés des travaux de l'agri¬ culture pour allaiter (sic) de leurs sueurs le trésor du tyran le dernier, ils n’eurent d’autre dédommagement de leurs veilles que celui de voir augmenter chaque jour le poids de leurs chaînes. « Aujourd’hui, allégés de leur joug, n’oubliant jamais leur devoir et leur travail, l’aurore les fl) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, {>- 191. (2) Moniteur universel {[n° 70 du 10 frimaire an II {samedi 30 novembre 1793), .p 283, col. 1]. (3) Procès-verbaux de la Convention, L 26, p. 191. 4 Archives nationales, carton C 284, dossier 820. mis de la liberté et do F égalité. « La République une et indivisible, la stabi¬ lité dé la Convention dans ses fonctions jus¬ qu’après la destruction entière des tyrans: est toute leur sollicitude; se montrer généreux envers les défenseurs de notre liberté et de notre égalité est tout leur désir. « Tu en trouveras, citoyen Président, la preuve dans l’adresse qu’ils font à la Conven¬ tion et dans la» délibération qui l’aceonapagne, sois -leur propice auprès d’elle, leux reconnais - sauce t'est acquise. « Salut et fraternité. « Le commandant en second de la garde natio¬ nale du canton. « Daste. » A. ; Extrait du registre des procès-verbaux du con¬ seil permanent de la commune de Mouchés, canton de Vile Arhechan, district de Mi¬ rande, département du Gers (I). Le conseil général de la commune de Mou¬ ches, assemblé au lieu de ses séances, le treize octobre mil sept cent quatre-vingt-treize, l’an deux de la République française une et indivisi¬ ble, présents Joseph Capdeeoume, maire, Jacques Pérès, Pierre Maupeu, officiers muni¬ cipaux, Louis Cougot, procureur de la com¬ mune, François Bertin, Louis Daste, Julien Capdeeoume, Joseph Fourès, notables. Daste lit l’adresse suivante qu’il fut chargé de faire à la Convention à raison des événe¬ ments des trente et un mai et deux juin, de l’abandon du revenu de leur bien communal pour les frais de la guerre et de la fête qu’ils désirent renouveler chaque année le trente juin au pied de l’arbre de la fraternité : « Citoyens représentants, « Un grand mouvement s’est fait dans la France ; le patriote fut presque stupéfait des conspirations secrètes qui donnèrent lieu aux journées des trente et un mai et deux juin. « Des traîtres parmi vous surent s’allier par une influence liberticide des hommes hypo¬ crites semés parmi vous. Mais heureusement» luttant entre le vice et la vertu, ils savourèrent seuls leur criminelle jouissance. « Enfin une douce aurore annonça le jour où la Sainte Montagne, du haut de sa cime, vit fondre à ses pieds ces épais brouillards qui lui cachaient les traîtres de la plaine ! Astre lumi¬ neux, tu la favorisas pour écraser de sa foudre ces crapeaux fangeux qui, gonflés de leur per¬ nicieux venin, se vautraient dans le bourbier du marais. « Epoque mémorable... trente et un mai et deux juin ! (1) Archives nationales, carton C 284, dossier 820*